Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse I
Cette page démarre la navigation dans les laisses du manuscrit d'Oxford.
Sommaire
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Les conquêtes de CharlemagneCe premier couplet vante les conquêtes de Charlemagne. La carte ci-jointe montre leur étendue au moment de la bataille de Ronvevaux. |
Dans le manuscrit d'Oxford
La laisse I regroupe les 9 premiers vers du premier feuillet (1 recto ) du manuscrit d'Oxford.
Le troisième vers de la transcription de Léon Gautier ne suit pas le manuscrit.
Là où Francisque Michel et Joseph Bédier suivent le manuscrit avec :
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Transcription et traduction par Léon Gautier
À SARAGOSSE. — CONSEIL TENU PAR LE ROI MARSILE
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I | |||
1 | Carles li Reis, nostre emperere ↓ magnes ↓ , | Charles le roi, notre grand empereur, | |
Set anz ↓ tuz pleins ad estet en Espaigne : | Sept ans entiers est resté en Espagne : | ||
Cunquist la tere tresqu’en la mer altaigne ↓ . | Jusqu’à la haute mer, il a conquis la terre. | ||
N’i ad castel ki devant lui remaigne ; | Pas de château qui tienne devant lui, | ||
5 | Murs ne citez ↓ n’i est remés à fraindre | Pas de cité ni de mur qui reste encore debout | |
Fors Sarraguce, ki est en une muntaigne ↓ . | Hors Saragosse, qui est au haut d’une montagne. | ||
Li reis Marsilies ↓ la tient, ki Deu n’enaimet ; | Le roi Marsile la tient, Marsile qui n’aime pas Dieu, | ||
Mahumet sert e Apollin recleimet : | Qui sert Mahomet et prie Apollon ; | ||
Ne s’ poet guarder que mals ↓ ne li ataignet. | Aoi. | Mais le malheur va l’atteindre : il ne s’en peut garder. |
Transcription commentée de Francisque Michel
Navigation dans le manuscrit d'Oxford Laisse I (page 1) II (W: II ) |
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Transcription et traduction de Joseph Bédier
Édition critique et traduction[2]
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Voir aussi la page 2 de l'édition de 1922.
I
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I
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Notes de Bédier
- Page 308
- À la première page du manuscrit, l’écriture est effacée en plusieurs lieux, surtout dans les mots ci-après relevés(les lettres entre crochets sont celles qui sont devenues tout à fait ou presque illisibles) : 1 magne[s], 2 Espaig[ne], 6 [mu]ntaigne,)
Version rythmée d'Eduard Böhmer
En 1872, Eduard Böhmer a composé une édition critique du manuscrit d'Oxford.
Il a choisi un format d'édition qui marque la structure des vers en 2 parties (en quatre et six syllabes).
Carles li reis | nostre emperere magnes | 1 | ||
set ans tuts pleins | ad estet en Espaigne | |||
Tresqu’ en la mer | cunquist la terre altaigne. | |||
n’i at castel | qui devant lui remaignet ; | |||
5 | murs ne citets | n’i est remes a fraindre, |
Version musicale médiévale de Daron Burrows
Daron Burrows, professeur à l'Université d'Oxford donne ici une version chantée de cette laisse, comme elle devait être déclamée par un jongleur.
Version musicale de Gilles Mathieu
Mouvement : II (La cité sur la colline) // Mesures : 1 à 21 Laisse I II |
Les 5 premiers vers dans le deuxième mouvement de la composition de Gilles Mathieu, et plus précisément les mesures 1 à 21.
Notes (version de Léon Gautier)
I II |
- Vers 1. ↑
- Emperere.
- Dans le manuscrit de la Bodléienne, on lit tantôt emperere, tantôt empereres. [...]
- Magne.
- O. Nous avons restitué magnes, à raison des règles de la Déclinaison romane. Voici ces règles :
- Première déclinaison romane (correspondant à la première déclinaison latine). Les Substantifs de cette famille ne prennent pas l’s au singulier, et la reçoivent toujours au pluriel. Pas de distinction entre le cas sujet et le cas régime.
- Seconde déclinaison romane (correspondant à la seconde et à la quatrième déclinaisons latines). Les Noms et Adjectifs masculins de cette déclinaison reçoivent une s au cas sujet du singulier et au cas régime du pluriel (paiens, magnes, etc.) ; ils n’en prennent pas au cas sujet du pluriel ni au cas régime du singulier (paien, magne).
- Troisième déclinaison romane (correspondant à la troisième déclinaison latine).
- 1° Les Substantifs masculins ou féminins, qui ont une s au nominatif singulier de la déclinaison latine, ont donné naissance à des Noms français qui suivent en général la règle de la deuxième déclinaison.
- 2° Les Substantifs masculins ou féminins qui n’ont pas d’s au nominatif singulier de la déclinaison latine, ont donné naissance à des Noms français qui ne prennent pas en général l’s finale au cas sujet du singulier et qui, pour tout le reste, suivent ordinairement la règle de la deuxième déclinaison. Mais il y a déjà tendance, dans le texte d’Oxford, à ce que ces noms eux-mêmes prennent, par extension et par analogie, une s finale au sujet singulier. (Voir notre première note.)
- 3° Pour le cas sujet du pluriel, il y a quelque hésitation chez notre scribe. Le plus souvent, pour les noms masculins, il n’emploie pas l’s finale au sujet pluriel. (Voir notre note du vers 20.)
