Le Palais ducal de Nancy (1852) Lepage, 8

De Wicri Nancy
logo travaux texte en cours d'intégration
LePalaisDucalLasageFront.png
 
Le
Palais ducal
de Nancy
1766-1851
(pages 152 à 171)

Cette page introduit le huitième chapitre d'un livre écrit par Henri Lepage en 1852 : Le Palais ducal de Nancy.

 
Le Palais ducal de Nancy
Vers le texte original

Texte original

- 152 ( )-


VIII

1766 - 1851.

Aussitôt après la mort de Stanislas (23 février 1766), M. de Siainville, commandant ou gouverneur général des duchés de Lorraine et de Bar, qui était logé dans le pavillon oriental de la place Royale, prés de l'Hôtel-de-Ville, demanda et obtint pour sa résidence le palais habilé par l'Intendant de la province, et ce dernier vint occuper, à son tour, le pavillon de la place. L'Intendance prit dès lors le nom de Gouvernement.

Mais cet édifice, quoique de construction récente, était à peu près inhabitable, tout ayant été sacrifié à la décoration extérieure (1) ; on fut donc obligé de songer à y faire immédiatement des t réparations, changements et augmentations » considérables. M. Montluisant, inspecteur général des bâtiments


  (1) On lit dans une lettre de M. de La Galaizière : « La maison affectée aujourd'hui au logement du Gouverneur général de la province, à Nancy, a un besoin urgent de réparations considérables, ce qu'on doit imputer à un vice de première construction.-Je l'ai habitée huit ans, et toujours avec la plus grande inquiétude. Les bois qui forment les planchers du rez-de-chaussée au premier étage, sont presque tous échauffés dans leurs portées; d'ailleurs, étant soutenus par des colonnes trop éloignées les unes des autres, la moindre charge les fait ployer dans le milieu, de sorte que, pour prévenir la chute des planchers, j'étais obligé de faire étayer l'étage quand je devais recevoir beaucoup de monde. Les réparations indispensables demandées par M. le comte de Stainville peuvent être faites de manière à rendre la maison beaucoup plus logeable et commode , avantages qui lui manquent absolument, tout ayant été sacrifié à la décoration extérieure. n (Papiers de l'Intendance, Archives du département.)


- 153 ( )-


et usines du domaine, fut chargé, à cet effet, de rédiger un projet des ouvrages « nécessaires et indispensables à faire » à cet hôtel, et de dresser un plan des nouvelles distributions à donner à l'intérieur (1).

Ce plan, qui nous a été conservé, comprend non-seulement le palais du Gouvernement, mais aussi le corps-de-logis où sont aujourd'hui les bureaux de la Préfecture, et qu'on appelait alors, au fez-de-chaussée, le bâtiment des Cuisines, et au premier élage, Yaile des Cuisines. Ce premier étage, qui restait à achever, comprenait, du côté donnant sur la petite Carrière, à partir de la Grande-Rue, un garde-meuble, un cabinet, une salle à manger, un cabinet de jour, une chambre à coucher et une garderobe avec cabinet au derrière; le côté donnant sur la petite cour des remises (2) renfermait un garde-manger et une cuisine, une chambre à coucher et un antichambre. Ces deux parties étaient séparées par un corridor qui, tournant à droite, prenait jour sur la cour dont il vient d'être parlé. La cour actuelle des bureaux de la préfecture s'appelait cour des Cuisines; celle de la gendarmerie, cour des Remises, à cause des remises établies en avant de la galerie régnant, du côté de la cour, sous la salle des Cerfs; la contre-partie de cette galerie, c'est-à-dire celle donnant sur la Grande-Rue, est désignée sous le nom d'ancienne écurie.


  (1) Toisé et estimation des ouvrages nécessaires et indispensables qui sont à faire à l'hôtel du Gouvernement, conformément aux plans dressés par Montluisant, en conséquence des ordres de l'Intendant, du 12 juin 1766. {Papiers de VIntendance.)

  (2) A l'extrémité de cette cour, située derrière les bureaux actuels de la Préfecture, il y avait, en 1766 , un lavoir, qui est figuré sur le plan de M. Montluisant. On voit également, sur ce plan, le mur dont j'ai parlé, et qui, partant à peu près de l'endroit où est aujourd'hui la sellerie de la gendarmerie, coupait la cour en deux par une ligne brisée.


- 154 ( )-


L'adjudication des ouvrages à faire au Gouvernement, fut passée, le 1er septembre 1766, moyennant la somme de 30,754 livres 7 sols 4 deniers au cours de Lorraine (23,809 1. 16 s. 8 d. au cours de France), au profit du sieur Joseph Mengin, entrepreneur à Nancy (1).

Les travaux comprenant la construction de l'écurie qui est adossée au mur du jardin de la Préfecture (2), furent exécutés au moyen d'une imposition extraordinaire frappée sur la province, et payable en quatre annuités. On avait vainement exposé au Roi la situation malheureuse de la ville de Nancy, celle de la Lorraine toute entière (3), et demandé que des fonds particuliers fussent affectés à cette dépense sur le Trésor public, le contrôleur général des finances refusa de faire droit à ces légitimes réclamations.

