La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Partie 2/La mêlée

De Wicri Chanson de Roland
logo lien interne Cette page est en phase de création pour des raisons de cohérence des liens dans ce wiki (ou au sein du réseau Wicri).
Pour en savoir plus, consulter l'onglet pages liées de la boîte à outils de navigation ou la rubrique « Voir aussi ».
Fig. 1C. — Parmi la bataille chevauche Olivier; le bois de sa lance est brisé, il n'en a plus qu'un tronçon au poing. (Vers 1351, 1352.)
(Composition de Ferat.)
La mêlée
Les couplets (laisses) 
XCIX,
C, CII, CIII, CIV, CV, CVI, CVII, CVIII, CIX,
CX, CXI, CXII, CXIII, CXIV, CXV, CXVI (??), CXVII (??), CXVIII (??), CXIX,
CXX, CXXI, CXXII, CXXIII, , CXXIV, CXXV, CXXVI, CXXVII, CXXVIII, CXXIX,
CXXX, CXXXI, CXXXII, CXXXIII, CXXXIV, CXXXV, CXXXVI, CXXXVII, CXXXVIII, CXXXIX,
CXL, CXLI, CXLII, CXLIII, CXLIV, CXLV, CXLVI, CXLVII, CXLVIII, CXLIX,
CL
Notes originales
1225. Des deux éperons d'or, 1229. Arçons
1263. La boucle, 1326. Le heaume où les escarboucles étincellent,
1331. La selle, 1331. La selle, 1363. L'épée Hauteclaire
1379. Sorel, 1411. Lacune comblée
1428. Jusqu'aux saints de Cologne, 1437. Lacune comblée
1443. La geste de France., 1448. Lacune comblée
1482. Lacune comblée, 1493. Le frein,
1523. C’est ce Valdabron qui jadis prit Jérusalem
1602. Nasal, 1604. Jazerenc, 1605. Auves
1627. Lacune comblée, 1651. Quant au cheval
1663. Galafre, 1679. Lacune comblée
Facsimilés
Voir aussi

Les couplets (laisses)

XCIX

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 124.jpg
O. => XCII
Le neveu de Marsile (il s'appelle Aelroth)
Chevauche tout le premier devant l'armée païenne ;
Il a de bonnes mines, un fort et rapide cheval.
1190   Quelle injure il jette à nos Français !
« Félons Français, vous allez aujourd'hui lutter avec les nôtres;
«  Qui devait vous défendre vous a trahis;
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 125.jpg
« Votre empereur est fou qui vous a laissés dans ces défilés.
« C'en est fait aujourd'hui de l'honneur de douce France ,
1195 « Et Charles le Grand va perdre ici le bras droit de son corps.
« L'Espagne enfin sera en repos. »
Roland l'entend : grand Dieu, quelle douleur!
« Il éperonne son cheval de ses éperons d'or,
Du plus rude coup qu'il peut porter, le Comte frappe le païen.
Il fracasse l'écu d'Aelroth, lui rompt les mailles de son haubert,
Lui enfonce sa grande épée au corps,
1200 Lui tranche la poitrine, lui brise les os,
Lui sépare toute l'échiné du dos,
Et avec sa lance lui jette l'âme hors du corps.
Le coup est si rude , qu'il fait chanceler le corps du Sarrasin ,
Si bien que Roland, à pleine lance, l'abat mort de son cheval,
1205 Et que le cou du païen est en deux morceaux.
Roland cependant ne laissera pas de lui parler :
« Va donc, misérable, et sache bien que Charles n'est pas fou,
« Et qu'il n'aima jamais la trahison.
« En nous laissant aux défilés, il a agi en preux,
1210 « Et la France aujourd'hui ne perdra pas sa gloire.
« Frappez, Français, frappez : le premier coup est nôtre.
« C'est à ces gloutons qu'est le tort , c'est à nous qu'est le droit. » Aoi.

C

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 126.jpg
O. => XCIII
Il y a là un duc du nom de Fausseron
C'est le frère du roi Marsile.
1215   Il tient la terre de Dathan et d'Abiron,
Et il n'est pas sous le ciel d'homme plus insolent ni plus félon.
Entre ses deux yeux il a le front énorme,
Et l'on y pourrait mesurer un grand demi-pied.
A la vue de son neveu mort, il est tout saisi de douleur ,
1220   Sort de la foule, se précipite,
Jette le cri des païens ,
Et, dans sa rage contre les Français :
« C'est aujourd'hui, » dit-il, « que douce France va perdre son honneur. »
Olivier l'entend, il en a grande colère :
1225   Des deux éperons d'or pique son cheval
Et va frapper Fausseron d'un vrai coup de baron.
Il lui brise l'écu , lui rompt les mailles de son haubert ,
Lui plonge dans le corps les pans de son gonfanon,
Et, à pleine lance, l'abat mort des arçons.
1230   Alors il regarde à terre, et, y voyant le misérable étendu,
Il lui dit ces très fières paroles :
« Point n'ai souci, lâche, de vos menaces.
« Frappez , Français , frappez , nous les vaincrons ! »
Puis : « Monjoie! » s'écrie-t-il. C'est le cri de l'empereur. Aoi.

CI

O. => XCIV
1235   II y a là un roi du nom de Corsablis;
Il est de Barbarie, d'un pays lointain.
Le voilà qui se met à interpeller les autres païens :
« Nous pouvons aisément soutenir la bataille :
« Les Français sont si peu !
1240   « Ceux qui sont devant nous sont à dédaigner ;
« Pas un n'échappera, Charles n'y peut rien,
« Et voici le jour qu'il leur faudra mourir. »
L'archevêque Turpin l'entend;
Il n'est pas d'homme sous le ciel qu'il haïsse autant que ce païen ;
1245   Des éperons d'or fin il pique son cheval
Et va frapper sur Corsablis un coup terrible.
L'écu est mis en pièces, le haubert en lambeaux ;
Il lui plante sa lance au milieu du corps.
Le coup est si rude, que le Sarrasin chancelle :
1250   A pleine lance, Turpin l'abat mort sur le chemin ;
Puis regarde à terre et y voit le glouton étendu.
Il ne laisse pas de lui parler, et lui dit :
« Vous en avez menti , lâche païen ;
« Mon seigneur Charles est toujours notre appui,
1255   « Et nos Français n'ont pas envie de fuir.
« Vos compagnons, nous saurons bien les arrêter ici,
« Et quant à vous, c'est une nouvelle mort qui vous attend.
« Frappez, Français : que pas un de vous ne s'oublie.
« Le premier coup est nôtre, Dieu merci! »
1260 Puis : « Monjoie! Monjoie! » s'écrie-t-il, pour rester maître du champ. Aoi.

CII

O. => XCV
Malprime de Brigal est frappé par Gerin ;
Son bon écu ne lui sert pas pour un denier :
La boucle de cristal en est brisée,
Et la moitié en tombe à terre.
1265   Son haubert est percé jusqu'à la chair,
Et Gerin lui plante au corps sa bonne lance.
Le païen tombe à terre d'un seul coup.
Satan emporte son âme.

