Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse XXVIII

De Wicri Chanson de Roland

Cette page concerne la laisse XXVIII du manuscrit d'Oxford.

Dans le manuscrit

La laisse XXVI (26) est contenue dans le feuillet 7 verso du manuscrit.


 
Page14-2140px-La Chanson de Roland - MS Oxford.djvu.jpg

Transcription et traduction par Léon Gautier


L’AMBASSADE ET LE CRIME DE GANELON

XXVIII

Guenes chevalchet suz une olive halte : Voilà Ganelon qui chevauche sous de hauts oliviers...
Asemblet s’est as sarrasins messages ; Il a rejoint les messagers sarrasins :
Mais Blancandrins, ki envers lui s’atarget, Blancandrin, pour l’attendre, avait ralenti sa marche.
Par grant saveir parolet li uns al altre.
Tous deux commencent l’entretien, tous deux y sont également habiles :
370 Dist Blancandrins : « Merveillus hom est Carles,
« Quel homme merveilleux que ce Charles ! s’écrie Blancandrin.
« Ki cunquist Puille e trestute Calabre, « Il s’est rendu maître de la Calabre et de la Pouille ;
« Vers Engletere passat il la mer salse,
« Il a passé la mer salée, afin de mettre la main sur l’Angleterre,
« Ad oes seint Pere en cunquist le chevage. « Et il en a conquis le tribut pour saint Pierre.
« Que nus requert ça en la nostre Marche ? » « Mais pourquoi vient-il nous poursuivre chez nous ?
375 Guenes respunt : « Itels est sis curages : « — Telle est sa volonté, dit Ganelon,
« Jamais n’ert hom ki encuntre lui vaille. » Aoi.
« Et il n’y aura jamais d’homme qui puisse aller à l’encontre. »

Transcription commentée de Francisque Michel

Francisque Michel-02.png
Chanson de Roland (Francisque Michel 1869) Exemplaire annoté par Paul Meyer
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Manuscrit d'Oxford Lettrine 1.png

XXVIII. ( => F. M. )


Guenes chevalchet suz* une olive halte,  *Chevauche sous.
Asemblet s'est as sarrazins messag[es] * ;  *Messagers.
Mais Blancandrins, ki envers lu s'atarget*,  *Qui vers lui se retarde.
Par grant saveir parolet* li uns al altre.  *Parle.
Dist Blancandrins : « Merveillus hom est Charles,
Ki cunquist Puille e trestute* Calabre.  *La Pouille el toute.
Vers Engletere passat-il la mer salse*,  *Salée.
Ad oès seint Père en cunquist le chevage*  *Au bénéfice de S. Pierre en conquit la capitation.
Que nus requert* ça en la nostre marche**. ».  *Requiert. **Frontière.
Guenes respunt : « Itels* est sis curages,  *Tel.
Jamais n'ert* hume ki encuntre lui vaille. » AOI.  *Ne sera.
 
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Notes (version de Léon Gautier)

Chanson de Roland (1872) Gautier, II, page 092.jpg[85]

Vers 368.
Lu.
Lu. O.[2]
Vers 373.
Ad oes seint Pere en conquist le chevage.
C’est une allusion évidente au Denier de saint Pierre : « Beaucoup d’écrivains ont considéré, comme le premier auteur du Denier de saint Pierre, Ina, roi de Wessex, qui fonda à Rome la Scola Saxonum pour de pauvres pèlerins anglais et de jeunes Anglo-Saxons, et qui mourut dans cette ville en 728. Mais le silence de Bède et de tous les écrivains des siècles suivants rend cette opinion plus que douteuse. Il y a beaucoup de raisons d’attribuer cette institution aux rois Offa et Ethelwulf. Offa, roi de Mercie (✝ 796), qui attribuait ses victoires à saint Pierre, lui promit, en son nom et en celui de ses successeurs, un tribut annuel de 300 marcs... Ethelwulf, père de l’illustre roi Alfred, renouvela, durant son séjour à Rome en 855, la promesse d’Offa... Alfred, dès qu’il eut soumis les Danois, envoya le tribut annuel rétabli par son père, et, sous le règne d’Édouard (901-924), on parlait du Denier de saint Pierre comme d’une institution permanente. » (Schrödl, dans le Dict. encycl. de la théol. catholique de Welte et Wetzer, VI, pp. 183-184.)

Chanson de Roland (1872) Gautier, II, page 093.jpg[86]

Notre Chanson attribue faussement à Charles l’institution du Denier de saint Pierre. Mais, touchant sa date originelle, elle ne se trompe pas : Offa fut, en effet, contemporain de Charlemagne.
Vers 376.
N'ert
Lire plutôt iert.
Hume
Hom O. V. la note du v. 20, sur la déclinaison d’hom.
Vaille
Lire vaillet, avec le t étymologique que le scribe n’oublie presque jamais. (Cf. 1666.)

Voir aussi

Notes
  1. Version numérique copiée de WikiSource :
  2. Cette note signale simplement l'abscence du i de lui dans le manuscrit d'Oxford
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