La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Partie 3/Duel : Différence entre versions

De Wicri Chanson de Roland
(Compléments de la rédaction Wicri)
 
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<center>'''<big>{{Petites capitales|Duel entre deux empereurs </br> fin de la grande bataille}}</big>'''</center>
 
[[Fichier:Chanson de Roland Gautier 1895 page 258 fig.png|300px|right|thumb|Fig. 28. — Charles chancelle... Saint Gabriel descend près de lui. (Vers 3608-3110) (Composition de Zier.) ]]
 
[[Fichier:Chanson de Roland Gautier 1895 page 258 fig.png|300px|right|thumb|Fig. 28. — Charles chancelle... Saint Gabriel descend près de lui. (Vers 3608-3110) (Composition de Zier.) ]]
==Facsimilés==
 
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==Les couplets (laisses)==
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|3560&nbsp;&nbsp;
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| Le jour passe, la vêprée s'avance ;
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|Païens et Francs frappent de leurs épées.
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|Ceux qui rassemblèrent ces deux armées,
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|Charles et Baligant, sont des vaillants.
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|Toutefois ils n'oublient pas leurs cris d'armes.
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| « Précieuse! » crie l'Emir.
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|« Monjoie! » réplique l'Empereur.
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|Ils se reconnaissent l'un l'autre à leurs voix claires et hautes;
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|Au milieu même du champ de bataille, tous deux se rencontrent.
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|Ils se jettent l'un sur l'autre, et s'entre-donnent de grands coups.
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|Frappant de leurs épieux sur leurs écus à rosaces
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| Ils les brisent au-dessous de la large boucle
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|Et se déchirent les pans de leurs hauberts
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|Mais ils ne s'atteignent pas plus avant :
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|Les sangles de leurs chevaux sont brisées et leurs selles renversées :
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|Bref, les deux rois tombent, et les voilà par terre :
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| Vite ils se relèvent, et les voici debout.
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|Très valeureusement ils tirent alors leurs épées
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|Ce duel ne peut désormais finir.
 
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|Il ne peut s'achever sans mort d'homme.
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|Il est vaillant le roi de douce France
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|3580&nbsp;&nbsp;
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| Mais l'Émir ne le craint ni le redoute.
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|''« Tu as tué mon fils, dit alors Baligant,''
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|''« Et fort injustement tu envahis ma terre;''
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|''« Deviens mon homme, et je te la donne en fief.''
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|Tous deux ont à la main leurs épées toutes nues.
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|Et s'en donnent de furieux coups sur leurs écus.
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|Ils en tranchent le cuir et le bois, qui cependant est double ;
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|Les clous en tombent, les boucles sont en pièces.
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| Alors ils se frappent nu à nu sur leurs hauberts :
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|Des heaumes clairs jaillit le feu.
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|Ce duel ne peut en rester là :
 
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|[[File:Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 264.jpg|180px]]
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|Il faut que l'un ou l'autre reconnaisse son tort
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|Aoi
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|}
==Les couplets (laisses)==
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===<center>'''CCLXXXVIII '''</center>===
 
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===<center>'''CCLXXXIX '''</center>===
 
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===<center>'''CCXC '''</center>===
 
===<center>'''CCXC '''</center>===
 
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===<center>'''CCXCII'''</center>===
 
===<center>'''CCXCII'''</center>===
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|Quand Charles entend la sainte voix de l'ange,
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|Il n'a plus peur, il ne craint plus de mourir;
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|Les forces et le sentiment lui reviennent.
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| De son épée de France il frappe l'Émir,
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|Brise le heaume où flamboient tant de pierres précieuses,
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|Tranche la tête, d'où se répand la cervelle,
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|Jusqu'à la barbe blanche met en deux morceaux le visage ;
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|Bref, sans remède, l'abat raide mort.
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|3620&nbsp;&nbsp;
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| Puis, pour se faire reconnaître : « Monjoie ! » s'écrie-t-il.
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|A ce mot, le duc Naimes accourt;
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|Il saisit Tencendur, et le grand roi y remonte.
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|Quant aux païens, ils s'enfuient: Dieu ne veut pas qu'ils restent davantage,
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|Et les Français enfin ont ce qu'ils demandent.
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|Aoi.
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===<center>'''CCXCIII'''</center>===
 
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| Dieu le veut , les païens s'enfuient ;
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|L'Empereur et les Francs leur donnent la chasse ;
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|« Vengez- vous, » s'écrie le Roi, « vengez toutes vos souffrances ;
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|« Satisfaites vos désirs, soulagez vos cœurs;
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|« Car ce matin je vous ai vus pleurer de vos yeux. »
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| Et les Français de lui répondre : « Il le faut , il le faut ! »
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|
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|Et chacun de frapper les plus grands coups qu'il peut.
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|Ah! des païens qui furent là, il s'en échappa un bien petit nombre. Aoi.
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===<center>'''CCXCIV'''</center>===
 
===<center>'''CCXCIV'''</center>===
 
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===<center>'''CCXCV'''</center>===
 
===<center>'''CCXCV'''</center>===
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|Tous les païens sont morts ou en fuite;
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|Charles a vaincu sa bataille.
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|3650&nbsp;&nbsp;
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| De Saragosse la porte est abattue,
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|Et l'Empereur sait bien qu'on ne défendra plus la ville.
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|Il y entre avec son armée, il la prend,
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|Et les vainqueurs y couchent cette nuit.
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|
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|Notre Roi à la barbe chenue, notre Roi est plein de fierté ,
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|-
 +
|3655&nbsp;&nbsp;
 +
| Et Bramimonde lui a remis les tours de la ville ,
 +
|-
 +
|
 +
|Dix grandes et cinquante petites...
 +
|-
 +
|
 +
|Il travaille bien celui qui travaille avec l'aide de Dieu.
 +
|Aoi.
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|-
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|}
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===<center>'''CCXCVI'''</center>===
 
