La musique en Lorraine (1882) Jacquot/Chapitre II

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La musique en Lorraine
I - II - III - IV - V - VI - VII - VIII - IX -- (lutherie)

CHAPITRE II

XVIe SIÈCLE. — ANTOINE, DUC DE LORRAINE, 1508- 1544. — INSTRUMENTS. — COSTUMES DE MUSICIENS DE LA COUR. — REBECS ET VIOLES. — HAUTBOIS FLUTES, TROMPES DE CHASSE. — CHANTRES, CHANTEURS ET COMPOSITEURS. — MYSTÈRES. — DANSES ET FÊTES AU PALAIS DUCAL.

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Chapitre II


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Les renseignements sur la musique sont encore plus intéressants sous le règne d'Antoine, fils et successeur de René II, que pendant les deux précédents.

ANTOINE, DUC DE LORRAINE, 1508- 1544

Antoine eut, à la cour de son père, toutes les occasions de se faire une éducation musicale, si nous pouvons nous servir de cette expression pour désigner un art naissant à cette époque.

Il maintint les mêmes musiciens dans leurs emplois, et en accrut le nombre. Comme René, il alla plusieurs fois en Italie, assistant, en 1509, à côté de Louis XII, à la bataille d'Agnadel, où il combattit vaillamment, et rap- porta de ce pays en revenant en Lorraine, en 1511, des idées de grandeur artistique qu'il appliqua aux beaux- arts de son duché. On sait qu'il fit construire la vaste galerie des Cerfs, au palais ducal, et la Porterie, qui existent encore de nos jours .

Instruments

Mentionnons les instruments dont on se servit sous ce règne.

Le rebecq se jouait avec l'archet, comme la viole et


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le violon, mais il avait une forme particulière ; il est évident que le nom de rebecq de Monseigneur, mentionné dans les comptes, s'applique plutôt à l'exécutant qu'à l'instrument même, qui tend déjà à disparaître, mais dont le nom, comme nous l'avons fait remarquer à propos du psautier de René II, est encore maintenu pour désigner l'instrumentiste, puisque c'est une vièle qui est alors en usage.

Cette vièle est la seconde transformation progressive qui a été expliquée dans le premier chapitre, mais qu'il convient de rapporter ici pour plus de précision : premièrement rebec, secondement vièle, troisièmement viole, et quatrièmement violon.

Les gages des joueurs de rebec s'élevaient ordinairement à vingt-deux florins et demi.

« Au rebecq pour ses gaïges »; mandement daté de 1509 1. La livrée de ces musiciens était semblable à celle qui est indiquée pour les tabourins, toujours aux couleurs de la maison de "Lorraine. Le rebecq favori du duc Antoine se nommait Guillaume Baudet; il jouissait des faveurs du souverain et possédait une certaine fortune, puisqu'en 1514 il acheta une maison à Nancy.

Le duc de Nemours avait aussi son rebecq, qui fut récompensé par le duc de Lorraine 2. Une autre gratification fut faite, en 1510, « à ung tabourin, ung joueur d'orgues et ung rebecq qui ont sonné devant Monseigneur, à Grenoble, pendant son souppé3 ». Semblable somme est mentionnée aux Archives pour « Richard, rebecq de Monsieur le connestable de Bourbon »; 1521.

Guillaume Baudet remplit la charge de rebec de 1509


(1) Archives} B. 1012.
(2) Ibid.
(3) Ibid. 1016


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à 1526; nous voyons son nom jusqu'à cette époque; mais, en 1527, on remarque des sommes données à « deux


Fig. 11. — Portail de la basilique Saint-Nicolas-du-Port

jeunes compaignons, l'un g joueur de tabourin, l'autre de rebecq, que le sainturier avait amenés de Paris 1 ».

Jusqu'en 1528, les joueurs de rebecs et de vièles se servaient de ces instruments ; les violes furent apportées pour la première fois en 1529. En voici la preuve :


(1) Archives; B. 1037.