En 1769 et 1770 (4), de nouveaux ouvrages de réparation et d'entretien furent exécutés à l'hôtel du Gouvernement, et


  (1) Les dépenses, indiquées dans le Toisé des ouvrages, devaient se répartir de la manière suivante:

Hôtel du Gouvernement 11,148' 19» OO"1

Bâtiment des Cuisines 5,412 16 un

Grande écurie sous la Galerie des Cerfs.... 213 un un Aqueducs (pour l'écoulement des eaux du bâ- timent des cuisines dans un des égoûts de

la ville) 590 un nu

Bâtiment d'une nouvelle écurie... , 7,984 18 5

Bénélice et soins de l'entrepreneur 2,534 19 4   (2) Cette écurie est figurée sur le plan précédemment indiqué, à peu près telle qu'elle est encore aujourd'hui.

  (3) Lettres de Durival et de M. de La Galaizière. (Ces lettres sont aux Archives.)

  (4) A cette dernière époque, l'architecte Montluisant dressa le < plan des écuries, remise et bûcher, projetés de construire dans la cour, à l'est, entre le Gouvernement et le rempart, n et le u plan général du premier étage de l'hôtel du Gouvernement, n

Ce plan, qui est sur une très-grande échelle, représente la Galerie des Cerfs divisée en quatre parties: au haut de l'escalier de l'Horloge est une petite salle prenant jour sur le balcon situé en face de la rue Saint-Michel; la Galerie proprement dite; une salle commençant au premier balcon à droite de la Porterie, et se prolongeant jusqu'à l'autre balcon ; enfin, une chambre ouvrant sur ce dernier et ayant un cabinet au derrière, sur la cour. Cette chambre communique à l'hôtel actuel des bureaux par un escalier (qui a été supprimé en 1823). La cour de la gendarmerie est appelée cour des écuries; mais on n'y voit pas le mur qui la coupe en deux sur le plan de 1766, partant de devant le grand escalier et aboutissant au jardin de la Préfecture.


- 155 ( )-


coûtèrent encore plus de 40,000 livres, sans compter les sommes qui, à partir de 1766, furent dépensées en achat d'ameublement.

Le 13 novembre 1774, le Conseil royal des Finances rendit un arrêt portant qu'à partir du 1er janvier 1775, il serait imposé annuellement, sur les duchés de Lorraine et de Bar, une somme de 8,000 livres au cours de France, laquelle somme serait employée au paiement des dépenses des grosses et menues réparations, ouvrages d'entretien et de nouvelle construction à faire dans l'hôtel destiné au logement du gouverneur ou du commandant en chef de la province de Lorraine, et dans les jardins en dépendant, ainsi qu'à la fourniture, entretien et renouvellement des meubles dudit hôtel; que cette somme serait remise tous les ans, par le Receveur général des finances, au Trésorier receveur de la ville de Nancy, pour être employée par ce dernier, sur les mandements des maire royal et échevins, au paiement des dépenses relatives atixdites réparations, ouvrages de construction nouvelle ou d'entretien, etc., sur les demandes qui en seraient faites par le commandant de la province, lesquelles dépenses


- 156 ( )-


ne pourraient excéder ladite somme de 8,000 livres, faute de quoi l'excédant serait supporté par la ville, laquelle, en outre, demeurerait chargée à perpétuité de toutes les réparations de cet hôtel, de quelque nature elles puissent être, ouvrages de nouvelle construction, etc. (1)

La double clause de servitude stipulée dans l'arrêt du Conseil des Finances, du 9 février 1739, fut observée jusqu'en 1791, époque où les bâtiments du Gouvernement furent abandonnés à l'administration de la guerre, qui les affecta au logement du général commandant la division militaire du département (2).

Les mutilations qu'avait subies le Palais Ducal sous les règnes de Léopold et de Stanislas, n'avaient eu pour motif qu'une manie de nouveauté, condamnable sans doute au double point de vue de l'art et des souvenirs historiques; cet édifice allait avoir à souffrir des dégradations d'un autre genre, inspirées, celles-là, par un fanatisme aveugle, jar des passions que rien ne saurait excuser. „

Au milieu des événements dont Nancy avait été le théâtre, depuis 1790, ses monuments avaient été religieusement respectés ; personne n'avait songé à détruire les tableaux, les statues qui décoraient l'intérieur ou l'extérieur de ses palais: il appartenait à des hommes étrangers à la cité de porter les premiers une main sacrilége sur ces objets précieux. Les bataillons de Fédérés des 86 départements, plus connus sous


  (1) Le 27 mars 1791, la municipalité de Nancy fut obligée d'adresser une requête au Directoire du département de la Meurthe, à l'effet d'obtenir le paiement d'une somme de 16,000 livres dont le Receveur général lui était redevable pour les années 1789 et 1790, et dont il refusait le paiement à la ville.

  (2) On appelait cet bôtel le bâtiment militaire, dit hôtel du Gouvernement.