===<center>'''CCXCVI'''</center>===
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{|
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|-
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|
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|Le jour est passé, les ombres de la nuit tombent,
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|-
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|
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|La lune est claire, les étoiles flamboient,
 +
|-
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|3660&nbsp;&nbsp;
 +
| L'Empereur est maître de Saragosse,
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|-
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|
 +
|Mille Français, sur son ordre, parcourent la ville en tous sens,
 +
|-
 +
|
 +
|Entrent dans les mosquées et les synagogues ,
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|-
 +
|
 +
|Et, à coups de maillets de fer et de cognées,
 +
|-
 +
|
 +
|Mettent en pièces Mahomet, toutes les images, toutes les idoles.
 +
|-
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|3665&nbsp;&nbsp;
 +
| De sorcellerie, de mensonge, il ne reste plus de trace.
 +
|-
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|
 +
|Le Roi croit en Dieu et veut faire le service de Dieu.
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|-
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|Alors les évoques bénissent l'eau
 +
|-
 +
|
 +
|Et mènent les païens au baptistère.
 +
|-
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|
 +
|S'il en est un qui se refuse de faire la volonté de Charles,
 +
|-
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|3670&nbsp;&nbsp;
 +
| II le fait pendre, occire ou brûler.
 +
|-
 +
|
 +
|Ainsi l'on en baptise plus de cent mille ,
 +
|-
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|
 +
|Qui deviennent bons chrétiens. La Reine seule est mise à part.
 +
|-
 +
|
 +
|On la mènera captive en douce France,
 +
|-
 +
|
 +
|Et c'est par amour que l'Empereur veut la convertir.
 +
|Aoi.
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|-
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|}
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===<center>'''CCXCVII'''</center>===
 
===<center>'''CCXCVII'''</center>===
...
+
{|
 
+
|-
 +
|3675&nbsp;&nbsp;
 +
| La nuit passe, et le jour clair apparaît dans le ciel,
 +
|-
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|
 +
|Charles garnit alors les tours de Saragosse
 +
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|
 +
|Il y laisse mille chevaliers vaillants,
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|-
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|
 +
|Qui gardent la ville pour l'Empereur ;
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|-
 +
|
 +
|Puis, avec tous ses hommes, Charles remonte à cheval ,
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|-
 +
|3680&nbsp;&nbsp;
 +
| Emmenant Bramimonde captive ;
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|-
 +
|
 +
|Mais il ne veut lui faire que du bien...
 +
|-
 +
|
 +
|Les voilà qui s'en retournent pleins d'allégresse, pleins de fierté joyeuse.
 +
|-
 +
|
 +
|Vivement et en vainqueurs ils passent par Narbonne.
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|-
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|
 +
|Pais Charles arrive à Bordeaux, la grande et belle ville.
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|3685&nbsp;&nbsp;
 +
| C'est là que sur l'autel du baron saint Séverin
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|-
 +
|
 +
|Charles dépose l'olifant, qu'il avait rempli d'or et de mangons ;
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|-
 +
|
 +
|Et c'est là que les pèlerins peuvent encore le voir.
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|-
 +
|
 +
|Sur de grandes nefs l'Empereur traverse la Gironde ;
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|-
 +
|
 +
|Il conduit jusqu'à Blaye le corps de son neveu,
 +
|-
 +
|3690&nbsp;&nbsp;
 +
| Celui d'Olivier, le noble compagnon de Roland,
 +
|-
 +
|
 +
|Celui de l'Archevêque, qui fut si preux et si sage.
 +
|-
 +
|
 +
|On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc,
 +
|-
 +
|
 +
|A Saint-Romain, où maintenant encore gisent les barons ;
 +
|-
 +
|
 +
|Et les Français les recommandent une dernière fois, à Dieu et à tous les noms divins.
 +
|-
 +
|3695&nbsp;&nbsp;
 +
| Puis Charles chemine derechef à travers les vallées et les montagnes;
 +
|-
 +
|
 +
|Plus ne s'arrête qu'à Aix.
 +
|-
 +
|
 +
|Si bien chevauche, qu'il descend à son perron.
 +
|-
 +
|
 +
|A peine est-il arrivé dans son haut palais,
 +
|-
 +
|
 +
|Que par ses messagers il mande tous les juges de sa cour,
 +
|-
 +
|3700&nbsp;&nbsp;
 +
| Saxons et Bavarois, Lorrains et Frisons,
 +
|-
 +
|
 +
|Bourguignons et Allemands,
 +
|-
 +
|
 +
|Bretons, Normands et Poitevins,
 +
|-
 +
|
 +
|Et les plus sages de ceux de France.
 +
|-
 +
|
 +
|Alors commence le procès de Ganelon.
 +
|Aoi.
 +
|-
 +
|}
 
{{Corps article/Fin}}
 
{{Corps article/Fin}}
  
Ligne 186 : Ligne 527 :
 
se tourner vers la muraille pour prier  
 
se tourner vers la muraille pour prier  
 
Dieu et fondre en larmes : ''Et convertit Ezechias faciem suam'' {{Petites capitales|ad parietem,}} ''et oravit ad Dominum.'' (Isaias, xxxviii, 2.)  
 
Dieu et fondre en larmes : ''Et convertit Ezechias faciem suam'' {{Petites capitales|ad parietem,}} ''et oravit ad Dominum.'' (Isaias, xxxviii, 2.)  
{{Corps article/Fin}}
+
===3670. ''Il le fait pendre''===
==Compléments de la rédaction Wicri==
+
3670. ''Il le fait pendre,'' etc. Toutes  
===Vers 2641===
 
 
 
==Fin brute d'OCR==
 
 
 
 
 
DUEL ENTRE DEUX EMPEREURS. — FIN DE LA GRANDE BATAILLE
 
 
 
E jour passe, la vêprée s'avance ;
 
Païens et Francs frappent de leurs épées.
 
Ceux qui rassemblèrent ces deux armées,
 
Charles et Baligant, sont des vaillants.
 
Toutefois ils n'oublient pas leurs cris d'armes.
 
« Précieuse! » crie l'Emir.
 
« Monjoie! » réplique l'Empereur.
 