CIII

O. => XCVI
Le compagnon de Gerin, Gerier, frappe l'Amirafle :
1270   II brise l'écu et démaille le haubert du païen,
Lui plante sa bonne lance au cœur,
Le frappe si bien, qu'il lui traverse tout le corps,
Et qu'à pleine lance il l'abat mort à terre.
« Belle bataille! » s'écrie Olivier. Aoi.

CIV

O. => XCVII
1275   Le duc Samson va frapper l'Aumaçour ;
Il lui brise l'écu couvert de fleurons d'or;
Son bon haubert ne le garantit pas.
Samson lui tranche le cœur, le foie et le poumon ,
Et (qu'on s'en afflige ou non) l'abat raide mort.
1280   « Voilà un coup de baron, » dit l'Archevêque. Aoi.

CV

O. => XCVIII
Anséis laisse aller son cheval
Et va frapper Turgis de Tortosa.
Au-dessous de la boucle dorée il brise l'écu,
Rompt la double étoffe qui garnit le haubert ,
1285   Lui plante au corps le fer de. sa bonne lance,
Et le frappe d'un si bon coup, que tout le fer le traverse.
A pleine lance il le renverse mort.
« C'est le coup d'un brave, » s'écrie Roland. Aoi.

CVI

Engelier, le Gascon de Bordeaux,
1290   Pique des deux son cheval, lui lâche les rênes,
Et va frapper Escremis de Valtierra.
Il met en pièces l'écu que le païen porte au cou,
Lui déchire la ventaille du haubert,
Le frappe en pleine poitrine entre les deux épaules,
1295   Et à pleine lance l'abat mort de sa selle.
« Vous êtes tous perdus, » s'écrie-t-il. Aoi.

CVII

Othon va frapper un païen, Estorgant,
Tout au-devant de l'écu, sur le cuir :
Il en enlève les couleurs rouge et blanche ;
1300   Puis déchire les pans du haubert,
Lui plante au corps son bon épieu tranchant,
Et l'abat mort de son cheval courant.
« Personne, » dit-il alors, « personne ne vous sauvera de la mort. » Aoi.

CVIII

Bérengier frappe Estramaris,
1305   Brise l'écu , met le haubert en morceaux,
Lui plante au corps son bon épieu tranchant,
Et l'abat mort entre mille Sarrasins.
Des douze pairs païens, dix sont déjà tués;
Il n'en reste plus que deux vivants :
1310   Chernuble et le comte Margaris. Aoi.

CIX

Margaris est un très vaillant chevalier,
Beau , fort , léger , rapide ;
Il pique des deux son cheval et va frapper Olivier.
Au-dessous de la boucle d'or pur, il brise l'écu,
1315   Et lui porte un coup de lance le long des côtes.
Dieu préserve Olivier, si bien que le coup ne le touche pas;
La lance effleura sa chair, mais n'en enleva point.
Margaris alors va plus loin, sans encombre,
Et sonne de son cor pour rallier les siens. Aoi.

CX

1320   La bataille est merveilleuse, la bataille est une mêlée :
Le comte Roland ne craint pas de s'exposer.
Il frappe de la lance tant que le bois lui dure;
Mais voilà que quinze coups l'ont brisée et perdue.
Alors Roland tire Durendal, sa bonne épée nue,
1325   Éperonne son cheval et va frapper Chernuble,
Il met en pièces le heaume du païen, où les escarboucles étincellent,
Lui coupe en deux la coiffe et la chevelure,
Lui tranche les yeux et le visage,
Le blanc haubert aux mailles si fines,
1330   Tout le corps jusqu'à l'enfourchure
Et jusque sur la selle, qui est couverte de lames d'or.
L'épée entre dans le corps du cheval,
Lui tranche l'échiné sans chercher le joint,
Et sur l'herbe drue abat morts le cheval et le cavalier :
1335   «. Misérable, » lui dit- il ensuite, « tu fus mal inspiré de venir ici ;
« Ton Mahomet ne te viendra pas en aide,
« Et ce n'est pas par un tel glouton que cette victoire sera gagnée!» Aoi.

CXI

Par le champ de bataille chevauche le comte Roland,
Sa Durendal au poing, qui bien tranche et bien taille,
1340   Et qui fait grande tuerie des Sarrasins.
Ah! si vous aviez vu Roland jeter un mort sur un autre mort,
Et le sang tout clair inondant le sol!
Roland est rouge de sang; rouge est son haubert, rouges sont ses bras,
Rouges sont les épaules et le cou de son cheval.
1345   Pour Olivier, il ne se met pas en retard de frapper.
Les douze Pairs aussi ne méritent aucun blâme ;
Tous les Français frappent, tous les Français massacrent.
Et les païens de mourir ou de se pâmer :
« Vivent nos barons ! » dit alors l'Archevêque :
1350   « Monjoie! » crie-t-il, « Monjoie! c'est le cri de Charles. » Aoi.

CXII

Parmi la bataille chevauche Olivier;
Le bois de sa lance est brisé , il n'en a plus qu'un tronçon au poing.
Alors il va frapper un païen du nom de Mausseron.
Il lui brise l'écu , qui est couvert d'or et de fleurons,
1355   II lui jette les deux yeux hors de la tête,
Et la cervelle du païen lui tombe aux pieds.
Bref il le renverse mort avec sept cents de sa race.
Puis il a tué Turgis et Estorgous;
Mais cette fois sa lance se brise en éclats jusqu'à son poing :
1360   « Que faites-vous, compagnon? » lui crie Roland,
« Ce n'est pas un bâton qu'il faut en telle bataille ,
« Mais il n'y a de bon que le fer et l'acier.
« Où donc est votre épée qui s'appelle Hauteclaire?
« Sa garde est d'or, et son pommeau de cristal.
1365   « — Je n'ai pas le temps de la tirer, » répond Olivier;
« J'ai trop besoin de frapper. Aoi.

CXIII

Monseigneur Olivier a tiré sa bonne épée,
Que lui a tant demandée son compagnon Roland,
Et, en vrai chevalier, il la lui a montrée.
1370   II en frappe un païen, Justin de Val-Ferrée,
Lui coupe en deux morceaux la tête,
Lui tranche le corps et le haubert brodé,
Avec la bonne selle où brillent les pierreries et l'or
Il tranche aussi l'échiné du destrier,
1375   Et abat mort sur le pré le cheval avec le cavalier :
« Ah! désormais, » s'écrie Roland, « je vous regarde comme un frère.
« Voilà bien les coups qui nous font aimer de l'Empereur. »
Et de toutes parts on entend ce cri : « Monjoie ! » Aoi.