- La Règle de l’s
- La « Règle de l’s (comme on l’a assez inexactement appelée) est commune à la langue d’oïl et à la langue d’oc. « Elle n’a pas toujours été suivie avec une rigueur absolue, et commence à disparaitre au xive siècle » : tel est aujourd’hui le sentiment général de tous ceux qui s’occupent de philologie romane ; telle est la proposition qui résume le plus exactement la doctrine commune sur cette règle dont l’importance a été exagérée. Quoi qu’il en soit, nous l’avons, dans notre texte critique, observée partout, et alors même que notre scribe ne s’y conformait point :
- 1° Parce qu’elle est étymologique.
- 2° Parce qu’elle est observée dans tous les monuments de notre langue qui sont contemporains de la Chanson de Roland.
- 3° Parce que, dans notre manuscrit même, elle est le plus souvent observée. (Dans les 500 premiers vers de notre poëme, elle est, pour le sujet singulier, violée 39 fois, observée 182 fois.)
- Carles li reis, etc.
- Pour la légende de Charlemagne, voir la note du vers 96.
- Phonétique des voyelles
- Nous donnons ici le Tableau (pour les voyelles) de la Phonétique de notre Chanson.
- Set ans.
- Suivant l’auteur de Gui de Bourgogne, c’est vingt-sept ans que Charles aurait passés en Espagne. Mais la leçon de Gui de Bourgogne ne fut jamais populaire, et Génin a raison de citer ici la farce de Pathelin, « où maître Pierre se vante à sa femme d’être aussi savant que s’il avait été à l’école autant que Charles en Espaigne. » (V. aussi Martial de Paris, cité par Littré au mot Charlemagne de son grand Dictionnaire de la langue française. )
- Ested
- . O. Le d se prend pour le t à la fin de quelques verbes, participes, noms et adjectifs du texte d’Oxford. Dans les mille premiers vers de la Chanson, le d final, à la place du t, ne se retrouve pas plus de 26 fois sur un millier de cas. Nous l’avons partout remplacé par le t, qui, d’ailleurs, est plus étymologique.
- Toutefois, il est un mot très-usuel, où le d a définitivement pénétré, sauf de très-rares exceptions : c’est ad venant d’habet (abt). Nous l’avons partout laissé tel que notre manuscrit nous l’offrait ; car nous nous proposons, dans ce texte critique, de reconstituer notre vieux poëme tel qu’il aurait été écrit par un scribe instruit et soigneux, avec les règles générales de la langue de son temps et les règles particulières de son dialecte spécial.
- Ad ested en Espaigne
- — La Keiser Karl Magnus’s Kronike dit : « L’Empereur ayant soumis l’Espagne et la Galice… »
- Vers 3. ↑
- Tresqu’en la mer cunquist la tere altaigne
- O. — Le manuscrit de Versailles et celui de Venise VII nous offrent : Conquist ou conquest la terre jusqu’à la mer altaigne, et nous avons adopté cette version comme plus logique et plus précise. — Altaigne est, de toute la famille dérivant d’altus, le seul vocable qui n’ait pas pris l’h (Cf. halt, halte, haltur). Dans l’appendice de son Dictionnaire étymologique (p. 560), M. Brachet dit, après M. Max Müller, au sujet de cette h initiale : « Cette aspiration est due à l’influence des formes germaniques correspondantes (hoch, etc.). » Sans rejeter absolument cette opinion, il convient d’observer que certains mots de notre texte, — les uns venus du germain, comme helme ; les autres du latin, comme honor, — prennent ou rejettent tour à tour l’h initiale, qui, d’ailleurs, n’impliquait pas l’aspiration et s’élidait très-légitimement.
- Vers 4. ↑
- N’i ad castel
- Ad, employé dans ce sens, gouverne toujours après lui l’accusatif. En d’autres termes, castel et les mots analogues sont nécessairement régimes. « Il y a un roi », se traduirait, dans un thème étymologique, par : Illud ibi habet unum regem. Cette observation, trop élémentaire peut-être, est néanmoins utile pour expliquer certaines parties de notre texte critique.
- Au lieu de remaigne O, lire remaignet. Toutes les troisièmes personnes du singulier, sauf des cas excessivement rares, se terminent, dans le texte d’Oxford, par un t qui est étymologique, mais qui, d’ailleurs, ne se prononçait pas. Le scribe a oublié cette règle huit ou dix fois peut-être dans tout son texte : nous l’avons rétablie partout.
Vers 6. — Mun[tai]gne. Mü. On lit fort bien le mot entier dans le manuscrit d’Oxford ; les crochets sont inutiles. — « Il restait un château que l’Empereur n’avait pu réduire ; on rappelait Saragus, et il était situé sur une montagne élevée. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)
Mahummet
- O. La forme la plus fréquemment employée dans notre texte est : Mahumet.
- Vers 9. ↑
- Mals
- Ce mot vient de malum, qui est un neutre, et cependant il est écrit suivant la règle de l’s. C’est l’occasion pour nous d’établir la « Théorie des neutres ».
Concordances et compléments
Cette laisse est alignée avec :
- la laisse I du Manuscrit de Châteauroux (qui contient 4 vers complémentaires)
- la laisse I du Manuscrit de Venise 4.
Elle est reprise dans :
Voir aussi
- Notes
- Sources
- https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Gautier_-_La_Chanson_de_Roland_-_2.djvu/10
- https://fr.wikisource.org/wiki/Page:Gautier_-_La_Chanson_de_Roland_-_2.djvu/15
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- la catégorie : Chanson de Roland, laisse I