Us se reconnaissent l'un l'autre à leurs voix claires
 
 
 
et hautes;
 
Au milieu même du champ de bataille, tous deux se
 
rencontrent.
 
 
 
 
 
 
 
LA CHANSON DE ROLAND
 
 
 
Us se jettent l'un sur l'autre, et s'entre- donnent «le
 
 
 
grands coups.
 
Frappant de leurs épieux sur leurs écus à ros ■--.
 
3570 Us les brisent au-dessous de la large bou
 
Et se déchirent les pans de leurs hauberts
 
Mais ils ne s'atteignent pas plus avant :
 
Les sangles de leurs chevaux sont brisées et leurs
 
 
 
selles renvei sées :
 
Bref, les deux rois tombent, et les voilà par terre :
 
3575 Vite ils se relèvent, et les voici debout.
 
Très valeureusement ils tirent alors leurs
 
 
 
duel ne peut désormais finir.  
 
Il ne peut s'achever sans mort d'homme.
 
 
 
 
 
 
 
CCLXXIX
 
 
 
Il est vaillant le roi de douce Frai. .
 
3580 Mais l'Émir ne le craint ni le redoute.
 
 
 
" Tu as tué mon fils, dit alors Baligant,
 
 
 
« Et fort injustement tu en ma terre;
 
 
 
' Deviens mon homme, et je te la donne en fief.
 
 
 
Tous deux ont à la main leurs épées toutes nu - .
 
 
 
Et s'en donnent de furieux coups sur leurs écus.
 
 
 
Ils en tranchent le cuir et le bois, qui cependant si
 
 
 
double ;
 
Les clous en tombent, les boucles sont en piè< es.
 
~ - 5 Alors ils se frappent nu à nu sur leurs haubert- :
 
Des heaumes clairs jaillit le feu.
 
Ce duel ne peut en rester là :
 
Il faut que l'un ou l'autre reconnaisse son tort.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
CCXCII
 
 
 
Quand Charles entend la sainte voix de l'ange,
 
Il n'a plus peur, il ne craint plus de mourir;
 
Les forces et le sentiment lui reviennent.  
 
3615 De son épée de France il frappe l'Émir,
 
 
 
Brise le heaume où flamboient tant de pierres pré-
 
cieuses,
 
Tranche la tête, d'où se répand la cervelle,
 
 
 
 
 
 
 
LA CHANSON DE ROLAND 261
 
 
 
Jusqu'à la barbe blanche met en deux morceaux le
 
 
 
visage ;
 
Bref, sans remède, l'abat raide mort.
 
3620 Puis, pour se faire reconnaître : « Monjoie ! » s'écrie-
 
 
 
t-il.
 
A ce mot, le duc Naimes accourt;
 
Il saisit Tencendur, et le grand roi y remonte.
 
Quant aux païens, ils s'enfuient: Dieu ne veut pas
 
 
 
qu'ils restent davantage,
 
Et les Français enfin ont ce qu'ils demandent. Aoi.
 
 
 
' GCXGIII
 
 
 
3625 Dieu le veut , les païens s'enfuient ;
 
 
 
L'Empereur et les Prancs leur donnent la chasse ;
 
« Vengez- vous, » s'écrie le Roi, « vengez toutes vos
 
 
 
souffrances ;
 
« Satisfaites vos désirs, soulagez vos cœurs;
 
« Car ce matin je vous ai vus pleurer de vos yeux. »
 
3630 Et les Français de lui répondre : « Il le faut , il le
 
faut ! »
 
Et chacun de frapper les plus grands coups qu'il
 
 
 
peut.
 
Ah! des païens qui furent là, il s'en échappa un bien
 
petit nombre. Aoi.
 
 
 
 
 
 
 
ccxcv
 
 
 
Tous les païens sont morts ou en fuite;
 
Charles a vaincu sa bataille.
 
3650 De Saragosse la porte est abattue,
 
 
 
Et l'Empereur sait bien qu'on ne défendra plus la
 
 
 
ville.
 
Il y entre avec son armée, il la prend,
 
Et les vainqueurs y couchent cette nuit.
 
Notre Roi à la barbe chenue, notre Roi est plein de
 
fierté ,
 
3655 Et Rramimonde lui a remis les tours de la ville ,
 
Dix grandes et cinquante petites...
 
Il travaille bien celui qui travaille avec l'aide de Dieu.
 
 
 
Aoi.
 
 
 
GCXCVI
 
 
 
Le jour est passé, les ombres de la nuit tombent,
 
La lune est claire, les étoiles flamboient,
 
3660 L'Empereur est maître de Saragosse,
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
LA CHANSON DE ROLAND
 
 
 
 
 
 
 
263
 
 
 
 
 
 
 
Mille Français, sur son ordre, parcourent la ville en
 
 
 
tous sens,
 
Entrent dans les mosquées et les synagogues ,
 
Et, à coups de maillets de fer et de cognées,
 
Mettent en pièces Mahomet, toutes les images, toutes
 
les idoles.
 
3665 De sorcellerie, de mensonge, il ne reste plus de trace.
 
Le Roi croit en Dieu et veut faire le service de Dieu.
 
Alors les évoques bénissent l'eau
 
Et mènent les païens au baptistère.
 
S'il en est un qui se refuse de faire la volonté de Charles,
 
3670 II le fait pendre, occire ou brûler.
 
 
 
Ainsi l'on en baptise plus de cent mille ,
 
 
 
Qui deviennent bons chrétiens. La Reine seule est
 
 
 
mise à part.
 
On la mènera captive en douce France,
 
Et c'est par amour que l'Empereur veut la convertir.
 
 
 
Aoi.
 
