Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse XCIV

De Wicri Chanson de Roland
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Cette page concerne la laisse XCIV du manuscrit d'Oxford.

Dans le manuscrit d'Oxford

La laisse XCIV (94) est contenue sur le recto du feuillet 23 du manuscrit d'Oxford.

Elle démarre avec la lettrine V (U) en deuxième ligne.

Elle est numérotée XCV chez Francisque Michel.

 
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Transcription et traduction par Léon Gautier (1872)

Source : Wikisource[1]


XCV

1235 Uns reis i est, si ad num Corsablis ; Il y a là un roi du nom de Corsablis ;
Barbarins est, d’un estrange païs. Il est de Barbarie, d’un pays lointain.
Si apelat les altres Sarrazins : Le voilà qui se met à interpeller les autres païens :
« Ceste bataille ben la puum tenir, « Nous pouvons aisément soutenir la bataille :
« Kar de Franceis i ad asez petit ; « Les Français sont si peu !
1240 « Cels ki ci sunt devum aveir mult vils : « Ceux qui sont devant nous sont à dédaigner ;
« Ja pur Carlun n’i ert uns suls guariz. « Pas un n’échappera, Charles n’y peut rien,
« Or est li jurz que l’s estuverat murir. » « Et voici le jour qu’il leur faudra mourir. »
Ben l’entendit li arcevesques Turpins, L’archevêque Turpin l’entend :
Suz ciel n’ad hume que tant voeillet haïr ;
Il n’est pas d’homme sous le ciel qu’il haïsse autant que ce païen ;
1245 Sun cheval brochet des esperuns d’or fin, Des éperons d’or fin il pique son cheval
Par grant vertut si l’est alez ferir, Et va frapper sur Corsablis un coup terrible.
L’escut li freinst, l’osberc li descunfist, L’écu est mis en pièces, le haubert en lambeaux ;
Sun grant espiet par mi le cors li mist : Il lui plante sa lance au milieu du corps.
Empeint le ben que mort le fait brandir, Le coup est si rude que le Sarrasin chancelle et meurt ;
1250 Pleine sa hanste l’abat mort el’ chemin. À pleine lance, Turpin l’abat mort sur le chemin ;
Guardet à tere, veit le glutun gesir, Puis regarde à terre et y voit le païen-étendu.
Ne laisserat que n’i parolt, ço dit : Il ne laisse pas de lui parler, et lui dit :
« Culvert païen, vus i avez mentit ; « Vous en avez menti, lâche païen ;
« Carles mis sire nus est guaranz tuz dis ; « Mon seigneur Charles est toujours notre appui,
1255 « Nostre Franceis n’unt talent de fuir. « Et nos Français n’ont pas envie de fuir.
« Voz cumpaignuns ferum trestuz restifs. « Quant à vos compagnons, nous saurons bien les arrêter ici.
« Nuveles vus di : mort vus estoet suffrir.
« Voici la nouvelle que j’ai à vous apprendre : vous allez tous mourir.
« Ferez, Franceis ; nuls de vus ne s’ublit ! « Frappez, Français : que pas un de vous ne s’oublie.
« Cist premers colps est nostre, Deu mercit. » « Le premier coup est nôtre, Dieu merci ! »
1260 Munjoie escriet pur le camp retenir. Aoi.
Puis : « Montjoie ! Montjoie ! » s’écrie-t-il, pour rester maître du champ.

Voir aussi

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