Buffon illustré de la jeunesse - 1893/Mammifères/Domestiques/Vache
Le bœuf et la vache
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Le bœuf et la vache
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Parmi les quadrupèdes ruminants, le bœuf se distingue
à son corps trapu, à ses membres courts et robustes, à
son cou garni en dessous d'une peau lâche qu'on appelle
sanon, à ses cornes creuses, qui se courbent d'abord en
bas et en dehors. Son cri est un mugissement grave,
sourd et prolongé.
Le bœuf domestique est répandu aujourd'hui en Europe,
en Asie, en Afrique et même en Amérique. Il se montre
doux, patient, capable d'attachement; mais il ne faut pas
l'irriter, car alors il devient furieux et rien ne l'arrête
dans l'exécution de sa prompte et terrible vengeance.
Son pelage, ordinairement rougeâtre, noir ou blanc, se
mélange souvent de ces trois couleurs; plus le poil est
rouge, plus il est estimé on fait cas aussi du poil noir. Il
atteint, en hauteur, à un mètre trente centimètres, en
longueur, à deux mètres vingt centimètres; il pèse jus-
qu'à six cents kilogrammes et plus (douze cents livres).
Du reste, ces proportions varient suivant le climat, la
race et les pâturages. Il vit communément de quatorze à
quinze ans; vers trois ans on le dresse au labour; de
cinq à dix, il est dans sa plus grande sorce à douze ans,
il quitte la charrue pour passer à l'engraissement et de
la à l'abattoir. Quand on veut faire servir la vache à la
charrue, il faut l'assorlir autant que possible avec un
bœ'uf de sa taille et de sa force, afin d'obtenir un trait égal.
Dans les terrains fermes et surtout dans les sriches, il saut
souvent jusqu'à huit ou dix bœufs, tandis que deux
vaches sussiront pour labourer des terrains légers et sa-
blonneux. Un bon bœ'uf pour la charrue ne doit être ni
trop gras ni trop maigre, il doit avoir une tête courte et
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ramassée, les oreilles grandes, bien velues et bien unies,
les cornes fortes, luisantes et de moyenne grandeur le
front large, les yeux gros, noirs, le mufle gros et camus,
les naseaux bien ouverts, les dents blanches et égales, les
lèvres noires, le cou charnu, les épaules grosses et pe-
santes. la poitrine large, le fanon pendant jusque sur les
genoux, les reins forts, larges, le ventre spacieux et tom-
bant, la croupe épaisse, les jambes et les cuisses grosses
et nerveuses, le dos droit et plein, la queue pendante jns- qu'à terre et garnie de poils touffus et fins, les pieds fermes, le cuir grossier et maniable, l'ongle court et large.
Le bœuf ne convient pas autant que le cheval, l'àne, le chameau, etc.. pour porter des sardeaux; la sorme de son dos et de ses reins le démontre mais la grosseur de son cou et largeur de ses épaules indiquent assez qu'il est propre à porter le joug.
Sans le bœuf, les pauvres et les riches auraient beau-
coup de peine vivre; la terre demeurerait inculte; les
champs, et mème les jardins, seraient secs et steri!es; il
t'st le domestique le plus utile de la ferme et fait la sorce
de l'agriculture il semble avoir été fait exprès pour la
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charrue la masse de son corps, la lenteur de ses mou-
vements le peu de hauteur de ses jambes, tout jusqu'à sa
tramluillité et sa patience dans le travail, semble con-
courir à le rendre propre à la culture des champs, et
plus capable qu'aucun autre de vaincre la résistance cons-
tante et toujours nouvelle que la terre oppose à ses efforts.
Le produit de la vache est un bien qui croît et qui se
renouvelle à chaque instant la chair du veau est une
nourriture aussi abondante que saine et délicate; le lait
est l'aliment des enfants; le beurre, l'assaisonnement de
la plupart de nos mets; le fromage, la nourriture la plus
ordinaire des habitants de la campagne. Que de pauvres
familles sont aujourd'hui réduites à vivre de leur vache!
La grande chaleur incommode les bœufs plus encore
que le grand froid. Il faut pendant l'été les mener au tra-
vail dès la pointe du jour, les ramener à l'étable ou les
laisser dans les bois pâturer à l'ombre pendant la grande
chaleur, et ne les remettre à l'ouvrage qu'à trois ou qua-
tre heures du soir. Au printemps, en hiver et en automne,
on pourra les faire travailler sans interruption depuis
liuit ou neuf hçures du matin jusqu'à cinq ou six heures
du soir.
La nourriture et les soins sont à peu près les mêmes pour la vache et pour le ba·uf; cependant la vache à lait exige des attentons particulières, tant pour la bien choisir que pour la bien conduire. On dit que les vaches noires sont celles qui donnent ln meilleur lait, et que les sont qui en donnent le plus.
Les pays les plus renommés pour produire )es plus
helles races sont la Suisse, In Normandie, l'Angleterre
et la Hollande, En général, il paraìt que les pays un peu
froids conviennent mieux à nos bœufs que les pays
chauds, et qu'ils sont d'autant plus gros et plus grands
que le climat est plus humide et plus abondant en pâtu-
rages. Les bœufs de Dauonark, de l'Ukraine et de la
Tartarie sont les plus grands de tous.
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En Irlande, en Angleterre, en Suisse, en Hollande, et,
en général, dans tout le Nord, on sale et on fume la
chair du bœuf en grande quantité, soit pour l'usage de
la marine, soit pour l'avantage du commerce. Il sorl
aussi de ces pays une grande quantité de cuirs.
Après la mort du bœuf, rien n'est perdu de lui sa chair fournit à l'homme le meilleur et le plus substantiel
des aliments; sa peau travaillée sert à saire des chaus- sures sa graisse donne du suif, de la pommade, de l'huile, dite de pied de bœus; son poil, de la bourre pour les tapissiers et les selliers ses cornes donnent des bou- tons, des peignes, des tabatières, etc. ses os, des ou- vrages pour le tour ses nerfs ou tendons, des fouets, des cravaches, etc. ses intestins, des enveloppes pour les saucissons, de la baudruche pour les ballons; son sang sert pour la saliricalion de plusieurs couleurs et pour le raffinage du sucre son liel pour la peinture et le dégrais- sage, etc.