Le Palais ducal de Nancy (1852) Lepage, 2 b

De Wicri Nancy

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Le
Palais ducal
de Nancy
1508-1544
'

Cette page introduit les pages 40 à 51 du deuxième chapitre d'un livre écrit par Henri Lepage en 1852 : Le Palais ducal de Nancy.

Pour alléger la lecture informatique ce chapitre est ici découpé en deux parties[NW 1].

 
Le Palais ducal de Nancy

Texte original

Pages 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 51.

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Tandis que le « tailleur d'images » Mansuy Gauvain, et « l'imagier de terre » Jean de Sanlis, faisaient pour le duc des ouvrages qui ne nous sont pas connus, ce prince chargeait son peintre Hugues de la Faye, de décorer la Galerie des Cerfs (1).

Les mentions relatives aux travaux faits par cet artiste, établissent positivement que la galerie où ils furent exécutés, était déjà garnie de bois de cerfs, et, par conséquent, qu'elle existait antérieurement à l'année 1524. Mais, comment se fait-il qu'elle ne soit désignée sous son nom que depuis cette époque? Doit-on lui appliquer la désignation de Grande Salle, précédemment donnée à une partie du Palais, et où j'ai supposé que s'étaient tenus les Etats sous René II et sous Antoine? Je n'ose rien affirmer; je dois dire, toutefois, qu'il y avait une Grande Salle vers St-Georges, située très-probablement dans le corps-de-logis qui s'étendait de derrière Ta collégiale jusqu'au Rond et au jeu de paume.

Quant aux peintures que fit Hugues de la Faye, rien n'indique quels sujets elles représentaient, ni si elles couvraient les murailles et la voûte. Il est néanmoins présumable que c'était, du moins en partie, des scènes de chasse; c'est ce qui semble ressortir de mentions postérieures, que j'aurai occasion de rappeler plus tard. Je dois ajouter que, si l'on en juge par quelques traces de peintures qu'on voit encore aujourd'hui


  (1) Payé à maistre Hugues, paindre , la somme de cent frans pour acheter des coulleurs pour achever la gallerie que presentement Monseigneur lui a faict paindre. (Comptes du Trésorier général pour 15231524.)

Les comptes du Cellerier de Nancy, pour la même année, font mention de différentes sommes payées u à plusieurs charpentiers pour avoir dressé des échafauds en la grant galerie des cerfz que Monseigneur veult faire paindre ; n — « à plusieurs massons pour avoir mis bas les tètes des cerfz de la grant gallerie. n


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dans la Galerie des Cerfs, les embrasures des croisées étaient ornées d'écussons aux armes de Lorraine et de Bourbon.

On remarque également, sur le mur du fond de cette galerie , à droite en entrant, une guirlande en feuillage et une inscription, en grande partie effacée, qui était destinée à rappeler la Passion ou des épisodes de la Passion de JésusCbrist ; on y lit, en effet, les mots suivants : Quant.... AcCusé FUST EN..... PlLATE LA FAUL..... CONDEMPNE POUR EN... LA CROIX PUIS PAYENS.... ET EN LA CROIX..... JESUS PLORANT ET.....

En 1526, on refit tout à neuf les plafonds du jeu de paume et on pava ce dernier de pierres de taille.

En 1527, François, le fondeur, refondit la cloche de la poterne de l'Hôtel, qui était rompue; le menuisier Philippe de Haut posa une couche de chêne, « à tous paremens, à panneaulx et à draperie » en la garderobe auprès de la chambre de M. le Cardinal, et fit une cage de chêne à l'entrée de la porte de la Court, pour y mettre un corbeau; enfin, Hugues de la Faye continuait à travailler à la Galerie des Cerfs (1).

L'année suivante, on fit une nouvelle fontaine dans le jardin du Palais. Elle se composait de sept gros pilliers de pierre de taille, sculptés par Jacob Menusier, de Toul, supportant un dôme couvert d'ardoises et de plomb, terminé par une lanterne vitrée, et dont les arcs doubleaux étaient décorés d'écussons armoriés. Six gargouilles en pierres de taille, faites, de même que les écussons, par l'artiste que je viens de nommer, étaient placées au-dessus des contreforts des pilliers et


  (1) Payé à Me Hugues, paintre, trente florins d'or pour trois milliers d'or qu'il a fourny pour la grant galerye de Monseigneur. (Comptes du Trésorier général pour 1526-1527.)


