Nuvola apps important.png Attention, suite à une faille de sécurité, quelques liens vers les serveurs d'exploration sont désactivés.

-

HISTCNRS (2000) Wyart, partie 3

De Wicri France
Révision datée du 18 août 2014 à 20:27 par imported>Jacques Ducloy

Entretiens avec Jean Wyart

Les débuts de la documentation scientifique au CNRS


 
 

logo travaux article en cours de mise en ligne

Cette page introduit la troisième partie du texte des « Entretiens avec Jean Wyart », publiés sur le site HISTCNRS[1] en 2000.

Il reprend le contenu d'une série d'entretiens avec Jean Wyart réalisés en 1986 par Jean-François Picard et Elisabeth Pradoura les les 5, 12 et 20 mars 1986.

Pour une meilleure lisibilité dans un contexte hypertexte, ce texte a été découpé en plusieurs parties.

 

Jean Wyart s'est occupé de la documentation à partir de 1945. Dans cette partie, « Les débuts de la documentation scientifique au CNRS », il remonte en fait au années 1930.

L'article original

C'est alors que vous avez commencé à vous occuper de documentation scientifique

En octobre 1940, nous avons eu une première réunion concernant l'organisation de la révolte universitaire. Il y avait là aussi Frédéric Joliot avec lequel j'ai noué le contact. C'est lui qui m'a demandé, peu après, de venir l'aider aux 'Tables de constantes et données numériques'. Les Tables étaient un organisme créé par Charles Marie au début du siècle destiné à l'origine à faire la documentation de l'Union Internationale de Chimie, les autres disciplines ayant suivi ensuite. A la fin des années 1930, ces Tables étaient moribondes. Il y avait eu des difficultés d'argent au moment du Front Populaire et on avait demandé à Joliot de les remettre à flot. Il avait obtenu l'appui de l'industrie chimique, en particulier de Rhône-Poulenc. Ensuite il y a eu une aide du CNRS qui y appointait quatre ou cinq personnes. Mais le secrétaire général qui s'occupait de cela, Pierre Auger est parti au début de l'occupation et Joliot m'a demandé de prendre la suite. Début 1941, j'ai accepté, bénévolement, en plus de mes autres occupations. Il y avait donc quatre ou cinq employés qui ne savaient quoi faire, du fait de la guerre, il n'y avait plus de coopération internationale. On recevait toutes les revues de physique et de chimie en double et des spécialistes en faisaient une extraction critique que l'on publiait. Mais la France était maintenant coupée en deux et le problème était de se procurer les revues. En accord avec Joliot, j'ai donc organisé tout un réseau de collecte. Pour cela, j'ai pris contact avec un certain nombre d'industriels, des gens qui avaient l'avantage de pouvoir franchir facilement la ligne de démarcation. On a beaucoup travaillé au début avec la firme LMT (Le Matériel Téléphonique) et son chef de service des brevets, Chéreau, qui est devenu un ami ainsi qu'un ingénieur, Rigodet qui fournissait les revues. Mais c'était insuffisant. Or, très rapidement et pour d'autre raisons que la documentation, j'ai réussi à obtenir un laisser passer pour la zone Sud. J'avais un ami astrophysicien, Daniel Challonge, et, comme vous le savez, les astronomes sont des types universels. Challonge connaissait un allemand important dans l'organisation scientifique allemande, quelqu'un qui s'occupait de la prévision du temps. Cet allemand lui avait dit : "si vous avez besoin d'un laissez-passer, j'ai mon bureau chez les nazis au siège de la B.N.P., avenue de l'opéra. Voici un papier que vous présenterez à mon secrétaire, il vous en donnera un". Je demande donc à Challonge si il peut me confier le fameux papier. Bien sur, personne ne voulait aller dans ces bureaux, mais il a bien fallu que je me décide. Il y avait deux soldats à la porte. Ils me saluent, je remets le papier au secrétaire. Le type me regarde bizarrement, un peu inquiet, et sans un mot, il me donne le laissez-passer. Je n'avais qu'une crainte, c'est qu'en sortant, je croise des français qui me prennent pour un collabo… Cet ausweis m'a permis d'aller souvent à Lyon, pour prendre contact avec un service scientifique de l'armée d'armistice. De même que l'industrie créait des laboratoires de recherche pour l'après-guerre, l'armée avait commencé à créer un centre de documentation. Il y avait là un type bizarre, un ancien polytechnicien qui avait commandé le premier régiment d'artillerie de France au mois de mai 1940. Il avait un adjoint, à l'époque capitaine que j'ai revu quand il est devenu général. Tous deux étaient très anti-allemands, mais pétainistes bien sûr. Ils m'ont procuré beaucoup de documents. Et puis, je suis allé plusieurs fois à Grenoble. Bref, c'est comme cela que l'on a organisé notre réseau de collecte de revues.


Voir aussi

Notes
… davantage au sujet de « HISTCNRS (2000) Wyart, partie 3 »
Les débuts de la documentation scientifique au CNRS +
Entretiens avec Jean Wyart +