CXIV

Voici sur son cheval Sorel le comte Gerin,
1380   Et son compagnon Gerier sur Passe-Cerf.
Ils leur lâchent les rênes, et d'éperonner vivement.
Tous deux vont frapper le païen Timozel ;
L'un l'atteint à l'écu, l'autre au haubert.
Ils lui brisent leurs deux lances dans le corps,
1385   Et l'abattent raide mort au milieu d'un guéret.
Je ne sais point, je n'ai jamais entendu dire
Lequel des deux fut alors le plus rapide...
Espreveris était là, le fils de Borel :
Il meurt de la main d'Engelier de Bordeaux.
1390   Puis l'Archevêque tue Siglorel,
Cet enchanteur qui avait déjà été dans l'enfer,
Où Jupiter l'avait conduit par l'art du diable :
« Voilà un grand félon, » dit Turpin.
« — Le misérable est vaincu, » répond Roland.
1395   « Frère Olivier, ce sont là des coups que j'aime. » Aoi.

CXV

La bataille cependant est devenue très rude :
Français et païens y échangent de beaux coups.
Les uns attaquent, les autres se défendent.
Que de lances brisées et rouges de sang !
1400   Que de gonfanons et d'enseignes en pièces !
Que de bons Français perdent là leur jeunesse!
Ils ne reverront plus ni leurs mères ni leurs femmes,
Ni ceux de France qui les attendent là-bas, aux défilés.
Charles le Grand en pleure et se lamente :
1405   Hélas! à quoi bon? Ils n'en recevront point de secours.
Ganelon leur rendit un mauvais service,
Le jour qu'il alla dans Saragosse vendre sa propre lignée.
Mais, depuis lors, il en a perdu les membres et la vie :
Plus tard, à Aix, on le condamna à être écartelé,
1410   Et avec lui trente de ses parents,
Auxquels on ne fit pas grâce de la mort. Aoi.

CXVI (??)

Le roi Almaris, avec son corps d'armée,
Par un étroit et merveilleux passage,
Va joindre Gautier, qui garde la montagne
Et les défilés du côté de l'Espagne.
« Ah ! Ganelon le traître, » dit Gautier le capitaine,
« Ganelon, pour notre grand malheur, a fait marché de nous. »


CXVII (??)

Le roi Almaris est venu sur la montagne;
Soixante mille païens sont avec lui
Qui très vigoureusement attaquent nos Français
En grande colère ils les ont tous frappés,
Ils les ont mis en déroute, tués, massacrés.
Plus que tous les autres, Gautier est en rage.
Il tire son épêe, serre son écu contre lui,
Au petit trot s'en va devant le premier rang des païens,
Leur fait mauvais salut et s'aligne près d'eux.     Aoi.

CXVIII (??)

A peine Gautier s'est-il aligné près des Sarrasins,
Que ceux-ci l'assaillent à droite, à gauche, de toutes parts.
Son fort écu est brisé en mille pièces,
Son blanc haubert est rompu, et la broderie en est perdue.
Lui-même il est percé de quatre lances ;
Il n'y peut plus tenir, et quatre fois se pâme.
Qu'il le veuille ou non, il lui faut quitter le champ.
Voilà que de son mieux il descend la montagne
Et appelle Roland : « A mon aide, baron, à mon aide ! »   Aoi.

CXIX

A Roncevaux la bataille est merveilleuse et pesante :
Olivier et Roland y frappent de grand cœur ;
L'archevêque Turpin y rend des milliers de coups ;
1415   Les douze Pairs ne sont pas en retard.
Tous les Français se battent et sont en pleine mêlée;
Et les païens de mourir par cent et par mille.
Qui ne s'enfuit ne peut échapper à la mort :
Bon gré, mal gré, tous y laissent leur vie.
1420   Mais les Français y perdent leur meilleure défense,
Leurs forts épieux et leurs lances qui tranchent,
Leurs gonfanons bleus, vermeils ou blancs.
Le fer de leurs épées est brisé.
Et que de vaillants chevaliers ils ont perdus !
Quant à eux, ils ne reverront plus ni leurs pères ni leurs familles,
Ni Charlemagne qui les attend là-bas...
Cependant en France il y a eu une merveilleuse tourmente :
Des tempêtes, du vent et du tonnerre,
1425   De la pluie et de la grêle démesurément,
Des foudres qui tombent souvent et menu,
Et (rien n'est plus vrai) un tremblement de terre.
Depuis Saint-Michel-du-Péril jusqu'aux Saints de Cologne,
Depuis Besançon jusqu'au port de Wissant,
1430   Pas une ville dont les murs ne crèvent.
A midi, il y a grandes ténèbres;
Il ne fait clair que si le ciel se fend.
Tous ceux qui voient ces prodiges en sont dans l'épouvante ,
Et plusieurs disent : « C'est la fin du monde,
1435   « C'est la consommation du siècle. »
Non, non : ils ne le savent pas, ils se trompent :
C'est le grand deuil pour la mort de Roland ! Aoi.lacune

CXX

Les prodiges sont terribles et l'orage effroyable ;
En France, il y a plusieurs signes évidents :
Dès l'heure de midi jusqu'à celle des vêpres,
La nuit y est obscure, et les ténèbres.
Ni le soleil ni la lune n'y jettent leur clarté.
Tous ceux qui voient ces choses croient qu'ils vont mourir ;
Mais en vérité on peut bien être en telle douleur,
Quand celui qui conduit tous les autres, quand Roland meurt.
Il n'y eut jamais sur terre un homme de plus haut prix
Pour vaincre les païens et conquérir les royaume?.   Aoi.

CXXI

La bataille est formidable; elle est horrible.
Tous nos Français y frappent du tranchant de l'épée,
Il n'en est pas un dont l'acier ne soit tout rouge de sang.
« Monjoie ! » s'écrient-ils; c'est le nom de la fameuse enseigne.
Par toute la contrée s'enfuient les Sarrasins,
Que poursuivent les Français, les hommes de la terre chrétienne.
Ah ! ils voient maintenant que la mêlée est rude.   Aoi.

CXXII

Les mécréants, la tristesse et la rage au cœur,
Laissent le champ et se mettent en fuite,
Poursuivis de près par les Français, qui les voudraient atteindre.
Vous pourriez voir la plaine toute couverte de combattants,
Tant de Sarrasins tomber sur l'herbe drue,
Tant de blancs hauberts et de broignes qui étincellent,
Tant de lances brisées et tant de gonfanons en lambeaux!
Cette bataille est gagnée par les Français.
Mais, Dieu ! comme la peine va s'accroître pour eux !
Charles en perdra sa meilleure aide et toute sa fierté;
Grande est la douleur où la France va tomber.         Aoi.

CXXIII

Les Français frappent rudement et de bon cœur,
Et les païens de mourir par milliers, par multitudes.
1440   Sur cent mille, il n'en est pas deux qui survivent
« Nos hommes sont braves, » s'écrie l'Archevêque.
« Et nul roi sous le ciel n'en a de meilleurs.
« Il est écrit dans la geste de France :
« Il est de droit , dans la grande terre,
« Que nos empereurs aient de vaillants soldats. »
1445   Et les voilà qui vont par la plaine et recherchent les leurs.
De deuil et de tendresse leurs yeux sont tout en larmes
A cause du grand amour qu'ils ont pour leurs parents.
Devant eux va surgir Marsile avec sa grande armée. Aoilacune.

