Les nouvelles frontières de la connaissance (2014) CSRT, partie 2, section C
Cette page introduit la dernière section de la deuxième partie du rapport « Les nouvelles frontières de la connaissance» rédigé en 2014 par le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT) |
Plan du rapport
Introduction et cadrage général
Partie 2 : La production de connaissance
Les éléments de pagination contenant un w (wicri) ne sont pas explicites dans l'original
Accès à l'original
Auteurs et rédacteurs
Claude Saunier st Isabelle de Lamberterie sont les auteurs de ce rapport. Un groupe de travail a pris part à la rédaction. Il est composé de : Jean-Pierre ALIX, Claude AUFORT, Dominique BALLUTAUD, Pierre-Etienne BOST, François de CHARENTENAY, Sonia ESCAICH, Laurent GOUZENES, Robert MAHLER, Pascale MOLLIER, Irène NENNER, Martine PRETCEILLE, Claudine TIERCELIN, Renée VENTURA, Catherine VERGELY, Francis-André WOLLMAN. |
La connaissance : obstacles et perspective
Les développements précédents et leur positivisme affiché pourraient conduire à la conclusion que le monde de la recherche ne connaît aucun problème et répond totalement aux besoins de la société. La réalité de la crise, dans la diversité de ses manifestations et dans sa persistance, qui résulte d’une incapacité à anticiper les mutations rappelle au contraire l’incapacité de la connaissance à régler seule les problèmes de notre époque. Cela renvoie à la fois à son articulation, décisive, avec le corps social, qui fera l’objet de la troisième partie du rapport. Mais le constat conduit aussi à identifier les obstacles rencontrés dans la production de connaissance afin d’esquisser quelles pistes de réflexion visant à améliorer le dispositif actuel.
Le positionnement politique
- Le constat
L’un des obstacles que rencontre actuellement le monde de la recherche est l’absence de lisibilité de son positionnement au sein de la société, et le flou sur ses perspectives en matière d’organisation, de moyens, d’objectifs. Ce constat n’est pas propre à la communauté des chercheurs. Il est général. Mais il constitue un frein à l’effervescence, à l’engagement personnel et à l’imagination qui sont le propre de la production intellectuelle. De ce point de vue les messages envoyés par les responsables politiques au niveau européen comme au plan national sont contre-productifs ou ne se situent pas à la hauteur des enjeux actuels. Les discours en restent à l’incantation. Les initiatives, lorsqu’il y en a, comme avec les grands investissements sont brouillonnes et aggravent la confusion. Les tentatives de réformes comme avec la loi d’orientation de la recherche, qui ouvre pourtant quelques perspectives, manquent de souffle et ne positionnent pas la connaissance au coeur d’un projet politique général par ailleurs insuffisamment affirmé.
Il en résulte une perte de dynamique globale dans la production de la connaissance alors même que celle-ci par ses acquis et son expertise, peut apporter un soutien déterminant à la solution des grands problèmes économiques, sociaux et environnementaux actuels.
Recommandations I du Conseil A propos de la production de la connaissance et de son positionnement politique, le CSRT recommande :
|
Les moyens financiers
- Le diagnostic
Leur insuffisance est régulièrement présentée comme l’un des principaux obstacles à la production de connaissance. Ils sont pourtant aujourd’hui sans commune mesure avec les engagements antérieurs, et, pour l’Union Européenne, ils situent la zone parmi les régions les mieux dotées du monde. Par ailleurs il n’est pas clairement établi que la production de connaissances soit strictement corrélée aux moyens financiers mis à la disposition de la recherche. Cependant, la comparaison macro-économique entre les crédits affectés et les résultats enregistrés établit le lien entre les deux sur une longue période. Ce constat global incontestable conduit naturellement à poser la question des engagements financiers au sein de l’Union Européenne, qui sont très loin d’atteindre l’objectif de 3% du PIB en 2010 fixé par la stratégie de Lisbonne, avec seulement 2% en 2010, et en quasi-stagnation alors que les pays émergeants, et singulièrement la Chine, font preuve d’un grand volontarisme et que le Japon se situe à 3,45% et les Etats Unis à 2,79% en 2008. Cette timidité n’est pas sans conséquences. Un des grands noms de la recherche en nanosciences en France a choisi de poursuivre à temps partiel ses activités à Singapour avec la création de laboratoires nouveaux en raison du volume des dotations qui lui étaient offertes. Il ne s’agit pas du développement personnel de l’esprit de lucre mais de la satisfaction d’un chercheur qui saisit l’opportunité de donner une nouvelle ampleur à la poursuite de ses travaux.
Pour la France, la quasi sanctuarisation des dotations d’origine publique dans un contexte budgétaire global pourtant tendu est plutôt une bonne nouvelle. Avec un correctif significatif : le Crédit Impôt Recherche avec ses 5 Milliards d’Euros annuels représente une part significative de l’engagement public. La Cour des Comptes vient de publier un avis critique sur l’efficacité du dispositif qui, dans les faits, est conçu davantage comme un mécanisme de compensation fiscale que comme une aide à la recherche. Le rapport du CSRT consacré en 2012 au CIR peut être consulté utilement.
Mais, pour l’Europe comme pour la France, l’obstacle financier vient moins du volume des moyens alloués que des modalités d’attribution. Plus précisément, la généralisation des procédures de financement par appel d’offres et projets a imposé la logique du court terme et du retour immédiat sur investissement à la recherche, amputant le temps de production des chercheurs d’une part significative, entre 20 et 30%, aux obligations administratives. Cet obstacle n’est pas seulement propre à l’Europe. Les Etats Unis ont la réputation de l’efficacité, et pourtant des équipes de recherche performantes s’interrogent sur leur avenir et leur pérennité qui dépendent de leur réussite dans la chasse aux crédits. L’application excessive de la procédure d’appel d’offre est un élément de déstabilisation des équipes de recherche, de perte d’efficacité immédiate et d’une vision restrictive du temps de la recherche. On pourrait en effet considérer que le court ou moyen terme est compatible avec la recherche finalisée, mais en opposition avec la recherche cognitive qui s’inscrit dans des durées plus longues, voire indéterminées.
Recommandations II du Conseil A propos de la production de la connaissance et des moyens financiers nécessaires, le CSRT recommande :
|
L'ouverture au Monde
- Le constat
La réalité de la production de connaissance est mondiale. Le fait n’est pas nouveau, mais il est aujourd’hui incontournable. Les instruments de cette production, du laboratoire de base aux institutions les plus massives, doivent intégrer pleinement cette problématique d’ouverture. Elle vise l’espace européen mais aussi l’ensemble du monde, compte tenu de la nouvelle configuration mondiale de la recherche. Or cette nécessité d’ouverture n’est pas suffisamment prise en compte par la communauté de la recherche en France. Les résistances culturelles, financières, administratives, l’absence de volonté politique des pouvoirs publics comme des responsables des organismes de recherche constituent autant d’obstacles à une démarche pourtant évidente.
Recommandations III du Conseil Concernant la production de la connaissance dans un environnement mondial, le CSRT recommande :
|