Société des sciences de Nancy/1883/11-17

De Wicri Nancy
Séance du 17 novembre 1883 de la Société des sciences de Nancy
Début : 17 novembre 1883
Ville : Nancy

Cet article a publié en 1883 dans le Bulletin de la Société des sciences de Nancy [NDLR 1].

Procès verbal

Présidence
Gustave-Marie Bleicher
Membres présents
MM.. Jaquiné, Humbert, Le Monnier, Floquet, Herrgott, Hasse, Vuillemin, Lernaire, Thouvenin, Barthélémy, Mulot, de Metz-Noblat, Ritter, Friant, Fliehe, Hecht, Blondlot et Wohigemuth.

M. Marty, de Toulouse, offre à la Société une brochure qu'il vient de publier, et sollicite le titre de membre correspondant.

M. Bleicher est chargé du rapport sur cette candidature.

M. le Président annonce que M. le Dr Mangenot offre sa démission de membre titulaire, par suite de son départ.

M. Le Monnier a la parole pour une demande de modification aux statuts. Faisant remarquer que la Société atteint presque actuellement le nombre maximum de membres permis par ses statuts, M. Le Monnier estime qu'il serait bon de supprimer l'article qui limite ainsi le nombre des membres. Après une discussion à laquelle prennent part MM. Fliehe et Hecht, la Société décide que cette proposition sera mise à l'ordre du jour de la prochaine séance.


Communications

I. Géologie préhistorique

M. Bleicher fait une communication sur la Découverte d'armes préhistoriques du type le plus ancien aux environs de Colombey (Meurthe-et-Moselle), par M. Olry, instituteur à Allain. Ces armes sont en roches du pays, silex de l'oolithe inférieure ou du corallien, grès métamorphique passant à la quartzite provenant des alluvions quaternaires. Elles ont été trouvées dans les couches les plus superficielles du sol, mais appartiennent au type chelléen de M. de Mortillet, anciennement achéuléen.

Elles méritent le nom de hache plutôt que celui de grattoir ou de couteau, sont taillées à grands éclats et présentent souvent un talon. Un échantillon d'arme du type couteau trouvé dans les mêmes gise-ments, également de grès voisin de la quartzite, semble à M. Bleicher appartenir au type plus perfectionné du mousiier. 11 présente enfin un fragment assez grand d'andouilier de cerf, travaillé des deux côtés vers la pointe par un instrument tranchant grossier, qui a été trouvé à en-viron lm,50 dans des alluvions essentiellement composées de cailloux jurassiques, dans le voisinage de Barisey-la-Côte. M. Bleicher, qui a visité avec M. Olry ces divers gisements, appelle l'attention de la So-ciété sur ces faits qui démontrent l'existence de stations préhistoriques très anciennes en dehors des cavernes.

II Météorologie.

M. Millot lit un mémoire relatif à ses Observations sur les orages dans le département de Meurthe-et-Moselle.

Les orages sont amenés dans nos contrées par la branche équatoriale du vaste circuit aérien qui tourne de gauche à droite autour d'une zone de calmes et de hautes pressions.

Ils sont de deux sortes : les orages d'hiver et les orages d'été. Les premiers, indifférents à l'agriculture, prennent naissance dans la partie méridionale des mouvements tournants (ou dépressions) qui sont engendrés sur la rive gauche du courant équatorial parle frottement de l'air en marche contre l'air calme ou moins rapide.

Les orages d'été, accompagnés de phénomènes électriques d'une grande intensité, sont situés au contraire sur la rive droite du courant équatorial ; ils nous arrivent quand, après une série de beau temps et de hautes pressions, le régime des vents de S.-O. s'établit sur nos contrées. Après quelques jours d'orages, les manifestations électriques cessent et l'on traverse une période simplement pluvieuse.