CXXIV

Le comte Roland est un bon chevalier ;
Olivier aussi et tous les douze Pairs,
Et les Français qui sont de grande valeur.
Ils sont vainqueurs, ils massacrent les païens.
Sur cent mille, pas un, pas un n'a pu se sauver,
Excepté Margaris, et le voilà qui s'enfuit.
Mais, s'il s'enfuit, on ne doit point lui en faire de reproches;
Car il peut sur son corps montrer de grandes marques de son courage,
Et il est percé de quatre coups de lance.
Margaris s'achemine du côté de l'Espagne,
Et raconte tout au roi Marsile.         Aoi.

CXXV

Le roi Margaris s'en est donc allé tout seul.
Sa lance est brisée, son écu est troué,
Et, au-dessous de la boucle, n'est plus long que d'un demi-pied.
L'acier de son épée est tout rouge de sang,
Son haubert est rompu et démaillé,
Et il est lui-même percé de quatre lances.
C'est ainsi qu'il revient du champ de bataille, où l'on a donné de si fiers coups.
Dieu ! quel baron s'il était chrétien !
Il raconte tout au roi Marsile,
Et soudain tombe à ses pieds :
« A cheval, Sire, à cheval ! » lui dit -il;
« Vous trouverez les Français de France épuisés
« A force de frapper et de martyriser les nôtres.
« Leurs lances sont en pièces,
« Une grande moitié d'entre eux sont morts;
« Ceux qui restent sont bien affaiblis;
« La plupart sont blessés et rouges de leur sang,
« Et plus d'armes, ils n'ont plus d'armes pour se défendre !
« Vous n'aurez pas de peine à venger les nôtres.
« Sachez-le bien, Sire, les chrétiens sont bons à vaincre.
Cependant les Français réclament Roland et Olivier.
« A notre aide, les douze Pairs, à notre aide!
Et l 'Archevêque de leur répondre avant tous autres :
« Hommes de Dieu, faites-vous gaillards et fiers;
« Voici le jour où les couronnes vont être placées sur vos têtes,
« Et où le saint Paradis va vous être donné. »
Parmi les chevaliers français, c'est alors grande douleur et pitié.
Par très vive amitié l'un pleure sur l'autre,
Et, par charité, tous se donnent mutuellement un dernier baiser.
« A cheval, maintenant , » s'écrie Roland,
« Car voici Marsile et ses cent mille païens. »         Aoi.

CXXVI

Par le milieu d'une vallée s'avance le roi Marsile,
1450   Avec la grande armée qu'il a réunie
Et divisée en vingt colonnes.
Au soleil reluisent les pierreries et l'or des heaumes,
Et ces lances et ces gonfanons,
Et les écus et les hauberts brodés.
Sept mille clairons sonnent la charge.
1455   Quel bruit dans toute la contrée !
« Olivier mon compagnon, » s'écrie Roland, « mon frère Olivier,
« Le traître Ganelon a juré notre mort,
« Et sa trahison n'est ici que trop visible.
« Mais l'Empereur en tirera une terrible vengeance.
1460   « Quant à nous, nous aurons une forte et rude bataille :
« Car on ne vit jamais une telle rencontre.
« J'y vais frapper de mon épée Durendal ;
« Vous, compagnon, frappez de votre épée Hauteclaire.
« Nous les avons déjà portées en tant de lieux !
1465   « Avec elles déjà nous avons gagné tant de victoires!
« Il ne faut pas qu'on chante sur nous de méchantes chansons. » Aoi.

CXXVII

Quand nos Français voient qu'il y a tant de païens,
Et que la campagne en est couverte de toutes parts,
Ils appellent à leur aide Olivier et Roland
1470   Et les douze Pairs, pour qu'ils soient leur défense.
L'Archevêque alors leur dit sa façon de penser :
« Pas de lâche pensée, seigneurs barons.
« Au nom de Dieu, ne fuyez pas,
« De crainte que les gens de cœur ne chantent contre nous de mauvaises chansons.
1475   « Il vaut mieux mourir en combattant.
« Or il est très certain que nous allons mourir ;
« Oui, après ce jour nous ne serons plus vivants.
« Mais il est une chose dont je puis vous être garant :
« C'est que le saint paradis vous sera ouvert ;
1480   « Demain vous y serez assis tout près des Saints. »
«A ces mots, les Francs redeviennent gaillards et fiers.
«Ils éperonnent en avant sur leurs rapides destriers,
«Et tous de crier : « Monjoie! Monjoie! » Aoi.lacune.

CXXVIII

C'est un très mauvais roi que Marsile :
« Ecoutez-moi, » dit-il à ses païens;
« Le comte Roland est d'une merveilleuse puissance,
« El ce n'est pas sans peine qu'on le vaincra :
« Deux batailles n'y suffiront point.
« Eh bien ! si vous y consentez, nous lui en livrerons trois.
« Dix de nos colonnes vont se mettre en ligne contre les Français,
« Et les dix autres resteront avec moi.
« Voici, voici le jour où Charles perdra de son pouvoir
« Et verra tomber la France dans la honte ! »
A Grandoigne Marsile donne alors une enseigne brodée d'orfroi
Pour conduire sa gent contre les Français :
« Vous aurez, » lui dit-il, « commandement de roi.»       Aoi.

CXXIX

Le roi Marsile est resté au haut d'une montagne,
Tandis que Grandoigne descend dans le bas de la vallée ;
Son gonfanon est attaché par trois clous d'or :
« Barons, » s'écrie-t-il, a à cheval ! »
Mille cors retentissent, mille cors au son clair,
Et les Français de dire : « Dieu le Père, que ferons-nous ?
« Ah ! maudit soit le jour où nous vîmes Ganelon :
« C'est lui qui nous a traîtreusement vendus.
« A l'aide, à l'aide, les douze Pairs! »
L'Archevêque alors leur répond :
« Bons chevaliers, voici le jour où vous recevrez grand honneur :
« Dieu vous va donner couronnes et fleurs,
« Au paradis, entre les glorieux.
« Quant aux lâches, il n'y a point pour eux de place là-haut.
« — Nous ferons tout ce que vous voulez, » répondent les Français.
« Dussions-nous y mourir, nous ne serons pas félons envers Dieu. »
Ils éperonnent des éperons dorés
Et se jettent sur ces maudits, sur ces traîtres.       Aoi.

CXXX

Le roi Marsile partage en deux son armée :
Il en garde dix colonnes avec lui,
Et voici que les dix autres chevauchent pour engager la bataille.
« Dieu ! » s'écrient les Français, « notre perte est certaine.
« Que vont devenir les douze Pairs ? »
Et l'archevêque Turpin de leur répondre avant tous autres :
« Bons chevaliers,, vous êtes les amis de Dieu.
« Voici le jour où vous allez être fleuris et couronnes;
« Voici le jour où vous reposerez dans les saintes fleurs du paradis.
« Quant aux lâches, ils n'y entreront jamais!
« — Nous n'y devons pas faillir, » disent les Français.
« Si c'est le bon plaisir de Dieu, nous n'y contredirons pas.
« Donc, nous allons nous battre contre nos ennemis.
« II est vrai que nous sommes peu; mais, pour hardis et preux, nous le sommes. »
Lors ils éperonnent pour entrer parmi les païens.
Voici les Sarrasins et les Français aux prises.     Aoi.

