Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse I

De Wicri Chanson de Roland
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Les conquêtes de Charlemagne

Empire carolingien 768-811.jpg

Ce premier couplet vante les conquêtes de Charlemagne.

La carte ci-jointe montre leur étendue au moment de la bataille de Ronvevaux.

Dans le manuscrit d'Oxford

La laisse I regroupe les 9 premiers vers du premier feuillet (1 recto ) du manuscrit d'Oxford.

Chanson de Roland Manuscrit Oxford feuillet 1r haut.png
Remarques de la rédaction Wicri

Le troisième vers de la transcription de Léon Gautier ne suit pas le manuscrit.

Cunquist la tere tresqu’en la mer altaigne.

Là où Francisque Michel et Joseph Bédier suivent le manuscrit avec :

Tresqu’en la mer cunquist la tere altaigne.
 
Page1-2140px-La Chanson de Roland - MS Oxford.djvu.jpg

Transcription et traduction de Léon Gautier

Source : première édition critique de Léon Gautier (1872) [1]
À SARAGOSSE. — CONSEIL TENU PAR LE ROI MARSILE

I

1 Carles li Reis, nostre emperere magnes, Charles le roi, notre grand empereur,
Set anz tuz pleins ad estet en Espaigne : Sept ans entiers est resté en Espagne :
Cunquist la tere tresqu’en la mer altaigne. Jusqu’à la haute mer, il a conquis la terre.
N’i ad castel ki devant lui remaigne ; Pas de château qui tienne devant lui,
5 Murs ne citez n’i est remés à fraindre Pas de cité ni de mur qui reste encore debout
Fors Sarraguce, ki est en une muntaigne. Hors Saragosse, qui est au haut d’une montagne.
Li reis Marsilies la tient, ki Deu n’enaimet ; Le roi Marsile la tient, Marsile qui n’aime pas Dieu,
Mahumet sert e Apollin recleimet : Qui sert Mahomet et prie Apollon ;
Ne s’ poet guarder que mals ne li ataignet. Aoi. Mais le malheur va l’atteindre : il ne s’en peut garder.

Transcription commentée de Francisque Michel

Voir page1.


I.
Carles li reis, nostre emperère magne*,  *Grand.
Set anz tuz pleins* ad ested en Espaigne,  *Sept ans entiers.
Tresqu'en* la mer cunquist la tere altaigne**;  *Jusqu'en **Élevée, montagneuse.
N'i ad castel ki devant lui remaigne*,  *Reste, tienne.
Mur ne citet n'i est remés à fraindre*  *Resté à briser.
Fors* Sarraguce, k'iest en une muntaigne.  *Si ce n'est.
Li reis Marsilie la tient, ki Deu n'enaimet* :  *Qui n'aime pas Dieu.
Mahummet sert e Apollin recleimet*  *Invoque.
Ne s' poet guarder que mals ne li ateignet*. AOI.  *Ne l'atteigne.
 
RCR 543952103 85137 Page 035.jpg

Transcription et traduction de Joseph Bédier

Voir la page 2 de l'édition de 1922.


CARLES li reis, nostre emperere magnes,
Set anz tuz pleins ad estet en Espaigne :
Tresqu’en la mer cunquist la tere altaigne.
N’i ad castel ki devant lui remaigne ;
Mur ne citet n’i est remés a fraindre,
Fors Sarraguce, ki est en une muntaigne.
Li reis Marsilie la tient, ki Deu nen aimet.
Mahumet sert e Apollin recleimet :
Nes poet guarder que mals ne l’i ateignet. aoi.

 


LE roi Charles, notre empereur, le Grand,
sept ans tout pleins est resté dans l’Espagne :
jusqu’à la mer il a conquis la terre hautaine.
Plus un château qui devant lui résiste,
plus une muraille à forcer, plus une cité,
hormis Saragosse, qui est dans une montagne.
Le roi Marsile la tient, qui n’aime pas Dieu.
C’est Mahomet qu’il sert, Apollin qu’il prie.
Il ne peut pas s’en garder : le malheur l’atteindra.

Version musicale de Gilles Mathieu

Les 5 premiers vers dans le deuxième mouvement de la composition de Gilles Mathieu, et plus précisément les mesures 1 à 21.