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déversaient les eaux pluviales. La pierre employée dans ce monument, dont la dépense totale s'éleva à 1,493 livres 19 sols tournois, provenait des carrières de Pont-St-Vincent, de Flabémont, de Moncel et de Vie, et le bois de charpente de la forêt de Haye. La fontaine était, en outre, ornée de six colonnes de marbre amenées de Lombardie, et que Mansuy Gauvain avait été chargé de tailler, nettoyer et polir. On avait fait construire, « en ung petit coin de la tour de derrière le logis de M. le grand maître, » une fonderie et plomberie pour mettre en table le plomb destiné à cet ouvrage (1).

La même année, marché fut passé avec Fiacre, maçon à Nancy, « pour faire ung mur devant la fouriere de Phostel, derriere l'eglise St George, prenant au mur du jeu de palmes jusques au mur de ladicte eglise, du loing de l'alée dudict jeu de palmes. »


  (1) Un chapitre des comptes du Receveur général pour 4327-1528, est intitulé ; u Despence pour la nouvelle fontainne du jardin de Monseigneur; n on y lit, entre autres, les mentions suivantes:

u Pavé par le receveur à Jacobe Menusier demouraut à ïoul, pour la façon et tailliaige de sept ebappiteaulx des gros pilliers portans le toict de ladicte fontainne, qu'il a fait et taillié des pierres de taille de provision dudit ouvraige, xiiij fr. valant xj livres iiij solz.

n A lui pour la taille et façon de six gargoulles desdites pierres de taille, qu'il a fait et taillié pour gecter les eawes à l'endroit desdits pilliers, xij fr. valant ix 1. xij s.

n A lui pour la façon et taille de deux escussons armoyez qu'il a fait et taillié qui sont au dessus de deux arc doublez de ladicte fontainne, xij gros valant xvj s.

M A Mansuy, ymaigier, pour l'appoinctement fait avec lui d'avoir poly et nettoyé les six colombes que l'on a amené de Lombardie et qui sont assisses à l'entour de ladicte fontainne, ensemble les sourbasses et chappitelz, xxxvj fr. valant xxviij 1. xvj s.

n A lui pour avoir taillié les deux colombes, sorbasses et chappitelz de la pierre que l'on a amené de la poiriere de Vy, les nettoyé et poly, xxviij fr. valant xxij 1. viij s."


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Il ressort de cette mention que, du temps du duc Antoine, le jeu de paume était déjà sur l'emplacement qu'il occupait lors de l'incendie de 1627, et que le corps-de-logis qui reliait les bâtiments du fond de la cour du Palais à ceux de la Grande-Rue, servait, au rez-de-chaussée, de fourrière ou de bûcherie. Quant aux étages supérieurs, ils étaient occupés par la chambre des Comptes, la chambrette où se tenaient les clercs du Trésor, et par la salle St-Georges.

Dans le courant de cette même année, on fit venir de Châlons en Champagne un nommé Jean Chevallier, nattier, pour couvrir de nattes de paille la chambre de la duchesse de Lorraine.

En 1530, Mansuy Gauvain, qui était encore occupé à la fontaine du jardin, sculpta une cheminée de marbre pour le cabinet de Madame, et un charpentier refit à neuf « la porte et porterie sur le fossel, on chemin allant du jardin vers la porte la Craffe. *

J'ai dit précédemment que les représentations dramatiques avaient lieu dans la grande salle où se tenaient les Etats; quelquefois, et sans doute lorsqu'on voulait y admettre un plus grand nombre de spectateurs, on les donnait dans la cour du Palais; c'est là que le dimanche, 23 juin 1532, fut joué le jeu de St-Job devant le duc Antoine.

A cette époque, on fit, « en la galerie du jardin de Monseigneur, » une nouvelle fontaine dont les ouvrages de sculpture furent exécutés par Mansuy Gauvain et Jean, son fils (1).


  (1) Despence pour la neufve fontainne faicte on jardin de Monseigneur et par son ordonnance en ceste presente année.

