Chanson de Roland/Manuscrit d'Oxford/Laisse LXVII

De Wicri Chanson de Roland

Cette page concerne la laisse LXVII du manuscrit d'Oxford.

Dans le manuscrit

La laisse est contenue sur les feuillets 15 verso puis 16 recto du manuscrit.

Elle est numérotée LXVIII chez Léon Gautier.

De son côté, Francisque Michel introduit une séparation qui n'est pas matérialisée dans le manuscrit.

 
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Transcription et traduction par Léon Gautier


LXVIII

Carles li magnes ne poet muer n’en plurt : Charles le Grand ne peut s’empêcher de pleurer :
.C. milie Franc pur lui unt grant tendrur, Cent mille Français sont pris pour lui de grand’pitié
E de Rollant merveilluse poür. Et d’une peur étrange pour Roland.
Guenes li fels en ad fait traïsun ; C’est Ganelon, c’est ce félon qui l’a trahi ;
845 Del rei païen en ad oüt granz duns,
C’est lui qui, pour cette trahison, a reçu du roi païen riches présents,
Or e argent, palies e ciclatuns, Or et argent, étoffes de soie, riches vêtements,
Muls e chevals, e cameilz e leuns. Chevaux et mulets, chameaux et lions…
Marsilies mandet d’Espaigne les baruns, Et voici que Marsile mande ses barons d’Espagne,
Cuntes, vezcuntes e dux e almacurs, Comtes, vicomtes, ducs et aumaçors,
850 Les amirafles e les filz as cunturs ; Avec les émirs et les fils de ses comtes.
.Iiii. c. milie en ajustet en .iii. jurz. Il en réunit quatre cent mille en trois jours,
En Sarraguce fait suner ses taburs.
Et fait sonner ses tambours dans toute la ville de Saragosse.
Mahumet levent en la plus halte tur ;
Sur le sommet de la plus haute tour, on élève la statue de Mahomet :
N’i ad païen ne l’ prit e ne l’ aürt. Pas de païen qui ne la prie et ne l’adore.
855 Puis, si chevalchent par mult grant cuntençun Puis ils chevauchent, en très-grande furie,
Tere Certeine e les vals et les munz ; À travers la Cerdagne, les vallées et les montagnes.
De cels de France virent les gunfanuns, Enfin ils aperçoivent les gonfanons de ceux de France.
La rere-guarde des .xii. Cumpaignuns : C’est l’arrière-garde des douze Compagnons :
Ne lesserat bataille ne lur duint. Aoi. Point ne manqueront à leur livrer bataille.

Transcription commentée de Francisque Michel


LXVII.
Carles li Magnes ne poet muer n'en plurt*.  *Charles le Grand ne peut faire qu'en pleurer.
.c. milie Francs pur lui une grant tendrur*,  *Tendresse.
E de Rollant merveilluse poür*?  *Peur.
Guen[e]s li fels* en ad fait traïsun ;  *Félon.
Del rei paien en ad oüd* granz duns,  *Eu.
Or e argent, palies* e ciclatuns**,  *Étoffes de prix. **Espèce de tissus de soie.
Muls* e chevals, e cameilz* e léuns. [AOI.]

LXVIII.
Marsilies mandet d'Espaigne les baruns,
Cuntes, vezcuntes e dux e almacurs*,  *Vicomtes, ducs et connétables.
Les amirafles* e les filz as cunturs** ;  *Émirs. **Comtes.
.iiii.c. milies en ajustet en .iii. jurz*,  *400,000 il en rassemble en trois jours.
En Sarraguce fait suner ses taburs* ;  *Tambours.
Mahumet lèvent en la plus halte tur*.  *Tour.
N'i ad paien ne l'prit e ne l'aort*.  *Qui ne le prie et ne l'adore.
Puis si chevalchent par mult grand cuntençun*  *Émulation.
La tere Certeine* e les vals e les munz,  *La Cerdagne.
De cels de France virent les gunfanuns*,  *Les étendards.
L'arère-guarde des .xii. cumpaignuns
Ne lesserat bataille ne lur dunt*. [AOI.]  *Ne laissera que bataille ne leur donne.


 
LachansondeRoland F Michel page 27 Internet archive.jpg

Notes (version de Léon Gautier)

logo travaux partie en cours de rédaction

Chanson de Roland (1872) Gautier, II, page 117.jpg[110]

Vers 842.
Francs
O. Pour le cas sujet du pluriel, il faut Franc.
Vers 844.
Guens
O. Lire p.-e. fel.
Vers 845.
Oüd
O. Voir la note du vers 2.
Vers 850.
Mahumet levent en la plus halte tur
... « Il fit placer ses dieux sur le rempart, et leur fit des sacrifices. » (Keiser Karl Magnus’s Kronike.)
Vers 854.

Vers 854.Aort. O. Pour l’assonance, aürt. Le verbe est aürer.

Vers 858.
Tere Certeine
C’est sur ces deux mots que M. d’Avril a appuyé toute sa théorie sur le théâtre des derniers exploits et de la mort de Roland. Il le place en Cerdagne, et non en Navarre. Dans notre « Note sur la Géographie de la Chanson de Roland », nous réfutons longuement cette opinion, après MM. P. Raymond, Gaston Paris et François Saint-Maur. (Voir cette note au vers 703.)
Vers 859.

Lire duinst, qui se trouve au vers 1898. Le subjonctif Chanson de Roland (1872) Gautier, II, page 118.jpg[111] présent a beaucoup embarrassé nos pères, qui tenaient à le bien distinguer du présent de l’indicatif. Ainsi, pour la seule 3e p. du subjonctif de duner, nous avons, dans notre Chanson, cinq ou six formes différentes : dunne (18) ; dunget (2016) ; duinset (2938) ; dunt (859) ; duinst (1898) ; doinst, etc.

Lire plutôt laisserat.


Concordances et compléments

Cette laisse est alignée avec la laisse LXXVI du manuscrit de Châteauroux.

Voir aussi

Notes
  1. Version numérique copiée de WikiSource :
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