Le Palais ducal de Nancy (1852) Lepage, 2 a

De Wicri Nancy
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Le
Palais ducal
de Nancy
1508-1544
Première partie (pages 28 à 39)

Cette page introduit le deuxième chapitre d'un livre écrit par Henri Lepage en 1852 : Le Palais ducal de Nancy.

Pour alléger la lecture informatique ce chapitre est ici découpé en deux parties.

 
Le Palais ducal de Nancy
Vers le texte original

Texte original

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1508 - 1544

J'arrive à la période la plus intéressante de l'histoire du Palais Ducal, c'est-à-dire au règne du duc Antoine. Suivant l'auteur de la Dissertation[NC 1], ce prince « fit faire la Galerie des Cerfs avec la Porterie, et ajouter au Palais plusieurs pièces nécessaires. »

Je ne sais jusqu'à quel point la première partie de celte assertion est fondée, et il me semble qu'on a pris pour des constructions nouvelles de simples travaux de restauration et d'embellissement; il serait peut-être plus juste de dire, et je vais essayer de le démontrer, qu'Antoine fit refaire la façade du Palais sur la rue (1), décorer la Galerie des Cerfs, et enrichir de sculptures la Porterie à laquelle il a donné son nom.

Outre le passage de Nicolas Remy, que j'ai précédemment cité, et où il est dit qu'on pouvait aller à couvert de la Court à St-Georges et aux Cordeliers, une foule de notes consignées dans les registres du Cellerier et du Receveur général, établissent qu'il existait une communication entre ces trois bâtiments. Maintenant, où était cette communication? Les tribunes réservées au duc, tant aux Cordeliers qu'à St-Georges, se trouvant dans la partie supérieure de ces églises, il est plus que probable qu'on y arrivait, soit par des galeries[NW 1],


  (1) Cette supposition pourrait être autorisée par la quantité considérable de pierres de taille employées en 1511-1512, et surtout par l'intitulé suivant d'un des chapitres du compte de cette année: « Charryaige de repoulx des fondemens des pilliers de la muraille au loing de la rue.


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soit par des appartements situés aux étages supérieurs du palais (1).

Quelle était, d'ailleurs, cette Grande Salle où René II et Charles-le-Téméraire tinrent les Etats, et où fut passé, le 13 février 1508, l'acte relatif à l'émancipation d'Antoine (2)? Ainsi que je l'ai dit plus haut, j'ai tout lieu de croire que cette salle était la Galerie des Cerfs, non seulement à cause de la corne de cerfs qui y servait de chandelier, mais encore à cause de sa qualification, qui s'applique parfaitement à cette vaste Galerie. D'ailleurs, aucune mention des travaux exécutés sous le duc Antoine, n'est relatif à sa construction ni aux dépenses, certainement considérables, qu'un ouvrage de cette importance eût occasionnées. J'ajouterai, toutefois, que je ne fais qu'émettre ici un doute, et non pas une affirmation (3)[NW 2].


  (1) Il semblerait, d'après les découvertes qui ont été faites lorsque l'on a restauré le vestibule donnant sur la cour des bureaux de la préfecture, pour y établir le Musée lorrain, qu'à une époque qu'il est difficile de déterminer d'une manière bien précise, mais qui très-vraisemblablement se rapporte au règne de René II, l'aile du palais longeant la Grande-Rue, ne se prolongeait pas jusqu'à l'Eglise Saint-Georges. On a trouvé, en effet, dans le vestibule dont il vient d'être parlé, des ouvertures de portes et de fenêtres qui devaient avoir une destination quelconque, et donner sur un espace laissé vide entre le palais et la collégiale. Ce fait laisse le champ libre à une foule de conjectures. Mais il est à peu près impossible d'émettre, à cet égard, une opinion positive.

  (2) Acte passé en la Grande Salle du Palais Ducal à Nancy, par les comtes, barons, chevaliers, baillis et autres nobles, les abbés, prieurs, collèges et gens d'église, ensemble les bourgeois et commun peuple du duché de Lorraine et de Bar, convoqués et assemblés, représentant les trois Etats desdits duchés, au sujet de l'émancipation d'Antoine, duc de Lorraine et de Bar. (Trésor des Chartes, lay. Etats généraux II, n° 61, et Cartulaire de Lorraine, Liber omnium.)

  (3) La qualification de Grande Salle fut donnée plus tard à la salle d'Honneur, située du côté des Cordeliers, mais qui ne fut construite que sous Charles III.


