Fonds Paul Meyer

De Wicri Chanson de Roland
Révision datée du 15 février 2017 à 11:34 par udl-bul-col.fr>Sylvie Bouchoule (Actualités du fonds Paul Meyer : l'affaire Dreyfus)
Fonds Paul Meyer

Présentation des fonds et corpus de la Direction de la documentation et de l'édition
- Bibliothèque universitaire de lettres et de sciences humaines
et Bibliothèque universitaire de droit et de sciences économiques
Logo BU UL.png
Fonds spécifiques DDE
Droit Corpus juridique
Droit Fonds Burnouf
Lettres et Droit Fonds Paul Meyer
Lettres Fonds Taveneaux
Lettres Collections de l'Époque moderne
Lettres Fonds de la Sarre
Lettres Fonds Jeanne d'Arc
Lettres Fonds Decaux
Lettres Fonds Lajarrige
Lettres Fonds Rosambert
Fonds Paul Meyer
Université : Université de Lorraine
Époque : 19ème siècle
Domaine : Philologie romane
Contexte : Donation
Ville : Nancy
Pays : France

Le fonds Paul Meyer désigne l’ensemble des ouvrages d'une collection de la bibliothèque personnelle de M. Paul Meyer, acquis par la Bibliothèque universitaire de lettres et de sciences humaines de Nancy 2 suite à une donation posthume.

Présentation du fonds Paul Meyer

L'article ci-dessous s'inspire au départ du mémoire de Betty Bodron, réalisé en 2004 sous la direction de madame Isabelle Turcan, dans le cadre d'un stage réalisé à l'ATILF en partenariat avec la Bibliothèque universitaire de lettres (BUL). Certaines modifications et des enrichissements ont été depuis apportés par les équipes de la BUL (partie prenante de la Direction de la documentation et de l'édition de l'Université de Lorraine, depuis janvier 2012), afin de prendre en compte les études toujours en cours sur le fonds .

Biographie de Paul Meyer

Paul Meyer est un savant du XIXe siècle, spécialisé en philologie romane.

Né à Paris le 17 janvier 1840, Marie-Paul-Hyacinthe Meyer devient élève de l’École des Chartes en 1858, où il se prend de passion pour la philologie romane. Après l'obtention d'un diplôme d'archiviste-paléographe (promotion du 28 janvier 1861[1], il travaille aux archives de Tarascon. De 1866 à 1872, il est archiviste aux Archives impériales, qui, dans l'intervalle, sont devenues les Archives nationales. Il est nommé professeur suppléant à l'École des Chartes en 1869, dont il devient le Secrétaire général en 1872. Il obtient définitivement la chaire des langues romanes en 1882, quelques jours seulement avant de remplacer Jules Quicherat[2] comme directeur de cette institution. Dans l'intervalle, il est entré comme professeur au Collège de France pour y enseigner les langues et les littératures d'Europe méridionale, chaire dont il restera titulaire jusqu'en 1906.

Il est élu membre de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres en 1884. Il reçoit de nombreux prix scientifiques dont, en 1883, le prix biennal décerné par l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres pour l'ensemble de ses travaux sur les langues romanes.

Comme en témoignent ses publications ainsi que les ouvrages présents dans sa bibliothèque, Paul Meyer porte un intérêt particulier à la langue et à la littérature des anciens troubadours. Avec son ami et confrère Gaston Paris[3], il fonde la Revue critique d'histoire et de littérature[4] en 1866 et la revue Romania[5],[6] en 1872. Cette dernière a exercé une grande influence et a bénéficié d’un prestige international dans le domaine des études latines, établissant ainsi le prestige de la France dans une branche d'étude dont l'Allemagne s'était jusqu'alors assuré le monopole.

En 1875, Paul Meyer et Gaston Paris fondent la Société des anciens textes français[7].

Histoire du fonds Paul Meyer

A sa mort, le 7 septembre 1917, Paul Meyer souhaitait léguer sa bibliothèque à l'université de Strasbourg. Cependant, puisque l'Alsace oscillait sans cesse entre la France et l'Allemagne, les ouvrages furent accueillis par mesure de précaution par la Bibliothèque de l'Université de Nancy - l'actuelle Bibliothèque universitaire de droit de la place Carnot - qui couvrait alors toutes les disciplines.

Si on se réfère à la date d'entrée dans l'inventaire du premier ouvrage du fonds, l'inventaire du fonds Paul Meyer a débuté le 15 décembre 1919. Un premier document, daté du 29 octobre de la même année, traite d'un projet d'aménagement de ce fonds, prouvant de la sorte que l'arrivée de ce fonds à Nancy se situe entre septembre 1917 et octobre 1919. Néanmoins, on peut supposer que le fonds est arrivé après l'incendie survenu à la Bibliothèque universitaire de droit le 31 octobre 1918 suite à des bombardements. Cependant de récentes recherches nous indiqueraient que le fonds Paul Meyer «est entré en 1919, grâce à la libéralité de M. Basile Zaharoff» sans plus de précisions : don de la bibliothèque ou don d'argent ayant permis l'acquisition ? Une réponse peut être entrevue l'année suivante par le même auteur lorsque celui-ci précise : "De nombreux particuliers se sont joint aux collectivités, et le geste généreux d'un bienfaiteur de l'Université, Basile Zaharoff, permit l'acquisition de la riche bibliothèque de l'ancien directeur de l’École des Chartes, Paul Meyer, source unique de langues et littératures romanes."