Le premier chapitre est intitulé : « Rayaige et charroy de pieres de jaspe tirées ez poirieres de Hincourt, Moncel, Vy et autres lieux pour employer audit ouvraige. n

Le second chapitre a pour titre : u Journées d'ymaigiers, massons, tailleurs et autres qui ont ouvré à taillier l'ouvraige de ladicte fontaine, M On y lit les mentions suivantes:

u A Jehan de Fer et Jehan Gradelet, massons demeurans à Vendeuvre, pour chacun sept journées qu'ilz avoient ouvré en la maison de Mansuy pour commencer la taille dudit ouvraige, iij fr. qui valent Ivj s.

n A Mansuy, ymaigier, pour iiij"j journées qu'il a ouvré et vacqué à taillier, pollir et besongnier a l'ouvraige de ladicte fontaine...., Ix fr. ix g. qui valent xlviij I. xij s.

u A Jehan Mansuy , son filz , pour iiij" journées qu'il a vacqué à taillier, pollir et besongnier audit ouvraige...., Ix fr. qui valent xlviij I. «

Différentes sommes sont payées à d'autres maçons qui avaient u taillé et besogné n avec Mansuy; ce sont : Jean de Fer, Jean Gradelet, Jean Roselot, Cuny Bazelot, Didier Renault, Claude Chaubaultet Jean de Gondreville.

« A Mansuy , ymaigier, et son filz, pour chacun v journées qu'ilz ont vacqué, ouvré et employé à dresser, asseoir et mectre ensemble ladicte fontaine en la gallerie du jardin, vj fr. ij g.— A Mansuy, Jehan, son filz, et ses compaignons, pour avoir deffaict, rosté et dessemblé ladicte fontaine, iij fr. M (Comptes du Receveur général pour 1532-1S33).


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L'année suivante, le célèbre Ligier Richier, de St-Mihiel, vint à la cour du duc de Lorraine et fit les « pourtraictures en terre » tant de ce prince que de la duchesse et de plusieurs autres personnages (1).

En 1535, des dépenses assez considérables furent faites pour « asseoir la fontaine de jaspe du jardin. » Mansuy y vacqua onze journées, et Hugues de la Faye peignit « le plomb d'alentour le pied de la colonne » de cette fontaine.


  (1) Payé par le celerier à Jehan de Mirecourt, menuisier, demeurant à Nancy, pour une grande layette en maniere de coffre, de xv pieds de longueur et iiij pieds de haulteur, qu'il a fait et fourny de son bois sapin à mectre les pourtraictures faictes de terre, tant de Msr le duc que Madame et autres faictes par maistre Liegier, ymaigier, viij fr. (Comptes du Cellerier pour 1S33-1S34.) — Une autre note des comptes du Trésorier général pour iSAQ-VM , fait mention d'une somme de 60 francs, payée u à M11 Legier, demeurant à St-Mihiel, en consideration de quelque œuvre qu'il a fait present à Monseigneur, u


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On souda avec de l'étain de Cornouaille « la plomberie de la grant vix, » et la chambre du grand escalier fut pavée de carreaux de terre plombés, jaunes et noirs (1536).

En 1537, un nommé Robert de Paris, qualifié de « prince des nattiers, » fut mandé de Reims à Nancy, pour natter la chambre de la duchesse et les cabinets du duc; maître Hugues fit différents « ouvraiges de son mestier de paincterie » dans plusieurs appartements du Palais et « radouba » les peintures de la Galerie des Cerfs (1).

En 1538, Nicolas Graxien, verrier de l'hôtel, fit, d'après les dessins de cet artiste, une verrière » toute paincte, » de treize pieds et demi, « pour servir à un rond au bout de la galerie allant de la maison de Monseigneur jusques à l'oratoire de l'église des Frères. » Nicolas avait aussi fait deux rosaces et quatre « pièces de verrières à ymages » pour l'oratoire de la duchesse, que décoraient également des peintures de Georges ou Georgin Gresset, et un bas-relief de Mansuy Gauvain, représentant l'Apparition(2).


  (1) A Me Hugues, concierge, pour couleurs et estoffes qu'il a fourny en ouvraiges de son mestier de painctre par lui faiz ez lieux cy apres: en la chambre de Madame, deux franz, en la traveur de son grant cabinet, dix frans. Pour dorer deux grandes planches de noyer ondit cabinet, dix frans. A paindre huit ymaiges de terre cuyte, douze frans. Plus à dorer et argenter de fines couleurs deux moyennes cheyeres (chaises) pour Madame, dix franz, et pour deux autres grandes cheyeres vernyes et brenyes, dix huit gros. Plus encore pour radouber les painctures de la galerie des Cerfz, vingt frans. (Gellerier de Nancy, 1536-37.)