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Quant à la Porterie, elle est déjà désignée sons ce nom en 1484 (1), mais uniquement, sans doute, parce que cette porte était l'entrée principale du Palais.

Quoiqu'il en soit, c'est bien Antoine qui peut revendiquer l'honneur d'avoir fait décorer et embellir ces deux parties si intéressantes de l'ancienne résidence de nos ducs ; il fit continuer et presser avec la plus grande activité les travaux commencés par son prédécesseur; des ouvriers y furent occupés de jour et de nuit (2), et le Receveur général de Lorraine fut chargé de tenir des comptes particuliers des « recettes et dépenses pour les ouvrages faits en la maison de monseigneur le duc. »

Malheureusement, ces registres, où l'on trouverait des détails précieux, n'existent plus ; le seul qui nous ait été conservé est de l'année 1511-1512, et les renseignements pleins d'intérêt qu'il renferme, doivent faire regretter vivement la perte de ceux qui l'ont précédé ou suivi (3).

Des ouvrages considérables furent faits dans le courant de celte année, à en juger par l'énorme quantité de matériaux


  (1) Les comptes du Cellerier de Nancy, pour 1484-1485, parlent d'une somme payée pour « une verge mise à la lanterne de la Porterie et un chandelier dedans. »

  (2) Le registre des recettes et dépenses pour les ouvrages du Palais (1511-I512), fait mention d'une dépense de 6 gros « pour six petits chandelliers à mettre chandoilles pour les massons à besongner de nuyet. »

  (3) Ce registre est intitulé : « Septieme compte des receptes et despences faictes par George des Moynes, receveur gênerai de Lorraine, pour les ouvraiges faits en la maison de monseigneur le duc à Nancey depuis le premier jour de janvier mil vc et xj jusques au dernier jour de decembre mil vc et douze, qu'est ung an entier, u


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employés : on amena à Nancy, tant des carrières de Pont St-Vincent et de Maizières, que de celles de Flabémont, Montenoy et Bouxières-aux-Chènes, 43,371 pieds de pierres de taille; trente marches, de la carrière de Belleville , plus vingt-six toises de pavé, aussi de pierres de taille, tirées des environs de l'Avantgarde.

Plusieurs ouvriers travaillaient, sous la direction de l'architecte Jacot de Vaucouleurs, au « parachevement du portail du corps de maison de la Grande Rue, » et à un escalier qui se faisait au canton allant au petit jardin (1). On recouvrait tout à neuf un petit toit « dessus l'église St-Georges, entre la chapelle du duc et le toit de la chambre des Comptes (2) ; » on posait des verrières aux fenêtres de la chambre des Assises (2); enfin, l'imageur Mansuy Gauvain taillait les


  (1) Journées de massons en molure, feuillaiges et autrement, assayeurs de taille, massons rencoutrans ladite taille.

Payé par le Recepveur à maistre Jaco, maistre masson audit ouvraige, Loys Jehan et Didier et Claude, ses valetz, Thouvenin de Condé, Jehan du Boys, le Bagnelol, Arnoult de , Grant Jehan le Velu, Labbé, Jacob, Didier d'Essey, Jeminet, Odart, son fils, Guillaume de Brabant, Claude de Lay, Aubertin Vosgien et plusieurs autres massons pour leurs journées de la sepmaine commenssant au lundi Ve jour de janvier mil vc et xij, qu'ils ont ouvré audit ouvraige au taillier pierre de taille, massonner, assavoir les ung quatre gros, xiij blans, iij gros, xj blans, x blans et vij blans, pour besonnier au parachevement du portai du corp de maison de la grant rue, et besoingner à ung vix qui se fait au quanton allant on petit jardin, et aultres ouvraiges et en plusieurs lieux en ladicte maison, iO fr. S g. 12 d. — Somme des journées de massons, 5,212 fr. 6 g. et demi.

  (2) Payé à Jean de Rains, couvreur d'ardoises, la somme de cent florins d'or, ij frans piece , pour avoir recouvert tout à neuf ung petit toict dessus l'eglise Sainct George, qui est entre la chappelle de Monseigneur et le toict de la chambre des Comptes faict en l'année mil v° et dix (et autres ouvrages), 200 fr.

