La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Partie 2/Le cor : Différence entre versions

De Wicri Chanson de Roland
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Fig. 17. — Le comte Roland, à grand'peine , à grande angoisse, — Et très douloureusement sonne de son olifant. ( Vers 1701 , 1702. )
(Composition de Zier.)

Facsimilés

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 157.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 158.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 159.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 160.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 161.jpg
Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 162.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 163.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 164.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 165.jpg

Les couplets (laisses)

CLI

O. => CXXVII
Le comte Roland voit la grande perte des siens,
Et parle ainsi à son compagnon Olivier :
« Beau sire, cher compagnon, au nom de Dieu (qu'il vous bénisse!)
« Voyez tous ces bons vassaux qui gisent à terre :
1695   « Certes, nous pouvons plaindre douce France la belle,
« Qui va demeurer veuve de tels barons.
«. Eh! roi, notre ami, que n'êtes-vous ici!
« Mon frère Olivier, comment pourrons -nous faire
« Pour lui mander de nos nouvelles?
1700   — Je n'en sais pas le moyen , » répond Olivier.
« Mais plutôt la mort que le déshonneur! » Aoi.

CLII

O. => CXXVIII
« — Je vais, » dit Roland, sonner mon cor,
« Et Charles l'entendra, qui passe aux défilés.
« Les Français, je vous jure, vont retourner sur leurs pas.
1705 « — Ce serait grande honte, répond Olivier.
« Tous vos parents auraient à en rougir ,
« Et ce déshonneur serait sur eux toute leur vie.
« Lorsque je vous le conseillai, vous n'en voulûtes rien faire ;
« Mais ce n'est pas moi qui vous approuverai maintenant.
1710 « Sonner de votre cor, non, ce n'est pas d'un brave.
« Puis vous avez déjà vos deux bras tout sanglants.
« — C'est vrai, » répond Roland; « j'ai donné de fiers coups! » Aoi.

CLIII

O. => CXXIX
« Notre bataille est rude, » dit Roland ;
« Je vais sonner du cor, et Charles l'entendra. »
1715   « — Ce ne serait point là du courage, » répond Olivier.
« Quand je vous le conseillai, ami, vous ne daignâtes pas le faire.
« Si l'Empereur était ici, nous n'aurions pas subi une telle perte.
« Mais ceux qui sont là -bas ne méritent aucun reproche.
« — Par cette mienne barbe , » dit encore Olivier,
1720   « Si je revois jamais la belle Aude, ma sœur,
« Vous ne coucherez jamais entre ses bras. » Aoi.

CLIV

O. => CXXX
« — Pourquoi me garder rancune? » dit Roland.
« — C'est votre faute, » lui répond Olivier;
« Le courage sensé n'a rien de commun avec la démence,
1725   « Et la mesure vaut mieux que la fureur.
« Si tant de Français sont morts, c'est votre folie qui les a tués;
« Et voilà que maintenant nous ne pourrons plus servir l'Empereur.
« Si vous m'aviez cru, notre seigneur serait ici;
« Cette bataille , nous l'aurions livrée et gagnée ;
1730   « Le roi Marsile eût été pris et tué.
« Ah! votre vaillance, Roland, nous sera bien funeste ;
« Désormais vous ne pourrez rien faire pour Charlemagne,
« L'homme le plus grand que l'on verra d'ici au jugement.
« Quant à vous, vous allez mourir, et la France va tomber dans le déshonneur.
1735   « Puis c'est aujourd'hui que va finir notre loyale amitié :
« Avant ce soir nous serons séparés et bien douloureusement! »
Et voilà Roland et Olivier qui pleurent l'un pour l'autre. Aoi.

CLV

L'Archevêque entend leur dispute

Et pique son cheval de ses éperons d'or pur;


160 LA CHANSON DE ROLAND

Il vient vers eux, et se prend à les gourmander : 1740 « Sire Roland, et vous, sire Olivier,

« Je vous conjure de ne point vous courroucer ainsi. . « Voyez nos Français, qui sont condamnés à mort.

« Votre cor ne nous sauverait pas :

« Charles est bien loin et tardera trop à venir.

« Mais néanmoins il serait mieux d'en sonner.

« Vienne le roi , il saura nous venger, 1745 « Et les païens ne s'en retourneront pas joyeu- sement.