  (2) Je dois ajouter ici une note qui aidera à compléter ma notice sur cet artiste. Malgré les nombreux travaux qu'il avait exécutés, Mansuy Gauvain était resté pauvre; aussi, n'ayant pas obtenu aussitôt qu'il le désirait le paiement du prix de l'ouvrage qu'il avait fait pour l'oratoire de Renée de Bourbon, il adressa à cette princesse la requête suivante : * Plaise à vostre benigne grace , souveraine dame, faire payer et contenter voslre tres humble subiect Mensuy Gauwain, imaigier demenrant en ce lieu de Nancy, d'ung tableau de.... (probablement l'Apparition ; le mot est à demi-couvert par une tache d'encre) qu'il a faict pour vostre oratoire, pour lequel il demande trente six frans qu'est au plus bas pris que luy est possible sans y avoir grosse perte, car le pouvre homme est endebté à plusieurs et necessiteux , et n'a argent pour subvenir à ses necessitez, à ce bon jour. Ce faisant il priera Dieu pour vous, H (Pièces justificatives des comptes du Cellerier pour 1537-1538.


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Des réjouissances eurent lieu à la cour, en 1 539, à l'occasion du mariage de la princesse Anne, fille d'Antoine, avec René de Chalons, prince d'Orange. Les noces avaient eu lieu à Bar ; mais les jeunes époux vinrent ensuite à Nancy, où on leur fit une réception magnifique; on leur offrit le spectacle d'un tournoi et d'une « momerie (sans doute un ballet), » dont les machines furent exécutées par l'imagier Martin Crocq.

Un artiste du même nom, Claude ou Claudin Crocq, peignit, l'année suivante, le cabinet que l'on fit, de l'ordonnance du duc, derrière sa chambre, « avec une galerie (en pierres de taille) prenant audit cabinet et à la grande galerie tendant sur le jeu de paume. »

De grands préparatifs furent faits, en 1541, pour la réception de Christine de Danemarck, qui venait d'épouser François, duc de Bar, depuis duc de Lorraine sous le nom de François Ier. Un combat à pied fut donné, le soir, dans la cour du Palais, qu'on avait splendidement illuminée et garnie, dans son pourtour, de chapeaux de triomphe, retenus par des liens dorés, et d'écussons armoriés, peints par Claudin Crocq; ce dernier avait également peint les murailles du jeu de paume, tandis que l'architecte Jean Paris, dit Thouvenin, dirigeait la construction d'une fontaine qu'on élevait devant l'échansonnerie, et dont la sculpture était


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confiée à l'imagier Pierre Maret (ou des Marels), de Pont-à-Mousson (1).

Dès l'année 1542, le crépi des murs du jeu de paume étant tombé en plusieurs endroits, on fut obligé de les couvrir d'un nouvel enduit 'et de refaire les peintures qui avaient disparu par suite de ces réparations. Ce fut Pierre de Francheville , peintre et verrier, déjà connu par ses travaux aux Cordeliers et à St-Georges, qu'on chargea de cet ouvrage (2) , ainsi que de repeindre la chambre « paincte en vert * où étaient les arbalètes du duc. On acheta près de Georges Ferry, marchand à Nancy, neuf aunes de drap vert, façon de Paris, « pour couvrir une table longue à faire un jeu de billart » pour la duchesse de Bar; enfin, une somme de 450 francs fut délivrée au peintre Claudin Crocq, pour plusieurs tableaux, dont les uns furent donnés par le duc et les autres mis au Rond (3).


  (1) A Claude Croix, painctre de Monseigneur, et trois aultres paincIres qui ont vacqué par xvj jours à paindre le jeu de paulnie, xxxij fr.

A Jehan Paris dit Thouvenin, Me des œuvres, xij fr. pour ses peines et vacations d'avoir fait et assys ung pillier de pierre de taille à molures avec ung chappiteau à l'anticque, et percé ledit pillier à mectre des cors de plomb et ung goulot de fer qu'il a fourny.... pour servir à la fontaine de la court devant l'eschansonnerie.