CXXXI

O. => CXVI
Il y a certain païen de Saragosse
Qui possède toute une moitié de la ville :
1485   Climorin n'a pas un cœur de baron.
C'est lui qui a reçu les promesses du comte Ganelon
Et qui par amitié l'a baisé sur la bouche ;
Même il a donné au traître son épée et son escarboucle.
« Je veux, » disait-il, « couvrir de déshonneur le grand pays
1490   « Et enlever sa couronne à Charlemagne. »
Climorin est assis sur son cheval Barbamouche,
Plus rapide qu'épervier et hirondelle.
Il l'éperonne, il lui lâche les rênes
Et va frapper Engelier de Gascogne.
1495   Haubert, écu, rien n'y fait :
Le païen lui plante au corps le fer de sa lance
Et si bien le frappe, que la pointe passe tout entière de l'autre côté.
A pleine lance il le retourne à terre, raide mort :
« Ces gens-là, » s'écrie -t-il, « sont bons à vaincre.
1500   « Frappez, païens, frappez, et brisons leurs rangs.
« — Quelle douleur ! » disent les Français. « Perdre un si vaillant homme! » Aoi.

CXXXII

O. => CXVII
Alors le comte Roland interpelle Olivier :
« Sire compagnon, » lui dit-il, « voici déjà Engelier mort;
« Nous n'avions pas de plus brave chevalier.
1505   « Que Dieu me donne de le venger, » répond Olivier. ,
Il pique son cheval de ses éperons d'or pur;
Dans ses mains est Hauteclaire , dont l'acier est rouge de sang.
Il court frapper le païen de toute sa force,
Tranche le corps, lue le destrier :
Il brandit son coup, et le Sarrasin tombe,
1510   Et les démons emportent son âme.
Puis il a tué le duc Alphaïen,
Tranché la tête d'Escababi,
Et désarçonné sept Arabes
Qui plus jamais ne seront bons pour guerroyer.
1515   « Mon compagnon est en colère, » dit Roland,
« Et il conquiert grand honneur à mes côtés :
« Voilà les coups qui, plus encore, nous font aimer de Charles.
« — Frappez, chevaliers, » s'écrie Roland , «frappez toujours. » Aoi.

CXXXIII

O. => CXVIII
    D’autre part est le païen Valdabron.
 1520  Qui, pour la chevalerie, fut le parrain du roi Marsile.
Il est seigneur sur mer de quatre cents vaisseaux.
Pas de marinier qui ne se réclame de lui.
C’est ce Valdabron qui jadis prit Jérusalem par trahison,
C’est lui qui viola le temple de Salomon,
 1525 Et qui devant les fonts égorgea le patriarche.
C’est encore lui qui a reçu les promesses du comte Ganelon,
Et qui a donné à ce traître son épée avec mille mangons.
Le cheval qu’il monte s’appelle Gramimond :
Un faucon est moins rapide.
 1530 Il le pique de ses éperons aigus,
Et va frapper le puissant duc Samson.
Il met en pièces l’écu du Français, rompt les mailles du haubert,
Lui fait entrer dans le corps les pans de son gonfanon,
Et, à pleine lance, l’abat mort des arçons :
« Misérables, » s'écrit-il, « vous y mourrez tous les uns après les autres »
 1535 « Frappez, païens, nous les vaincrons. »
Et les Français : « Dieu ! s’écrient-ils, quel baron nous venons de perdre ! »    [Aoi]

CXXXIV

O. => CXIX
Quand le comte Roland vit Samson mort,
Vous pouvez bien penser qu'il ressentit une grande douleur.
Il éperonne son cheval, et, de toute sa force, prend son élan.
1540   Dans son poing est Durendal, qui vaut plus que l'or fin ;
Le baron va donner à Valdabrun le plus rude coup qu'il peut
Sur le heaume chargé de pierreries et d'or.
Il lui tranche la tête, le haubert, le corps,
La selle incrustée d'or et de pierres précieuses,
1545   Et jusqu'au dos du cheval, très profondément.
Bref (qu'on le blâme ou qu'on le loue), il les tue tous les deux.
« Quel coup terrible pour nous ! » s'écrient les païens.
« — Non, » s'écrie Roland, « je ne saurais aimer les vôtres ;
« C'est de votre côté qu'est l'orgueil, et non le droit. » Aoi.

CXXXV

1550   II y a là un Africain venu d'Afrique :
C'est Malquidant, le fils au roi Malquid.
Ses armes sont toutes d'or battu ,
Et, plus que tous les autres, il flamboie au soleil.
Il monte un cheval qu'il appelle Saut-Perdu ;
1555   Pas de bête qui puisse vaincre Saut-Perdu à la course,
Malquidant l'éperonne des éperons aigus
Et va frapper Anséis au milieu de l'écu,
Dont il efface le vermeil et l'azur ;
Puis il met en pièces les pans du haubert
Et lui plonge au corps le fer et le bois de sa lance.
1560   Anséis meurt; il a fini son temps,
Et les Français : « Baron, » disent-ils, » quel malheur! » Aoi.

CXXXVI

O. => CXXI
Par tout le champ de bataille va et vient Turpin l'archevêque ;
Jamais tel prêtre ne chanta messe
Et ne fit de telles prouesses de son corps :
1565   « Que Dieu te maudisse! » crie-t-il au païen :
« Celui que mon cœur regrette, c'est toi qui l'as tué. »
Alors Turpin donne l'élan à son bon cheval,
Et frappe Malquidant sur l'écu de Tolède;
Sur l'herbe verte il l'abat raide mort.
« Il frappe bien, notre archevêque, » disent les Français. Aoi.

CXXXVII

1570   D'autre part est Grandoigne, un païen,
Fils de Capuel, roi de Capadoce.
Il a donné à son cheval le nom de Marmoire ;
L'oiseau qui vole est moins rapide.
Grandoigne lui lâche les rênes, l'éperonne
1575   Et va de toute sa force heurter Gerin ;
Il met en pièces l'écu du Français et lui porte un formidable coup :
Du même coup son haubert est déchiré,
Et le gonfanon bleu du païen lui entre dans le corps ;
Il tombe mort sur le haut d'un rocher.
1580   Grandoigne ensuite tue Gerier, le compagnon de Gerin ;
Il tue Bérengier, il tue Guyon et Antoine ;
Puis il va frapper Austoire, un riche duc
Qui tient sur le Rhône la seigneurie de Valence.
Il l'abat mort, et les païens d'entrer en grande joie,
1585   Et les Français de s'écrier : « Comme les nôtres tombent! » Aoi.