  (3) Payé à Nicolas le verrier, de Nancey, pour deux croisiées de verrieres qu'il a faictes es fenestres de la Chambre des Assyses venant sur la rue au loing de l'eglise Sainct George.... 5 fr. et demi.


Antoine de Lorraine
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les gargouilles de la façade du Palais, et sculptait la statue équestre du duc Antoine(1).


  (1)Autre despence à Mansuy tailleur pour avoir faillie et fait le pourtraict de Monseigneur le duc qui est à cheval sur le portai de ladicte maison.

“ Payé par ledict Receveur audiet Mansuy, ymageur, pour la marchandie faicte avec lui d'avoir esté au lieu de Savonnieres en Partoys faire rayer des pierres de taille et faillie le pourtrait de Monseigneur qui est à cheval sur le portai de ladicte maison sur la grant Rue ainsy qu'il se monstre , du tout à ses fraiz.... pour ce.......... lxvj fr.
« Audict Mansuy que lui ont esté ordonnez pour ses journées et despens d'aller avec les charrettons de Sainct Nicolas audiet Savonnieres en allant charger lesdictes pierres par appoinctement à lui. fait....... iij fr.
« Audiet Mansuy la somme de xij fr. que mondict seigneur lui a fait donner pour et en recompense des perdes qu'il avoit fait en faisant ledict pourtrait et ce pour une fois.... pour ce....... xij fr.
« Audiet Mansuy pour avoir fait quatre gargoilles pour mectre ez chanlettes de pieces du corps de maison joindantà la grant Rue de ladicte maison et ce des pierres de provision à raison de trois franz la piece xij fr.
« Payé par ledict Receveur à Symon le charreton et Jehan Wanier demeurons à Sainct Nicolas, pour avoir esté avec trois chers attallez et leurs chevaulx au lieu de Savonnieres en Partoys et amené les trois grosses pierres de taille que ledict Mansuy avoit esté rayer en la poiriere dudict lieu pour la représentation et pourtraict de mondict seigneur cy devantdicte onquel veaige ilz ont vacqué, tant allant, seiournant que retournant par sept jours entiers, et ce pour leurs journées salaires et despens, par appoinctement à eulx fait... pour ce., x liij fr. et demi.
« A Claude Liebault, charpentier, pour l'appoinctement fait avec luy d'avoir fait une roullette de bois pour charrier et mener ladicte representacion depuis l'astelier ou les massons besongnent jusques à la porte de ladicte maison pour monter et tirer hault ladicte representacion qu'il mis et assis dessus ladicte porte avec ses gens le tout à ses despens v fr.
« A Jehan le sellier esperonnier pour ung mors de bride qu'il a fait ct attachié les bossettes et esperon du cheval de ladicte representacion ix gros.
Somme de la despence à Mansuy pour la representation dessus la porte de la maison cxlij fr. iij g.

Je crois avoir prouvé, dans ma notice sur Mansuy Gauvain, insérée au tome II des Bulletins de la Société d'Archéologie, que la statue dont il vient d'être parlé, est bien celle d'Antoine et non le portrait de René II, comme Chevrier l'a avancé, contrairement aux traditions historiques et à la vérité.


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Ces ouvrages, et beaucoup d'autres moins importants, que je ne crois pas devoir indiquer en détail, s'élevèrent à la somme de 40,053 francs 5 gros 7 deniers.

C'est donc à l'année 1512 qu'on peut, avec certitude, fixer l'achèvement de la Porterie, que de récentes restaurations, exécutées avec art et intelligence, nous permettent d'admirer dans toute sa magnificence primitive.

Cette Porterie, dont une des planches de la Pompe funèbre de Charles III donne une excellente représentation (1), offre un type curieux de l'architecture transitoire de l'ogive à la renaissance du XVI6 siècle. A ses ouvertures à plein cintre s'élèvent deux pieds-droits chargés d'arabesques et découpés à jour vers leurs extrémités. Dans l'intervalle qui les sépare se trouve la porte principale, au-dessus de laquelle est une niche spacieuse et profonde, à cintre légèrement surbaissé, et qui contient la statue du duc Antoine. La niche supérieure est occupée par les armes de Lorraine, sculptées dans le cadre ogival de deux tiges ornées de feuillages et richement fleuronnées au-dessus de leur jonction. Entre deux autres pieds-droits, terminés à jour comme les premiers, et au-dessous d'un fronton à demi-rosace, que surmonte encore la réunion fleuronnée de deux tiges, sont les bustes affrontés de René II et d'Antoine, sculptés en bas-relief.


