Le Palais ducal de Nancy (1852) Lepage, 4

De Wicri Nancy

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Le
Palais ducal
de Nancy
1608-1624
(pages 89 à 100)

Cette page introduit le quatrième chapitre d'un livre écrit par Henri Lepage en 1852 : Le Palais ducal de Nancy.

 
Le Palais ducal de Nancy
Vers le texte original

Texte original

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IV

1608 - 1624

Un voyageur qui avait visité la capitale de la Lorraine dans les premières années du XVIIe siècle, et avait été admis , sans doute , à pénétrer dans l'intérieur du Palais , rend ainsi compte des impressions qu'il avait ressenties: « Dans la Ville Vieille, dit-il, est le magnifique palais (magnificum palatium) des ducs de Lorraine. On a coutume d'y montrer la chambre du duc lui-même , où vous arrivez par une galerie que décorent les portraits d'une foule de rois et de princes. Par un autre côté, vous êtes conduit dans une salle (ou vestibule, atrium) où vous voyez deux tables trèsprécieuses, l'une de marbre...., l'autre d'argent doré... (1). Vous êtes mené ensuite dans une pièce où l'on vous déroule et vous montre, en nombre immense (immani numero), des tapisseries infiniment précieuses et d'une magnificence plus que royale (magnificentiœ plus quàm regiœ). Là vous verrez une figure humaine sculptée en bois, dans laquelle tous les muscles et les tendons sont mobiles, formant un ensemble cousu de parties très-fines et très-délicates. Près de là, sur un bastion, est un jardin (ou verger, viridarium) des plus agréables (2). »


  (1) Il a été précédemment parlé de ces deux tables (p. 81).

  (2) Jodoci Sinceri Itinerarium Galliœ, etc. Amstelodami M DCILV. (Bibliothèque de M. l'abbé Marchai et traduction de M. de Dumast.)


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Jodocus ne parle , dans ce récit succinct, que des parties du Palais qui, soit par elles-mêmes , soit par les objets curieux qui s'y trouvaient placés, avaient le plus excité son admiration , c'est-à-dire la chambre du duc, la galerie des Peintures, qui y conduisait, la Galerie des Cerfs, et enfin le Rond ou Garde-meuble , qui renfermait, à profusion, de riches tapisseries amenées de Flandre ou fabriquées à Nancy par les ouvriers étrangers que Charles III avait attirés dans sa capitale.

Un autre historien , qui avait rempli 5>pendant plusieurs années , les fonctions de secrétaire auprès de ce prince , et qui, par conséquent, avait habité le Palais, nous a laissé, de cet édifice, une description qui complète celle de Jodocus, et donne une idée bien plus grandiose encore de cette ancienne résidence princière.

« Les ducs de Lorraine, dit Georges Aulbery dans sa Vie de St. Sigisbert (1617), ont fait de long temps leur demeure ordinaire à Nancy, en un Palais duquel la beauté et somptuosité a toujours témoigné la grandeur de ses possesseurs. J'auray autant de tesmoins qu'il y a de personnes qui ont veu ledit Palais, qu'il ne se peut veoir maison de prince plus logeable que celle à présent d'un Duc de Lorraine.

» Son assiette est en un lieu plain et égal, et est composé de quatre grands corps de logis en quarré de trois estages de haut, et chacun d'iceux estant fort éminent, aiant encore de fort commodes logements par dessus, le tout des mieux percé à jour : et est basty entierement de pierre tres dure taillée et cizelée. Toute la couverture est d'ardoises, aiant le faiste enrichy de petites couronnes piramidales de cuivre doré.

» Au dedans il y a une cour quarrée d'environ cent pas communs d'angle à autre , et tout autour se voient des galeries hautes et basses basties sur petites arcades soubs les


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quelles les suivants la Cour se peuvent promener à couvert. Dans ceste cour se faisoient anciennement et se font encores quand on veut les tournois , courses , combats de barriere et autres exercices de Noblesse.