- 157 ( )-


le triste nom de Marseillais, venaient (12 septembre 1792) d'entrer dans la ville désignée à leur haine comme aristocrate et anti-révolutionnaire. A peine arrivés, ils se mirent à briser les fleurs de lys, les ornements et les couronnes des riches grillages de la place Royale; puis, selon l'énergique expression d'un témoin oculaire, avec une fureur digne des Goths et des Vandales, ils se portèrent sur les monuments publics , brisant les statues, déchirant et livrant aux flammes les tableaux qui les décoraient. Rien ne put échapper à leur fureur : ni les trophées, ni les figures allégoriques qui ornaient le fronton de l'hôtel du Gouvernement et l'hémycicle de la Carrière; ni la statue du duc Antoine, ni les armes de Lorraine qui embellissaient la Porterie, ni même les jettoirs en pierre qui garnissaient la corniche du Palais; tous ces morceaux furent impitoyablement brisés, et leurs débris allèrent rejoindre ceux de la statue équestre de René II, qu'on avait triomphalement précipitée de son piédestal (1).

Tous les bons citoyens s'indignèrent de ces actes de vandalisme, contre lesquels l'administration s'empressa de protester (2); mais le mal était fait, et bien des années devaient s'écouler avant que les monuments ainsi mutilés, fussent rendus à leur état primitif.

L'administration de la guerre, qui, depuis 1791, occupait le bâtiment de l'Intendance, voulut, en 1818, le faire vendre


  (1) La tète seule de la statue équestre de René II fut sauvée comme par miracle, en roulant dans l'allée de la maison d'un boulanger de la place St.-Epvre, qui la conserva jusque dans ces derniers temps ; elle fait partie du Musée lorrain.

  (2) On lit dans le procés-verbal de la séance publique du Directoire du département de la Meurthe, du 14 novembre 1792 : u Le Directoire du département, instruit qu'il s'était commis, hier soir, des dévastations à la ci-devant Chambre des Comptes (la Monnaie), et même au bâtiment de l'Administration, a délibéré qu'elles seraient reconnues et constatées ; 'a l'effet de quoi il a invité l'administrateur Mallarmé de visiter les lieux et de dresser procès-verbal de leur état, ainsi que des meubles et effets qui auraient été dégradés, n Un commissaire fut également désigné pour constater les dégradations commises dans le lieu des séances du tribunal criminel et de ia police correctionnelle. Je n'ai pu, malgré mes recherches, retrouver ces procès-verbaux ; mais il suffit, pour donner une idée de ce qui se passa dans notre ville , de citer cette seule ligne du Rapport présenté par l'abbé Grégoire à la Convention nationale : u A Nancy , dans l'espace de quelques heures , on avait détruit Pour Cent Mille écls de tableaux et de statues, n (Voir aussi les Marseillais à Nancy, par P. Barthélemy.)


- 158 ( )-


au profit de l'Etat. Mais la ville de Nancy revendiqua ses droits, qui furent solennellement reconnus par une ordonnance royale du 27 juillet 1821, et elle fut remise en possession de l'hôtel du Gouvernement et des terrains contigus, à charge d'affecter un logement convenable au commandant militaire.

Pendant ce temps, cet hôtel, qui avait servi, en 1814, de logement à l'état-major des armées alliées, était, suivant les termes d'un rapport adressé au Conseil général, tombé « dans l'état le plus complet de dégradation; » sa toiture menaçait d'une chute prochaine, et il était nécessaire de prendre € immédiatement des mesures pour empêcher la charpente de s'écrouler. » Les réparations à faire, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur,ne furent pas estimées moins de 120,000 francs(1), y compris la restauration du grand salon, d'après les dessins


  (1) Rapport adressé au Conseil général, le 17août 1821. — M. Jaquiné, ingénieur des ponts et chaussées, avait adressé, le 10 du même mois, au Préfet de la Meurthe , un rapport dans lequel les dépenses à faire à l'hôtel du Gouvernement , étaient ainsi détaillées : Grand* hôtel, 77,118 fr. 56 c. ; écuries et remises, 8,659 fr. 34, c. ; hôtel des bureaux ou petit hôtel, 17,376 fr. 6i c. Une somme de 2,315 fr. est affectée à la réparation de dix groupes de figures en pierre de Savonières, tant sur la première galerie , que sur l'entablement du second ordre. On lit dans ce rapport : u La peinture du plafond du grand ,salon est à refaire en totalité, ainsi que la voussure, d'après le dessin existant, ornés de fleurs et d'ornements, rehaussés en or fin de différentes couleurs Les panneaux d'appui an pourtour sont dégradés; une partie n'offre plus d'indices de peinture. n


- 159 ( )-


existant, et la réparation des groupes de figures de la première galerie et de l'entablement du second ordre (1).

Dans ces circonstances, la ville de Nancy, que l'état de ses finances empêchait de subvenir aux réparations et à l'entretien du Gouvernement, pria le Préfet (délibération du 21 août 1821) « de proposer au Conseil général l'affectation du palais et du jardin en dépendant, à l'établissement de la préfecture (1), à charge de faire réparer l'édifice et de fournir un logement convenable au maréchal-de-camp commandant le département, de telle sorte que la ville n'en fût aucunement inquiétée. Le département posséderait cet hôtel au même titre que celui déterminé par les actes de concession originaire, sans pouvoir l'aliéner ni l'employer à autre chose qu'à un service public. »

En même temps, le Conseil général invitait le Préfet à « solliciter l'autorisation nécessaire pour transférer dans l'hôtel du Gouvernement et dépendances la préfecture, ses bureaux et ses archives , et à y faire, à cet effet, les réparations nécessaires; à solliciter de même l'autorisation de vendre les deux hôtels (place Royale et rue d'Alliance) servant, l'un à son habitation personnelle et aux séances du Conseil général,


  (1) Ces statues, restaurées, en 1880, par MM. Laurent frères, sculpteurs à Nancy , représentent la Justice , la Science, la Navigation et le Commerce.