 
 
 
 
 
 
GGXGVII
 
 
 
 
 
 
 
3675 La nuit passe, et le jour clair apparaît dans le ciel,
 
Charles garnit alors les tours de Saragosse
 
 
 
 
 
 
 
3670. Il le fait pendre, etc. Toutes  
 
 
les fois que, dans nos chansons, une  
 
les fois que, dans nos chansons, une  
 
ville infidèle est conquise, l'Empereur  
 
ville infidèle est conquise, l'Empereur  
Ligne 387 : Ligne 534 :
 
force tous les habitants : ceux qui  
 
force tous les habitants : ceux qui  
 
refusent le baptême ont la tète coupée.  
 
refusent le baptême ont la tète coupée.  
(Roland, v. 102 et 3670; Gui de Bour-
+
(''Roland'', v. 102 et 3670; ''Gui de Bourgogne'', v. 3003, 3071-74, 3436-38; ''Huon de Bordeaux'', 6657-59, etc. etc.).
gogne, v. 3003, 3071-74, 3436-38;  
+
 
Huon de Bordeaux, 6657-59, etc. etc.)  
+
Nous avons ailleurs discuté très longuement ces textes, et montré qu'ils sont  
Nous avons ailleurs discuté 1res longue-
 
ment ces textes, et montré qu'ils sont  
 
 
contraires à la véritable doctrine do  
 
contraires à la véritable doctrine do  
l'Église, Un jour on lit au pape Nico-
+
l'Église, Un jour on fit au pape Nicolas I cette question : « Que faut-il faire  
las I cette question : « Que faut-il faire  
 
 
à l'égard des païens qui ne veulent pas  
 
à l'égard des païens qui ne veulent pas  
 
se faire chrétiens? » Et le Souverain  
 
se faire chrétiens? » Et le Souverain  
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genoux devant elles, nous n'avons rien  
 
genoux devant elles, nous n'avons rien  
 
à vous commander à leur sujet, si ce  
 
à vous commander à leur sujet, si ce  
 
 
 
 
n'est de les convaincre de leurs erreurs  
 
n'est de les convaincre de leurs erreurs  
 
par de bons avis, par des exhortations,  
 
par de bons avis, par des exhortations,  
 
PAR LA RAISON ENFIN PLUTÔT QUE PAR  
 
PAR LA RAISON ENFIN PLUTÔT QUE PAR  
 
+
la force. » (''Nicolai I responsa ad consulta Bulgarorum'', cap. XLI ; Labbe,  
la force. » (Nicolai I responsa ad  
 
consulta Bulgarorum, cap. xli ; Labbe,  
 
 
vin, 530. Le Pape est beaucoup plus  
 
vin, 530. Le Pape est beaucoup plus  
 
sévère à l'égard des renégats.) Et nous  
 
sévère à l'égard des renégats.) Et nous  
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tous deux contre l'emploi de la force.  
 
tous deux contre l'emploi de la force.  
 
Enfin les Pères du concile de Plaisance .  
 
Enfin les Pères du concile de Plaisance .  
en biSS, font cette proclamation solen-
+
en biSS, font cette proclamation solennelle : « La religion chrétienne ne doit  
nelle : s La religion chrétienne ne doit  
 
 
pas rejeter les Juifs et les Sarrasins,  
 
pas rejeter les Juifs et les Sarrasins,  
 
parce qu'il est constant qu'ils ont en eux  
 
parce qu'il est constant qu'ils ont en eux  
l'image de notre Créateur. » (Labbe, xi ,  
+
l'image de notre Créateur. » (Labbe, XI,  
 
2074.) Il y a loin de là à la sanglante  
 
2074.) Il y a loin de là à la sanglante  
 
et abominable brutalité de nos héros  
 
et abominable brutalité de nos héros  
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===3680. ''Bramimonde''===
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{{Wicri article détaillé|texte=[[La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Partie 3/Duel/Bramimonde]]}}
  
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===3683. ''Ils passent par Narbonne''===
 
+
Ils passent par Narbonne. Dans  
 
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une carte du {{XIIe}} siècle qui se trouve  
 
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en une Apocalypse appartenant à M. Didot, Narbonne est marquée tout près  
LA CHANSON DE ROLAND
+
de Saragosse, sur le chemin de France.  
 
+
Voyez, dans notre 7° éd., l'''Éclaircissement IV''.
 
 
 
 
Il y laisse mille chevaliers vaillants,
 
Qui gardent la ville pour l'Empereur ;
 
Puis, avec tous ses hommes, Charles remonte à
 
cheval ,
 
3680 Emmenant Bramimonde captive ;
 
 
 
 
 
 
 
3680. Bra mimon de^ etc. C'est ici que
 
les Remaniements cessent de suivre,
 
même de loin , le texte primitif, et il
 
en est de même pour le plus ancien
 
manuscrit de Venise, qui avait jusqu'ici
 
reproduit si exactement la version ori-
 
ginale de notre poème. = A partir de
 
notre vers 3682, TOUS les textes autres
 
que celui d'Oxford nous offrent le même
 
récil , qu'il importe de faire connaître :
 
« Charles donc esl à Roncevaux . qui
 
se pâme de douleur «levant le corps
 
 
 
inanimé de Roland. Il l'ait ensevelir son
 
neveu : il maudit Ganelon. Prières in-
 
terminables. (Couplets 330-336 du texte
 
de Paris, édit. F. Michel.) On enterre
 
les Français morts dans la grande ba-
 
taille. Les Anges chantent, une lumière
 
divine éclate . des arbres verts sortenl
 
miraculeusement de chaque I be (337.)
 
 
 
('.halles passe alors les défilés pyré-
 
néens : i] s'arrête à Saint-Jean-Pied-de-
 
Port,oùil fonde un moutier (338,339).
 
L'Empereur ordonne ensuite à Girard
 
d'Orléans, à Guion de Saint-Omer el
 
à Geoffroi d'Anjou de se rendre en
 
-o auprès de Girard de Viane pour
 
le prier de venir le rejoindre el de lui
 
amener la belle Aude (339). Puis il
 
envoie Bazin le Bourguignon . Garnier
 
d'Auvergne, Guyon et Milon dans la cité
 
de Mâcon, à sa propre sœur Gilles : ils
 
sont chargés de la conduire à l'Empe-
 
reur (340, :ii I i. Les messagers partent :
 
Charles s'avance en France. Il arrive
 
à Sorgues (à Sorges,dil le manuscrit).
 