» Le maistre corps de logis dudit Palais, avec un autre naissant d'iceluy par dehors d'un costé , joint à une belle et grande galerie de proportion egale de l'autre, enceignent un parterre enfermé d'iceux en quarré, et vont aboutir à un grand et fort bastion, dit le bastion des Dames, duquel ledit Palais est couvert au levant, et sur lequel bastion se voit aussy un des plus plaisant et fertile parterre qui se puisse souhaiter, où vous voiez des cabinets en esté à l'espreuve des raions du soleil, avec un grand rang d'espalliers travaillez en portiques, aiant en veue une grande prairie, la riviere et les bois. Ce bastion-parterre est de l'estendue de cent soixante pas communs en sa longueur et d'environ quatre vingt et huit en sa largeur; on y va à couvert par lesdictes galerie et corps de logis, et y peut on monter aussi par trente deux marches depuis le parterre d'embas auquel se voient des rares compartiments. Vous y voyez des orangers portans fruits, des oliviers et autres rares plantes empruntées des provinces lointaines.

» II se trouve audit Palais trente appartements, chose presque incroiable, et qui se void en peu de maisons roiales. Il y a aussy huit grandes galeries et plusieurs belles et somptueuses sales. Entre autres il s'en y void une qui contient cent trente-cinq pieds de longueur, cinquante de largeur et trente de hault (1); la voulte de ceste sale est faitte en berceau lambrissé et peint richement par tout, là où on peut


  (1) Ces dimensions sont aussi celles que La Ruelle donne à la salle d'Honneur (salle Neuve).


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commodement combattre à la picque et à toutes autres sortes d'armes, à pied.

» Ce qui manque à ce Palais est qu'il a faute de parade et de place en sa principale entrée , estant couvert par les maisons de la ville, desquelles si on en avoit abattu à proportion de sa quarrure, ce seroit un des beaux Palais du monde.

» Au prospect dudict Palais, entre levant et midy, se voit une place (la Carrière) , longue de trois cent pas communs, et large de plus de soixante , qui est bordée en sa longueur de maisons tellement egales de frontispice qu'elles semblent n'estre qu'un seul hostel. Là sont les escuieries du Duc toutes voultées, et s'y peuvent fort commodement dresser et domter ses chevaux. Là se font aujourd'huy (1617) fort commodement les joustes, tournois et courses de bague. »

Tel était le Palais Ducal sous le règne d'Henri II, c'est-àdire à l'époque de sa plus grande splendeur. Suivant l'auteur de la Dissertation historique sur Nancy, ce prince y fit faire le Rond, où étaient les riches tapisseries et autres meubles de la Maison, y fit conduire les fontaines du parterre d'en bas et mettre les statues.

Je crois avoir démontré, par les notes nombreuses précédemment reproduites, que la construction du Rond remonte à une époque plus éloignée que le règne du successeur de Charles III, et que, depuis longtemps, il servait à renfermer les meubles précieux du Palais, notamment les magnifiques tapisseries dont on tendait les appartements les jours de grandes cérémonies. D'ailleurs , aucune mention des dépenses faites par le duc Henri, ne concerne l'érection de cette superbe tour, qui dut coûter cependant des sommes considérables.

En revanche , comme on le verra bientôt, l'assertion de


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l'historien que je viens de citer, est vraie en ce qui concerne les statues de la rampe du parterre.

En 1609, Henri II fit faire, « au-devant de son cabinet, » sans doute dans une des cours de l'hôtel, « une carrière pour courir la bague et piquer les chevaux. » La même année , des comédiens donnèrent une représentation dans la salle St.-Georges (1). Un nommé Marceloffe, meunier à Bitche, fut admis à présenter au duc « un orloge en bois de sa façon, » qu'on lui acheta et qui fut placé dans une salle du Palais.

En 1610, on érigea « une maison aux fourrières devant le quartier de Msr de Vaudémont, pour le jardinier de l'hôtel. » Les dépenses de cette construction s'élevèrent à la somme de 2,908 francs b gros, sur les lesquels 1621 francs furent délivrés à l'architecte Nicolas La Hierre « pour la maçonnerie qu'il avait fait faire audit bâtiment, savoir : une porte ronde neuve mise en une petite muraille pour séparer lesdites maison et fourrière contre le Rond où sont les meubles de Son Altesse. » Le logement du jardinier était donc, comme l'indique cette note, contigu au garde-meuble. A cette époque, le sculpteur Jessé Drouin fit quelques travaux dans le cabinet de la Duchesse (2).