Quant aux groupes du premier étage , les débris en ont été vendus en 1840, et transférés au château d'Haroué , où on les voit encore aujourd'hui.

  (2) La préfecture occupait le pavillon de l'Intendance, sur la place Royale.


- 160 ( )-


l'autre aux bureaux de la préfecture, pour, le prix provenant de cette vente être employé aux réparations dudit hôtel... »


Cette vente fut autorisée par une ordonnance royale du 23 mai 1823. La veille, conformément à l'ordonnance du 27 juillet 1821 et à la décision du ministre de la guerre, du 19 avril 1823, la ville avait été remise en possession de l'hôtel du Gouvernement. Le 26 mai, les travaux à faire dans ce bâtiment, furent adjugés, moyennant la somme de 92,315 francs 98 centimes, à MM. François Solet et Louis Thiéry, entrepreneurs à Nancy. Enfin, le 28 du même mois, fut rendue une ordonnance royale dont le premier article porte: « La préfecture, ses archives et ses bureaux seront transportés dans l'hôtel de l'ancien Gouvernement, sous la réserve, pour la ville, du droit d'établir son musée de tableaux dans la salle des Cerfs, et de conserver le passage dans la cour contiguë à la portion dudit hôtel où se trouve cette salle. »

Je n'ai pas l'intention d'indiquer ici les divers travaux qui furent exécutés dans ce bâtiment.; ces détails n'ont aucune importance historique; je signalerai toutefois, comme éminemment regrettable, la destruction, qui fut accomplie, en 1824 (1), des décorations du grand salon. Cette pièce, destinée aux réunions qui avaient lieu lors des fêtes publiques, du


  (1) Par une délibération en date du 24 mai de cette année, le conseil municipal de Nancy offrit de céder au département un emplacement de 15 mètres de longueur à prendre dans un bâtiment servant d'écurie et dépendant de l'ancien Palais , pour y placer le logement du portier, le magasin à bois et les latrines; mais il demanda, en retour, les emplacements se trouvant au-dessous et à côté de la Galerie des Cerfs, ainsi que l'escalier gothique qui y conduit, en faisant disparaître la hache formée par le mur séparalif des cours du bâtiment de la ville et de celui occupé par la gendarmerie, u L'escalier gothique, est-il dit dans cette délibération , ue peut servir qu'à communiquer à la Galerie des Cerfs, dont il est un appendice, notamment sous le rapport de l'architecture, et même, sans cet escalier, on ne pourrait concevoir aucun plan raisonnable de restauration, soit de la Galerie, soit du portique extérieur qui sert d'entrée. n

Voici les observations qui furent adressées au Préfet, par M. Jaquiné, au sujet de cette délibération:

« En échange de l'abandon d'une partie des bâtiments situés dans la cour du Palais, la ville réclame du département la cession de diverses parties des dépendances actuelles de l'hôtel des bureaux et des bâtiments contigus de la caserne de la gendarmerie, soit pour appliquer à une nouvelle destination la Galerie dite des Cerfs, servant maintenant de grenier à fourrage pour la caserne, soit pour former un dépôt des pompes à incendie pour la Ville-Vieille.

H Les dépendances actuelles de l'hôtel des bureaux, réclamées par la ville, seront convenablement remplacées dans la partie de bâtiment qu'elle consent à abandonner...

n Quant à la cessiou d'une portion de la grande écurie de la caserne pour y loger le portier du Musée, j'ai consulté M. le commandant de la gendarmerie, et il m'a fait observer que cette écurie, réunie à la petite, était à peine suffisante pour les besoins de la caserne.

m Une autre demande du Conseil, consistant dans la suppression du passage actuel, pour les chevaux et les voitures, à travers la galerie qui communiquera de la porte sculptée, destinée à l'entrée du Musée, au grand escalier circulaire que le Conseil demande aussi pour procurer un accès convenable à la salle des Cerfs, donne à la vérité les moyens de restituer aux écuries un espace équivalent à celui du fond demandé pour le portier; mais il faudra procurer à la caserne une autre communication de la rue à la cour pour les chevaux et les voitures, et cette communication ne sera pas aisée à pratiquer à travers les appartements du rez-de-chaussée ; quoiqu'on fasse, elle altérera l'ordonnance de la façade du pavillon au derrière du Palais.

n Les demandes du Conseil comprennent encore, au bénéfice de la cour du Musée, la suppression de la hache que forme le mur de séparation de cette cour avec celle de la caserne

n Je saisis cette occasion' de vous rcprésenter que l'abandon qui a été fait à la ville de la salle des Cerfs, qui sert maintenant de grenier,entraîne la nécessité de la construction d'un autre grenier aussi vaste; que ce nouveau grenier, ne pouvant plus être à portée des écuries actuelles, et devant néanmoins se trouver au-dessus d'un rez-de-chaussée, cette construction devra consister dans un bâtiment assez considérable, à deux étages, que l'on pourrait convenablement placer dans le fond de la cour de la caserne; qu'il conviendrait alors, pour la facilité du service des gendarmes, d'utiliser le rez-de-chaussée de ce bâtiment, en y plaçant les écuries, qui se trouveraient ainsi sous le grenier au lieu d'en être éloignées et séparées par une cour et des bâtiments. Après cette construction, la cour de la caserne conservera 5)0m de longueur et 27 50 de largeur, produisant une surface de l,375m, qui se trouvera encore suffisante.