C'est là que Ganelon s'échappe une pre-
 
mière fois sur le destrier de Garni de
 
Montsaor : il se dirige vers Toulouse,
 
ou <• Chaste! -MonroK, » ou Saragosse.
 
Deux mille Français se jettent à sa
 
poursuite ; le plus ardent est Othes
 
(342-334). Ganelon rencontre des mar-
 
chands qu'il trompe et qui trompent
 
Othes sur la distance qui le sépare du
 
fugitif (345). Il arrive par là que les
 
 
 
 
 
 
 
Français se présentent devant l'Empe-
 
reur sans s'être emparés de Ganelon.
 
Colère de Charles (346). Un paysan
 
indique à Othes la retraite de Ganelon.
 
Le traître s'est endormi sous un arbre
 
(347, 348) et le bon cheval de Ganelon
 
éveille son maître. Combat entre Gane-
 
lon et Othes. Ils luttent d'abord à pied,
 
puis le beau-père de Roland propose
 
à < >thes de combattre en vrais cheva-
 
liers, à cheval. Le traître s'élance sur
 
le cheval de son adversaire, et s'enfuit
 
(349-354). othes se remet à la pour-
 
suite de Ganelon. Dieu fait un miracle
 
pour lui : ses armes ne lui pèsent plus
 
sur lis épaules. Alors le fugitif tombe
 
• le cheval ; nouveau combat. Sur ces
 
entrefaites, arrivent Samson et Isoré,
 
et l'on peut enfin se rendre maître de
 
Ganelon, que l'on remet aux mains de
 
l'Empereur | 355-361 i. Charles traverse
 
toute la Gascogne et arrive à lilaye
 
(362). Le poète ici change la scène de
 
son roman et nous transporte soudain
 
près des messagers du roi qui vont à
 
Viane. Ils y arrivent, et font leur me —
 
sagi II- cachent a (iirard la mort de
 
 
 
Roland et d'( Hmer : - Charlemagne, »
 
ajoutent-ils, veul qu'on célèbre le
 
<< mai iage de son neveu avec la belle
 
« Aude. Amenez-lui sur-le-champ votre
 
« nièce. >. Joie de Girard et de Gui-
 
bourg (363-368). On part à Blaye.
 
Pressentiments d'Aude : ses songes lu-
 
gubres (368-375). Ln clerc savant en
 
ningremance cherche à les lui expli-
 
quer favorablement; mais il en voit
 
bien lui-même la triste signification
 
(377). Pour ne pas étonner trop dou-
 
loureusement la belle Aude, on contre-
 
fait la joie dans le camp français. On
 
essaye de lui cacher la grande douleur ;
 
on va jusqu'à lui dire que Roland est
 
allé en « Babiloinne » épouser la sœur
 
de Baligant. Aude n'en veut rien croire.
 
« Roland, » s'écrie -t- elle, « Roland est
 
 
 
 
 
 
 
LA CHANSON DE ROLAND
 
 
 
 
 
 
 
265
 
 
 
 
 
 
 
Mais il ne veut lui faire que du bien...
 
 
 
Les voilà qui s'en retournent pleins d'allégresse,
 
 
 
pleins de fierté joyeuse.
 
Vivement et en vainqueurs ils passent par Narbonne.
 
Pais Charles arrive à Bordeaux, la grande et belle
 
 
 
ville.
 
3685 C'est là que sur l'autel du baron saint Séverin
 
 
 
Charles dépose l'olifant, qu'il avait rempli d'or et de
 
 
 
mangons ;
 
Et c'est là que les pèlerins peuvent encore le voir.
 
Sur de grandes nefs l'Empereur traverse la Gironde ;
 
Il conduit jusqu'à Blaye le corps de son neveu,
 
3690 Celui d'Olivier, le noble compagnon de Roland,
 
Celui de l'Archevêque, qui fut si preux et si sage.
 
On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de
 
 
 
marbre blanc,
 
 
 
 
 
 
 
« mort! » (378-383.) Sur ce, arrive
 
Gilles, la sœur du roi, la mère de Ro-
 
land : Charles lui annonce sans aucun
 
ménagement la mort de son fds. « Une
 
< mère, » pense-t-il. « est mieux pré-
 
parée à de tels coups qu'une fiancée. •
 
Enfin c'est Gilles elle-même qui a la
 
force d'apprendre à la sœur d'Olivier la
 
mort de Roland. Douleur d'Aude (384-
 
390). Elle veut voir du moins le corps
 
de son fiancé, que Charles rapporte
 
d'Espagne. Ses prières, ses larmes. Un
 
ange lui apparaît sous les traits d'Oli-
 
vier, et l'invite à songer au bonheur
 
du ciel. Aude, enfin, se décide à mou-
 
rir (391-399). Retour de Charlemagne
 
à Laon. 11 n'a plus désormais qu'une
 
seule pensée : se venger de Ganelon.
 
Le jugement du traître va commencer.
 
Gondrebœuf de Frise s'offre à le dé-
 
mentir juridiquement la lance au poing.
 
Ganelon donne des otages, i — propres
 
parents. Mais, au moment où va com-
 
mencer le grand combat de L'accusateur
 
et de L'accusé, celui-ci s'enfuit encore
 
une fois les grans galos. Gondrebœuf
 
le poursuit de pi es. Il L'atteint. Combat.
 
On se saisit de Ganelon ( iflO- 417 . C'esl
 
alors que fait son entrée dans le poème
 
le neveu du traître, Pinabel. Il sera Le
 
champion de son oncle. Le défi est re-
 
 
 
 
 
 
 
levé par un « valet du nom de Thierri ,
 
fils de Geoffroi dAnjou, qui veut dé-
 
fendre la cause de Roland. Préparatifs
 
du duel (413-431 ). La chanson se pour-
 
suit ici en vers de douze syllabes, et
 
raconte le combat singulier de Pinabel
 
et de Thierri. Celui-ci pense un instant
 
périr d'un formidable coup que lui porte
 
son adversaire (432-439). Le poème se
 
termine en décasyllabes. Pinabel est
 
vaincu, et meurt (440-445). Il ne reste
 
plus dès lors qu'a délibérer sur le châ-
 
timent de Ganelon. Chacun des barons
 
français propose un supplice spécial :
 
qui la corde, qui le bûcher, qui les
 
bêtes féroces. On se décide à l'écarte-
 
ler (446-450). Ici s'arrête le manuscrit
 
de Paris. Lyon nous donne une strophe
 
de plus, et nous t'ait assister au dépari
 
(I, - barons île l'i ance . qui prennent
 
congé de Charlemagne... ». — Le texte
 
de tous nos Remaniements est mainte-
 
nant connu de nos lecteurs.
 