Des ouvrages considérables furent faits, en 1611 , par Jacques Bellange, à la salle Neuve (3) et à la galerie neuve


  (1) Il y en eut également en 1610 et 1611.

  (2) A Mr Jesse (ou Jessé) Drouin, sculpteur demeurant à Nancy, dix francs pour avoir desposé ung oratoire de pierre de marbre ou de couleur, du commandement de Madame , qu'estoit en son cabinet. (Comptes du Celleier pour 1610.)

  (3) Le comptable met en despence sur le trésorier général la somme de 900 francs que le comptable auroit délivré l'an dernier au sieur Belange sur les peintures qu'il fait en la neuve salle du château. (Comptes du Cellerier pour 1611.)La salle dont il est ici fait mention, ne doit pas être confondue avec celle à laquelle on donnait précédemment le nom de salle Neuve, car elle est appelée quelquefois la salle neuve sur la rue Neuve. (Payé 17 fr. à un charbonnier à qui le serviteur du sieur Belange avoit acheté deux chaffes de charbons pour bruler pendant l'hiver en la salle neuve qu'il peint sur la rue Neuve en l'hostel de S. A.) Il est probable qu'elle était située dans le corps-de-logis donnant sur le jardin , du côté de la Carrière, et dans le voisinage de la galerie neuve, que Bellange décora aussi de peintures en 1611.


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sur le jardin; il enrichit les corniches et moulures de cette galerie d'arabesques et autres fantaisies, et représenta sur les lambris « les histoires de la métamorphose d'Ovide. (1) » La même année, on posa, dans la galerie des Peintures, « un orloge de la sorte et façon de celui qui est au temple de Strasbourg (2), » et Gille de Lisle, ingénieur et mathématicien, cimenta « de ciment à feu ou mastic, » l'un des réservoirs du Palais (3).


  (1) A Jacques de Bellange, peintre à S. A., 4,000 fr. qui luy sont esté accordés pour peindre en huille tout du long du lambris du plancher de la gallerie neuve sur le jardin de l'hostel de Nancy , y representer les histoires du la methamorfoze d'Ovide, enrichir les corniches et molures de moresques et autres fantaisies. (Comptes du Trésorier général pour 1611.)

  (2) A Isaac Habrecht, orlogier demeurant à Strasbourg , la somme de 1,250 fr. pour un orloge de la sorte et façon de celuy qu'est au temple dudit Strasbourg, et mis en la gallerie des peintures du chateau de Nancy. {Idem.)

  (3) A Gille de Lisle, ingénieur et matématicien demeurant à Nancy, 300 fr. pour avoir cimenté de ciment à feu ou mastic l'un des reservoirs de la Court... Ledit de Lisle s'est obligé et a promis d'entretenir ledit reservoir, en ce qu'il a fait, par l'espace de dix ans qu'il prelend demeurer en Lorraine et plus sy ledit reservoir se creve, d'autant que le pavé du dessus n'est cimenté ny aultrement assuré. (Comptes du Cellerier pour 1611.) — En 1615, on établit deux pompes au puits du jardin, selon l'invention qu'en avait faite cet ingénieur.


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Les comptes de 1612 ne font mention d'aucun ouvrage exécuté au Palais; le duc Henri s'occupait alors à faire ajouter de nouveaux bâtiments au château de Lunéville, et il chargeait un nommé Jean Lyot, dit de Tassy, « Me architccq (1) et tailleur de pierre, » de lui dresser, à cet effet, plusieurs plans parmi lesquels il pût choisir celui qui lui conviendrait le mieux.

En 1613, on construisit, derrière les Cordeliers, « joignant les neuves fourrières de l'hôtel, » un bâtiment pour y mettre les carrosses de la cour; Jean Francequin (2), marbrier à la Ville-Neuve, fit une cheminée de marbre noir pour le cabinet de la duchesse, lequel il pava, l'année suivante, en carreaux de marbre noir, tiré, par moitié des Pays-Bas, et par moitié de la côte Ste.-Catherine.

