Quand mon mary vient de dehors (Roland de Lassus)
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Quand mon mary vient de dehors est une chanson écrite par Roland de Lassus.
Sa popularité lui a valu de multiples rééditions avec notamment des contrafacta, évoqués ici.
Sommaire
- 1 Un contrafactum significatif, avec musica ficta
- 2 Le texte
- 3 La musique
- 4 Interprétations
- 5 Voir aussi
Un contrafactum significatif, avec musica ficta
Sur le site ChoralWiki, la première mention de cette chanson est dans le recueil Quatriesme livre des chansons a 4 et 5 parties, publié en 1564 à Louvain par Pierre Phalese. La partition « Superius » est donnée en haut de page de cet article.
Nous présentons dans la suite quatre versions ultérieures de cette chanson[1]. Elles montrent une complète transformation du texte, et sont accompagnées de légères évolutions de la ligne mélodique.
Le premier extrait a été édité en 1566. Le texte est truculent et évoque le comportement agressif d'un vieux mari jaloux d'une jeune épouse. Nous présentons ici la partie superius.
Nous donnerons la copie complète d'une version éditée ensuite, en 1576, par Adrian Le Roy et Robert Ballard, avec probablement une rédaction collaborative entre l'auteur et l'éditeur.
Pour cette version, les quatre voix sont donc détaillées à des fins de comparaison. On notera par exemple que le début de la mélodie Superius ne contient pas d'altération visible. Il s'agit en fait d'une musica ficta où le chanteur professionnel est censé rétablir les altérations implicites.
Nous présenterons ensuite une version intermédiaire (de 1582) qui montre une profonde transformation du texte, mais en conservant l'altération. Les paroles sont maintenant très moralisatrices et vantent les qualités domestiques d'une épouse au foyer.
Ce mécanisme de réécriture (contrafactum) a été étudié par Richard Freedman dans un livre publié en 2000 et intitulé : The Chansons of Orlando di Lasso and their Protestant Listeners: Music, Piety, and Print in Sixteenth-Century France. Un article avait déjà été publié sur ce thème en 1999 et peut être consulté sur ISTEX.
Nous montrerons enfin une version presque complète qui a été éditée en 1594 (année de la mort de Lassus) par un éditeur protestant, Paul Marceau.
Dans cette dernière version, le début de la mélodie Superius explicite l'altération (do dièse) que l'on retrouve généralement dans les transcriptions ultérieures.
Le texte
Voici donc les deux versions du texte, avec les paroles écrites par Lassus et les contrafacta des imprimeurs protestants.
Les paroles, première version
Dans son initiation à la musique, à l'usage des amateurs de musique et de radio, Roger Wild donne cette chanson comme exemple des textes de Roland de Lassus. Il précise[2] :
- Car en dépit de sa formation postérieure en Italie, où, adolescent, il fût emmené, il est demeuré le fils des musiciens du Nord, Il parle le français comme eux et la chanson à quatre voix dont le texte ci-dessous dit suffisamment l'origine, révèle à la fois la science et la finesse du joyeux maître.
Quand mon mary vient de dehors,
Ma rente est d’estre battue :
Il prend la cuillier du pot
À la teste il me la rue.
J’ay grand peur qu’il ne me tue.
C’est un faux vilain, jaloux
C’est un vilain, rioteux, grommeleux.
Je suis jeune et il est vieux.
Les paroles, version réformée
Dans l’épître dédicatoire, de l'édition de 1582 Simon Goulart, pasteur protestant, explique qu’il a changé les paroles des chansons de Lassus de manière à ce qu’elles puissent être chantées sans offenser les oreilles chrétiennes.