A Me Pierre des Maretz, ymaigier , pour avoir fait au mylieu de

ladite fontaine ung pillier garny de bassins, gargoulles, vazes, fueillaiges anticques, escussons, armoiries et autres enrichissemens, cent fr. (Comptes du Cellerier pour 1540-1541.)   (2) A Demenge Monturicul et Didier Regnier, massons, vj gros pour avoir crapy et enduyct en plusieurs lieux les murs du jeu de paulmcs, où le vieil enduyct estoit rompu, et à Pierre de Francheville, painctre, xij gros pour ses peines et vacations d'avoir painct esdits lieux les murs dudit jeu de paulmcs et fourny les couleurs noires et gryses reservé l'azur qui a esté delivré en la chambre des comptes.... (Comptes du Cellerier pour 1541-1542.)

  (3) Payé iiijc 1 fr. à Claudin Crock pour diverses parties et ouvrages de son art, savoir plusieurs tableaux.... dont Monseigneur a donné une partie et les autres ont été mis au Rond que Claudine a en garde. (Comptes du Receveur général pour 1541-1542.)


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Si je reproduis cette dernière mention, c'est qu'il semble en ressortir que la fameuse tour, dont on attribue la construction au duc Henri II, remonterait à une époque beaucoup plus éloignée que celle qu'on lui assigne généralement. D'autres notes des comptes des premières années du XVIIe siècle, et que je reproduirai plus tard, viendront peut-être encore à l'appui de cette opinion.

En 1543, Mansuy Gauvain raccommoda de petites images et d'autres objets qui se trouvaient sur la cheminée de la « chambre dorée estant du Rond, » savoir : un saint Sébastien, trois déesses, un Dieu de Pitié, deux coupes et deux salières d'albâtre. En même temps, Claude Crocq et Medard Chupin « redoraient et rabillaient » la Galerie des Cerfs (1).

Tels sont les principaux travaux qui furent exécutés au Palais Ducal sous le règne du duc Antoine. Si ce prince ne construisit pas cet édifice, il y ajouta plusieurs parties importantes, et, ce qui est mieux encore, il le décora de nombreux ouvrages de peinture et de sculpture, et le dota de cette magnifique Porterie, à laquelle il a attaché son nom. Durant


  (1) A Pierot le charpentier, pour quatre trastelz (tréteaux) de dix pieds de haulteur qu'il a faict pour faire les allœufz des paintres pour eulx en servir à repaindre et racoustrer la salle des Cerfs, iiij gros.

Payé par le Receveur à Claude Crock et Medard Chuppin, painctres, par mandement de Monseigneur donné à Nancy le xxe jour d'avril (1543), la somme de six vingt frans monnoie de Lorraine, pour avoir refaict ce qui pour lors estoit necessaire à refaire à la paincture de la Galerie des Cerfz de la maison de Monseigneur à Nancy, et fourny toutes etoffes, reservé l'or, l'azur et l'huille.

Payé vingt deux frans à Jehan de la Monnoye, marchand demeurant à Nancy, pour or battu en feuilles pour redorer et rabiller ladicte Galerie.


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cette période de trente-six années, qui vit grandir l'immortel auteur du Sépulcre de Saint-Mihiel, les arts prirent en Lorraine des développements remarquables : les peintres et les tailleurs d'images s'y multiplièrent, encouragés par la bienveillante protection du prince. Ce ne fut pas seulement le Palais Ducal et la collégiale St-Georges qu'ils peuplèrent de leurs chefs-d'œuvre : Pierre Maret, Mansuy et Jean Gauvain embellirent de sculptures la chapelle du couvent de Ste-Claire, à Pont-à-Mousson, où la pieuse Philippe de Gueldres s'était retirée loin du monde pour se consacrer tout entière à Dieu; Pierrequin Fauterel et François Bourcier, l'enlumineur, peignirent le mausolée de René II aux Cordeliers de Nancy; Georges Millereau fit des vitraux peints pour cette église, tandis que Gabriel Salmon, de Lunéville, et Georges Gresset y suspendaient leurs tableaux, et que Hugues de la Faye et Medard Chuppin (1) enrichissaient le réfectoire des Frères Mineurs de cette Cène qu'on a longtemps attribuée à Léonard de Vinci. Enfin, à la même époque, vivait encore un peintre, nommé Jean le Courtoys, dont aucun des ouvrages ne nous est connu.