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« A Jacques le Vel, VIOLLEUR, pour quatre VIOLLES, que Monseigneur luy a fait apporter de Paris. 1 »

Le luth était employé avec succès, à cette époque (fig. 13); c'était un nommé Loys Ogier qui jouait le plus souvent de cet instrument; il remplit son emploi à la cour de 1517 à 1538, et obtint, en 1523, le titre de maître joueur de luth du duc 2. Ce musicien acheta, lui aussi, une maison ; le prince lui fit don de cinquante francs, en l'année 15 ig, « pour ayder à payer sa maison ». Dans un voyage que fit Antoine, en 1 510, il donna une somme d'argent « à un g petit enfant joueur de luth qui a joué pendant le diné de Monseigneur à Blois ».

Mentionnons aussi un fait très curieux :

En 1528, somme payée « à Madame la duchesse (Renée de Bourbon, sœur du Connétable) pour une popine qui joue du luth » ; le mot popine veut dire une petite fille qui joue du luth.

Nous remarquons aussi sous ce règne l'emploi très fréquent de la harpe (fig. 14). Le « harpeur » le plus connu fut Pierre de Waldouche, en 1521.

Ce qui nous fait supposer que le duc Antoine jouait de cet instrument c'est la mention suivante :

En 1 S10, « Robert, Irrasseur, pour une lyrasse (lyre) qu'il a donné à Monseigneur » 3 ; nous avons expliqué dans le premier chapitre que la lyre et la harpe étaient le même instrument, la différence n'existant que dans la manière de le jouer.

Les ménétriers de la prévôté de Sierck formaient une confrérie en 1513.



(1) Archives. B. 1041.
(2) Ibid. 5260.


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Une cérémonie religieuse se perpétua pendant long- temps en Lorraine : ce fut le service, suivi d'une messe en musique, qui avait lieu à la collégiale Saint-Georges, fondé par René II en l'honneur de son patron.

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I ig. If. — Portail de la basilique Saint-Nicolas-Ju-Port.

Hautbois, flutes, troupes de chasse

Le hautbois servait pour jouer pendant les repas et pour régler les danses.

En 1509, somme payée « aux joueurs de haultz-boys, qui ont joue pendant le souppé de Monseigneur »((. En 1508, « aux haultz-boys qui ont joué devant Monseigneur au lieu


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de Germiny ». En 1510, « aux joueurs de haultz-boys du roy, qui ont joué des Choses Saintes au disné de Monseigneur » 1

Les principaux joueurs de hautbois, sous le règne d'Antoine, étaient :

  • Loys (1528) ;
  • Pierron, à qui ce prince donna un cheval, en 1528, et 100 francs dans la même année « pour ayder à faire ses nopces » ;
  • Pierre Leconte ;
  • Louis du Boys (15 26) ;
  • Robert Mengin et Jacques de Saint-Laner en 1531.

En 1526, 30 écus d'or furent donnés « aux haultz-boys de Monseigneur pour ayder à leur entrelennement 2. A un joueur de hault{ boys, demeurant à Metî, dix-huit francs, pour certains instruments que Monseigneur a fait prendre de luy » . On faisait venir de Metz presque tous les instruments nécessaires à l'entretien de la musique.

En 1536, somme donnée « pour les hault'{-boys de Toul qui allèrent jouer à Gondreville» 3 ; un de ces joueurs de haut- bois, Mengin, fut chargé, en 1534, par le duc, d'acheter quatre violons, qui, à cette époque, n'étaient pas coûteux (ils ne se payaient que trois francs chacun) 1 ; Jean de Bar et Picquart furent hautboys « de la chapelle », en 1534; Pierrot en 1535, ainsi que Pierre Colliquet, en 1537.

Le duc Antoine était très familier avec ses lnusi- ciens. En 1542, il perdit une somme d'argent, en « jouant à la paulme avec son hautz-boys et son organiste » 5.

Les principaux organistes connus sous ce règne furent Jehan de Sermaize (dont la sœur Jehanne était sœur de lait du duc) ; il était en même temps facteur d'orgues


(1) Archives. B. 1016.
(2) Ibid. B. 1041
(3) Ibid. B. 6:67
(4) Ibid. B. 1056
(5) Ibid. B. 1072


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et organiste de Saint-Georges, car il reçut six écus d'or soleil pour la réfection des orgues des Cordeliers de Neufchâteau, en 1521. Il eut un frère, nommé Jehan de Sermaize, le jeune, qui, lui aussi, fut organiste, et se maria

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en 1521; il reçut soixante francs « pour aider à ses nopces ». Une somme est donnée, en i io, « à tuig bonhomme^ qui a charroyé les orgues de Bar à Nancy »,

La rote ou vielle à manivelle, qu'il ne faut pas confondre avec la vielle à archet, fut en grand usage ; la figure no 15 montre un personnage sculpté au portail de


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l'église Saint-Nicolas du Port, jouant de cet instrument.