Dans une autre version des Mellanges éditée en 1576 la dédicace de Jean Pasquier annonce également qu'il a choisi de restaurer un sens spirituel à la musique de Lassus :
- « Entre tous les Musiciens de notre siècle Orlande de Lassus semble (et à bon droit) mériter la meilleure place pour l'exellence et admirable douceur de sa musique [...] Voyant [sa musique] neantmoins employee à des chansons si profanes, si sales et impudiques que les oreilles chastes et chrestiennes en ont horreur, j’ay pensé que je ferois devoir de chrestien si, repurgeant ces tresgracieux et plaisans accords de tant de villenies et ordures dont ils estoient tous souillez, je les remettois sur leur vray et naturel suject, qui est de chanter la puissance, sagesse et bonté de l'Eternel. »
Le résultat final est le suivant[3] :
Quand l'homme honneste va dehors
Sa femme n'est par la rue
Ainsi à la besogne alors
Menagère elle se rue
S'il revient elle le salue
Et lui fait accueil gracieux
Il n'est un vilain, rioteux, grommeleux.
Si elle jeune et s'il est vieux.
La musique
Charles Van den Borren cite ainsi cette chanson :
- La chanson Quand mon mary (n °11), où la jeune femme d'un vieux mari « rioteux et groumeleux » clame son triste sort avec une ironie presque tragique, est une merveille d'expression, en sa rude bonhomie, que fait ressortir la combinaison symétrique de périodes homophones bien rythmées et sujettes à répétition
Le thème
Le thème musical a évolué entre les premières versions et les rééditions suivantes.
version initiale | version ultérieure | |
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Dans « nouvelles chansons » de 1566
Dans les Meslanges, version de 1576
Edition de 1576 par Adrian Le Roy et Robert Ballard.
Soprano (superius) | Basses |
---|---|
Altos | Ténors |
Le Trésor de musique, version de 1582
Partition ténor.
Cette version est un contrafacta typique.
Le Trésor de musique, version de 1594
Dans « LE THRESOR DE MVSIQUE // D'ORLANDE DE LASSVS, » édité à Anvers en 1594 par Par Paul Marceau.
Superius | Bassus |
---|---|
Ténor | Contra. |
Le volume correspondant aux contralto est malheureusement manquant à la BnF. |
Exemples de transcriptions
Premières mesures d'une transcription réalisée par le DFC Dresden
Voici les premières mesures d'une transcription réalisée par la Chorale Franco-Allemande de Dresde.
On notera la reprise du texte initial, mais avec une mélodie plus proche de la version de 1594 (do dièse en mesure 2).
Premières mesures d'une transcription spécifique
Voici les premières mesures d'une transcription qui suit fidèlement la version de 1576[4].
Transcription complète
La transcription complète est visible sur la page
Interprétations
Cette chanson, relativement facile à mettre en place[5], est fréquemment interprétée par des chorales. Par rapport aux autres compositions d'Orlando de Lassus, les voix sont relativement alignées - ce qui la rend exécutable par des ensembles de plusieurs dizaines de choristes.
En voici deux exemples.
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Par l'ensemble Amarante (Atelier vocal des Herbiers). Direction: Michèle Laporte. Chantonnay, 1994. Vidéo: Franck Laporte. | Par l'ensemble « Wiener Lehrer-a cappella-Chor » en répétition générale le 28 Novembre 2015 pour un concert au MuTh de Vienne. Direction : Maximilian Opll. |
Voir aussi
- Notes
- ↑ Ce paragraphe est rédigé par un rédacteur non spécialiste en histoire de la musique. D'où l'emploi de formules conditionnelles
- ↑ page 248 dans l'édition de 1935
- ↑ Une investigation complémentaire est à mener pour déterminer l'auteur exact du texte Paquier ou Goulart
- ↑ Jacques Ducloy (discussion) 20 novembre 2018 à 09:09 (CET) : Le code LilyPond a été repris de la transcription du DFC Dresden. Le résultat est identique à la restitution de Jacques Barbier dans les éditions A Coeur Joie.
- ↑ Avis du rédacteur Jacques Ducloy (discussion) 7 novembre 2018 à 16:57 (CET)
- Sur ce wiki
Liste des évènements où cette œuvre est interprétée :
- Liens externes
- Notes de gestion
- mise en lecture : 18 novembre 2018