On ignore les raisons qui ont poussé Paul Meyer à souhaiter transmettre sa bibliothèque à Strasbourg mais on peut supposer qu'elles avaient un rapport avec l'existence à l'époque d'une spécialisation en langues romanes dans cette université.

Le fait que son grand-père paternel était originaire de Strasbourg[8] a également pu influencer son choix.

En 1965, la création de la bibliothèque universitaire spécialisée de Lettres et sciences humaines entraîne un important transfert de fonds, dont celui de Paul Meyer qui trouve alors sa localisation actuelle, mais pas dans sa totalité, puisque les réserves de la Bibliothèque universitaire de droit conservent encore quelques ouvrages de ce fonds, surtout des doubles, et l'ensemble de ses manuscrits. Cependant, les conditions particulières de l'arrivée du fonds à Nancy en temps de guerre expliquent la difficulté de trouver des documents prouvant l'exactitude des faits et des dates.

Nature et valeur scientifique du fonds Paul Meyer

La partie du fonds déposée à la BU Lettres de Nancy regroupe

  • environ 7700 brochures appelées par la tradition "tirés-à-part", mais qui comprennent aussi toutes sortes de "petites publications" pouvant s'avérer d'un grand intérêt.


Les monographies

La bibliothèque d'un savant tel que Paul Meyer témoigne de la production éditoriale de l'époque sur un sujet d'étude très spécifique.

Le fonds comprend des ouvrages de littérature générale et des ouvrages spécialisés dans les domaines d'études de ce savant. On y trouve ainsi des écrits concernant l'histoire des langues européennes, des langues romanes, de la langue française et en particulier de la langue médiévale et des variétés régionales du français, des dictionnaires, des grammaires, mais aussi des ouvrages de littérature ancienne, européenne et médiévale, ainsi que des cours de littérature française et d'histoire de la littérature publiés au cours du XIXe siècle. Ce fonds est également constitué de livres d'histoire et géographie ou d'histoire du droit, de monographies traitant des religions, de documents de références bibliographiques et de nombreux catalogues.

Ces différentes composantes apparaissent donc comme autant de collections dans le fonds.

La majorité des titres a été éditée au cours du XIXe siècle. Certains (environ 495) sont rédigés dans une langue étrangère (anglais, allemand, espagnol, italien, roumain, latin, grec, etc.) ou dans des langues régionales (langue d'oc) ; ils correspondent à des dictionnaires et à des productions concernant la langue, tels que des grammaires - les ouvrages de philologie romane sont souvent en allemand - ou à des recueils de textes dans leur version originale, en ancien français par exemple.

En 2004, à partir d'un échantillon de 131 livres, il etait apparu qu'environ 34% des ouvrages de ce fonds avaient une présence relativement rare dans les collections des différentes bibliothèques françaises.


Les "tirés-à-part"

Ils sont regroupés dans environ 237 liasses divisées comme suite :

  • Tirés-à-part proprement dits : environ 180 liasses, correspondant à 6600 pièces, classées par auteurs (les textes de Paul Meyer lui-même occupant un peu plus de 3 liasses)
  • Publications de l'Institut : 24 liasses, couvrant la période 1861-1915 (avec des lacunes)
  • Divers : 33 liasses comprenant des catalogues de livres et de manuscrits ; des tirés-à-part mélangés ; des "petites publications" très diverses.
    Parmi celles-ci, on peut citer par exemple cette édition de 1784 de l'ouvrage "Les amours de Léandre et Héro : poème de Musée le grammairien" (parue à Paris, chez Nyon le jeune). On remarque aussi un opuscule intitulé "Una leggenda araldica e l'epopea carolingia nell'Umbria : documento antico pubblicato per le nozze Meyer-Blackburne da A. d'Ancona ed E. Monaci", publié en 1880 à l'occasion du mariage de Paul Meyer avec Lilian Gwendoline Blackburne.