Les orages n'éclatent, le plus souvent, que quand il y a deux ou plusieurs couches de nuages ; cependant il existe une forme nuageuse qui semble, à elle seule, renfermer la foudre dans son sein  : c'est le grain arqué.

Parmi les arbres qui bordent les routes, ceux qui sont le plus fréquemment atteints par la foudre sont ceux qui se trouvent à un coude ou une bifurcation du chemin  ; et, au* point de vue des essences, le peuplier est le plus menacé. Aussi peut-il servir de paratonnerre, à condition que ses racines soient en communication avec un sol humide.

La grêle tombe généralement sur une bande comprise entre deux bords parallèles et presque droits dont la position dépend d'un centre de dépression éloigné. Elle a une tendance à suivre les vallées, notamment celles dont la direction est comprise entre l'Ouest et le Sud vers l'Est et le Nord; ainsi qu'a éviter les côtes et les plateaux élevés qui divisent le météore. Dans les vallées transversales, la zone grêlée s'élargit de part et d'autre au point de faire croire aux observateurs que l'orage descend ou remonte la vallée qu'ils habitent.

Dans le département de Meurthe-et-Moselle, la plupart des orages nous arrivent par le, plateau de Colombey, suivent les côtes jusqu'à Toul et la vallée de la Moselle vers Pompey et gagnent ensuite la Seille. Le promontoire occidental du plateau de Haye divise en deux les orages venus de l'Ouest par Foug et la vallée de l'Ingressin. Une branche va de Toul à Pompey et à la Seille par la route précédente, l'autre remonte la Moselle jusqu'à Pont-Saint-Vincent, gagne la Meurthe par le col du Mauvais-Lieu, et continue son chemin vers l'Est en passant au Nord de Lunéville.

D'autres orages nous arrivent du Sud par les vallées du Brénon et du Madon. Plus au Nord, ce sont les vallées de l'Ache, du Rupt-de-Mad, de l'Orne et de la Ghiers qui servent de trajectoires aux météores à grêle. Enfin, l'angle S.-E. du département est visité par les orages qui longent le versant occidental des Vosges du S.-S.-O. au N.-N.-E. Tous ces orages peuvent se rencontrer aux confluents des vallées et donner lieu à des tourbillons locaux qui causent de grands dégâts.

On a remarqué que la grêle tombe le plus souvent sur le versant des coteaux, à mi-côte à peu près, ainsi que dans les localités où le sous-sol, peu accidenté et imperméable, entretient la couche superficielle dans un certain état d'humidité  ; ce dernier cas est celui des campagnes au Nord de Lunéville, si souvent éprouvées.

Que peut-on faire pour se garantir du fléau ? Des auteurs sérieux croient que les bois de sapins changent en pluie un orage de grêle. C'est dans les Vosges que cette question doit être étudiée.

Si l'on ne peut empêcher la grêle de tomber, on pourrait peut-être annoncer les orages avec plus d'exactitude. ïl est impossible au Bureau central de Paris de préciser quelle est la vallée plus particulièrement menacée, mais les commissions météorologiques départementales pour-raient le faire en procédant dans leur rayon d'action de la même façon qu'à Paris  : étudier la marche des orages, multiplier les stations, centraliser au chef-lieu les observations télégraphiées deux fois par jour, etc. Enfin, il faudrait que les commissions voisines s'avertissent mutuellement quand il y a lieu. C'est là malheureusement une. solution très coûteuse et une décentralisation du service des avertissements, pour laquelle la météorologie n'est pas mûre, cette science ne comptant pas un assez grand nombre d'adeptes.

(Cette étude paraîtra in extenso dans le Bulletin de la Société.)

Le Secrétaire annuel, J. WOHLGEMUTH.



Voir aussi

Notes
  1. Cette société, installée à Nancy en 1870, a pris la suite de la Société des sciences naturelles de Strasbourg. Elle est devenue l'Académie lorraine des sciences.
Source
http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/32172/ALS_1883_6_16.pdf (page XXXI).