CXXXVIII

Le comte Roland tient au poing son épée rouge de sang.
Partout il la lève, et partout il la montre.
Mais il a entendu les sanglots des Français :
Si grande est sa douleur, que son cœur est prêt à se fendre.
« Que Dieu, » s'écrie-t-il , « t'accable de tous maux!
1590   « Celui que tu viens de tuer, je te le ferai payer chèrement. »
Là-dessus il éperonne son cheval, qui prend son élan.
Quel que doive être le vaincu, voici Grandoigne et Roland en présence. Aoi.

CXXXIX

Grandoigne est un homme sage et vaillant,
Intrépide et sans peur à la bataille.
1595   Sur son chemin il rencontre Roland.
Jamais il ne l'avait vu, et cependant il le reconnaît sûrement,
Rien qu'à son fier visage et à la beauté de son corps,
Rien qu'à sa contenance et à son regard.
Ses yeux tombent sur l'acier rougi de Durendal,
Et le païen ne peut s'empêcher d'en être épouvanté :
1600   II veut fuir : impossible !
Roland le frappe d'un coup si vigoureux,
Qu'il lui fend le heaume jusqu'au nasal.
Il coupe en deux le nez, la bouche, les dents;
Il coupe en deux tout le corps et le haubert à mailles;
1605   II coupe en deux les auves d'argent de la selle d'or ;
Il coupe en deux très profondément le dos du cheval ;
Bref, il les tue tous deux sans remède.
Et ceux d'Espagne de pousser des cris de douleur.
Et les Français : « Notre champion, » disent-ils, « frappe de bons coups. » Aoi.

CXL

1610   Merveilleuse est la bataille et rapide.
Les Francs y frappent vigoureusement, et, pleins de rage,
Tranchent les poings, les côtes, les échines,
Et les vêtements jusqu'aux chairs vives.
Dieu! que de têtes coupées en deux,
Que de hauberts brisés et de broignons en pièces !
1615   Le sang clair coule en ruisseaux sur l'herbe verte :
« Nous n'y pouvons tenir, » s'écrient les païens.
« O grand pays, que Mahomet te maudisse!
« Ton peuple est le plus hardi des peuples. »
Pas un Sarrasin qui ne s'écrie : « Marsile, Marsile !
« Chevauche, ô roi! nous avons besoin d'aide.» Aoi.

CXLI

1620   Merveilleuse, immense est la bataille :
De leurs lances d'acier bruni , les Français donnent de bons coups.
C'est là que l'on pourrait assister à grande douleur
Et voir des milliers d'hommes blessés, sanglants, morts.
L'un gît sur l'autre : l'un sur le dos, et l'autre sur la face.
C'est là qu'on verrait tant de bons chevaux errant sur le champ de bataille
Et traînant leurs rênes qui pendent le long de leur poitrail.-
1625   Mais les païens n'y peuvent tenir plus longtemps;
Bon gré, mal gré, quittent le champ,
Et les Français de les poursuivre de vive force, la lance au dos.lacune.
Jusqu'à Marsile ils les pourchassent, et les tuent. Aoi.

CXLII

Les coups de Roland sont d'un rude et fort chevalier ;
Pour les siens, ni trêve ni repos.
'Dieu! comme les Français chevauchent rapidement!
Au trot, au galop, ils poursuivent les païens ;
Ils vont dans le sang rouge jusqu'au milieu du corps.
Leurs épées d'acier sont tordues et brisées :
Pour se défendre ils n'ont plus d'armes.
Ils se souviennent alors de leurs cors et de leurs clairons,
Et chacun d'eux se sent plus fort.
« Maudit, » s'écrient les païens, « maudit soit le jour où nous vînmes aux défilés;
« C'est nous qui en porterons tout le dommage, »
Ils laissent le champ de bataille , ils tournent le dos aux Français,
Et ceux-ci de les tailler à grands coups d'épée.
La traînée des morts va jusqu'au roi Marsile.   Aoi.

CXLIII

Marsile assiste au martyre de sa gent;
Il fait sonner ses cors et ses trompettes;
1630   Puis, avec sa grande armée, avec tout son ban, il monte à cheval.
En tête s'avance un Sarrasin nommé Abîme :
Il n'en est pas de plus félon que lui ;
Il est chargé de crimes, chargé de félonies.
Point ne croit en Dieu, le fils de sainte Marie ;
1635   II est noir comme poix fondue ;
Il préfère la trahison et la perfidie
A tout l'or de la Galicie;
Aucun homme ne l'a jamais vu ni plaisanter ni rire;
D'ailleurs il est hardi et d'une bravoure folle :
1640   C'est ce qui le fait aimer de Marsile,
Et c'est lui qui porte le Dragon du Roi, signe de ralliement pour toute l'armée.
Turpin ne saurait aimer ce païen ;
Dès qu'il le voit, il a soif de le frapper.
Et, fort tranquillement, se dit en lui-même :
1645 « Ce Sarrasin me semble bien hérétique ;
« Jamais je n'aimai les couards ni la couardise.
« Plutôt mourir que de ne pas aller le tuer. » Aoi.

CXLIV

C'est l'Archevêque qui commence la bataille ;
Il monte le cheval qu'il enleva jadis à Grossaille.
1650   Grossaille est un roi que Turpin tua en Danemark.
Quant au cheval , il est léger et taillé pour la course ;
Il a les pieds bien taillés, les jambes plates,
La cuisse courte, la croupe large,
Les côtés longs et l'échiné haute ;
Jusqu'au bas de la gorge, il a le cou bien fait ;
1655   Sa queue est blanche, et sa crinière jaune ;
Ses oreilles petites , et sa tête fauve.
Il n'y a pas de bête qui lui soit comparable.
L'Archevêque l'éperonne, et il y va de si grand cœur,
Lâchant le frein d'or et les rênes,
Qu'il ne peut manquer de se trouver face à face avec Abîme.
1660   Donc il va le frapper sur son merveilleux écu
Couvert de pierres fines, d'améthystes, de topazes,
De cristaux et d'escarboucles couleur de feu ;
Le païen le tient de l'émir Galafre ,
Et c'est un diable qui le lui donna au Val-Métas.
1665   Turpin le heurte, point ne l'épargne.
Après un tel coup, l'écu d'Abîme ne vaut plus un denier.
Il lui tranche le corps de part en part,
Et l'abat sur place, raide mort.
« Monjoie, Monjoie, » c'est le cri de Charles, c'est le sien.
Et les Français : « Voilà du courage, » disent-ils.
1670   « Cet archevêque sait bien garder sa crosse.
« Plût à Dieu que Charles en eût beaucoup de pareils! » Aoi.

CXLV

Cependant le comte Roland appelle Olivier :
« Sire compagnon, ne serez-vous pas de mon avis?
« L'Archevêque est un excellent chevalier,
« Et sous le ciel il n'en est pas de meilleur :
1675   « Comme il sait frapper de la lance et de l'épieu !
« — Eh bien! » répond Olivier, <r courons l'aider. »
A ces mots, les Français recommencent la bataille.
Durs y sont les coups, et rude y est la mêlée.
Les chrétiens y souffrent grande douleur. lacune. Aoi.