H Les écuries actuelles, qui seraient par là abandonnées, pourraient servir très-convenablement, attendu qu'elles sont voûtées, à loger une partie assez considérable des archives du département et suppléer largement à l'insuffisance probable du local qui leur est affecté au second étage de l'hôtel des bureaux. n


- 161 ( )-


passage d'un prince ou de quelque personnage de distinction, avait un caractère particulier qu'on devait peut-être respecter, comme offrant le type d'une époque artistique. On admit


- 162 ( )-


les raisons qui furent présentées contre cette opinion (1), et l'on fit disparaître, comme entachés de mauvais goût, les


  (1) La destruction des décorations du grand salon, ayant été l'objet de nombreuses critiques , je crois devoir reproduire ici les motifs qui furent présentés à l'appui de cette détermination, dans le rapport adressé au Préfet, le 16 décembre 1824, par M. Jaquiné:

  • Dans le projet de restauration de l'hôtel du Gouvernement...., on s'était proposé de conserver, au moyen de réparations, néanmoins assez considérables, le système de décorations du grand salon, quoiqu'on eût, depuis longtemps et avec raison, abjuré les formes et le goût dont toute cette composition se trouve empreinte.

n Mais les réparations faites au second élage , ayant occasionné le relevé de quelques planchers et parquets, on reconnut de la pourriture dans les portées de quelques sommiers du plafond à l'exposition du nord-ouest. On fit, en conséquence, la visite de toutes ces pièces importantes ; on pourvut aux remplacements nécessaires et aux moyens réclamés pour la sûreté de l'édifice, et ces divers ouvrages entraînèrent inévitablement la démolition du plafond et de presque toute sa corniche. D'ailleurs, ce plafond, qui avait été appliqué sur un lattis simple, ne tenait plus : dès 1788, on avait été obligé, pour prévenir sa chute, de le retenir par un grand nombre de vis, dont les tètes à ailes étaient masquées par des papillons qui se confondaient dans la peinture dont il était couvert, et ce moyen ni aucun autre ne pouvaient suffire à sa conservation.

n Au surplus, la chute de ce plafond ne peut inspirer aucun regret, de même que la suppression que nous proposons de tout l'ensemble des décorations de cette pièce. En effet, indépendamment de la peinture du plafond en feuillages et guirlandes de fleurs, et de sa corniche, ouvragée et surchargée dans ses angles de moulures en rocailles, le système de ces décorations consiste dans les formes chantournées de ses portes et surtout de ses lambris, dans des enduits d'e stuc divisés en compartiments mixtilignes de peinture par des guirlandes d'un style maniéré, entremêlées d'arabesques, et sur lesquels est étalée une grande profusion de dorures, maintenant écaillées ou ternies. Le fond blanc du stuc, couvert de taches de l'huile des lampes et de nombreuses souillures, est, de plus, altéré par une décomposition de cette substance, résultant de l'humidité, et qui se manifeste par des points noirs à la surface. Il est désormais impossible de restituer à cette décoration la fraîcheur et l'éclat desquels seulement elle pouvait emprunter quelque mérite ; et d'ailleurs, depuis que, dans les décorations intérieures, on s'est assujetti aussi à des lignes simples, à des contours purs et à des formes correctes, le goût mesquin, faux et insignifiant du XVIIIe siècle, qui frappe dans ces décorations, ferait une disparate choquante et désagréable avec les autres appartements, arrangés dans le goût moderne, et avec les ameublements dont cette belle pièce devra être ornée. n

Afin que toutes les parties du salon fussent en harmonie, on fit disparaître également les anciennes cheminées de marbre et on leur en substitua de modernes.


- 163 ( )-


peintures et les ornements dont Stanislas avait fait enrichir le magnifique salon du palais de l'Intendance (1).


  (1) C'est vers cette époque qu'eut également lieu le percement de la grande porte actuelle de la gendarmerie. La démolition du mur disgracieux qui séparait la cour en deux parties, et celle des constructions qui, appuyées contre le bâtiment de la Galerie des Cerfs, servaient de remises à des voitures de louage, s'exécuta en 1828.

Il y avait, sous la porte de la gendarmerie, une fontaine qui versait de l'eau dans la grande écurie, aujourd'hui le magasin de la ville. Elle a été reportée en 1858, dans la cour, à l'endroit où elle se trouve actuellement.


- 164 ( )-


Quant à la partie encore debout de l'ancien Palais Ducal, celle qui, à ce tilre, méritait le plus d'intérêt, elle était complétement oubliée. La salle des Cerfs, qui avait été transformée en grenier, aussitôt après la translation de la bibliothèque publique à l'Hôtel-de-Ville, conservait cette déplorable destination; les galeries inférieures, avec leurs chapiteaux sculptés, continuaient à servir d'écuries, et la Porterie, veuve de la statue du duc Antoine, portait toujours les traces des mutilations que les Marseillais lui avaient fait subir.