L'année suivante, on apporta à la cour, et par les ordres d'Antoine, un instrument très curieux, se composant d'un jeu d'échiquier, d'orgues, d'épinettes et de flûtes: « A Loys Rodilli, organiste, la somme de trente escu{ d'or soleil que Monseigneur le duc luj'a ordonné pour l'achast d'un instrument que Monseigneur a prins de luy, faisant archi- quier, orguesj espinettes et fluttes. 1) Ce mandement fut donné à Valence, le 24 juillet 15 i i \ Ce Loys Rodilli semblerait être le facteur de ce singulier instrument. Pierre Le Roux fut organiste du duc en 1520; il fit un voyage à Paris pour se perfectionner dans l'art musical. Ce voyage eut lieu en 1521 et lui fut payé par le duc. Il remplaça Jehan de Sermaize pendant une maladie de ce dernier en il était également chantre de la chapelle en 1529 ; l'année suivante, il reçut 20 francs pour une « êpinette » qu'il présenta au prince.

Une double épinette fut apportée par ordre d'Antoine à la cour.

En 1521, « à messire Humbert, prebtre, demeurant à Met" trente-huit francs pour une espinette double, que Mon- seigneur a fait prendre de luy pour mettre en sa chambre » - En 1 S, 5, le chapitre de la collégiale Saint-Georges commandait à un nommé Vendrequin de grosses et de petites orgues pour son église.

Pierre Le Roux, dont nous avons déjà parlé, fut remplacé par Bertrand Mittat, qui obtint le titre d'organiste de Monseigneur, et fut anobli en 153).

En continuant la nomenclature des organistes, nous trouvons : Mathieu de Nlilleville, organiste de M. le Inarquis (on désignait sous ce nom le fils aîné du duc de


(1) J. Archives. B. ioi6.


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Lorraine, comme le Dauphin, en France) ; Loys Fres- selis, en 1540; messire Dominique, en 1543,

Les flûtes étaient souvent employées à la cour.

En 15 15, une somme est donnée « aux joueurs de flûte de Dieu'{e 1 ». Parmi les noms des joueurs de flûte de cette époque, on remarque: Jehan Jacquot ( 1521 ). Les joueurs de flûte à bec étaient aussi tabourins, c'est-à-dire qu'ils jouaient, comme nous l'avons déjà dit dans le cha- pitre précédent, de ces deux instruments à la fois ; d'une main ils frappaient le tambour et de l'autre tenaient la flûte à bec ; ainsi, on voit ce même Jehan Jacquot, désigné sous le nom de tabourin en 1521 (mêlne année), recevoir douze francs « pour ayder à la despense de deux petits ta- bou rills qu'il a en garde ». En 1526, à Michelet, joueur de fluttes, serviteur de M. le cardinal de Lorraine, dix escu% d'or soleil que Monseigneur lui a ordonné pour et en récom- pense du passe-temps que ledit Michelet luy a faict pendant le séjour de Monseigneur le cardinal à Nancy 2 ».

Nous ne connaissons que le nom d'un seul joueur de musette sous le règne d'Antoine : c'est en 1510 qu'une somme fut donnée à un de ces instrumentistes qui joua devant le duc.

La place de tabourin était une des plus importantes parmi celles des musiciens de l'hôtel. Leur costume était semblable à celui des tabourins du siècle précédent, à l'exception du bonnet, qui se nommait « bonnet de milan simple ».

Les tambours étaient achetés à Metz en 1509, et il y avait des « petits tabourins » sous les ordres d'un « maître tabourin » ; le duc et la duchesse en avaient chacun un.


(1) Archives} B. 1021.

2. Ibid. B. 1037.


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En 1510, Gaspart était celui de « la Royne de Sicile ». (La duchesse de Lorraine.)

La même année, une somme fut donnée, lors d'un voyage d'Antoine, « aux tabourins de Beaune », qui jouèrent devant lui ; même largesse fut faite, à Romant, à Va- lence, à trois tabourins bourbonnais, ainsi qu'à celui qui joua pendant le souper à Grenoble.

