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Les nouvelles frontières de la connaissance (2014) CSRT, partie 2, section A

De Wicri France
Révision datée du 6 août 2014 à 22:23 par imported>Jacques Ducloy
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Le dispositif actuel de production de la connaissance
 

Cette page introduit la première section (A) de la deuxième partie du rapport « Les nouvelles frontières de la connaissance» rédigé en 2014 par le Conseil supérieur de la recherche et de la technologie (CSRT)

 
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Le dispositif actuel de production de la connaissance

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L'état global de la connaissance

Une production massive sans précédent

C’est l’une des caractéristiques de notre époque. Elle est soulignée par de multiples articles et colloques. Elle est illustrée par quelques chiffres qui parlent d’eux-mêmes. Selon Victor MAYER-SCHÖNBERGER, professeur à l’Institut Internet de l’Université d’Oxford, « chacun de nous dispose de 320 fois plus d’informations que jadis la bibliothèque d’Alexandrie ». La quantité d’informations disponibles en Europe, qui avait doublé en 50 ans au XVI° siècle après Gutenberg, double maintenant tous les trois ans. Cette explosion du savoir peut être quantifiée par le nombre des articles contenus dans les encyclopédies. La Grande Encyclopédie de Diderot et D'Alembert en comptait 72 000, la Britannica 228 000, Wikipédia en français 1 400 000 et en anglais 4 300 000.

Cette explosion résulte pour une grande part, au cours des dernières décennies, de la révolution numérique qui bouleverse le paysage mondial et affecte 98% des informations accessibles, contre 25% seulement en 2000. Cette croissance vertigineuse résulte de la conjonction de plusieurs facteurs qui structurent l’univers numérique : la puissance de calcul qui double tous les 18 mois selon la « loi de Moore », l’efficacité des algorithmes qui a augmenté de 100 fois en 20 ans, et l’effondrement du prix de stockage de masse qui s’ajoutent à la création de centres de calcul de grande puissance, de réseaux supportant des transferts volumineux, de « fermes de données » gigantesques.

Les brevets ne constituent pas l’indicateur le plus fiable de la production de connaissance. Ils ne concernent qu’une partie de celle-ci. Ils donnent cependant une idée de l’évolution de cette production. On retiendra qu’en 20 ans, de 1985 à 2005, les demandes de brevets ont évolué de 900 000 à 1,6M, avec un taux moyen de croissance annuelle de 4,7%, comparable à la croissance économique mondiale. En 2005 le monde comptait 5,6M de brevets actifs. Même si le nombre de brevets délivrés est inférieur aux demandes (600 000 en 2005) la tendance générale est claire: la production de connaissance dans le monde est très forte.

Les publications scientifiques sont un second indicateur de l’activité de production de connaissance, il est vrai dans le cadre d’une approche statistique classique. Un inventaire des articles publiés en science ou ingénierie dans les revues scientifiques couvertes par le « Science Citation Index » et le «Social Science Citation Index » indique que dans le monde le nombre d’articles a connu une progression globale de 60% en 6 ans. Les chiffres, même anciens, confirment indirectement la progression massive de production de connaissance. Cette "élite des contributions" connaît une progression de 50% tous les 16 ans.

Le rapport mondial 2012 de l’éducation de l’Unesco résume et confirme la consolidation de la connaissance au travers de l’accès à l’enseignement supérieur : « le taux d’accès à l’enseignement supérieur progresse partout dans le monde ». Il atteint « 29% des jeunes en âge d’être scolarisés dans le monde en 2010, contre 18% en 1999. Ce taux progresse partout, dans les pays riches (de 56 à 73% entre 1999 et 2010) mais aussi dans les pays en voie de développement (de 11 à 22%) »

De 2000 à 2015 le nombre d’étudiants va passer de 100 à 180 Millions soit un rythme de progression bien supérieur à celui de la population globale.


L'accélération du temps de production

Sans prétendre faire même un survol de l'histoire de la production des connaissances, la démarche de caractérisation du système actuel impose d'identifier cette accélération du temps comme l'une des caractéristiques de la connaissance contemporaine. Celle-ci doit être appréciée à l'aulne des grands repères de l'histoire de l'humanité avec l'invention de l'agriculture, de l'écriture, de la métallurgie etc. Le pas de temps nécessaire à chaque est passé de centaines de milliers d'années à quelques milliers, puis centaines, puis dizaines. Il est aujourd'hui, dans certains secteurs de la connaissance, de quelques années, voire quelques mois.

Cette accélération vaut pour l'ensemble des disciplines scientifiques. Nous l'illustrerons ici par la multiplication des découvertes récentes en astronomie, avec les exo-planètes dont l'existence n'a été reconnue qu'en 1996, dont le nombre est maintenant est estimé à 60 milliards pour la seule voie lactée. Dans le secteur de la recherche fondamentale sur la matière, en quelques décennies on est passé d'une approche considérée aujourd'hui comme basique à l'inventaire complet des particules élémentaires achevé par l'identification du boson de Higgs en Juillet 2012. Quant au secteur des sciences appliquées, le temps s'emballe littéralement, singulièrement en microélectronique, avec la vérification de la loi de Moore édictée en 1962 et qui prévoyait un doublement de la puissance de calcul des microprocesseurs tous les 18 mois.

La courbe d'évolution de production des connaissances est identique à celles qui peuvent caractériser l'Histoire : démographie, production, transports etc...Cette similitude marque l'interaction évidente de la connaissance et de la société, sur laquelle il n'est pas nécessaire d'insister. Elle souligne l'importance de la question des causes de l'emballement des connaissances. On peut y voir un effet cumulatif des avancées antérieures de la science, notamment dans les disciplines fondamentales. Ce qui a été construit depuis le XIX° siècle constitue les fondations d'une science contemporaine qui s'élève d'autant plus rapidement que ces fondations sont solides, même si, par nature, elles sont en permanence remises en cause et dépassées. Ce sont les ruptures fondamentales de la connaissance issues des travaux du passé qui expliquent la rapidité des découvertes actuelles. Plus concrètement, la production de connaissances s'appuie aujourd'hui sur des outils d'une redoutable efficacité, qu'ils soient conceptuels, avec les modèles mathématiques, ou matériels avec les technologies issues du décryptage génomique ou la puissance des calculateurs amplifiée par la capacité de transfert des informations par les réseaux. Observation, analyse, conceptualisation, vérification par la confrontation : les grandes étapes de la production de connaissance ont aujourd'hui des moyens sans précédents historiques qui expliquent l'accélération actuelle.