On ne répara pas non plus, à cette époque, les groupes de figures de la première galerie et de l'entablement du second ordre, dont la restauration avait été cependant comprise dans le devis dressé en 1821.

C'est seulement à partir de 1820, que l'attention publique se porta sur la Galerie des Cerfs. Dès lors, on eut la louable pensée d'y établir le musée de la ville. Des études furent faites, des projets et des plans rédigés dans ce sens (1). Quelques années plus tard, et à l'occasion de la demande faite par le Conseil municipal au département de l'escalier conduisant à cette Galerie, la question se reproduisit encore (2), mais il n'y fut point donné de solution sérieuse ni définitive.

En 1827, on songea à placer dans la salle des Cerfs les Archives départementales et le Trésor des Chartes de Lorraine. Mais ce projet (3), pas plus que le précédent, ne fut mis à exécution.


  (1) D'abord par M. Grillot père, puis par M. Chatelain, architecte du département. La Société d'Archéologie possède, dans sa bibliothèque, le plan qui fut dressé alors par M. Grillot.

  (2) Délibération du Conseil municipal de Nancy, du 24 mai 1824, et observations adressées au Préfet, au sujet de cette délibération, rapportées précédemment (p. 160).

  (3) Il fut rédigé par M. Chatelain et approuvé.


- 165 ( )-


En 1848, la Commission des Antiquités du département de la Meurthe, en signalant au Ministre de l'Intérieur la nécessité de créer un musée dans la capitale de l'ancienne Lorraine, indiqua cette salle comme le seul local convenable pour recevoir cette destination, et, par une délibération du 9 novembre 1843, chargea trois de ses membres (MM. Grillot, Paul Laurent et Guerrier de Dumast) de rechercher les moyens les plus propres à amener la formation de ce musée.

A la suite du Congrès scientifique qui s'était tenu à Strasbourg l'année précédente, la Société de Conservation des monuments français avait solennellement émis le même vœu, et adressé au Ministre (4 octobre 1842) une lettre dans laquelle elle appelait vivement son attention sur cet objet, qu'elle représentait, à juste titre, comme digne de toute la bienveillante sollicitude du Gouvernement.

Mais ces manifestations, pas plus que les protestations chaleureuses faites par plusieurs organes de la presse (1), n'amenèrent encore de résultats.

C'est seulement à dater de 1845, que le Conseil général de la Meurthe commença à manifester hautement son intention de sauver l'aile restante du Palais Ducal et de donner à la Galerie des Cerfs une destination convenable. Dans ce but, il songea à y placer les Archives et vota des fonds pour faire étudier tout à la fois et le projet de translation, et celui de restauration de la Porterie (2).

En 1847, il alloua une nouvelle somme (1,000 fr.), tant pour la continuation de ces études, que pour les réparations


  (1) Voir, notamment, l'article publié par M. Raymond Thomassy, dans l'Artiste, le 9 novembre 1842.

  (2) Voici le texte de la délibération de 1815 : u Sur la proposition de l'un de ses membres, le Conseil général, reconnaissant la nécessité de pourvoir, le plus promptement possible, à la restauration du portail de l'ancien Palais des ducs de Lorraine, et des balcons qui en font partie, qui sont les restes les plus précieux de l'état florissant de l'architecture et de la sculpture dans un temps où le pays produisit tant d'artistes célèbres en tout genre, vote pour cet objet une somme de SOO fr. n

Il résulte du rapport adressé au Préfet, en 1846, par M. Henriot, architecte du département, au sujet de la translation des Archives dans la Galerie des Cerfs, que cette dernière fut reconnue suffisante pour recevoir ce dépôt, et que la totalité de la dépense, ii tant pour le rétablissement de la salle des Cerfs avec sa voûte, que pour la construction d'un nouveau grenier à fourrages, H fut évaluée à la somme de trentetrois mille francs.


- 166 ( )-


les plus urgentes à faire au portail. Ces réparations, commencées dans le courant de 1848, se sont continuées sans interruption jusqu'à leur parfait achèvement : aujourd'hui, elles sont entièrement terminées, et en admirant la richesse de ce magnifique frontispice du Palais, on ne saurait trop remercier le Conseil général d'avoir fait entreprendre et conduire à bonne fin cette intéressante restauration.

Malgré les préoccupations politiques de ces dernières années, les sympathies pour cette œuvre réparatrice, loin de se refroidir, sont devenues plus vives encore , les administrations locales, les représentants du département et de la cité (1),


  (1) Voir le rapport présenté au Conseil général, dans sa session de 1850 , par M. Louis, au nom de la commission d'administration, et la délibération du Conseil municipal de Nancy, du 10 mai de la même année.

Le rapport présenté an Conseil général contient ce préambule: H L'ancienne capitale de la Lorraine compte plusieurs monuments dignes du plus haut intérêt, au double point de vue de l'art et des souvenirs nationaux.

n II en est un surtout qui doit attirer sur lui votre attention et votre sollicitude. C'est le Palais Ducal fondé par Raoul, magnifiquement reconstruit par Antoine, embelli encore par les successeurs de ces deux princes.