 
 
3683. Ils passent par Narbonne. Dans  
 
une carte du xu" siècle qui se trouve  
 
en une Apocalypse appartenant à M. Di-
 
dot, Narbonne est marquée tout près  
 
de Saragosse, -m- le cl h ■min de France.  
 
Voy., dans notre 7° éd., V Eclaircisse-
 
ment IV.  
 
 
 
3692. On dépose les trois seigneurs
 
 
 
 
 
 
 
266
 
 
 
  
 +
===3692. ''On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc'' ===
  
LA CHANSON DE ROLAND
+
''On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc, etc. ''
 
 
 
 
 
 
A Saint-Romain, où maintenant encore gisent les
 
 
 
barons ;
 
Et les Français les recommandent une dernière fois,
 
 
 
à Dieu et à tous les noms divins.
 
3695 Puis Charles chemine derechef à travers les vallées
 
 
 
et les montagnes;
 
Plus ne s'arrête qu'à Aix.
 
Si bien chevauche, qu'il descend à son perron.
 
A peine est-il arrivé dans son haut palais,
 
Que par ses messagers il mande tous les juges de sa
 
 
 
cour,
 
3700 Saxons et Bavarois, Lorrains et Frisons,
 
Bourguignons et Allemands,
 
Bretons, Normands et Poitevins,
 
Et les plus sages de ceux de France.
 
Alors commence le procès de Ganelon. Aoi.
 
 
 
 
 
 
 
en îles tombeaux de marbre blanc, etc.  
 
Ces funérailles, d'après la Karlama-
 
gnus Saga et le Kelser Karl Magnus's
 
kronike, oui lieu à Ailes. = D'après la
 
Chronique de Turpin (cap. xxix : De
 
sepulchro Rolandi et cmterorurn qui
 
apud Belinum et diversis locis sepulli
 
aunt), Roland fut enterré à Blaye et
 
Olivier à Belin. = Le mot beatus, qui
 
  
 +
Ces funérailles, d'après la Karlamagnus Saga et le Kelser Karl Magnus's kronike, oui lieu à Arles.
  
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D'après la
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Chronique de Turpin (cap. <small>XXIX</small> : ''De sepulchro Rolandi et caeterorurn qui apud Belinum et diversis locis sepulti sunt''), Roland fut enterré à Blaye et
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Olivier à Berlin.
  
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Le mot beatus, qui
 
précède ici celui de Roland, n'est pas  
 
précède ici celui de Roland, n'est pas  
 
fait pour nous étonner. Roland, en  
 
fait pour nous étonner. Roland, en  
 
effet, a été longtemps révéré comme  
 
effet, a été longtemps révéré comme  
 
un martyr et représenté avec un nimbe.  
 
un martyr et représenté avec un nimbe.  
Son nom se trouve en plusieurs Mar-
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Son nom se trouve en plusieurs Martyrologes, et les Rollandistes ont dû  
tyrologes, et les Rollandistes ont dû  
 
 
s'en occuper à diverses reprises (31 mai  
 
s'en occuper à diverses reprises (31 mai  
 
et 16 juin).
 
et 16 juin).
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 +
|-
 +
|}
 +
==Compléments de la rédaction Wicri==
 +
===Vers 3641===
 +
Ici Léon Gautier, au Lieu d'ajouter un vers, remplace celui du manuscrit d'Oxford par un autre.
 +
 +
Dans le manuscrit d'Oxford, Léon Gautier donne la version suivante :
 +
:A halte voiz s’escrie : « Aïez nus, Mahume !
 +
:::::« À l’aide, Mahomet ! s’écrie-t-elle d’une voix perçante
 +
Dans ce manuscrit, Francisque Michel donne :
 +
:A halte voiz s'escrie : « Aïez-nos*, Mahum[e]. &nbsp;    * ''Aide-nous''.
 +
 +
Dans le manuscrit de Paris, comme donné ici par Léon Gautier, la référence à Mahomet disparait :
  
 
==Voir aussi==
 
==Voir aussi==

Version actuelle datée du 14 août 2022 à 19:45

logo travaux page en cours de réédition
Duel entre deux empereurs
fin de la grande bataille
Fig. 28. — Charles chancelle... Saint Gabriel descend près de lui. (Vers 3608-3110) (Composition de Zier.)


Les couplets (laisses)

CCLXXXVIII

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 258.jpg
O. => CCLXIII
3560   Le jour passe, la vêprée s'avance ;
Païens et Francs frappent de leurs épées.
Ceux qui rassemblèrent ces deux armées,
Charles et Baligant, sont des vaillants.
Toutefois ils n'oublient pas leurs cris d'armes.
3565   « Précieuse! » crie l'Emir.
« Monjoie! » réplique l'Empereur.
Ils se reconnaissent l'un l'autre à leurs voix claires et hautes;
Au milieu même du champ de bataille, tous deux se rencontrent.
Ils se jettent l'un sur l'autre, et s'entre-donnent de grands coups.
Frappant de leurs épieux sur leurs écus à rosaces
3570   Ils les brisent au-dessous de la large boucle
Et se déchirent les pans de leurs hauberts
Mais ils ne s'atteignent pas plus avant :
Les sangles de leurs chevaux sont brisées et leurs selles renversées :
Bref, les deux rois tombent, et les voilà par terre :
3575   Vite ils se relèvent, et les voici debout.
Très valeureusement ils tirent alors leurs épées
Ce duel ne peut désormais finir.
Il ne peut s'achever sans mort d'homme.

