Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse XXXV

De Wicri Chanson de Roland

Cette page concerne la laisse XXXV du manuscrit d'Oxford.

Dans le manuscrit

La laisse est contenue sur le feuillet 9 recto du manuscrit.

Elle démarre à la lettrine T.

Elle est numérotée XXXIV chez Stengel avec mention 36.

 
Page17-2140px-La Chanson de Roland - MS Oxford.djvu.jpg

Transcription et traduction par Léon Gautier


XXXV

Tant li preièrent li meillur Sarrazin Les meilleurs des païens ont tant prié Marsile,
Qu’el faldestoed s’est Marsilies asis. Qu’il s’est enfin rassis dans son fauteuil ;
Dist l’Algalifes : « Mal nus avez bailliz. Et le Calife : « Vous nous mettiez, dit-il, en vilain cas,
« Que le Franceis asmastes à ferir ; « Quand vous vouliez frapper le Français.
455 « Vus le doüssez esculter e oïr. « Il fallait l’écouter et l’entendre.
« — Sire, dist Guenes, me l’ cuvent à suffrir. « — Sire, dit Ganelon, je veux bien tout oublier ;
« Jo ne lerreie, por tut l’or que Deus fist,
« Mais jamais je ne consentirai, pour tout l’or que Dieu fit,
« Por tut l’aveir ki seit en cest païs, « Ni pour tous les trésors qui sont en ce pays,
« Que jo ne li die, se tant ai de leisir, « À ne pas dire, si l’on m’en laisse le loisir,
460 « Que Carlemagnes, li Reis poëstéifs, « Le message que Charles, le Roi très-puissant,
« Par mei li mandet sun mortel enemi. » « Vous mande à vous, son ennemi mortel. »
Afublez est d’un mantel sabelin, Ganelon était vêtu d’un manteau de zibeline,
Ki fut cuvert d’un palie alexandrin : Couvert de soie d’Alexandrie.
Getet le à tere, si l’ receit Blancandrins ; Il le jette à terre, et Blancandrin le reçoit ;
465 Mais de s’espée ne voelt mie guerpir, Mais, quant à son épée, point ne veut la quitter,
En sun puign destre par l’oret punt la tint. En son poing droit la tient par la garde dorée.
Dient païen : « Noble barun ad ci ! » Aoi. « Voilà, disent les païens, voilà un noble baron ! »

Transcription commentée de Francisque Michel

Francisque Michel-02.png
Chanson de Roland (Francisque Michel 1869) Exemplaire annoté par Paul Meyer
Navigation dans le manuscrit d'Oxford
XXXIV (W: XXXIV ) Previous CDR.png Laisse XXXV (page 15)Next CDR.png XXXVI (W: XXXVI )
Manuscrit d'Oxford Lettrine 1.png

XXXV. ( => F. M. )


Tant li prièrent li meillor Sarrazin,
Qu'el faldestoed* s'es[t] Marsilies asis.  *Fauteuil.
– Dist l'algalifes* : « Mal nos avez baillit**,  *Le calife. **Traités.
Que li Franceis asmates à férir* ;  *Essayâtes de frapper.
Vos le doussez* esculter e oïr. »  *Dussiez.
– « Sire, dist Guenes, mei la vent à suffrir*.  *Il me la faut souffrir.
Jo ne lerreie por tut l'or* que Deus fist  *Je ne laisserais pour tout l'or.
Ne por tut l'aveir ki seit* en cest païs  *L'avoir qui soit.
Que jo ne li die, se tant ai de leisir,
Que Charles li mandet, li reis poestéifs* ;  *Ce que Charles lui mande, le roi puissant.
Par mei li mandet sun mortel enemi. »
Afublez est d'un mantel sabelin*  *De martre zibeline.
Ki fut cuvert d'un palie alexandrin*,  *D'une étoffe d'Alexandrie.
Getet-le à tere, si l'receit* Blancandrin ;  *Et le reçoit.
Mais de s'espée ne volt mie guerpir*,  *Mais de son épée ne voulut pas se dessaisir.
En son puign destre par l'orié punt* la tint.  *En son poing droit par la poignée dorée.
Dient paien : « Noble baron ad ci* » AOI.  *Il y a ici.


 
RCR 543952103 85137 Page 055.jpg

Notes (version de Léon Gautier)

logo travaux partie en cours de maquettage

Chanson de Roland (1872) Gautier, II, page 096.jpg[89]

Vers 451.

Vers 451.Tuit. O. Erreur évidente, corrigée par les manuscrits de Versailles et de Venise VII : Tant fut blasmé de ses meillors amis. ═ Prièrent. Mu. Le manuscrit porte visiblement preierent, qui est très-conforme à la phonétique de notre Chanson.

Meillor
O. V. la note du vers 51.
Vers 453.

Vers 453.Nos. O. V. la note du vers 17.

Le Ms. porte : Mal nos avez baillit, et l’on peut conserver cette forme. La règle des participes, dans notre texte, n’a rien de rigoureux : « Que le régime direct précède le participe ou le suive, le participe prend tantôt l’accord et tantôt ne le prend pas. » On trouve, par exemple : La flur de France as perdut (vers 2455) ; et ailleurs : Sa culur ad perdue (v. 2299). On lit, dans certains passages de notre texte : Li Emperere ad prise sa herberge (v. 2488) ; et plus loin : Tuz lur amis qu’il i unt morz truvet (v. 2934). De ma maisnie ad faite traïsun (v. 1820) ; et plus haut : De sun osberc li a les pans rumput (v. 1558), etc. etc. Bref, les deux systèmes paraissent, à notre scribe et à notre poëte, tout aussi réguliers l’un que l’autre. (Il est inutile d’ajouter que le non-accord, comme : Mal nos avez baillit, s’explique par l’emploi du neutre : Tu nous as aimé, habes amatum nos. Habes amatum ne fait plus alors qu’un seul mot, comme amasti.) Nous avons respecté les différentes formes qu’offre notre manuscrit. Lire baillit.

Vers 455.

Vers 455.Vos. O. Chanson de Roland (1872) Gautier, II, page 097.jpg[90]

Vers 456.

Vers 456.Mei l’avent. O. La correction est de M. Müller.

Vers 458.

Vers 458.Por. O. Lire pur. (V. la note du v. 17.) ═ Le Ms. donne ne por tut l’aveir. Nous avons supprimé, pour la mesure, le ne, qui est inutile.

    1. 460 ##

Vers 460.Charlemagnes. O. V. la note du v. 94.

    1. 463 ##

Vers 463. — Nous laissons cuvert à cause de mantel, qui peut venir de mantellum et que nous pouvons présumer neutre. Mais, d’un autre côté, l’on trouve souvent la forme mantellus. (V. Primat, Bibliothèque de l’École des Chartes, XXXI, 310.) Dans ces Vers latins de la première moitié du xiie siècle, on lit mantellus, mantelle, etc. Si l’on admet cette dernière étymologie, il faut lire cuverz au lieu de cuvert. ═ Palie alexandrin. V. la note du v. 2652.

    1. 464 ##

Vers 464.Blancandrin. O. Pour le cas sujet il faut Blancandrins.

    1. 465 ##

Vers 465.Volt. O. V. la note du v. 40.

    1. 466 ##

Vers 466.Orie. O. La vraie forme de cet adjectif, dérivé d’auratus, est orez, orée, que nous donnent les vers 1811, 1283, 1605.

    1. 467 ##

Vers 467.Baron. O. V. la note des vers 17 et surtout 30.


Voir aussi

Sur ce wiki :

  1. Version numérique copiée de WikiSource :