CXLVI

Ils ont perdu leurs armes, les Français de France,
Mais ils ont encore trois cents épées nues.
Sur les heaumes luisants ils frappent et refrappent encore.
Dieu! que de têtes fendues par le milieu!
Que de hauberts en pièces ! que de broignes rompues ! '
Les pieds, les poings, le visage , ils coupent et tranchent tout.
« Ces Français nous défigurent, » s'écrient les païens,
" Qui ne se défend n'a cure de sa vie. »
Et ils vont droit à Marsile ;
« A l'aide, à l'aide, bon roi. »
Marsile les entend, Marsile s'écrie :
« grande terre, que Mahomet te détruise,
«. Puisque ta race a vaincu la mienne !
« Ne nous ont-ils pas déjà enlevé assez de nos cités,
« Que tient aujourd'hui Charles à la barbe chenue 1 ?
« Il a conquis Rome, la Calabre et la Pouille,
« Il a conquis Constantinople et Saxe la puissante.
« Ah! plutôt mourir que de m? enfuir devant ces Français.
« Que nul ne pense à sa propre sûreté : frappez.
« Si Roland meurt , c'en est fait de la force de Charles ;
« S'il vit, c'en est fait de la nôtre! »     Aoi.


CXLVII

Les félons Sarrasins frappent grands coups de lance
Sur ces écus, sur ces heaumes qui flamboient au soleil.
On n'entend que le bruit du fer et de l'acier ;
Les étincelles en volent jusqu'aux deux.
Que de ruisseaux de sang et de cervelles !
Roland a grand deuil au cœur
De voir mourir tant de bons vassaux capitaines.
Alors il se souvient de la terre de France
Et de son oncle le bon roi Charlemagne ;
Et, qu'il le veuille ou non, ces pensées changent tout son cœur. Aoi.


CXLVIII

Il est entré dans la mêlée, le comte Roland,
Et ne cesse d'y frapper de grands coups.
Dans sa main est Durendal, sa bonne épée, qu'il a tirée du fourreau :
Il perce les hauberts, il brise les heaumes,
Il tranche les corps, les poings, les têtes,
Il jette à terre des centaines de païens
Qui tous se croyaient de bons vassaux.   Aoi.

CXLIX

De l'autre côté est Olivier,
Qui assaillit les païens et frappe de rudes coups !
Il tire du fourreau Hauteclaire, qu'il aime tant :
Fors Durendal, il n'en est pas de meilleure sous le ciel.
En son poing le Comte la tient, et vaillamment se bat.
Jusqu'aux bras il a du sang rouge.
« Dieu ! » s'écrie Roland, « que voilà un bon vassal!
« Eh! noble comte , si loyal et si preux,
« Voici le jour où notre amitié prendra fin,
« Voici le jour de la douloureuse séparation.
« L' Empereur ne nous verra plus,
« Et jamais il n'y aura eu si grande douleur en douce France.
« Pas un Français, pas un qui ne prie pour nous
« Et ne fasse oraison dans les moutiers.
« Quant à nos âmes, elles seront en paradis. »
Olivier l'entend, éperonne son cheval,
Et, à travers la mêlée, s'en vient tout près de Roland :
« Compagnon, venez par ici, » se disent-ils mutuellement ;
« S'il plaît à Dieu, nous ne mourrons pas l'un sans l'autre.   Aoi.

CL

1680   Ah! quel spectacle de voir Roland et Olivier
Combattre et frapper du fer de leurs épées !
L'Archevêque, lui, frappe de sa lance.
On peut savoir le nombre de ceux qu'ils tuèrent :
Ce nombre est écrit dans les chartes, dans les brefs,
1685   Et la Geste dit qu'il y en eut plus de quatre mille...
Aux quatre premiers chocs tout va bien pour les Français;
Mais le cinquième leur fut fatal et terrible ;
Tous les chevaliers de France y sont tués.
Dieu n'en a épargné que soixante;
1690   Mais ceux-là, avant de mourir, ils se vendront cher. Aoi.




Notes originales

1225. Des deux éperons d'or

1225.↑ Des deux éperons d'or. « L'éperon, aux XIe et XIIe siècles , était d'or ou doré. Sa forme générale n'a pas changé. C'est une talonnière, à deux branches recourbées, attachée au pied par une bride et un sous-pied, et portant une tige pointue destinée à aiguillonner le cheval. L'extrémité seule de la tige a varié dans sa disposition. Jusqu'aux premières années du XIIIe siècle , les sceaux représentent l'éperon armé d'un petit fer de lance qui est de forme conique ou losangée. » (Demay, le Costume de guerre, p. 145.[NDLR 1])

1229. Arçons

1229.↑ « Les arçons, ce sont les parties les plus relevées en avant et en arrière de la selle, dont les Orientaux ont conservé la forme et le vaste développement.

Arciones vocamus ab arcu, quod in niodum arcus sint incurvi. (Saumaise.)

Plusieurs arçons de derrière , des XIIe, XIIIe et XIVe siècles, sont parvenus jusqu'à nous , les uns en métal repoussé, émaillé ou ciselé, les autres en bois sculpté.

« Pierre de Blois, au XIIe siècle, parle de combats de cavalerie peints sur les arçons (?), et le moine Théophile décrit cette ornementation comme étant de vogue, et dès longtemps établie. » (Glossaire des émaux, par L. de Laborde, au mot Arçons.)

1263. La boucle

1263.↑ La boucle. C'est la proéminence qui est au centre de l'écu, l'antique umbo, que l'on trouve dans le bouclier gaulois, romain et frank. (Voir un dessin très curieux dans l'Histoire du costume, de J. Quicherat, p. 89.) Les boucles des écus étaient composées d'une armature en fer qui faisait saillie, qui formait mamelon. Dans les écus de luxe on réservait parfois un creux au milieu de cette armature, et l'on y mettait une boule de métal précieux ou de cristal. De là ces mots : bucle de cristal ou bucle d'or mier. Cf. bucle orée, etc.

1326. Le heaume où les escarboucles étincellent

1326.↑ Le heaume où les escarboucles étincellent. Le heaume, comme nous l'avons dit, est en forme de cône; il est bordé d'un cercle, d'une bande de métal qui est ornementée. Et il est souvent renforcé dans toute sa hauteur par quatre autres bandes de métal, également ornementées, lesquelles viennent aboutir et se croiser à son sommet. C'est sur ces bandes et sur le cercle que l'on plaçait des pierres précieuses ou de la verroterie. Voyez Demay, le Costume de guerre, p. 132.

1331. La selle

1331.↑ La selle comprend à cette époque :

1° des arçonnières ;
2° des quartiers coupés carrément et enrichis de broderies quadrillées ;
3° deux sangles, distantes l'une de l'autre ;
4° un poitrail formé d'une bande de cuir à franges ;
5° des étriers arrondis et surbaissés, lesquels sont suspendus par des étrivières tantôt de cuir, tantôt de chainette ;
6° une couverture carrée.

Voyez Demay, le Costume de guerre, p, 163.