« Les Français de Charlemagne descendront de leurs chevaux ,

« Ils nous trouveront morts et coupés en pièces,

« Recueilleront nos chefs et nos corps

a Et nous mettront en bières, à dos de cheval.

a De deuil et de pitié ils seront tout en larmes; 1750 « Puis ils nous enterreront dans les parvis des mou- tiers ;

« Les chiens , les sangliers et les loups ne nous man- geront pas.

« — Vous dites bien, » répond Roland. Aoi.

GLVI

« Sire Roland, il vous faut sonner votre cor

« Pour que Charles l 'entende, qui passe aux défilés.

« La merveilleuse armée du roi reviendra sur ses pas,

« Elle nous trouvera morts et en pièces ;

« Mais ceux de France vengeront les nôtres

« Que les païens auront tués dans la bataille;

« Ils emporteront nos corps.

« Les sangliers, les chiens et les loups ne les man- geront pas.

« — Voilà une bonne parole, » dit Roland. Aoi.

CLVII


Roland a mis l'olifant à ses lèvres ;

Il l'embouche bien, et le sonne d'une puissante haleine. 1755 Les puys sont hauts, et le son va bien loin.

On en entendit l'écho à trente lieues.

Charles et toute l'armée l'ont entendu ,

Et le Roi dit : « Nos hommes ont bataille. >

.Mais Ganelon lui répondit : 1760 « Si c'était un autre qui le dit, on le traiterait de menteur. Aoi.

GLVIII

'^Le comte Roland, à grand'peine, à grande. angoisse,

Et très douloureusement sonne son olifant. De sa bouche jaillit le sang vermeil, De son front la tempe est rompue ; 1765 Mais de son cor le son alla si loin !

Charles l'entend, qui passe aux défilés, Naimes l'entend, les Français l'écoutent , Et le Roi dit : a C'est le cor de Roland; <r Certes, il n'en sonnerait pas, s'il n'était en ba- taille. 1770 « — 11 n'y a pas de bataille, » dit Ganelon. « Vous êtes vieux, tout blanc et tout fleuri; Ces paroles vous font ressembler à un enfant. D'ailleurs vous connaissez le grand orgueil de Roland , « Le fort, le preux, le grand, le prodigieux Bo- land; C'est merveille que Dieu le souffre si longtemps. 177.) Déjà il prit Nobles sans votre ordre. « Les Sarrasins sortirent de la ville,


Notes de l'article

1752. Lacune comblée. Voir la note du v. 318.

177."). Déjà il prit '• i la note du v. 198

Fin de chapitre brut d'OCR








il 



162 LA CHANSON DE ROLAND 

« Et livrèrent bataille à Roland, le bon vassal. 

« II les tua du tranchant de son épée Durendal : 

« Ensuite il fit laver à grande eau le pré ensanglanté, 

« Afin qu'il n'y parût plus rien. 

1780 « Pour un lièvre Roland corne toute la journée. 

« Avec ses pairs sans doute il est en train de rire : 

« Et puis qui oserait attaquer Roland? Personne. 

« Chevauchez , Sire ; pourquoi faire halte ? 

« Le grand pays est très loin devant nous. » Aoi. 



GLIX 

1785 Le comte Roland a la bouche sanglante; 

De son front la tempe est brisée. 

Il sonne l'olifant à grande douleur, à grande angoisse, 

Charles et tous les Français l'entendent, 

Et le Roi dit : « Ce cor a longue haleine ! 
1790 « — Roland, » dit Naimes, « c'est Roland qui souffre 
là-bas. 

a Sur ma conscience, il y a bataille, 

« Et quelqu'un a trahi Roland : c'est celui qui feint 
avec vous. 

« Armez -vous, Sire, jetez votre cri de guerre 

« Et secourez votre noble maison : 
1795 <r Vous entendez assez la plainte de Roland. » Aoi. 



CLX 

L'Empereur fait sonner tous ses cors; 
Français descendent, et les voilà qui s'arment 
De heaumes, de hauberts, d'épées à pommeaux d'or; 
Ils ont de beaux écus, de grandes et fortes lances, 
1800 Des gonfanons blancs, rouges, bleus. 

Tous les barons du camp remontent à cheval; 
Ils éperonnent, et, tant que durent les défilés, 
Il n'en est pas un qui ne dise à l'autre : 



LA CHANSON DE ROLAND 103 



« Si nous voyions Roland avant sa mort , 
1805 « Quels beaux coups nous frapperions avec lui ! » 
Las! que sert! En retard! trop en retard! 