Le lever ducal se faisait au son de cet instrument (1510). « A lvlichelet, tabourin, et à son compaignon (proba- blement un hautbois), qui ont sonné pendant le lever de Monseigneur » • singulière coutume, qui devait réveiller le duc en sursaut! Une semblable sérénade, agrémentée de chanteurs, avait lieu aux repas d'Antoine.

1 5 1 O. «A Paule et à son compaignon, accompaigné du tabourin de la Royne, qui ont joué au diS1lé de Monseigneur. »

On fit venir des tabourins d'Allemagne en 1514: Vingt-six francs « à deux compaignolls pour aller par les Allemaignes chercher des joueurs de tabourin 1 ».

La qualification de grand joueur de tabourin était le plus haut titre des musiciens 2.

En 1517, Thomas était frappeur de tabourin; l'année suivante, Thomas et Jean Carot exerçaient tous deux ces fonctions ; il paraît que le premier avait beaucoup de dettes, car le duc l'aida deux fois à les payer, et ce n'est pas surprenant, la peste ayant fait de grands ravages à Nancy, comme la note suivante l'indique :

« A Ph illebert, tabourin, deux francs, en considération du passe-temps qu'il a baillé à ceux qui ont demeuré audict Nancy pendant le dangier de peste. J)

Comme nous l'avons dit, Jehan Jacquot était joueur de flûte et tabourin.


(1) Archives; B. 1020.

2. lbid. ■—


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Pierre Ripvière, qui jouait aussi du hautbois, suc- céda, en 1523, à Gaspard comme tabourin de la duchesse, et obtint une pension en 1530.

On commença, en 1526, à réparer les instruments de musique, à Nancy; il est vrai que ce n'étaient que les tam- bours ; c'est un orfèvre nommé Jehan Bertri^et qui fut chargé de cet ouvrage 1.

La trompette paraît tenir aussi une grande place à la cour de Lorraine ; elle était ornée des armes des ducs ; on peut le voir sur la miniature du psautier de René II, au frontispice de l'ouvrage.

Antoine donna, en 1^09, une somme d'argent aux six trompettes du roi. Même somme fut donnée aux trom- pettes « qui ont joué pendant le soupé de Monseigneur 2 ; pendant le diS1lé à Bai- ; aux trompettes de M. de la Tré- mouille, qui ont sonné devant Monseigneur pendant son souppé et luy ont présenté un rameau chargé de cailles ».

A la réception de Renée de Bourbon, épouse du duc Antoine, au palais ducal, « trompettes et clirons, tous ins- trumens du long du souppé sonnoient ; toute la noblesse de la venue s'en réjouissoit. Après qu'ils eurent souppé, relldict grâces à Dieu, se mirent à dancer ».3

Parmi les trompettes des ducs de Lorraine, il faut citer : Pierre Bataine, 1517; Nicolas de Pont, 1537: Guil- laume Soldait, anobli par Antoine en 1541, et enfin Didier Doulcet, 1543.

En 1510 et 1517, des trompes de chasse avaient été commandées à des facteurs de Lyon et de Sedan, qui étaient connus pour la bonne fabrication de ces instru- ments. Antoine en jouait souvent.


(1) Archives. B. 1037.

2. Ibid. B. 1012.

3. Hist. de Sancy. Lionnois.

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En 1530, trois francs sont payés à « Jehan l'mièvre pour rabiller la trompe de Monseigneur ».

A l'issue du festin, pour annoncer que l'assemblée quittait la table, on agitait des sonnettes : « Aux bat- teurs de sonnettes après souper en salle » 1.

On désignait aussi bien par le nom de chanteurs les chantres de la chapelle que ceux qui faisaient partie de la musique de la chambre.

En i 5oq, (l à ung chantre qui a chanté devant Mon- seigneur ».

En 1 S 10, François Gennetel, dit le Messin, est « chantre en la chapelle ».

Il paraît que ces artistes étaient altérés, après l'exé- cution de leurs chants :

« A Pierrequin3 chantre, deux florins, que Monseigneur lujr a donnés et à ung de ses compaignons, chanteur, pour boire. »

La dénomination était différente pour les femmes : 1510. « A Colette, chanteresse, pour avoir chanté en ' la présence de Monseigneur, à Lyon.