M L'intérêt que nous tous, Lorrains, nous éprouvons pour ce monument, s'explique non pas seulement par le goût Irès-naturel qui nous porte vers l'étude de noire histoire, mais par la crainte très-légitime que nous ressentons de le voir compromis dans sa noble origine, si, plus longtemps, il est détourné de sa destination.

n De toutes les parties de la France, les liommes et les journaux de toutes les opinions se sont entendus dans une pensée commune, celle de reproduire toutes les communications ayant pour objet de rendre au Palais Ducal son antique et artistique splendeur...,n


- 167 ( )-


le Gouvernement lui-même (1) ont voulu y prendre part, et> en ce moment (1851-1852), un projet complet de restauration de l'aile encore debout du Palais Ducal, s'élabore par les soins du ministère de l'intérieur (2). On peut ajouter que la Société d'Archéologie et le Comité du Musée historique lorrain ont largement contribué à développer ces sympathies, grâce auxquelles ils ont déjà obtenu des résultats matériels qui ne sont pas sans importance (3).

Telles sont les particularités qui, depuis le XIVe siècle jusqu'à nos jours, se rattachent à l'histoire du Palais Ducal. J'ai essayé, autant qu'il m'a été possible, de fixer l'époque


  (1) On peut voir, à la suite du compte-rendu des travaux de la Société d'Archéologie lorraine , publié dans le premier volume de ses Bulletins, tous les documents officiels qui se rattachent à cette question.

  (2) C'est M. Boëswilwald, architecte des monuments historiques, qui a été chargé de rédiger ce projet.

  (3) Une souscription a été ouverte, à la fin de 18j0, par les soins du Comité, et a produit une somme de près de 10,000 fr. De son côté, le Ministre de l'Instruction publique a accordé à la Société d'Archéologie 800 fr., destinés à l'appropriation du local affecté au Musée lorrain. Le Conseil général, dans sa session de 1851 , a également voté, pour le même objet, une somme de SOO francs.

C'est à l'aide de ces ressources que le Comité a pu faire restaurer le porche d'entrée et le vestibule voisin, et y placer une partie des objets qu'il a déjà recueillis, et qui proviennent, soit de nous, soit d'acquisitions faites par lui.


- 168 ( )-


de sa fondation, celle des additions ou reconstructions qui y ont été faites par René II, Antoine, Charles III et Henri II; j'ai rappelé les événements principaux qui s'y sont accomplis; j'ai lâché enfin de signaler les changements de nom et de destination qu'on lui a fait %ubir : c'est ainsi qu'on .l'a vu prendre d'abord la simple dénomination de Maison ou d'Hôtel, puis être successivement qualifié de Court ou de Château, de Palais, de Louvre, de Château Royal, d'Intendance, de Gouvernement et de Préfecture. Ces noms, empruntés, pour la plupart, à des faits ou à des circonstances politiques, sont comme la table sommaire de l'histoire de cet édifice, et indiquent, en quelques mots, les différentes révolutions par lesquelles il a passé pour arriver jusqu'à nous.

Sa longue existence se divise en deux périodes bien distinctes : période de grandeur et de prospérité jusqu'aux premières années du règne de Charles IV, c'est-à-dire jusqu'à l'occupation de Nancy par les troupes françaises en 1633; période de décadence et de ruine à partir de celte époque. Les projets conçus par Léopold, ceux que fit exécuter Stanislas, sï magnifiques qu'ils aient pu être et quelque admiration qu'ils méritent, entraînèrent la destruction d'un monument, qu'on pouvait embellir sans doute, mais dont l'ensemble devait être respecté. Et d'ailleurs, par quoi fut-il remplacé? par des hôtels presque inhabitables, dont le premier (celui bâti par Boffrand) ne fut pas jugé digne de servir d'habitation à l'Intendant de la Province, et dont le second, après avoir coûté des sommes considérables, n'offrait pas même un logement convenable au gouverneur de la Lorraine , bien différents tous deux de ce vieux Palais où Louis XIV s'était trouvé plus commodément qu'au Louvre!

Une chose non moins regrettable que la destruction de cet édifice, c'est la perte des tableaux, statues, jneubles, objets


- 169 ( )-


d'art de toute espèce, que nos ducs s'étaient plus à y rassembler. Ces objets, précieux autant par eux-mêmes que par les souvenirs qu'ils rappelaient, personne ne sait ce qu'ils devinrent; aucun de nos historiens ne nous apprend si l'on prit soin de les transporter dans les résidences royales de la Malgrange et de Lunévillc, ou bien si on les abandonna au même sort que les belles statues de la rampe du Parterre, que les chefs-d'œuvre qui décoraient la chapelle princière de St-Georges. Quoiqu'il en soit, tous sont aujourd'hui dispersés ou perdus, et on chercherait vainement la trace de ces monuments qui attestaient la "civilisation artistique de notre pays.

