La légende des paladins (1877) Autran/XVII - Le repas de noce

De Wicri Chanson de Roland
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XVII - Le repas de noce

La lyre à sept cordes (1877) Autran, Gallica page f226.jpg[224]

LE roi des Sarrasins mariait donc sa fille.
Un festin s’apprêtait au palais de Marsille,
A Saragosse, antique et puissante cité.
A ce banquet royal il avait invité
Tous les chefs principaux des États qu’il gouverne :
Turgis de Tourtelouse, Escremiz de Vauterne,
Chernubles, dont la voix sonne comme un clairon,
Mont-Nigre aux yeux de loup, Corsablix, Falsaron,
Margariz, dont la barbe inonde la poitrine,
Roi qui régne au désert jusques à Scamarine ;
Justin de Val-Ferré, Torlus, Escarbabis,
L’enchanteur Siglorel aux étranges habits,
Qui, des magiciens pratiquant le commerce,
Sa baguette à la main, arrivait de la Perse ;
La lyre à sept cordes (1877) Autran, Gallica page f227.jpg[225]
Et vingt autres encor que l’on ne nomme pas.
Tout était déjà prêt pour le joyeux repas :
Les vins de Malvoisie et les vins de Madère,
Les sorbets, dont la glace au besoin les modère,
Les quartiers de mouton, la poule et la perdrix,
Et les gâteaux vermeils de maïs et de riz.
Puis venaient les chanteurs accordant leurs cithares ;
Puis les filles du Nil aux attitudes rares,
Qui, le sein découvert et le rubis au front,
Autour des conviés devaient danser en rond.

Instruit de ce banquet qu’on prépare à la noce :
« C’est fort bien, dit Roland, je prendrai Saragosse !
Au festin nuptial j’invite les barons,
Et les vins du bon roi, c’est nous qui les boirons. »
C’était, dit la chronique, une rude entreprise ;
N’importe ! avant la nuit Saragosse fut prise.

Sous le toit de Manille, on trouva le festin
Tout servi. Les barons, qui depuis le matin
N’avaient mangé ni bu, s’assirent à la table.
Les plats d’or exhalaient un fumet délectable.
Les vins les plus exquis des vignobles voisins
Étaient là. Destinés aux gosiers sarrasins,
La lyre à sept cordes (1877) Autran, Gallica page f228.jpg[226]
Ils furent avalés par des gosiers de France.
« Je bois à mon amour, je bois à l’espérance,
A la sœur d’Olivier dont je serai l’époux ! »
Disait l’heureux Roland qui les provoquait tous.
Et le vin circulait dans l’héroïque bande.
L’un buvait pour Agnès, l’autre pour Yolande,
Chacun gardant au cœur le nom de son amour.
Malvoisie et xérès firent cent fois le tour ;
Le vin semble meilleur qui vient de la maraude !
Et tous de répéter : « Buvons à la belle Aude ! »
Et ce repas joyeux, fier, splendide, royal,
Fut vraiment, moins l’épouse, un banquet nuptial.