CCLXXXIX

Il est vaillant le roi de douce France
3580   Mais l'Émir ne le craint ni le redoute.
« Tu as tué mon fils, dit alors Baligant,
« Et fort injustement tu envahis ma terre;
« Deviens mon homme, et je te la donne en fief.
Tous deux ont à la main leurs épées toutes nues.
Et s'en donnent de furieux coups sur leurs écus.
Ils en tranchent le cuir et le bois, qui cependant est double ;
Les clous en tombent, les boucles sont en pièces.
35855   Alors ils se frappent nu à nu sur leurs hauberts :
Des heaumes clairs jaillit le feu.
Ce duel ne peut en rester là :
Il faut que l'un ou l'autre reconnaisse son tort Aoi

CCXC

O. => CCLXV
« Réfléchis bien. Charles. » dit l'Émir.
3590   « Et décide-toi à me demander pardon.
« Je sais que tu as tué mon fils.
« Et fort injustement tu réclames ma terre :
« Deviens mon homme et je te la donne en fief,
« Si tu veux être mon vassal depuis l'Espagne jusqu'en Orient.
3595 « — Ce serait trop grande honte , » s'écrie Charles ;
« Je ne dois à un païen ni paix ni amour ;
« Reçois la loi que Dieu nous donne à croire ;
« Deviens chrétien, et sur l'heure je t'aimerai,
« Si tu crois, si tu sers le roi omnipotent.
3600 « — Mauvaises paroles que tout cela » dit Baligant.
« J'aime mieux mourir de l'épée qui tranche. » Aoi.

CCXCI

L'Émir est d'une force terrible.
Il frappe Charlemagne sur le heaume d'acier brun ;
Il le lui fend et casse sur la tête.
3605   L'épée du païen tranche les cheveux,
Et de la chair enlève un morceau plus large que la paume de la main ;
A cet endroit, l'os demeure tout nu.
Charles chancelle ; un peu plus il serait tombé ;
Mais qu'il meure ou qu'il soit vaincu, c'est ce que Dieu ne permet pas.
3610 Saint Gabriel descend de nouveau près de lui :
«  Grand roi, » lui dit-il, » que fais- tu? » Aoï.

CCXCII

Quand Charles entend la sainte voix de l'ange,
Il n'a plus peur, il ne craint plus de mourir;
Les forces et le sentiment lui reviennent.
3615   De son épée de France il frappe l'Émir,
Brise le heaume où flamboient tant de pierres précieuses,
Tranche la tête, d'où se répand la cervelle,
Jusqu'à la barbe blanche met en deux morceaux le visage ;
Bref, sans remède, l'abat raide mort.
3620   Puis, pour se faire reconnaître : « Monjoie ! » s'écrie-t-il.
A ce mot, le duc Naimes accourt;
Il saisit Tencendur, et le grand roi y remonte.
Quant aux païens, ils s'enfuient: Dieu ne veut pas qu'ils restent davantage,
Et les Français enfin ont ce qu'ils demandent. Aoi.

CCXCIII

3625   Dieu le veut , les païens s'enfuient ;
L'Empereur et les Francs leur donnent la chasse ;
« Vengez- vous, » s'écrie le Roi, « vengez toutes vos souffrances ;
« Satisfaites vos désirs, soulagez vos cœurs;
« Car ce matin je vous ai vus pleurer de vos yeux. »
3630   Et les Français de lui répondre : « Il le faut , il le faut ! »
Et chacun de frapper les plus grands coups qu'il peut.
Ah! des païens qui furent là, il s'en échappa un bien petit nombre. Aoi.

CCXCIV

O. => CCLXIX
P. => CCXLVI
La chaleur est grande, la poussière s'élève;
Les païens sont en fuite, et les Français les pressent angoisseusement ;
3635   Jusqu'à Saragosse dure cette poursuite.
Au haut de sa tour est montée Bramimonde,
Avec ses chanoines et ses clercs,
Ceux de la loi mauvaise et que Dieu n'aime point,
Ceux qu'un sacrement n'a pas ordonnés, et qui ne portent pas la tonsure sur leurs têtes.
3640 Quand la Reine aperçoit la déroute des païens,
Elle accourt vers Marsile et lui annonce cette nouvelle :
« Ah! noble roi, nos hommes sont vaincus;
« L'Émir est mort honteusement. »
Marsile l'entend, se tourne vers le mur,
3645 Se cache le visage et pleure de ses yeux,
Puis meurt de douleur. Et, comme il est sous le poids du péché,
Les vifs diables s'emparent de son âme. Aoi.

CCXCV

Tous les païens sont morts ou en fuite;
Charles a vaincu sa bataille.
3650   De Saragosse la porte est abattue,
Et l'Empereur sait bien qu'on ne défendra plus la ville.
Il y entre avec son armée, il la prend,
Et les vainqueurs y couchent cette nuit.
Notre Roi à la barbe chenue, notre Roi est plein de fierté ,
3655   Et Bramimonde lui a remis les tours de la ville ,
Dix grandes et cinquante petites...
Il travaille bien celui qui travaille avec l'aide de Dieu. Aoi.

CCXCVI

Le jour est passé, les ombres de la nuit tombent,
La lune est claire, les étoiles flamboient,
3660   L'Empereur est maître de Saragosse,
Mille Français, sur son ordre, parcourent la ville en tous sens,
Entrent dans les mosquées et les synagogues ,
Et, à coups de maillets de fer et de cognées,
Mettent en pièces Mahomet, toutes les images, toutes les idoles.
3665   De sorcellerie, de mensonge, il ne reste plus de trace.
Le Roi croit en Dieu et veut faire le service de Dieu.
Alors les évoques bénissent l'eau
Et mènent les païens au baptistère.
S'il en est un qui se refuse de faire la volonté de Charles,
3670   II le fait pendre, occire ou brûler.
Ainsi l'on en baptise plus de cent mille ,
Qui deviennent bons chrétiens. La Reine seule est mise à part.
On la mènera captive en douce France,
Et c'est par amour que l'Empereur veut la convertir. Aoi.

