Henrietta Lacks (InfoNum 2015-2016)

De Wicri Incubateur
Ce tableau de Albert Anker illustre une activité à caractère pédagogique sur une page Espace dédié à un travail pédagogique
IUT Charlemagne - InfoNum2 2015-2016
Portrait d'Henrietta Lacks

Les cellules d’Henrietta Lacks

Histoire

Au mois de février 1951, l’histoire de la médecine fut bouleversée par une jeune mère de famille issue de la communauté noire de Baltimore, aux États-unis. A cette époque, le Dr George Otto Gey dirige le service de recherche sur la culture des tissus humains à l’hôpital John Hopkins de Baltimore. Il poursuit alors un seul but : vaincre le cancer. Pour ce faire, sa femme et lui venaient de passer plus de 20 ans à essayer de maintenir en culture des cellules cancéreuses afin de pouvoir les étudier. En vain. Jusqu’au jour où leur chemin croisa celui d’Henrietta Lacks…

Ce jour-là, quelques instants avant que la médecine n’entre dans un nouvel âge, Henrietta Lacks est étendue dans une salle de l’hôpital Hopkins réservée aux noirs. Mère de famille agée de 31 ans, elle vient pour se faire soigner une tumeur maligne au col de l’utérus détectée huit jours plus tôt. Le gynécologue qui la traite au radium prélève un échantillon de sa tumeur et le fait passer au Dr Gey, qui fait alors une découverte sans précédent : en plus d’être immortelles, les cellules cancéreuses d’Henrietta Lacks prolifèrent sans limite.

Jusqu’ici, on n'avait jamais pu cultiver de cellules humaines à l’extérieur d’un corps. A cause du faible nombre de divisions, la lignée cellulaire finissait par s’éteindre. Mais la présence d’une enzyme particulière dans les cellules d’Henrietta faisait que celles-ci se divisaient indéfiniment, si bien qu’on pouvait non seulement les étudier, mais également les distribuer dans d’autres laboratoires. Elles furent baptisées cellules HeLa (pour Henrietta Lacks).


Henrietta Lacks à la fin des années 40

Si les cellules cancéreuses d’Henrietta prospéraient à toute vitesse dans les tubes à essai, elles faisaient de même dans son organisme, et la malheureuse mourut quelques mois plus tard, le 5 octobre 1951. Ce qu’elle ignorait, c’est que ses cellules continueraient à vivre. Elle qui n’avait jamais traversé plus longue distance que celle séparant la Virginie de Baltimore, elle ne put jamais savoir que ses cellules se multiplieraient dans les laboratoires du monde entier. Comment cette petite fille d’esclaves aurait-t-elle pu imaginer que des parcelles d’elle-même seraient envoyées jusque dans l’espace pour étudier les effets de la gravité sur les cellules humaines? Et qu’elles permettraient de guérir la polio?

Aujourd’hui encore, les cellules HeLa constituent la lignée standard dans le cadre d’innombrables études liées à la cancérologie, la biologie, ou encore l’effet des radiations. Elles ont permis de remporter des prix Nobel. Elles ont sauvé des vies. Et elles sont tellement nombreuses à présent que leur biomasse dépasse celle du corps tout entier d’Henrietta lorsque celle-ci était vivante.

Mais si de nombreux scientifiques honorent maintenant la mémoire d’Henrietta Lacks pour son inestimable contribution à l’avancée de la médecine, il faut préciser qu’elle fut enterrée sans sépulture décente, et qu’elle ne fut même pas mise au courant du prélèvement pratiqué sur elle à l’hôpital. Sa famille elle-même ne l’apprit que 20 ans plus tard. Les cellules d’Henrietta Lacks sont immortelles, puisse son souvenir l’être aussi.

Controverse

La publication, en mars dernier, du code génétique des célèbres cellules cancéreuses de Henrietta Lacks (HeLa) par des biologistes du Laboratoire européen de biologie moléculaire (EMBL) à Heidelberg a provoqué une violente polémique aux États-Unis. Les membres de la famille Lacks accusaient les chercheurs d'avoir publié des données qui relevaient des sphères « familiales et privées » sans leur accord. En 1951, les cellules cancéreuses avaient été prélevées sur la jeune malade américaine sans son consentement, ce qui serait aujourd'hui impossible avec les règles éthiques en vigueur. Les descendants des cinq enfants de Henrietta Lacks craignaient en fait que ne soient rendues publiques des mutations génétiques dont ils auraient pu hériter. La crise n'a trouvé une issue que la semaine dernière, avec un accord passé entre les Instituts américains de la santé (NIH) et la famille Lacks. Ces derniers obtenant un droit de regard sur ce qui pourra ou non être publié à l'avenir. Mais, assez ironiquement, les chercheurs allemands qui ont décrypté le génome des cellules HeLa ont trouvé qu'elles contenaient beaucoup trop de mutations inhabituelles, et ne devraient plus servir de modèle universel des cellules cancéreuses.

Source

  • Les Cellules d'Henrietta Lacks, repris de Axolot Blog
  • Pourquoi les cellules d'Henrietta Lacks sont immortelles ?, repris de Le Figaro


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