Un principe d'annotations

Fichier:Annotation colle.jpg
Chanson de Roland annotée par Paul Meyer Annotation collée en page de titre
Chanson de Roland annotée par Paul Meyer Annotations dans le texte
Chanson de Roland annotée par Paul Meyer Page de titre

La présence de notes manuscrites, de dédicaces et/ou de documents divers insérés dans la majorité des livres accordent une plus grande valeur à ce fonds. En effet, d'après Jacques Monfrin dans Études de philologie romane (2001), lors de l'étude de manuscrits, Paul Meyer notait systématiquement dans ses notices ses réflexions d'études dont il reconnaissait l'intérêt scientifique : « Ces notices de manuscrits ont une valeur permanente. Ce sont là les articles les plus utiles. Le plus grand service que l'on pourrait rendre à nos études est d'en publier le plus possible. Vous même [en parlant à Gaston Paris], quoique vous connaissiez bien la littérature française du Moyen-Âge, vous ne vous figurez pas la quantité de faits que vous ignorez et que des notices de faits mettent en lumière ». Ces considérations sont également valables pour l'étude des langues occitanes et la philologie en général, et les annotations ainsi accumulées par Paul Meyer pourraient encore servir à des études, à l'instar de ses notes sur l'histoire littéraire de Moyen-Âge, qui ont permis aux spécialistes d'avoir une meilleure connaissance de ce domaine aux XIIIe et XIVe siècles.

La Chanson de Roland et le Roman de Roncevaux des XIIe et XIIIe siècles publiés d'après les mss. de la Bibliothèque Boldéienne à Oxford et de la Bibliothèque Impériale par Francisque-Michel. Paris : F. Didot, 1869

Paul Meyer, un homme dans son époque : l'affaire Dreyfus

En octobre 2013, le travail de référencement du fonds Paul Meyer en cours à la BUL a permis d’y découvrir un exemplaire du Compte-rendu sténographique du Procès Zola devant la Cour d'assises de la Seine et la Cour de cassation, 7 février-23 février, 31 mars-2 avril 1898, dédicacé de la main de l’auteur de J’accuse. Cette découverte a été l’occasion d’étudier un aspect parfois moins connu de la personnalité de Paul Meyer.

En effet, lors du procès qui lui fut intenté après la publication de son célèbre article en faveur de l’innocence d’Alfred Dreyfus, Emile Zola fit appel à des experts en écriture connus pour leur indépendance et leur compétence. Parmi eux, Paul Meyer, alors directeur de l’Ecole des chartes, qui conclura que le document accusant Dreyfus est un faux. Bien que l’Ecole des chartes ne se soit pas massivement mobilisée en ce sens, plusieurs autres de ses professeurs et anciens élèves rejoindront le camp des dreyfusards (Arthur Giry, Auguste Molinier, Gaston Paris, Paul Viollet).

La bibliothèque de Paul Meyer contient de nombreuses publications en lien avec l’Affaire, en particulier l’Histoire de l'affaire Dreyfus de Joseph Reinach, parue entre 1901 et 1911, plusieurs de ses 7 volumes comportant un hommage de l’auteur à P. Meyer. On y remarque aussi les ouvrages (en rapport avec l’Affaire ou non) publiés et dédicacés par des chartistes dreyfusards (voir le catalogue de la Bibliothèque).

Pour en savoir plus :
Articles sur le rôle des chartistes entre 1894 et 1906 :

  • Ferri, Laurent. – Emile Zola et « ces messieurs de l’Ecole des chartes » dans l’affaire Dreyfus : documents inédits.

In : Bibliothèque de l’Ecole des chartes,2006, tome 164, p. 595-603.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_2006_num_164_2_463714

  • Joly, Bertrand. – L’Ecole des chartes et l’Affaire Dreyfus.

In : Bibliothèque de l’Ecole des chartes, 1989, tome 147, pp. 611-671.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bec_0373-6237_1989_num_147_1_450550

  • Ribémont, Thomas. – Les historiens chartistes au coeur de l’affaire Dreyfus.

In : Raisons politiques, 2005, no 18, p. 97-116.
http://www.cairn.info/revue-raisons-politiques-2005-2-page-97.htm

Ouvrages à consulter à la BUL :

  • Gaston Paris dreyfusard : le savant dans la cité / [lettres choisies et présentées par] Ursula Bähler, 1999.

Zs 3201

Et aussi:

  • Émile Gallé : le verrier dreyfusard / Bertrand Tillier, 2004.

0W 11129 / A 748 til

Voir aussi

Notes

  1. Sa thèse, intitulée Recherches sur la langue parlée en Gaule aux temps barbares (Ve - VIe siècles), est restée inédite
  2. Jules Quicherat sur Wikipédia
  3. Gaston Paris sur Wikipédia
  4. La Revue critique d'histoire et de littérature sur le wiki des Presses Universitaires de France (PUF)
  5. La revue Romania sur le site de l'Institut de recherche et d'histoire des textes
  6. La revue Romania sur le site du Collège de France
  7. La Société des anciens textes français sur Wikipédia
  8. Études de philologie romane Publications romanes et françaises - Par J. Monfrin, Geneviève Hasenohr-Esnos, Marie-Clotilde Hubert, Françoise Vielliard
  9. Thomas Antoine, Prou Maurice, Mortet Charles. Paul Meyer. In: Bibliothèque de l'école des chartes. 1917, tome 78. pp. 429-446
  10. Études de philologie romane Publications romanes et françaises - Par J. Monfrin, Geneviève Hasenohr-Esnos, Marie-Clotilde Hubert, Françoise Vielliard