La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Partie 1/Cordoue/Roland

De Wicri Chanson de Roland

Cette page introduit une note sur Roland.

Elle est extraite du chapitre « A Cordoue, le conseil tenu par Charlemagne » (vers 104).

Cette note est relativement indépendante du chapitre concerné.

La note sur Roland

Chanson de Roland Gautier Populaire 1895 page 55.jpg

Roland, dans toute notre légende épique, est représenté comme le neveu de Charlemagne : dans la plupart de nos poèmes, sa mère s'appelle « Gile, Gilain ». Une de nos Chansons, les Enfances de Roland (XIIe - XIIIe siècle), nous le montre à Sutri réconciliant avec Charlemagne son père, le sénéchal Milon, et sa mère, qui avaient encouru fort justement la colère du grand Empereur. Mais c'est dans la Chanson d'Aspremont (XIIe siècle) que nous assistons à ses véritables enfances : c'est là que nous le voyons prendre part, tout jeune encore, à la grande expédition de Charles contre les Sarrasins du midi de l'Italie, et après un combat héroïque avec Eaumont, fils du roi païen Agolant, conquérir glorieusement la fameuse épée Durendal.

Dans un autre poème de la fin du XIIe siècle, Girars de Viane, Roland, qui a été fait chevalier après sa victoire contre Eaumont , devient le champion de l'Empereur contre Olivier, qui est le champion de Girart de Vienne el des fils rebelles de Garin de Montglane. La scène se passe sous les murs de Vienne, et c'est la que Roland se prend d'amour pour la belle Aude, avec laquelle on le fiance, avec laquelle il ne se mariera jamais.

Dans Renaus de Montauban (XIIIe siècle), dans Jehan de Lanson (XIIIe siècle), dans Ottinel (XIIIe siècle), il joue un grand rôle qui n'esl cependant pas le premier. Mais les poèmes qui sonl le plus consacrés a sa gloire el qui for ni une sorte de « Rolandéide », sont l'Entrée en Espagne (XIIIe - XIVe siècle) et la Prise de Pampelune XIVe siècle. Dès son arrivée en Espagne, le neveu de Charles se mesure avec le géant Ferragus : plus lard , il prend la ville de Nobles malgré la défense de l'Empereur, e1 s'enfuh du camp chrétien pour aller en Orient l'aire un pèlerinage au Saint-Sépulcre et organiser à la française le ne de Perse converti par lui. De retour en Espagne, il prend pari à tous les grands combats des chrétiens el aux sièges victorieux de Pampelune et de toutes les places fortes de l'Espagne païenne. Quand commence notre vieux poème, il ne reste plus à conquérir que Saragosse, et c'esl sur Roland que comptent l'Empereur et la France, c'est vers lui que se tournent tous les regards. Nous n'avons pas à revenir sur le rôle que joue le neveu de Charles dans la Chanson de Roland. Il en est le centre, l'âme, la vie. La trilogie dont se compose le vieux poème lui est presque uniquement consacrée: dans la première partie, il est trahi ; dans la seconde, il meurt; dans la troisième. il est vengé. Son importance survit à sa mort, et jusqu'au dernier vers de la chanson il en est le héros. = Telle est la place de Roland dans la légende.

Quant à l'histoire, elle ne lui a consacré que huit mots, et Éginhard, en sa Vita Karoli (cap. IX), se contente de dire au sujet de notre héros et du désastre de Roncevaux : In quo praelio, Hruodlandus, Britannici limitis praefeclus, interficitur. Voir dans nos précédentes éditions l'Éclaircissement sur l'histoire poétique de Roland.