CCXCVII

3675   La nuit passe, et le jour clair apparaît dans le ciel,
Charles garnit alors les tours de Saragosse
Il y laisse mille chevaliers vaillants,
Qui gardent la ville pour l'Empereur ;
Puis, avec tous ses hommes, Charles remonte à cheval ,
3680   Emmenant Bramimonde captive ;
Mais il ne veut lui faire que du bien...
Les voilà qui s'en retournent pleins d'allégresse, pleins de fierté joyeuse.
Vivement et en vainqueurs ils passent par Narbonne.
Pais Charles arrive à Bordeaux, la grande et belle ville.
3685   C'est là que sur l'autel du baron saint Séverin
Charles dépose l'olifant, qu'il avait rempli d'or et de mangons ;
Et c'est là que les pèlerins peuvent encore le voir.
Sur de grandes nefs l'Empereur traverse la Gironde ;
Il conduit jusqu'à Blaye le corps de son neveu,
3690   Celui d'Olivier, le noble compagnon de Roland,
Celui de l'Archevêque, qui fut si preux et si sage.
On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc,
A Saint-Romain, où maintenant encore gisent les barons ;
Et les Français les recommandent une dernière fois, à Dieu et à tous les noms divins.
3695   Puis Charles chemine derechef à travers les vallées et les montagnes;
Plus ne s'arrête qu'à Aix.
Si bien chevauche, qu'il descend à son perron.
A peine est-il arrivé dans son haut palais,
Que par ses messagers il mande tous les juges de sa cour,
3700   Saxons et Bavarois, Lorrains et Frisons,
Bourguignons et Allemands,
Bretons, Normands et Poitevins,
Et les plus sages de ceux de France.
Alors commence le procès de Ganelon. Aoi.

Notes originales

3644. Vers le mur

3644. Vers le mur. Pareil, doit être traduit par « mur », en dépit du texte de Paris : Oit la Marsiles, vers la dame se tourne. Il est évident que l'auteur du Roland a pensé à ce célèbre passage d'Isaïe , où l'on voit le roi Ezéchias, frappé d'une maladie mortelle, se tourner vers la muraille pour prier Dieu et fondre en larmes : Et convertit Ezechias faciem suam ad parietem, et oravit ad Dominum. (Isaias, xxxviii, 2.)

3670. Il le fait pendre

3670. Il le fait pendre, etc. Toutes les fois que, dans nos chansons, une ville infidèle est conquise, l'Empereur Charles ou ses Pairs font baptiser de force tous les habitants : ceux qui refusent le baptême ont la tète coupée. (Roland, v. 102 et 3670; Gui de Bourgogne, v. 3003, 3071-74, 3436-38; Huon de Bordeaux, 6657-59, etc. etc.).

Nous avons ailleurs discuté très longuement ces textes, et montré qu'ils sont contraires à la véritable doctrine do l'Église, Un jour on fit au pape Nicolas I cette question : « Que faut-il faire à l'égard des païens qui ne veulent pas se faire chrétiens? » Et le Souverain Pontife répondit : « Quant à ceux qui refusent le bienfait de la foi chrétienne, qui immolent aux idoles et plient les genoux devant elles, nous n'avons rien à vous commander à leur sujet, si ce n'est de les convaincre de leurs erreurs par de bons avis, par des exhortations, PAR LA RAISON ENFIN PLUTÔT QUE PAR la force. » (Nicolai I responsa ad consulta Bulgarorum, cap. XLI ; Labbe, vin, 530. Le Pape est beaucoup plus sévère à l'égard des renégats.) Et nous avons également cité les paroles très précises de saint Augustin et de saint Thomas d'Aquin, qui se prononcent tous deux contre l'emploi de la force. Enfin les Pères du concile de Plaisance . en biSS, font cette proclamation solennelle : « La religion chrétienne ne doit pas rejeter les Juifs et les Sarrasins, parce qu'il est constant qu'ils ont en eux l'image de notre Créateur. » (Labbe, XI, 2074.) Il y a loin de là à la sanglante et abominable brutalité de nos héros épiques.


3680. Bramimonde

3683. Ils passent par Narbonne

Ils passent par Narbonne. Dans une carte du XIIe siècle qui se trouve en une Apocalypse appartenant à M. Didot, Narbonne est marquée tout près de Saragosse, sur le chemin de France. Voyez, dans notre 7° éd., l'Éclaircissement IV.

3692. On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc

On dépose les trois seigneurs en des tombeaux de marbre blanc, etc.

Ces funérailles, d'après la Karlamagnus Saga et le Kelser Karl Magnus's kronike, oui lieu à Arles.

D'après la Chronique de Turpin (cap. XXIX : De sepulchro Rolandi et caeterorurn qui apud Belinum et diversis locis sepulti sunt), Roland fut enterré à Blaye et Olivier à Berlin.

Le mot beatus, qui précède ici celui de Roland, n'est pas fait pour nous étonner. Roland, en effet, a été longtemps révéré comme un martyr et représenté avec un nimbe. Son nom se trouve en plusieurs Martyrologes, et les Rollandistes ont dû s'en occuper à diverses reprises (31 mai et 16 juin).


Facsimilés

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Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 259.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 260.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 261.jpg Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 262.jpg
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Compléments de la rédaction Wicri

Vers 3641

Ici Léon Gautier, au Lieu d'ajouter un vers, remplace celui du manuscrit d'Oxford par un autre.

Dans le manuscrit d'Oxford, Léon Gautier donne la version suivante :

A halte voiz s’escrie : « Aïez nus, Mahume !
« À l’aide, Mahomet ! s’écrie-t-elle d’une voix perçante

Dans ce manuscrit, Francisque Michel donne :

A halte voiz s'escrie : « Aïez-nos*, Mahum[e].   * Aide-nous.

Dans le manuscrit de Paris, comme donné ici par Léon Gautier, la référence à Mahomet disparait :

Voir aussi

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