  (1) La Porterie a été dessinée et lithographiée d'une manière remarquable par MM. Chatelain et Thorelle.


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Les détails de cette décoration, dont l'ensemble est aussi majestueux qu'élégant, présentent le fini d'une ciselure sur bois. La couronne du portail domine, de quatre mètres environ, la partie inférieure du toit. Ce portail est placé entre deux fenêtres garnies de balcons saillants, en demi-octogones, découpés en architecture flamboyante et supportés par des figures grotesques.

A côté de la Porterie se trouve une petite porte surmontée des armes de Lorraine, soutenues par deux génies; au-dessus du tympan, elle est décorée d'une tige fleuronnée, au haut de laquelle le sculpteur a représenté un singe habillé en Cordelier, et tenant des deux mains un livre ouvert. Cette représentation bizarre a donné lieu à diverses interprétations: suivant les uns, ce serait une petite vengeance de l'artiste, dont un religieux aurait critiqué le travail ; suivant Chevrier, l'auteur de cette figure serait Charles de Lorraine-Guise, qui fut évêque de Metz, archevêque de Reims et cardinal. Malheureusement, la dissertation que nous promettait sur ce sujet le très-piquant écrivain de L'Histoire de Lorraine, n'a jamais paru, et l'on ignore sur quelles preuves il se proposait de baser son étrange attribution (1).


  (1) "Voici ce qne dit Chevrier dans son Histoire de Lorraine :

« Je donnerai, dans le 9e tome, une dissertation (*) sur le singe habillé en Cordelier, qu'on voit au-dessus de la petite porte... Charles de Lorraine-Guise en est l'auteur; ce prince est le même qui fut évêque de Metz, archevêque de Reims et cardinal.

(*) Cette pièce aussi savante que badine (ajoute Chevrier dans une note), pourrait bien blesser la dignité d'un prince de l'église romaine, mais je dirai hardiment qu'elle ferait honneur à tout autre homme. Ruyr, chanoine de Saint-Dié, la lui dispute, et la date du XVIIe siècle sur un manuscrit trouvé à Angers. Je discuterai cet objet dans son temps. »

La dissertation annoncée par Chevrier, na jamais paru, et aucun passage des ouvrages de Ruyr n'a trait à cette particularité.


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La petite porte dont je viens de parler acquit, du temps de Léopold, une sorte de célébrité en raison d'un épisode que je raconterai plus tard. Dans le récit qu'il fait de cet événement, Lionnois prétend que, depuis René II, les ducs de Lorraine avaient toujours entretenu un ours à leur cour, en reconnaissance du service que le canton de Berne, qui porte l'effigie de cet animal dans ses armes, rendit à ce prince en pressant les Suisses de Ici porter secours contre le duc de Bourgogne. Je ne veux pas révoquer en doute l'assertion, du reste peu importante, du savant auteur de l'Histoire de Nancy; je dirai toutefois que rien ne la confirme. Du temps de René, il y avait, dans une partie du Palais , une sorte de ménagerie où étaient rassemblés des animaux de toute espèce, notamment une civette, un léopard, des cerfs, des lions, etc.; mais il n'est nullement fait mention de l'ours traditionnel, qni aurait dû cependant, en raison du souvenir qu'il rappelait, être l'objet de soins tout particuliers. Plus tard, et suivant un usage qui s'est conservé longtemps dans notre pays, un corbeau fut placé près de cette petite porte.

En parlant des travaux d'art faits au Palais Ducal dans les premières années du règne du duc Antoine, je ne dois point passer sous silence la corniche, en forme de cable tordu, qui reliait l'une à l'autre les gargouilles sculptées par Mansuy Gauvain. Cette corniche, qui est restée à peu près intacte le long du comble de la Galerie des Cerfs, a été coupée, en beaucoup d'endroits, dans l'aile du bâtiment qui avoisine les Cordeliers.

Je dois mentionner également, comme se rapportant à la même époque, les médaillons placés à la voûte du porche et du vestibule adjacent. Ils sont au nombre de vingt et représentent, pour la plupart, des figures bizarres. Quelques-uns renferment des portraits, notamment ceux d'Antoine et de


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René Ier. A l'exception de ce dernier, autour duquel on lit les mots : RENATVS CICILIE. I. REX, tous les autres sont encadrés par la devise d'Antoine : J'ESPERE, AVOIR en lettres gothiques d'une très-belle exécution.