\new Staff \with {
  midiInstrument = "voice oohs"
  instrumentName = #"S "
  shortInstrumentName = #"S "
  } {
  \relative c' {  
   \time 4/4 \key bes \major 
        r2 r4 \f d4\(
        a'4. b8 c b a g
    \time 3/4 
      a2 d,4
      f4. g8 e4
      d2\) d4\(
     \time 4/4
      a'4. bes?8 c bes? a g
   \time 3/4
      a2\) d,4 
      ees?4.\( f8 ees?4
      d2.\)
 \time 4/4
      bes'4\p g d bes'
      c1
      g2 g2
      a2. r4
      bes2\< bes4 bes
      c2 c4 c
      ees2 ees4 ees\!
      d2.\f d4\p
      c2 g2
      bes2. bes4
      g4 g g g
   \time 12/8 
      a1.
  }  }
 \addlyrics { 
              Car - les
              li - re -- is  nostr' em -- pe -- rer ma -- gnes.
              Set anz tuz pleins ad e - stet en E - s paigne
             Tre -- s qu'en la mer tere al -- taigne Mur ne ci -- tet n'i est re -- mes a
              Fraindres Fors Sar -- ra -- guce  ki est en une mum -- taigne
            }

 

Notes (version de Léon Gautier)

logo travaux partie en cours de maquettage

Vers 2.Set ans. Suivant l’auteur de Gui de Bourgogne, c’est vingt-sept ans que Charles aurait passés en Espagne. Mais la leçon de Gui de Bourgogne ne fut jamais populaire, et Génin a raison de citer ici la farce de Pathelin, « où maître Pierre se vante à sa femme d’être aussi savant que s’il avait été à l’école autant que Charles en Espaigne. » (V. aussi Martial de Paris, cité par Littré au mot Charlemagne de son grand Dictionnaire de la langue française. )

Ested. O. Le d se prend pour le t à la fin de quelques verbes, participes, noms et adjectifs du texte d’Oxford. Dans les mille premiers vers de la Chanson, le d final, à la place du t, ne se retrouve pas plus de 26 fois sur un millier de cas. Nous l’avons partout remplacé par le t, qui, d’ailleurs, est plus étymologique. ═ Toutefois, il est un mot très-usuel, où le d a définitivement pénétré, sauf de très-rares exceptions : c’est ad venant d’habet (abt). Nous l’avons partout laissé tel que notre manuscrit nous l’offrait ; car nous nous proposons, dans ce texte critique, de reconstituer notre vieux poëme tel qu’il aurait été écrit par un scribe instruit et soigneux, avec les règles générales de la langue de son temps et les règles particulières de son dialecte spécial.

Ad ested en Espaigne. — La Keiser Karl Magnus’s Kronike dit : « L’Empereur ayant soumis l’Espagne et la Galice… »

    1. 3 ##

Vers 3.Tresqu’en la mer cunquist la tere altaigne. O. — Le manuscrit de Versailles et celui de Venise VII nous offrent : Conquist ou conquest la terre jusqu’à la mer altaigne, et nous avons adopté cette version comme plus logique et plus précise. — Altaigne est, de toute la famille dérivant d’altus, le seul vocable qui n’ait pas pris l’h (Cf. halt, halte, haltur). Dans l’appendice de son Dictionnaire étymologique (p. 560), M. Brachet dit, après M. Max Müller, au sujet de cette h initiale : « Cette aspiration est due à l’influence des formes germaniques correspondantes (hoch, etc.). » Sans rejeter absolument cette opinion, il convient d’observer que certains mots de notre texte, — les uns venus du germain, comme helme ; les autres du latin, comme honor, — prennent ou rejettent tour à tour l’h initiale, qui, d’ailleurs, n’impliquait pas l’aspiration et s’élidait très-légitimement.

    1. 4 ##

Vers 4.N’i ad castel. Ad, employé dans ce sens, gouverne toujours après lui l’accusatif. En d’autres termes, castel et les mots analogues sont nécessairement régimes. « Il y a un roi », se traduirait, dans un thème étymologique, par : Illud ibi habet unum regem. Cette observation, trop élémentaire peut-être, est néanmoins utile pour expliquer certaines parties de notre texte critique. ═ Au lieu de remaigne O, lire remaignet. Toutes les troisièmes personnes du singulier, sauf des cas excessivement rares, se terminent, dans le texte d’Oxford, par un t qui est étymologique,


Concordances et compléments

Cette laisse est alignée avec :

Elle est reprise dans :

Voir aussi

Notes

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