Histoire poétique de Charlemagne (1905) Paris/Livre deuxième/Chapitre XI

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Les guerriers de Charlemagne

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Les guerriers

Nous avons déja mentionné les principaux héros qui entourent dans la tradition le glorieux empereur et dont la renommée finit par éclipser la sienne. Nous ne pouvons entrer ici dans des détails sur chacun d'eux gui demanderaient autant de monographies ; nous nous contenterons de les énumérer et d'indiquer sommairement ce que les poèmes en racontent, et le rapport dans lequel ils sont avec leur chef.

Roland

1° Roland, neveu de l'empereur. Sa naissance a donné lieu, comme nous l'avons vu (liv. 11, ch. ix et x), a des récits tres divers ; il n'y a pas moins de différences dans la maniere dont on lui fait accomplir ses premiers exploits. D'apres la Karlamagnis- Saga (I, 38), c'est lors du siége de Vienne, contre le duc Girard, qu'il fit ses premieres armes; suivant le Renaud de Montauban (voy. 1. 11, chap. Iv, 4), c'est en Saxe contre Amidan; d'apres la chanson d'Aspremont, gui est la meilleure et la plus ancienne source, c'est dans la grande guerre d' Italie, ou il tua Eaumont (voy. 1. II, chap. IV, 1) : c'est cette tradition qu'ont suivie Phi- lippe Mousket (v. 4429 et suiv.), Girard d'Amiens (1. JI in fine), David Aubert et la plupart des textes. Nous avons rapporté plus haut ses querelles avec son oncle et sa mort a Roncevaux (1. II, chap. Iv). I1 est devenu, comme on sait, le héros principal de r'épopée chevaleresque italienne ( Orlando) et figure aussi dans beaucoup des romances espagnoles (Roldan).

Olivier

2° Olivier, fils de Renier de Gennes. Il commence par guerroyer l'empereur (Girard de Vienne), livre a Roland un combat acharné que termine seule l'intervention divine, devient alors son frere d'armes et meurt avec lui a Roncevaux. Il ne figure pas dans les poémes du second cycle, mais il parait dans d'autres récits de guerre contre les Sarrasins (Fierabras, Otinel) et dans le Voyage de Charlemagne en Orient. Un poème très postérieur lui donne pour fils Galien,

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Turpin

Turpin, l’archevêque de Reims. D'apres la Karlamagnus-Saga (1, 26), c'était un clerc romain que le pape avait laissé Charlemagne dans un voyage en France; celui-ci le fit d'abord chancelier, puis archevêque de Reims (1, 36). 11 joue un grand role dans Aspremont, dans Ogier le Danois, et surtout, dans la Chanson de Roland, qui raconte sa mort héroique et sainte a Roncevaux. II est presque toujours représente comme armé, et la Chronique mise sous son nom lui attribue aussi ce caractere.

Naime de Bavière

4° Naime de Baviere, le fidèle conseiller de Charlemagne, souvent plus sage et plus avise que lui, toujours du parti du bon droit contre P'injustice méme triomphante en apparence. Girard d'Amiens raconte sa généalogie et sa présentation a Charlemagne d'une facon toute particuliere (fol. 112 y° B et suiv.). On le voit jeune et amoureux dans Aspremont; partout aileurs, c'est Naime a la barbe canue. Sa mort n'est rapportée nulle part.

Ogier le Danois

5° Ogier le Danois. Outre le grand poeme sur ce heros qui nous a longuement occupé (voy. 1. 11, chap. v), il figure dans Roland, dans Gui de Bourgogne, dans Renaud de Montauban, etc. Sa mort, sa résurrection et ses aventures fantastiques ont fait le sujet d'un bon nombre de compositions relativement modernes.

Guillaume au court Nez

6° Guillaume au court Nez. D'apres les poémes parvenus jus- qu'a nous, ses principaux exploits se sont accomplis sous le regne de Louis, fils de Charlemagne, mais une branche (IX) de la Karlamagnus-Saga le fait fleurir et mourir sous Charlemagne.

Les douze pairs

On a attaché une importance tres grande a une expression qui revient souvent dans les poémes carolingiens: les douze pairs de Charlemagne. On y a yu un symbole mythique, un nombre sacro; on en a fait le trait caractéristique de ces poemes; on y a cherché les éléments de la critique pour leurs dates. Nous ne pensons pas que cette désignation mérite qu'on s'ty arrete aussi longtemps; nous le ferons sentir simplement en examinant les textes qui nous l'offrent.