Malgré les documents nombreux qui se trouvent consignés dans les registres auxquels j'ai eu recours, il est vivement à regretter que pas un écrivain du temps ne nous ait transmis de détails sur cette époque si intéressante de l'histoire du Palais Ducal, et surtout ne nous ait laissé de description de cet édifice. Volcyr, qui a si minutieusement décrit certaines merveilles du Parc d'Honneur (le duché de Lorraine); qui n'a pas dédaigné de consacrer quelques lignes au château que René II avait fait construire sur les bords de la Moselle, à


  (1) En 1545, cet artiste, ainsi que Gandin Crocq , fut envoyé en Italie, aux frais du duc François, pour s'y perfectionner dans son art.


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Pont-à-Mousson; Volcyr ne dit rien de cette Court où il dut cependant faire sa résidence, et où il écrivit probablement, sous les yeux du duc Antoine, le récit de la guerre des Rustauds (1).

Le héraut d'armes du Boulay est le seul qui, en racontant les funérailles du « Prince de Paix, (2) » donne quelques indications sommaires sur les cérémonies qui avaient lieu au Palais lors des pompes funèbres de nos ducs. « Le maistre des cerimonies du temporel, dit-il, feit assembler toute la noblesse et tous ceulx de la maison du feu Prince en la Grande Salle de la triumphante maison ducalle de Nancy à une heure apres mydy, et à la mesme heure le maistre des cerimonies du spirituel feit congreger au couvent de sainct Françoys (les Cordeliers) tous les suffragantz, prelatz, abbez mittrez crossez, et crossez non mittrez, avec toutes les eglises parrochialles, ordres mendians, escolliers, poures en deuil, et crieurs avec clochettes sonnantes piteusement , lesquelz il admena en la Grande court, puis les feit monter par la vitz du concierge et tourner par dessus les haultes galleries droict à la chambre qui est aupres de la grant'vitz,


  (1) H Antoine, n dit M. Aug. Digot dans sa Notice sur Volcyr, qui a été insérée dans les Mémoires de la Société des Sciences, Lettres et Arts de Nancy, année 18-48; u Antoine , qui goûtait la facilité et l'esprit de son secrétaire , l'admit aux réunions littéraires qu'il avait coutume de tenir dans un appartement retiré de son palais, et Volcyr, à qui la familiarité du duc permettait ce langage , appelle cet appartement n nostre chambre secrette, propice à littérature, tant en latin comme en francois. n (V. Lhistoire et recueil de la triumphante... victoire obtenue contre les Lutheriens, ete.)

  (2) La vie et trespas des deux princes de Paix, le bon duc Anthoine et saige duc Francoys.... Ensemble les royalles et tres excellentes ceremonies observées et accomplies à leurs funerailles et enterrement


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où lors estoit Monseigneur de Metz (l'évèque de Metz, un des fils du duc Antoine), premier Prince du grand deuil et toutes les dignitez des cerimonies ; devant laquelle chambre s'arresterent, et alors moy roy d'armes, vestu de ma cotte d'armes, et accompaigné des Heraulx, poursuivant et cloches d'armes, j'entray en la Grande Salle susdicte, où estoient ceulx du temporel, puis au meillieu de la grande viz, me mis entre les deux maistres des cerymonies qui estoient à la poincte de leurs estatz spirituel et temporel...., le chaperon en forme, lesquelz je commençay à appeler.... »

Il est difficile, d'après la gravure de Deruet et le plan de i 698, de suivre la marche du cortège décrit par Edmond du Boulay: la seule supposition que je puisse hasarder, c'est que les corps ecclésiastiques montèrent par un escalier situé dans l'angle des bâtiments sur la cour, du côté du chœur de l'église des Cordeliers, et arrivèrent, en suivant les galeries de ce corps-de-logis, à une salle contiguë à la Galerie des des Cerfs, près du grand escalier de l'Horloge; et que le héraut d'armes, placé au haut de cet escalier, entre les maîtres des cérémonies , appela successivement toutes les personnes qui devaient faire partie du cortège. Mais ce n'est là, je le répète, qu'une simple supposition.


Notes complémentaires

Concernant la wikification du texte
  1. Pour ce découpage, nous nous appuyons essentiellement sur l'opportunité de trouver un saut de page sans coupure de phrase ou de note.
Notes explicatives