COSTUMES DE MUSICIENS DE LA COUR.

Une curieuse coutume existait à la cour de Lorraine, ou du moins à la collégiale Saint-Georges : le jour de la Sainte-Cécile, on faisait une distribution de « petits pas- teli aux enfants de cueur de Saint-Georges 2 ». Ce devait être singulier de voir accourir cette foule d'enfants, avec leurs costumes de couleurs éclatantes, se pressant pour avoir leur part du régal annoncé.

Autre temps, autres mœurs.

Messire Girard Maillette était chantre et vicaire en

1514 ; il mourut en 1525.

Pierrequin de Thérache, dont nous avons déjà parlé

1. Archives} B. 1016.

2. Ibid. B. 1018.


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sous René II, et qui conserva sa charge jusqu'en 15 Z7, était « maître des enfants de la chapelle de Monseigneur en l'église collégiale Saint-Georges 1 ».

Les gages des chantres de cette église s'élevaient à quatre-vingt-seize francs par an, ce qui était bien payé à l'époque.

En 11514, cent quatre-vingt-douze francs sont délivrés pour les gages de Jehan le Plat et Jehan Willebrot,

« chantres de Saint-Georges ».

En 15 2o, nous remarquons les noms suivants : Guy, maître de la chapelle; Jehan Morant, chantre; Noël de Rulers, haute-contre ; Corenille, dessus.

Le duc Antoine aimait beaucoup le chant.

En 1520, « à deux compaignons-chantres de Monsei- gneur le cardinal de Lorraine, vingt escui d'or soleil que Monseigneur le duc leur a ordonnés pour aider à leurs des- penses en considération du passe-temps qu'ils ont fait à Mon- seigneur le duc M.

Lespine fut chantre de la chapelle en 1521 ; cette même année, Jehan Robillon, vicaire de Saint-Georges, et Laurent Thouvenot, mort en 1525, furent chantres ; messire Loys Jacques, natif de Rosières, ténoriste de la chapelle; messires Crestien Friart, Florentin Friart, tous deux prêtres et chantres ; Dydier Audroyn, chanoine et - chantre ; Jehan Pellet, Jehan Pattio, chantres; messire Nicole Lestoq, clerc de chapelle.

Les maîtres de chapelle recevaient des ducs, pour l'éducation musicale et l'entretien de chaque enfant de chœur, la somme de soixante francs par an, et ils avaient sur ladite somme douze gros de bénéfice pour eux 2. Ces

1. Archives} B. 1019.

2. Ibid. B. 1027.


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enfants étaient, au surplus, habillés aux frais des ducs ; leurs costumes étaient de drap 1.

Tous les chantres touchaient à peu près la même somme. Laurent Thouvenot avait quarante francs par an, ainsi que Gérard Maillette.

Le chantre de la cathédrale de Toul recevait cin- quante francs pour ses gages.

En 1526, on trouve comme chantres : Pierre de la Ruelle, dessinateur et basse-contre 5 maître Loys Lom- bard, Jehan Geoffroy, Bartholomeo, Jehan Renault, té- noriste de la chapelle; Jehan Rouyer et Christophe Hu- bert, prêtres et chantres ; Charles de la Court, chantre, qui reçut, en 15 28, trente francs « pour soy accoustrer »; maître Bastien, Jehan Liegeoys, chantres.

Un nommé Jehan de Bar, jadis enfant de chœur à la chapelle, devint chantre dans la même chapelle. Mathieu Lasson fut nommé, en 1530, maître des enfants de chœur; il fit un voyage en France avec le duc Antoine. Charlot, chanrre, mourut en 1530.

Le prince retenait d'avance les chantres de sa cha- pelle :

En 1530, « Monseigneur a de nouveau retenu pour chantre et ténoriste, en la chapelle de feu M. le duc Charles2, un appelé « me s sire Christophle Masson, vicairre en ladite chapelle; Florentin Fiacre, pretre, chantre en ladite cha- Telle ». Pierre Le Roux fut chantre et joueur d'orgues.