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La Chanson de Roland est le plus ancien. Là les douze pairs ne semblent etre autre chose qu'une sorte d'association, a la tete de laquelle se trouvent Roland et Olivier, composée de guerriers particulierement braves et voués a combattre toujours ensemble. Ce n'est pas du tout une Table-Ronde pour ainsi dire officielle dans laquelle on ait prétendu réunir les plus illustres des vassaux de Charlemagne : la preuve en est que quelques-uns des premiers, Ganelon, Turpin, Naime de Baviere, Ogier de Danemark, etc., n'en font point partie. C'est un véritable compagnonnage[1], dans l'intérieur duquel se forment des associations encore plus intimes, comme celle de Roland et Olivier, de Gérin et Gerer. Aussi, quand Marsile marche sur Roncevaux, son neveu a l'idée d'opposer a ce petit bataillon sacré une association égale entre Sarrasins. < Pour ma part, dit-il, je me charge de Roland ; élisez-moi maintenant onze barons, avec lesquels je combattrai les douze pairs' donne a croire que 'etait Charlemagne qui avait désigné les douze pairs, et c'est en effet ce que nous apprend la Karlamagnus-Saga. Un jour que Charlemagne est entoure de ses chevaliers, il leur an- nonce qu'il veut choisir douze d'entre eux comme champions con- tre les paiens, comme Dieu a choisi douze apotres pour répandre sa parole sur le monde (I, 59)., Ceci se passe au début de T'expé- dition d'Espagne, et les douze pairs sont tues a Roncevaux. Ce n'est donc que dans la guerre d'Espagne quils doivent figurer ; c'est de la que les ont empruntes les écrivains postérieurs qui les ont transportés dans d'autres parties du cycle. Ni Aspremont, ni Guitalin, ni le Couronnement de Charles ¾, ni aucun des poemes sur les guerres contre les vassaux, ne les connaissent. En revanche nous les trouvons dans Gui de Bourgogne, dans Otinel, et surtout dans Fierabras*. Cest ce dernier poéme, devenu si populaire grace au roman en prose qu'on en tira (voy. ci-dessus p. 97, et passim), qui determina en beaucoup de points F'idée qu'on se fit de P'épopée carolingienne; cest a cause de lui qu'on se représente toujours Charlemagne comme entouré des douze pairs, conception qui n'apparalt pas dans poésie primitive. Cette conception se retrouve d'ailleurs dans la ci-dessus, p. 319 sont tout autre chose. au vers 875 (str. LXXI). Id. ibid. Les douse pairs dont il est parle Italie, Yavait transportee en Espagne. La dans V'allusion de Renaud de Montautan partie ou paraissent les douze pairs n'a a ce poeme que nous avons citée (woy. sans doute rien de traditionnel.

Cette plirase

Nous avons dit ailleurs ( p. 252) que poéme, dont la scène devrait être en

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quelques autres romans, tout a fait étrangers a la guerre d'Espagne, tels que Pairs en Perse ou Simon de Pouille (voy. ci-dessus, p. 342). Elle se répandit beaucoup hors de France : les romances espagnoles regardent les douze pairs, los doce qui a una mesa comen pan, comme une institution chevaleresque; Nicolas de Padoue a tiré de la meme idée un heureux profit dans Pépisode de Malceris (Prise de Pam- pelune, v. 482 et suiv.); en Angleterre, on en vint a forger le mot dosyper ou doseper, Charlemagne. Mais tout cela, nous le répétons, ne se trouve pas dans les traditions les plus anciennes. On concoit que les noms des douze pairs aient varie. Du mo- ment qu'on les considéra comme les douze apotres de la prédica- tion belliqueuse dont Charlemagne était le chef, on voulut faire entrer parmi eux tous les guerriers les plus illustres que la poésie lui attribuait. Les douze pairs de la Chanson de Roland, célébrés sans doute dans des poémes fort anciens, furent oublies de bonne heure, et, sauf Roland et Olivier, leurs noms n'offrirent plus d'in- téret. Ce sont, d'apres le texte d'Oxford : Roland, Olivier, Gerin et son compagnon Gerer, Berenger, Oton, Samson, le Gascon Engelier, Ivon et Ivoire 4 le vieil Anséis et Girard de Roussillon. Le Pseudo-Turpin, bien qu'il ne dise mot des douze pairs, con- nait encore tous ces noms ; mais de bonne heure on en changea quelques-uns. Deja la Karlamagnus-Saga (1, 59) supprime An- seis et Girard, qu'elle remplace par Turpin et Gautier de Lum, qui meurent en effet, d'apres la Chanson de Roland, a Roncevaux avec les pairs. Chaque texte a sa liste particuliere; nous en avons rassemblé un certain nombre que nous donnons a 1' Appendice. Roland et Olivier sont les seuls qui se retrouvent partout. Tous les poemes frangais de la seconde époque admettent Naime de Baviere et Ogier le Danois. Dans Fierabras, on voit apparaitre des héros tout nouveaux, dont quelques- uns méme, comme Richard de Normandie, sont étrangers au cycle, dont d'autres (Bérard de Montdidier, Gillimer 1'Escot, Aubri le Bourgoing, Basin) appar- tiennent a de tout autres parties. 11 n'y a plus que Roland et son inséparable ami qui se retrouvent ici parmi les guerriers de la pre- (cf. les variantes) a fait supprimer ici tie des pairs; mais cf. CXLIX, 1895, et Ivon et Ivoire, de sorte qu'on peut croire CLXXXIX, 2406.

LIVRE II.

le Voyage de Charles a Jérusalem et les Douze

au singulier, pour désigner un paladin de

Un vers passé dans la strophe LXV que Turpin et Gautier de Lum font par-

Notes de l'article

  1. Ils sont appeles les douze compagnons au vers 875
    NDLR : La référence exacte est 878.

Voir aussi