Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse CX

De Wicri Chanson de Roland
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Révision datée du 29 décembre 2021 à 09:55 par Jacques Ducloy (discussion | contributions) (Transcription et traduction par Léon Gautier (1881))

Cette page introduit la laisse CX (110) en suivant l'organisation propre au manuscrit d'Oxford.

Dans le manuscrit

La laisse CX (110) est contenue sur le feuillet 26, recto puis verso du manuscrit d'Oxford.

Elle est numérotée :

  • CXI chez Francisque Michel et Léon Gautier ;
  • CX chez Bédier.


 
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Transcription et traduction par Léon Gautier (1872)

Source : Wikisource[1]


CXI

La bataille est merveilluse e pesanz. La bataille est merveilleuse et pesante :
Mult ben i fiert Olivers e Rollanz ; Olivier et Roland y frappent de grand cœur ;
Li Arcevesques plus de mil colps i rent, L’archevêque Turpin y rend des milliers de coups ;
1415 Li .xii. Per ne s’en targent nient Les douze Pairs ne sont pas en retard.
Et li Franceis i fièrent cumunement. Tous les Français se battent et sont en pleine mêlée ;
Moerent païen à millers et à cenz. Et les païens de mourir par cent et par mille.
Ki ne s’en fuit de mort n’i ad guarent, Qui ne s’enfuit ne peut échapper à la mort :
Voeillet o nun, tut i laisset sun tens. Bon gré, mal gré, tous y laissent leur vie.
1420 Franceis i perdent lur meillurs guarnemenz : Mais les Français y perdent leur meilleure défense :
Ne reverront lur peres ne lur parenz, Ils ne reverront plus ni leurs pères ni leurs familles,
Ne Carlemagne ki as porz les atent. Ni Charlemagne qui les attend là-bas...

En France en ad mult merveillus turment :
Et pendant ce temps, en France, il y a une merveilleuse tourmente :
Orez i ad de tuneire e de vent, Des tempêtes, du vent et du tonnerre,
1425 Pluies e gresilz desmesuréement. De la pluie et de la grêle démesurément,
Chedent i fuildres e menut e suvent ; Des foudres qui tombent souvent et menu,
E terremoete ço i ad veirement Et (rien n’est plus vrai) un tremblement de terre.
De Seint-Michel de Paris jusqu’à Reins, Depuis Saint-Michel de Paris jusqu’à Reims,
De Besençun tresqu’as porz de Guitsand : Depuis Besançon jusqu’au port de Wissant,
1430 Nen ad recet dunt li mur ne cravent. Pas une maison dont les murs ne crèvent.
Cuntre midi tenebres i ad granz, À midi, il y a grandes ténèbres :
N’i ad clartet se li cels nen i fent. Il ne fait clair que si le ciel se fend.
Hom ne le veit ki mult ne s’espaent ; Tous ceux qui voient ces prodiges en sont dans l’épouvante,
Dient plusur : « Ço est li definement, Et plusieurs disent : « C’est la fin du monde,
1435 « La fins de l’ secle ki nus est en present. » « C’est la consommation du siècle. »
Il ne le sevent ne dient veir nient : Non, non : ils ne le savent pas, ils se trompent :
Ço est la granz dulurs pur la mort de Rollant. Aoi. C’est le grand deuil pour la mort de Roland !

Transcription et traduction par Léon Gautier (1881)

Voir : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k58334870/f177.item.texteImage

Par rapport à l'édition précédente les différences sont marquées par un surlignage en jaune.

Dans cette édition quatre vers en italique ne sont pas exprimés dans le manuscrit d'Oxford.

La différence la plus importante vient du vers 1428 (avec la mention de fait du Mont-Saint-Michel).


CXIX

La bataille est merveilluse e pesanz. La bataille est merveilleuse et pesante :
Mult bien i fiert Oliviers e Rollanz ; Olivier et Roland y frappent de grand cœur ;
Li Arcevesques plus de mil colps i rent, L’archevêque Turpin y rend des milliers de coups ;
1415 Li duze Per ne s’en targent nient Les douze Pairs ne sont pas en retard.
Et li Franceis i fièrent cumunement. Tous les Français se battent et sont en pleine mêlée ;
Moerent païen à millers et à cenz. Et les païens de mourir par cent et par mille.
Ki ne s’enfuit de mort n’i ad guarent, Qui ne s’enfuit ne peut échapper à la mort :
Voeillet o nun, tut i laisset sun tens. Bon gré, mal gré, tous y laissent leur vie.
1420 Franceis i perdent lur meillurs guarnemenz : Mais les Français y perdent leur meilleure défense :
Lur forz espiez e lur lances trenchanz ; Leurs forts épieux et leurs lances qui tranchent,
E gunfanuns blois e vermeilz e blancs ; Leurs gonfanons bleus, vermeils ou blancs.
De lur espées si sunt fruisiel li brant. Le fer de leurs épées est brisé.
Perdut i unt tanz chevaliers vaillanz ! . Et que de vaillants chevaliers ils ont perdus !
Ne reverrunt ne peres ne parenz, Quant à eux, ils ne reverront plus ni leurs pères ni leurs familles,
Ne Carlemagne ki as porz les atent. Ni Charlemagne qui les attend là-bas...

En France en ad mult merveillus turment :
Cependant en France, il y a une merveilleuse tourmente :
Orez i ad de tuneire e de vent, Des tempêtes, du vent et du tonnerre,
1425 Pluie e gresilz desmesuréement. De la pluie et de la grêle démesurément,
Chièdent e fuildres e menut e suvent ; Des foudres qui tombent souvent et menu,
E terremoete ço i ad veirement Et (rien n’est plus vrai) un tremblement de terre.
De Seint-Michiel de l' Peril jusqu’às Seinz, Depuis Saint-Michel-du-Péril jusqu’aux Saints de Cologne,
De Besençun tresqu’as porz de Guitsand : Depuis Besançon jusqu’au port de Wissant,
1430 Nen ad recet dunt li mur ne cravent. Pas une maison dont les murs ne crèvent.
Cuntre midi tenebres i ad granz, À midi, il y a grandes ténèbres :
N’i ad clartet se li ciels nen i fent. Il ne fait clair que si le ciel se fend.
Hom ne le veit ki mult ne s’espaent ; Tous ceux qui voient ces prodiges en sont dans l’épouvante,
Dient plusur : « C'est li definemenz, Et plusieurs disent : « C’est la fin du monde,
1435 « La fins de l’ secle ki nus est en present. » « C’est la consommation du siècle. »
Il ne le sevent ne dient veir nient : Non, non : ils ne le savent pas, ils se trompent :
Ço est la     dulurs pur la mort de Rollant. Aoi. C’est le grand deuil pour la mort de Roland !

Transcription et traduction par Joseph Bédier

 

Chanson de Roland Bedier Int Arch page 110.png

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