La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Partie 2/Roland meurt

De Wicri Chanson de Roland
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Fig. 22. — Voici que les Anges du ciel descendent d'en haut... près de Roland qui va mourir. ( Vers 23G3 et 2374.)
( Composition de Chifflart.)
Roland Meurt

Les couplets (laisses)

CCIV

O. => CLXXIII
2355   Roland sent que la mort l'entreprend
Et qu'elle lui descend de la tête sur le cœur.
Il court se jeter sous un pin :
Sur l'herbe verte il se couche face contre terre ;
Il met sous lui son olifant et son épée,
2360 Et se tourne la tête contre les païens.
Et pourquoi le fait-il? Ah! c'est qu'il veut
Faire dire à Charlemagne et à toute l'armée des Francs,
Le noble comte, qu'il est mort en conquérant.
Il bat sa coulpe, il répète son mea culpa.
2365   Pour ses péchés, au ciel il tend son gant :
P. => CXLV
Les Anges de Dieu descendent d'en haut et sans retard le reçoivent. Aoi.

CCV

O. => CLXXIV
Roland sent que son temps est fini.
Il est là, au sommet d'un pic qui regarde l'Espagne;
D'une main il frappe sa poitrine :
« Mea culpa, mon Dieu, et pardon au nom de ta puissance,
2370   « Pour mes péchés, pour les petits et pour les grands,
« Pour tous ceux que j'ai faits depuis l'heure de ma naissance
« Jusqu'à ce jour où je suis ainsi frappé. »
Il tend à Dieu le gant de sa main droite,
Et voici que les Anges du ciel s'abattent près de lui. Aoi.

CCVI

2375  
O. => CLXXV
II est là, gisant sous un pin, le comte Roland;
Il a voulu se tourner du côté de l'Espagne.
Il se prit alors à se souvenir de plusieurs choses :
De tous les pays qu'il a conquis,
Et de douce France, et des gens de sa famille,
2380 Et de Charlemagne, son seigneur, qui l'a nourri ,
Et des Français qui lui étaient si dévoués.
Il ne put s'empêcher d'en pleurer ou de soupirer.
Mais il ne veut pas se mettre lui-même en oubli,
Et de nouveau réclame le pardon de Dieu :
« notre vrai Père, » dit -il, « qui jamais ne mentis,
2385 « Qui ressuscitas saint Lazare d'entre les morts
« Et défendis Daniel contre les lions,
« Sauve, sauve mon âme et défends-la contre tous périls,
« A cause des péchés que j'ai faits en ma vie. »
Il a tendu à Dieu le gant de sa main droite ;
2390 Saint Gabriel l'a reçu.
Alors sa tète s'est inclinée sur son bras,
Et il est allé, mains jointes, à sa fin.
Dieu lui envoie un de ses anges chérubins ,
Saint Raphaël et saint Michel du Péril.
2395 Saint Gabriel est venu avec eux.
Ils emportent l'âme du Comte au paradis... Aoi.

Figure 23

Fig. 25 - Le comte Roland tend à Dieu son gant de la main droite. Saint Gabriel l'a reçu (vers 2889, 2890)
(Composition de Ferrat)

Notes de l'article

2384. O notre vrai Père

Dans sa savante Étude sur les Sarcophages chrétiens antiques de la ville d'Arles (Paris, Impr. nationale, 1878, p. 39), M. Edmond le Blant a rapproché ces vers d'un grand nombre de textes des liturgies primitives et de monuments figurés des IVe et Ve siècles : « Ce qui semble dominer dans le cycle des représentations figurées sur les tombes chrétiennes, c'est l'idée même dont s'inspirent les liturgies funéraires, et qui fit mettre aux lèvres du preux Roland ce cri suprême :

« notre vrai Père, toi qui ressuscitas saint Lazare d'entre les morts et qui défendis Daniel contre les lions, sauve mon âme et protège la contre tous périls. »

C'est à tort que les Remaniements donnent plus d'étendue à cette naïve prière.


Facsimilés

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 196.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 197.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 198.jpg

Voir aussi

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