Il y eut, en 1614, un combat à la barrière dans la salle St.-Georges, dont on fut obligé de « couper la traveure » pour donner passage aux machines qui figuraient dans ces sortes de spectacles.

On commença à travailler, vers la même époque, à l'un des ouvrages d'art qui contribuèrent le plus à l'embellissement du Palais Ducal : je veux parler des statues de la rampe du Parterre. En 1616, marché fut passé, parle grand maître de l'hôtel, avec Siméon Drouin, pour, dans l'espace de deux ans et moyennant la somme de 2,300 francs, « tailler, mettre et poser au jardin derrière l'hôtel quatorze statues de


  (1) C'est la première fois que cette qualification est employée. »'

  (2) Jean Francequin ou Francisquin exécuta, à la même époque, conjointement avec le sculpteur Jean de Tremont, diverses u pieces d'ouvrages d'architecture et sculpture » dans l'église des Minimes de Nancy. (Comptes du Trésorier général pour 1613.)


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pierre, ayant chacune sept pieds et demi de hauteur, avec leurs niches et pieds d'estalz convenables (1). »

Ces statues n'étaient donc pas, comme on l'a cru longtemps, l'œuvre de Florent Drouin, mais peut-être du frère de cet artiste, que « [[A pour auteur cité » contient un caractère désigné « [ » dans un libellé de propriété, et a été classé conséquemment comme non valide. appelle Simon, et qui sculpta (1630), pour l'église des Carmes, un magnifique autel dans la chapelle où était inhumé Elysée d'Haraucourt, gouverneur de Nancy. Elles n'avaient pas non plus, comme le dit l'historien de cette ville, élé commandées à Drouin par Charles III; c'est bien au duc Henri qu'il faut reporter cet honneur (2). Suivant Lionnois, ces statues représentaient les principales divinités de la fable. Lorsque Stanislas eût fait démolir le Palais commencé sur la Carrière par Léopold, d'après les dessins de Boffrand, ces beaux morceaux de sculpture, que rien ne protégeait, furent mutilés par les enfants et tombèrent bientôt en ruines; on les employa alors comme du moellon dans les fondations du bâtiment de l'Intendance. Ainsi, ces chefs-d'œuvre d'un artiste lorrain allèrent, avec tant d'autres chefs-d'œuvre qui décoraient le Palais Ducal et la collégiale St.-Georges, servir de matériaux à des constructions nouvelles, qu'ils auraient pu, qu'ils auraient dû être appelés à embellir (3)!...


  (1) Comptes du Trésorier général pour 1616.

  (2) Je dois ajouter, toutefois, que ces statues sont figurées sur le plan de Nancy , dressé en 1611. Peut-être les niches étaient-elles déjà construites à cette époque , et La Ruelle crut-il pouvoir y mettre les statues qu'on se proposait d'y placer ?

  (3) C'est dans l'intérieur même du Palais, u sous la galerie neuve du jardin, u où on lui avait arrangé un atelier, que Siméon Drouin tailla ses statues. Henri II voulait, sans doute, pouvoir suivre des yeux le travail de son u sculpteur ou tailleur de statues de pierre en bosse ronde. n


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Dans le courant de cette même année 1616 , il y eut, à la cour, un ballet dont Bellange peignit les machines; on plaça, dans la galerie des Peintures (1), deux portraits des princes, faits par Claude Cheveneau, peintre à Nancy, et l'horloger Charles Desrué fit différents ouvrages de son art à l'horloge du Palais.