1363. L'épée Hauteclaire

1363.↑ L'épée Hauteclaire est, d'après plusieurs de nos vieux poèmes, l'œuvre du forgeron Veland ; d'après quelques autres, de Munificant. L'auteur de Girars de Viane nous raconte tout au long l'histoire de cette fameuse épée :

« Elle appartenait autrefois à l'empereur de Rome Closamont , qui la perdit dans un bois. Des faucheurs la retrouvèrent et l'apportèrent au Pape. Pépin s'en empara, lorsqu'il vint à Rome; puis il la donna au duc Beuves, qui la vendit à un Juif. Et c'est ce Juif qui la céda à Olivier, au moment même où il allait engager, sous les murs de Vienne, son grand duel avec Roland. »

1379. Sorel

1379.↑ . Nous avons fait de « Sorel » le nom d'un cheval , ce qui nous semble justifié par le vers suivant : le manuscrit de Lyon donne Morel.

Cf. les noms donnés par nos épiques aux chevaux de nos autres héros : le cheval d'Ogier s'appelle Broiefort, relui de Renaud de Montauban, Bayard ; celui de Guillaume d'Orange, Baucent, etc. etc.

Déjà nous connaissons Tencendur et Veillantif.

1411. Lacune comblée

1411.↑ Voir la note du vers 330[NDLR 2].

1428. Jusqu'aux saints de Cologne

1428.↑ Jusqu'aux saints de Cologne dans le manuscrit d'Oxford on lit seulement : jusqu'au seinz. Nous n'avons aucune certitude sur le véritable sens de ce dernier mol ; mais nous sommes tenté de croire qu'il s'agit en effet de Cologne, laquelle a été surnommée « la sainte », à raison de ses innombrables reliques. Cinquante martyrs de la légion Tbébéenne y reposaient dans une basi- lique couverte de mosaïques et d'or, qui depuis une haute antiquité portait le nom de Sancti aurei. Nous avons là- dessus un texte de Grégoire de Tours ( De Gloria Martyrum, I, lxii), et une inscription du vi e siècle. Cologne, atout le moins, conviendrait bien comme point extrême de la France : « Du mont Saint-Michel aux saints de Cologne, et de Besançon à Wissant. » = Les mss. de Paris , de Lyon et de Cambridge nous donnent Rains.

1437. Lacune comblée

1437.↑ Voir la note du vers 330[NDLR 2].

1443. La geste de France.

1443.↑ La geste de France C'est une de ces prétendues chroniques dont nos épiques citent volontiers le témoignage. Il s'agit sans doute d'une plus ancienne chanson ou d'une tradition orale.

1448. Lacune comblée

1448.↑ Voir la note du vers 330[NDLR 2].

1482. Lacune comblée

1482.↑ Voir la note du vers 330[NDLR 2].

1493. Le frein

1493.↑ Le frein[NDLR 3] Le mors est à branches longues, reliées à l'extrémité par une traverse, laquelle est munie de deux trous où s'attachent les rênes. Celles-ci, en cuir ou en chaînette se terminent par un anneau de fer ou par un nœud, (Voir notre figure du v. 384.)

1523. C’est ce Valdabron qui jadis prit Jérusalem

1523.↑ En 1012[NDLR 4], le calife Hakem persécuta les chrétiens, détruisit la grande église de Jérusalem et fit crever les yeux au patriarche Jérémie. Le retentissement de ces crimes dut être grand en Europe, et ils ont peut-être inspiré l'auteur de notre Roland ou un de ses devanciers. Cf. ce que nous avons dit de Geoffroi d'Anjou (vers 106 et de Richard de Normandie (vers 171), lesquels sont morts tons deux à la fin du Xe siècle, et qui jouent un rôle si important dans notre poème. Ces diverses traditions, qui remontent aux premiers Capétiens, sont venues se joindre, dans notre action épique, à des traditions évidemment carlovingiennes, comme celles du désastre même de Roncevaux et de la mort de Roland.

1602. Nasal

1602.↑ Nasal C'est la partie du heaume destinée à protéger le nez. Voir, dans nos précédentes éditions, l'Eclaircissement sur le costume de guerre. Voici , d'après le sceau de Matthieu III, comte de Beaumont-sur-Oise, en 1177. un exemple de l'effet produit par le nasal.

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 90 fig 2.png

1604. Jazerenc

1604.↑ Jazerenc Le jaseran ou jaseron, c'est, encore aujourd'hui, de la maille ou de la chaînette. Un osberc jazerenc est donc « un haubert à mailles », et notre poète oppose sans doute cette armure perfectionnée à l'ancienne brunie de cuir.

1605. Auves

1605.↑ Les auves sonl les côtés de la selle, bien distincts des arçons. (Voir les notes des vers 1229 et 1331.) On lit dans Flore et Blanche-fleur

- Sele ot de mult riche façon;
Les auves sont l'autre manière, etc.

1627. Lacune comblée

1627.↑ Voir la note du vers 330[NDLR 2].

1651. Quant au cheval

1651.↑ Quant au cheval etc. Le type du beau cheval est presque partout le même dans nos Chansons. Aux vers de Roland on peut comparer ceux de Gui de Bourgogne (XIIIe siècle) :

« Il ot le costé blanc comme cisne de mer;
Les jambes fors et roides, les piés plas et coupés,
La teste corle et megre et les eus allumés,
Et petite oreillette, et mult large le nés. »
(V. 2326-2329.)

D'ailleurs il n'y a pas trace dans notre poème de cet amour profond du chevalier pour son cheval, qui trouve son expression dans Ogier', dans Aliscans, etc.

1663. Galafre

1663.↑ Il s'agit peut-être de cet émir Galafre, qui joue un si grand rôle dans la légende de l'oncle de Roland. Galafre est, en effet, ce roi de Tolède auprès duquel dut s'enfuir le jeune Charles, persécuté par ses deux frères, Heudri et Lanfroi. C'est à sa cour que le fds légitime de Pépin se cacha long- temps, sous le nom de Mainet; c'est la fille de Galafre enfin, c'est Galienne, qui devint alors la fiancée du futur empereur.

1679. Lacune comblée

1679.↑ Voir la note du vers 330[NDLR 2].


Facsimilés

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 124.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 125.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 126.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 127.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 128.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 129.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 130.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 131.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 132.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 133.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 134.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 135.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 136.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 137.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 138.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 139.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 140.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 141.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 142.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 143.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 144.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 145.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 146.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 147.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 148.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 149.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 150.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 151.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 152.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 153.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 154.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 155.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 156.jpg

Voir aussi

Notes
  1. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k95365f/f154.item
  2. 2,0, 2,1, 2,2, 2,3, 2,4 et 2,5 L'ouvrage initial contient ici 318. Or la note visée est celle du vers 330. Nous avons donc modifié le texte pour pointer sur la bonne note.
  3. frein est le mot contenu dans le vers original.
  4. Plus précisément, le Saint-Sépulcre fut détruit en 1009 par le calife Al-Hakin (et il fut rebâti sous son successeur).