On se servait aussi, à cette époque, de livres de mu- sique à la chapelle des ducs. En 1552, sommes payées « à un g compaignon qui a faici trois livres de musique pour la chapelle, assavoir l'un desdits livres où sont plusieurs messes, l'autre les mottes et Vautre le magnificat et les heures,

1. Archives. B. 1033.

2. Charles II.


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tant pour sa despe1lce que pour ses peines, la somme de vingt-six escus soleil (4 juin 1522) ».

En 1 S 30, on trouve des dépenses pour la messe de la Passion, que le duc Antoine avait fondée, ordonné de chanter et faire célébrer en l'église Saint-Georges, chaque vendredi. Adrian de Monte, Barbereau, Henry Harbaulmont, Morille, Pierre Myon, maître Michiel, Jean Ansel, furent les principaux chantres de la chapelle.

En 1539, un groupe d'enfants était appelé les petits chantres de Monseigneur 5 ils chantaient dans la musique de chambre du duc, et n'étaient pas confondus avec les enfants de chœur de la chapelle.

Les Études sur le théâtre en Lorraine et sur Pierre Grin- gore, par M. Henri Lepage 1, nous fournissent des do- cuments très complets sur les mystères représentés à cette époque.

Pierre Gringore, poète et prosateur, jouait lui-même des rôles dans les pièces qu'il composait, et qui étaient représentées devant le duc Antoine.

On le voit paraître pour la première fois en Lorraine vers 1518; peut-être, dit M. Lepage, après la mort de Louis XII, n'avait-il plus trouvé la même protection que par le passé à la cour de France 5 peut-être avait-il suivi François Ier, lors du voyage que fit ce prince à Bar pour être parrain d'un des fils d'Antoine ; peut-être aussi le désir de revoir son pays natal, s'il est vrai qu'il fût né en Lorraine, fut-il le seul motif qui l'amena dans cette pro- vince; toujours est-il que Pierre Gringore remplissait les fonctions de héraut d'armes d'Antoine en 15 2,4, et qu'il combattit sous ses ordres dans la guerre des Rustauds. Après ces événements il composa plusieurs ouvrages,

1. Mémoires de la Société des sciences, lettres et arts de Nancy) de 1848.


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parmi lesquels il faut citer les Chants royaux *, la Com- plainte de la cité chrétienne, les Rondeaux, qui, sans indiquer si la musique d'accompagnement était de la musique de Gringore, nous intéressent assez pour que nous ne les passions pas sous silence.

On croit que Gringore mourut à Nancy en 1538.

La danse la plus usitée à la cour de Lorraine était la Morisque; on l'exécutait surtout pendant le carnaval; les danseurs étaient costumés et faisaient un grand effet; les hommes et les femmes la dansaient.

Un mandement du duc Antoine, daté du 20 août 1) 2 l, accorde une somme de trente francs à Jehan Christian et Guillaume de la Fructerie, pour payer « certains ac- coustrements d'une morisque ».

On se représente facilement le palais ducal, brillam- ment éclairé, la foule des costumes orientaux se mariant dans les galeries, et faisant un contraste charmant avec les ornements et les têtes grimaçantes de l'édifice go- thique ; puis, dans la salle des Cerfs, illuminée par une quantité de torches de cire, portées par des pages, une assemblée des plus hauts personnages, assis sur de longues chaises sculptées, contemplant les mouvements gracieux des danseurs qui suivent les accords cadencés d'un orchestre placé sur une estrade recouverte de ten- tures rouges et jaunes, qui se trouve dans le fond de l'im- mense salle ; les fous et bouffons du duc faisant dérider la noble compagnie par leurs spirituelles saillies ; enfin, les brillants officiers de la cour, causant et dansant avec les damoiselles coiffées de gigantesques échafaudages de den-

J. Chants royaulx figurez morallement sur les mistères miraculeux de nostre Saulveur et rédempteur Jesuchrist et sur sa passion; avec plusieurs dé- votes oraisons et rondeaux contemplatifs, composez par Pierre Gringore, dict Vaudemont.


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telles et portant des robes garnies de menu-vair ou d'her- mine.

Nous trouvons encore, en 15 3 5> la mention suivante se rapportant à la danse :

« Somme payée aux ménétriers de Gondreville (près Tout), qui y menèrent la fête, et avoient fait danser les damoiselles 1 ».

Antoine mourut à Bar, le 14 juin 1544,

I. Archives, B. 6167.


Voir aussi