GLXI 

Le soir s'est éclairci, voici le jour. 
Au soleil reluisent les armes; 
Heaumes et hauberts jettent des flammes, 
1810 Et les écus aussi, si bien peints à fleurs, 
Et les lances, et les gonfanons dorés. 
L'Empereur chevauche, plein de colère; 
Tous les Français sont tristes, sont angoisseux; 
Il n'en est pas un qui ne pleure à chaudes larmes; 
1815 II n'en est pas un qui ne tremble pour Roland. 

Cependant l'Empereur a fait saisir le comte Gane- 

lon, 
Et l'a livré aux gens de sa cuisine. 
Charles appelle leur chef, nommé Begon : 
« Gardez-moi bien cet homme, » dit-il « comme un 
traître 
1820 « Qui a vendu toute ma maison. » 

Begon alors prend Ganelon, et met après lui cent 

compagnons 
De sa cuisine, des meilleurs et des pires, 
Qui vous lui épilent la barbe et les moustaches. 
Puis chacun vous lui donne quatre coups de son 

poing; 
1825 Ensuite ils vous le battent rudement à verges et à 

bâtons : 
Ils vous lui mettent une grosse chaîne au cou ; 
Ils l'enchaînent enfin comme on ferait un ours, 
Et le jettent ignominieusement sur un cheval de 

charge. 
C'est ainsi qu'ils le gardèrent jusqu'au moment de le 

rendre à Charles. A.01. 



164 LA CHANSON DE ROLAND 



CLXIII 



1830 Comme les montagnes sont hautes, énormes etiéné- 
breuses ! 

Comme les vallées sont profondes! comme les tor- 
rents sont rapides ! 

Par derrière, par devant, sonnent les trompettes de 
Charles , 

Qui toutes répondent au cor de Roland. 

L'Empereur chevauche , plein décolère. 
1835 Les Français sont en grande fureur et tout angoisseux. 

Il n'en est pas un qui ne pleure et ne sanglote, 

Pas un qui ne prie Dieu de préserver Roland 

Jusqu'à ce que, tous ensemble, ils arrivent sur le 
champ de bataille. 

Ah ! c'est alors qu'avec Roland ils frapperont de rudes 



coups 



1840 Mais, hélas! à quoi bon? Tout cela ne sert de rien : 
Ils ne peuvent arriver à temps. En retard! en retard! 

Aoi. 



CLXIII 

Le roi Charles chevauche en très grande colère ; 
Sur sa cuirasse s'étale sa barbe blanche. 
Et tous les barons de France d'éperonner vivement ; 
1845 Car il n'en est pas un qui ne soit plein de douleur 
De n'être point avec Roland le capitaine, 
Qui , en ce moment même , se bat contre les Sarrasins 

d'Espagne. 
Si Roland était blessé, un seul des siens, un seul 

survivrait -il? 
Mais, Dieu! quels soixante hommes il a encore avec 
lui! 
1850 Jamais roi, jamais capitaine n'en eut de meilleurs. 

Aoi. 



LA CHANSON DE ROLAND 105 

GLXIV 

Tant que durent les défilés, Charles chevauche. 

Quelle douleur, quelle rage en son cœur ! 

« Sainte Marie! » s' écrie- 1 -il, « aidez-nous. 

« Voici que Ganelon m'a jeté en grande tristesse. 

<( Il est écrit dans une vieille geste 

« Que les ancêtres de Ganelon furent des félons ; 

« Les félonies, chez eux, étaient une habitude. 

« 27s en firent une à Rome, au Capitole, 

« Quand ils assassinèrent le vieux César. 

« Mais ces maudits finirent mal 

« Et moururent en feu ardent et angoisseux. 

«. Ganelon est bien de leur nature. 

« Il a perdu Roland, confondu ma gent, 

« Et m'arrache vraiment la couronne de la tête. 

« La France, pour se défendre, n'a plus de cheva- 
liers ! » 

Charles pleure des yeux, tire sa barbe blanche. 

<( Malheureux! » disent les Français, « quelle douleur 
pour nous d'être nés ! » 

Ils êperonnent tant que dure le passage des défilés; 

Pas un ne retient la rêne à son cheval: 

Mais, avant que les Français soient arrivés sur le 
champ de bataille, 

Roland aura gagné la victoire 

Et mis en fuite Marsile et ses païens. Aoi. 


Voir aussi