Les nouvelles frontières de la connaissance (2014) CSRT, partie 2
La production de connaissance
Introduction
Le cadrage général est donc maintenant établi, le contexte des mutations multiples et simultanées dans lequel s’inscrit la réflexion est rappelé, la finalité du rapport destiné à définir une vision volontariste est affirmée. Il s’agit maintenant d’aborder le coeur de cette approche des « frontières de la connaissance » par une approche de la production de connaissance.
Celle-ci suppose quelques clarifications préalables.
Nous n’entendons pas traiter ici de la Connaissance avec un C majuscule, ce qui serait la manifestation d’une prétention à une vision globale, voire totale, peut-être métaphysique, qui n’est pas dans le champ de notre intention et moins encore dans nos moyens. La connaissance que nous allons tenter d’explorer est conçue comme l’une des données, certes centrale mais non unique, qui structure la civilisation contemporaine, aux côtés d’autres composants tels que les religions, l’organisation des pouvoirs politiques, les mécanismes de l’économie et la structuration de la société. Sans nier ou ignorer la spécificité et l’importance de la connaissance nous la considérerons ici comme un élément constitutif, parmi d’autres, du monde actuel.
Cette relativisation de la connaissance ne signifie pas un appauvrissement du concept. Nous entendrons donc celui-ci comme référence commune à la diversité des types de connaissances que nous allons aborder. On retrouvera donc ici la distinction classique entre la connaissance cognitive ou fondamentale et la connaissance finalisée ou appliquée. Nous n’entendons pas revenir sur cette distinction qui repose sur des finalités radicalement différentes. La première vise à connaître, à comprendre, à expliquer, à s’approcher de la vérité par des idées. Ses méthodes, ses instruments, son temps et ses moyens de production sont spécifiques et, par nature, s’inscrivent dans la permanence, la pérennité, l’universel. La seconde, au contraire, est ancrée dans l’actuel, l’immédiat, et tente de répondre aux besoins et aux attentes exprimées par la société à un moment donné. Elle a pour mission d’apporter des solutions concrètes à des questions précises.
La différence de nature de ces deux grands types de connaissance suppose des modes de production spécifiques qui doivent donc être identifiés dans leur particularité. Pour autant, par-delà ces différences, nous constatons la porosité entre ces deux domaines par des passerelles multiples: des innovations technologiques de rupture reposent souvent sur des concepts théoriques issus de la connaissance cognitive, mais à l’inverse, des avancées majeures de la connaissance fondamentale sont issues de l’appliquée aussi bien dans la compréhension de la matière ou de la vie que par l’utilisation d’instruments plus performants. Notre démarche s’inscrit donc à la fois dans la distinction des différents ordres de connaissance et leur complémentarité, voire leur imbrication.
Bien entendu, notre approche de la production des connaissances est un survol. On ne dira jamais assez qu’il ne s’agit en aucun cas d’une démarche encyclopédique. Pour autant, ce survol entend couvrir l’ensemble de l’éventail des disciplines scientifiques et techniques, en ouvrant largement la porte aux sciences humaines et sociales dont les apports sont plus que jamais indispensables à la conduite des affaires en cette période de mutations multiples. Nous cheminerons en tentant de répondre à quelques questions simples :
- Quelle est la situation du dispositif actuel de production de connaissance ?
- Quel sont les moteurs et outils de cette production ?
- Quel est l’état des avancées et des perspectives de la connaissance actuelle ?
- Quels sont les obstacles aux progrès de la connaissance et les réponses envisageables ?
Sommaire de la deuxième partie
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- A) Le dispositif actuel de production de la connaissance