D'autres médaillons, dont on voit encore l'empreinte sur le mur, ornaient également la façade intérieure du Palais: ils ont été brisés, soit lorsqu'on a établi les contreforts disgracieux qui déparent cette façade; soit lorsque, en 1751, on a agrandi les fenêtres de la Galerie des Cerfs (1).

En 1513, on refit à neuf le pont de bois « derrière l'Hostel au bout du fossel la haronniere, (2) » et l'on travailla à la « charpenterie de la coiffe de la vis carrée près du logis du concierge. » A en juger d'après le plan de 1698, cette vis ou cet escalier serait celui de la tour de l'Horloge, qui subsiste encore aujourd'hui, et qui était contigu au logement du concierge, situé alors à peu près sur l'emplacement actuel de la grande porte de la Gendarmerie, à l'extrémité de la galerie qui sert de magasin à la ville.

En 1515, on répara la galerie allant du Palais aux Cordeliers, et l'on fit tout à neuf la fontaine de l'Hôtel.

L'année suivante, et sans doute à l'occasion de la venue de


  (1) Cette particularité est indiquée dans une note marginale écrite sur un exemplaire de la Notice de Lorraine.

  (2) Suivant l'auteur de la Dissertation historique sur Nancy, cette ville avait, outre ses deux portes (celle de la Crane et de StNicolas), deux poternes, l'une dite du Vieil-Aitre, sur l'emplacement d'une partie de la rue de la Monnaie, près de la place de Grève; l'autre derrière la Court, u par où les princes sortaient par dessus un pont de bois pour s'égayer, principalement pendant la mortalité. Cette seconde a , sans doute, été détruite lorsqu'on a édifié le bastion des Dames (1556). Il y avait encore, sous le règne de Léopold , un pont de bois à l'angle flanqué dudit bastion, par lequel la Cour allait à la prairie, mais il n'y avait plus de poterne. C'est aussi en cet endroit que fut placée la porte St-Louis (construite par Louis XIII en 1635). n


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Renée de Bourbon, épouse du duc Antoine, des travaux furent faits aux étuves et aux chambres des filles, près du logis du concierge; aux « chambres du logis nouvellement faites pour M. le Seneschal; » aux « vieilles galeries et cabinets d'alentour du vieil jardin; » Jean Contelesse, maître paveur de Nancy, posa huit toises et demie « de pavement de pierres de roches » derrière la grande porte entrant à l'Hôtel; Nicolas le verrier mit cinq pieds de verrières peintes à l'écurie de la duchesse et peignit ses armes « en la chambre de son écurie; » Robinet le menuisier fit un « buffet à la taille d'anticque » pour l'appartement des filles d'honneur; enfin, Hugues de la Faye, peintre du duc, décora de ses ouvrages le cabinet de Renée de Bourbon (1). Ce cabinet renfermait des « chayeres et des pourtraits » taillés par les menuisiers Jean Dallein et Antoine Philbert; et dans le petit poêle de la duchesse, était « un lit de camp taillé d'ouvrage plat et les molures étant avec l'assemblement à mode d'Italie, » sculpté par Adam le Cygne (2).


  (1) Despence pour la paincture du cabinet de ma dame.

Payé par le Celerier à Robert Guerrart, marchant, demeurant à Sainct Nicolas, pour viijc j quarteron d'or qu'il a vendu et delivré à maistre Hugues, painctre, pour employer à paindre ledit cabinet xvij fr. x g. et demy.

A lui pour une libvre de vermillon, xij g.
Pour une libvre et v onces de blanc de plomb, viij g.
Pour une libvre de vert de terre, vj g.
Pour une libvre de pymont, xij g.
A maistre Hugues pour avoir painct une planche aux armes de Madame, ij fr.
A lui pour autre ouvraige de pattes de papier, xij g.
Pour ung cent et demy d'or, xxviij g.
A lui pour ung quarteron de sinoplc, iv g.
A Jehan de Rains pour la façon des lettres et croix, ij fr.
Somme, xlvj fr. iv d.