En 1617, Nicolas et Jean Ferry, potiers de terre, demeurant à Vie, dressèrent, dans le petit cabinet de la duchesse, « un fourneau deterre blanche peincturée, avec ses colonnes, corniches, armes de Son Altesse et de Madame et autres enrichissements. » Ce fourneau était supporté par quatre petits pilliers de pierre de taille, qui avaient été faits, fournis et posés par un tailleur de pierres de Nancy, nommé Jean Maillard. Différents tableaux furent achetés, cette année, sans doute pour en décorer la galerie des Peintures, à Claude Libal, « imagier » ou « marchand de pourtraitz peintz et en taille doulce. »


  (1) C'est probablement dans cette galerie, véritable musée ducal, que furent placés différents tableaux que le comte de Vaudémont avait achetés l'année précédente, savoir: le portrait à mi-corps de ce prince et deux figures de fantaisie , l'une d'un vieillard, l'autre d'une vieille, faits par Thiéry Vignolles, peintre à Nancy.— «Trois tableaux d'enlumineure sur parchemin vélin, u représentant les figures d'Apollon, de Bacchus et de Mercure, ouvrage de Pompée de Bouzey, peintre à Nancy. — Un grand tableau u auquel est peinte l'histoire du triumvirat , M acheté à M. de Cescaud, secrétaire du Roi.— Un tableau n auquel est peinte la Nativité de Notre Seigneur sur une lame d'argent, enrichi d'ébéne à l'enlour, u acheté à la veuve de Jean Parmentier, de Nancy.—Deux autres tableaux représentant u l'embrasement de la ville de Troyc et le jugement de Midas, n achetés à la veuve de M. Bonnet, secrétaire des commandements. — Enfin, Jean de St.-Paul, peintre à Nancy, avait fait aussi, pour le comte de Vaudémont, un arbre de ligne de la maison de Salin. (Comptes de la Hutterie , trésorier et receveur général des finances du comle de Vaudémont, pour l'année 1615.)


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En 1618, le cardinal de Guise, ainsi que les ducs d'Epernon et de Croy, étaient au Palais Ducal: on y refit à neuf la vieille galerie de bois allant du quartier de M*r de Vaudémont au jardin ; on disposa un petit parterre à fleurs dans le jardin du bastion des Dames, et plusieurs travaux de menuiserie furent exécutés « au grand cabinet de Madame, sous la Galerie des Cerfs (1), » dans lequel on mit une grande armoire de chêne.

Suivant M. Noël (2), la galerie qui régnait sous celle des Cerfs, était, dans l'origine , « un vaste estaichier, espèce d'écurie où l'on attachait les palefrois des personnes reçues à la cour. » Cette écurie recevait le jour par la galerie qui lui élait contiguë, donnant sur la cour, et non par la rue, comme aujourd'hui, car, ainsi qu'on le voit sur la gravure de Deruot, des boutiques, ou plutôt des échoppes, garnissaient complètement toute la façade du Palais sur la Grande-Rue. Si la galerie dont il vient d'être parlé, et qui sert aujourd'hui de magasin à la ville, eut jamais la destination que lui attribue M. Noël, il est certain que cette destination était déjà changée en 1618. A l'avènement de Léopold, cette partie du Palais était occupée par les logements du portier, du concierge, et par des chambres pour les officiers de l'hôtel.

En 1619, on répara les théâtres de la salle Neuve et de la salle St.-Georges; on travailla encore au cabinet de Madame, sous la Galerie des Cerfs, et le duc fit lambrisser une bibliothèque qu'il avait commandé lui être accommodée en son bâtiment neuf du Château. Le bâtiment dont il est ici parlé ,


  (1) Comptes du Cellerier pour 1618.

  (2) Lettre publiée dans le Patriote de la Meurthe, du 19 juin 1841.


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était situe du côté de la Carrière, près du jeu de paume (1), et c'est dans son intérieur que se .trouvait la salle Neuve peinte par Bellange.

On fit, en 1620, diverses réparations, dont la dépense s'éleva à 3,032 francs 3 gros 8 deniers, à l'occasion de la venue de l'archiduc Léopold, de l'évèque de Verdun, des ducs de Croy , d'Angouléme, de Bélhune , et de M. du Préau , ambassadeur de France.

Les comptes des années suivantes ne renferment aucune particularité qui mérite d'être mentionnée; on y voit seulement qu'en 1622, les Etats se tinrent dans la salle St.-Georges, et que les appartements occupés par le prince de Phalsbourg (1623) étaient placés vis-à-vis la rue St.-Michel.