S'il ne nous est pas possible de réparer tout le mal qui a été fait, nous pouvons du moins y remédier en recueillant les débris épars qui existent encore, et en les rassemblant dans une enceinte où chacun puisse venir les admirer. Cette enceinte, c'est la Galerie des Cerfs; c'est l'aile restante du Palais Ducal; c'est là qu'est tout naturellement marquée la place du Musée national que la Société d'Archéologie s'occupe en ce moment à fonder.

Avec la splendide Porterie qui lui sert d'entrée, avec les belles et vastes galeries qui y conduisent , avec le magnifique escalier par lequel on y arrive, la salle des Cerfs présente un ensemble monumental remarquable et tel que bien peu de villes peuvent en offrir (1).

C'est ce qui est presque universellement compris, et si cette grande pensée a trouvé quelques rares contradicteurs,


  (1) On peut voir, au Musée lorrain, une esquisse du projet complet de restauration et d'appropriation de cet édifice à uu musée , qui a été dressée par M. Chatelain.


- 170 ( )-


ce n'est que parmi ceux qui s'exagèrent les difficultés d'une pareille entreprise (1). Il y a des difficultés sans doute, mais elles ne sont pas insurmontahles;


  (1) On a prétendu : 1° que l'appropriation de la Galerie des Cerfs et la restitution d'un grenier àr fourrage à la gendarmerie entraîneraient des dépeuses considérables; 2° que cette Galerie serait beaucoup trop vaste pour qu'on pût espérer la voir jamais garnie par les objets d'art de toute espèce destinés à former le Musée historique lorrain.

Il résulte du rapport même de M. l'Architecte du département (voir la note de la page 166) que cette dépense serait beaucoup moins considérable qu'on ne le pense généralement, puisqu'elle ne dépasserait pas la somme de 53,000 fr. Cette somme, il faut, pour être juste, s'empresser de le reconnaître, serait insuffisante si l'on voulait procéder à une restauration complète et vraiment monumentale de la Galerie des Cerfs; mais une restauration de cette nature est-elle indispensable? et ne suffirait-il pas d'une simple appropriation, puisque la Galerie emprunterait sa décoration aux objets qui y seraient placés?

On a allégué, en second lieu, les proportions gigantesques de cette Galerie; or, voici, à cet égard, la vérité dégagée de toute exagération: La salle des Cerfs a environ S5 mètres de longueur, 8 mètres 10 de largeur, -i'eïi mètres h'O de surface; le pourtour des murailles est de 126 mètres 20 ; la hauteur, sous la voûte (à refaire) de 3 mètres; leur surface de 576 mètres 60; d'où il faut déduire, pour la place occupée par les portes et fenêtres, 12a mètres environ; reste sur mur, 2S1 mètres 61).Encore faut-il ne compter la surface disponible pour le placement des objets exposés qu'à une certaine hauteur à partir du plancher ; dès lors il ne restera dans les trumeaux que juste la surface capable de recevoir les tableaux, groupes d'armures, panoplies, etc.; les bahuts, meubles, tables à verrières, etc, seront au milieu de la Galerie, où il faudra laisser un espace assez considérable pour la circulation.

Il faut bien comprendre qu'un musée n'est pas un magasin où l'on entasse les objets à conserver ; mais un véritable appartement à meubler, où ces objels doivent être disposés avec ordre, sans confusion, de manière à les faire valoir et à orner les locaux.

Si l'on admet, en outre, la nécessité de réserver quelques emplacements pour les tapisseries qui occupent une grande surface ; pour une salle d'étude ou de réunion, on reconnaîtra que ces locaux sont bien moins vastes et bien moins difficiles à garnir qu'on ne l'a prétendu. Il est certain qu'aujourd'hui,'avec ce que possède déjà le Musée lorrain, avec surtout ce qu'il recueillera sans aucun doute dans un avenir peu éloigné, il pourrait occuper une grande partie de la Galerie des Cerfs.

S'il fallait des exemples à l'appui de ces assertions, on pourrait citer le Musée de Nancy, qui, commencé il y a tout au plus cinquante ans, a eu bien vite garni ses salons el se voit obligé de mettre beaucoup de tableaux dans les greniers de l'Hôtel-de-Ville.

Il en est de même de notre bibliothèque publique, dont les locaux, autrement vastes que ceux du futur Musée lorrain, sont iusuffisauts pour recevoir toutes les collections qui devraient y cire placées.


- 171 ( )-


et l'on peut voir, dès à présent, à quels résultats il est possible d'arriver avec des efforts et de la persévérance. Que sera-ce lorsque le Gouvernement, les administrations publiques, tous les hommes qui tiennent aux souvenirs nationaux par des traditions de famille ou par un sentiment éclairé de patriotisme, viendront sérieusement en aide à la Société d'-Arclléologie?

Sachons seulement ne pas désespérer et avoir foi dans l'avenir. Ce n'est pas en un jour que nous atteindrons le but que nous poursuivons; mais est-ce en un jour qu'ont été bâtis tant de monuments dont la grandeur et la magnificence nous frappent d'admiration ! Celui dont nous jetons les fondements sera long et difficile à construire, et nous n'aurons certainement pas le bonheur de le voir achevé ; nos descendants continueront l'œuvre que nous aurons commencée, et peut-être parviendront-ils à doter notre patrie d'une institution qui, un jour, fera son orgueil et sa gloire.


Notes complémentaires

Concernant la wikification du texte
Notes explicatives