  (2) Comptes du Cellerier de Nancy pour 1517-1B18. On voit, par une note du registre précédent, que des tournois eurent lieu H on pasquis derriere l'ostel n, et sur la place u dite le Chastel devant la halle. n


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En 1518, des ouvrages de menuiserie furent exécutés » en l'édifice que l'on fait neuf sur le demy rond du jardin devers la poterne, comme au logis de M. le grand maistre (d'hôtel). »

En 1519, une somme deplus de 5,000 livres fut affectée à la « despence faicte pour l'achevement des galleries de ma dame, pour le jardin de Monseigneur et la fontaine nouvellement faicte audit jardin (1). » Cette galerie, qui communiquait au jardin, et sur laquelle aboutissaient les appartements de la duchesse, avait environ 200 pieds de longueur et 20 de largeur. La « traverse au plus pres du toict, » était « toute de mairien et planches de sapin, les solmiers et filières à molures. » La chambre de la princesse, située à l'extrémité de la galerie , était décorée de vitraux, portant neuf écussons à ses armes, peints par Nicolas le verrier. Ses armes étaient également figurées sur les deux panonceaux qui surmontaient le toit en ardoises de la galerie, et avaient été peintes par le verrier Honoré. Tous ces travaux furent exécutés sous la direction de l'architecte Jacob (ou Jaquot), concierge de l'hôtel.

En 1521, des ouvrages considérables furent faits aux deux jardins et à la fontaine du grand jardin(2) Ce dernier était


  (1) Comptes du Trésorier général pour 1518-1519.

  (2) Despence faicte tant pour les deux jardins de l'hostel de Monseigneur, dehors et dedans, que autres ouvrages et refections necessaires en ladicte maison.

Tel est le titre d'un chapitre des comptes du Receveur général pour 1520-1521 ; la somme totale de la dépense s'éleva à 965 livres 11 sols 8 deniers. Dans cette somme sont comprises les dépenses faites pour ouvrages de charpentiers, menuisiers, serruriers, clou tiers, etc.; fournitures de planches pour les treillis et berceaux ou allées du jardin , portes a ces allées ; plomb pour la coiffe de la fontaine, panons posés sur cette fontaine, charpente du toit de son pavillon, construction d'une loge en planches de sapin, dressée auprès des « lysses n derrière le Palais. Parmi les mentions contenues dans ce chapitre, se trouvent les suivantes :

« Payé à maistre Claude, charpentier, demeurant à Nancy, pour la marchandie faicte avec luy d'avoir fait la charpenlerie du toict dessus le pavillon de la fontaine du grant jardin, xxviij livres.

n A Jehan de Itains, maistre couvreur de l'hostel, pour avoir couvert tout à neuf d'ardoises la coiffe et toict dessus ladicte fontaine, fait toutes les plomberies d'anticailles, bestions et dorure, iiij " xij 1.

n A Jehan Loilyer de Nancy pour trois pintes d'huylle de seuruze qu'il a delivré audit Jehan de Rains pour servir aux paiuctures de ladicte plomberie, xvj solz.

n A maistre Jaco, consierge de ladicte maison, pour deux quartes d'huylle de noix qu'il a delivré pour servir comme dessus, xxiv s.

n A maistre Jacques , monnoyer demourant à Nancy , la somme de iiij " xvj fr.... pour huict escussons de terre cuicte et esmaillée de diverses couleurs aux armes de Monseigneur, qu'il a faictes, myses et assyses on grant jardin aupres d'autres escussons faiz l'au passé, Ixxvj I. xvj s. n


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hors de l'enceinte du Palais, peut-être derrière les Cordeliers, peut-être sur l'emplacement où Christine de Daneniarck fit construire plus tard le bastion des Dames.

En 1523, le duc Antoine acheta aux chanoines de StGeorges, moyennant 180 francs, une maison « seante en la neuve rue derriere les freres Mineurs, » où était le vieux jeu de paume, et y fit faire un chenil pour ses chiens. On construisit un « colombier de passeretz » derrière l'Hôtel, auprès du jardin des Champs, et un échafaud fut dressé dans la Grande Salle pour tenir les Etats et jouer des farces au Gras Temps (le carnaval).

C'est à cette époque qu'il commence à être fait mention , d'une manière précise, de la Galerie des Cerfs ou de la Grande Galerie, comme elle était également appelée.


Notes complémentaires

Concernant la wikification du texte
  1. Ce terme est à cheval sur 2 pages dans l'édition originale
  2. La note numérotée 3 est à cheval sur 2 pages dans l'édition originale.
Notes explicatives
  1. Henri Lepage se réfère ici à l'ouvrage Dissertation historique sur Nancy - voir la note originale au chapitre précédent.