En 1624, un combat à la barrière eut lieu dans la Grande salle Neuve, et l'on représenta une comédie dans l'antichambre de Madame; une loge fut construite au jardin, « pour resserrer les orangers, lauriers et genêts d'Espagne; » enfin, plusieurs artistes, parmi lesquels Rémond Constant, Chrétien Guenaire, Deruet et Nicolas Chuppin, furent employés à différents ouvrages de peinture, de peu d'importance.

L'année 1624, qui avait commencé par des fêtes, ne s'était pas écoulée qu'Henri H descendait dans la tombe , emportant les regrets de tout son peuple. Ce prince, à l'exemple de Charles III, s'était plu à embellir sa résidence (2); de même que son illustre prédécesseur , il avait attiré,


  (1) On l'appelle quelquefois (1627) u le neuf quartier regardant sur le tripot, n

  (2) Les dépenses u pour bastimens, refections et autres ouvrages faits an cbasteau, n de 1609 à 1624, inclusivement, s'élevèrent à la somme de 60,908 francs un gros, non compris les parties de recouvreurs, briquiers, paveurs, de marchands de chaux et de sable, les achats de meubles et autres parties. Cette somme se répartit, par année, de la manière suivante : 1609, £,372 fr. 5 g. 4 d. — 1610, 1,883 fr. 12 d. — 1611, 1,798 fr. 3 g. i d. — (L'année 1612 manque.) —1613, 3,855 fr. — 1614, 5,703 fr. U d. — 1615, 3,291 fr. 6 g. 6 d. — 1616, 3,152 fr. 11 g. — 1617, 5,412 fr. i g. 12 d. — 1618, 2,818 fr. 5 g. 4 d. — 1619, 3,265 fr. 3 g. 8 d. — 1620, 3,052 fr. 5 g. 8 d. — 1621, 5,389 fr. 7 g. 11 d. — 1622, 1,59.4 fr. d g. i d. — 1623, 3,231 fr. 13 d. — 1624, 10,844 fr. 5 g. 4 d. (Comptes du Cellerier de Nancy.)


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par ses bienfaits , de nombreux artistes à sa cour : on y vit, outre les trois Drouin , les sculpteurs Jean Rjclncr, Didier Michel et Jean de Tremont; les architectes Nicolas La Hierre, Didier Desjardins et Jean de Tassy; les graveurs Alexandre Vallée et Demange Crocq; les fondeurs Antoine (1) et David Challigny; les peintres Thiéry Vignolcs, Jean de St.-Paul, Claude Cheveneau, Pompey de Bouzey, Rémond Constant, Claude Deruet, et, enfin, l'immortel calcographe Jacques Callot (2), dont la gloire suffirait à l'illustration de sa patrie.


  (1) Je crois devoir reproduire ici deux mentions, qui, bien qu'étrangères à l'histoire du Palais Ducal, sont intéressantes à cause des artistes qu'elles concernent : u A Antoine Challigny, fondeur, 80 fr. pour un benoisiier avec sa chaîne et guepillon de cuivre, enrichis des ouvrages de relief, mis et attaché contre un des pilliers de la chapelle sepulcrale de feue S. A., pour jeter de l'eau benite sur le caveau dans lequel son corps repose, H

  (2) A Jacques Callot, tailleur de taille doulce en eau forte, 40 fr. pour avoir fourni deux planches de cuivre, et sur chacune d'icelles taillé une inscription latine faite et dressée par le sieur de La Ruelle, secrétaire d'état, contenant les an, jour et heure que le feu duc Henry 2e du nom est decedé, ensemble les ans, mois et jours qu'il a vecu et regné, avec un eloge à sa louange, l'une des dites planches de cuivre ayant été soudée contre le cercueil de plomb et l'autre clouée contre le cercueil de bois de feue S. A., pour servir de memoire à la posterité. (Comptes du Trésorier général pour 1624.)

On trouve, dans les mêmes comptes, sous la date de 1626, la mention suivante : » A Jacques Callot, sculpteur en taille douce, 2,000 fr. que S. A., par effets de sa liberalité, lui a octroyé en don pour lui donner moyen de continuer sa demeure dans ses pays où il aurait esté arrcsté par feue S. A. u


Notes complémentaires

Concernant la wikification du texte
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