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H2PTM (2007) Alvarez 2

De H2PTM

Classification des Serious Games


 
 

 
Titre
Classification des Serious Games
Auteur
Julian Alvarez(i,ii), Olivier Rampnoux(iii), Jean-Pierre Jessel(i) et Gilles Methel(ii)
Affiliations
(i), Université Toulouse III , 118, route de Narbonne, 31062 Toulouse cedex.
(ii) LARA, Université Toulouse II, 54, rue du Taur, 31000 Toulouse
(iii) CEREGE/IAE/CEPE, Université de Poitiers, 15, rue de l'Hôtel Dieu, 86034 POITIERS Cedex
  • alvarez@irit.fr
  • olivier.rampnoux@univ-poitiers.fr
  • jessel@irit.fr
  • methel@univ-tlse2.fr,
Dans
actes du colloque H2PTM 2007 Hammamet
publié dans H²PTM07 : Collaborer, échanger, inventer
Résumé
Cet article propose de porter un regard sur les différents types de Serious Games. Inspirés des jeux vidéo, sous ce vocable nous trouvons une grande diversité d’applications. Nous proposons une classification au sein des Serious Games tout en les différenciant pour l’instant des simulations. La question du lien entre l’intention initiale du game designer et le rôle joué par l’implémentation d’objectifs nous donne un fil d’Ariane à dérouler. La posture adoptée par le joueur notamment dans le cas de simulations constitue une question centrale de notre réflexion.
Mots-clés
Serious Game, classification, Edumarket game, posture du joueur, intentionnalité.

Introduction

Aujourd’hui, de nombreux Serious Games sont disponibles gratuitement sur le réseau Internet dans des domaines aussi différents que les secteurs de la santé, de la défense, de l’éducation, de la communication… Face à cette grande diversité, il paraît nécessaire de définir une classification des Serious Games, en identifiant des critères qui ne soient pas liés à la pluralité de leurs champs d’application. Dans la première partie de cette communication, nous proposerons des éléments pour caractériser les Serious Games et les répertorier en quatre grandes catégories. Dans la seconde partie, nous confronterons ces dernières aux jeux vidéo de simulation, pour tenter d’identifier quelques correspondances.

Comment caractériser un Serious Game ?

Dans son article “From Visual Simulation to Virtual Reality to Games” (Zyda, 2005), Zyda propose la définition suivante du Serious Game : “A mental contest, played with a computer in accordance with specific rules, that uses entertainment to further government or corporate training, education, health, public policy, and strategic communication objectives.” (p. 26)[1]. Autrement dit, la vocation d’un Serious Game est d’inviter l’utilisateur à interagir avec une application informatique dont l’intention est de combiner à la fois des aspects d’enseignement, d’apprentissage, de communication, ou d’information, avec des ressorts ludiques issus du jeu vidéo. Une telle association a pour but de donner à un contenu didactique ou formateur (Serious), une forme ou des mises en scènes attrayantes (Game). Zyda, tout comme Michael et Chen (Michael, 2005), répertorient un large éventail d’applications concernées par les Serious Games. Dans ces classifications, le critère discriminant est principalement le domaine d’applications. Mais, les champs d’applications sont trop nombreux et trop subjectifs pour pouvoir construire une typologie résistante. De ce fait, nous proposons une classification des Serious Games en 4 catégories qui prend appui sur l’intention initiale souhaitée et implémentée par les concepteurs : - Les jeux à intention éducatives : jeux ludo-éducatifs ou Edutainment L’ambition d’une application ludo-éducative est de transmettre une connaissance ou un apprentissage en mobilisant des ressorts ludiques. Dans la lignée de ce paradigme, le MIT et l’université du Wisconsin développent un programme de recherche baptisé "Education Arcade"[2]. Ces deux termes, mis ensemble, affirment l’idée de concevoir des systèmes éducatifs bâtis sur de vrais ressorts ludiques.

  • Les jeux à intention publicitaires ou Advergaming

L’objectif des advergaming est de se baser sur le gameplay de jeux vidéo connus pour en faire un outil de communication. L’idée étant de libérer le joueur de l’apprentissage du gameplay pour qu’il se focalise sur les éléments graphiques ou sonores. Ces derniers véhiculant des marques que l’on souhaite mettre en valeur.

  • Les jeux à intention informative : Les Edumarket games

Cette catégorie désigne les Serious Games dont l’intention est d’informer ou tout au moins dont l’intention est de sensibiliser les utilisateurs à un message socio-éducatif. Cette forme différente de communication permet de modifier la sensibilité des publics afin qu’ils appréhendent avec plus d’aisance et de perspicacité les enjeux sociaux. Développement durable, orientation scolaire, aide humanitaire, sont autant de domaines d’application des Edumarket games.

  • Les jeux engagés

Ces Serious Games expriment des messages de nature politique, religieuse, militaire… Pour y parvenir cette catégorie détourne bien souvent les objectifs habituels à remplir pour gagner dans les jeux classiques (perdre pour gagner…) ou détourne chez ces derniers leurs aspects graphiques ou sonores afin d’interpeller les utilisateurs.

Serious Games et jeux de simulations

Dans le monde des jeux vidéo, il existe cependant une catégorie qui ne propose pas d’objectifs implémentés. Il s’agit de celle des jeux de simulation, dont des titres connus sont « Sim city », « Les Sims » ou encore « Flight Simulator ». Cette catégorie semble de ce fait se distinguer des Serious Games, car leur vocation est de laisser à l’utilisateur le soin de choisir de quelle manière il souhaite jouer et se fixer ses propres objectifs. Toutefois ils véhiculent, à l’instar des Serious Games, un système de valeur. Dans les Sims, plus un joueur est riche, plus il a d’amis. Grâce à la manne financière, les activités sociales et relationnelles sont plus simples à faire et plus valorisantes vis-à-vis des autres personnes au sein du jeu. Wright l’auteur des Sims a donné un rôle à l’argent, comme Molière dans l’Avare. L’argent fait partie de notre société occidentale et a une fonction. Il sert à "fluidifier" les rapports entre les gens. Il facilite les relations, même si en parallèle, il "réduit et simplifie" la nature de ces relations. Partant de cette analyse, ce questionnement démontre à lui seul qu’une simulation peut aussi être un support pour diffuser un message, le cautionner ou le déformer. Pour Genvo(Genvo, 2006), jouer est aussi un choix de posture que l’utilisateur adopte. Ainsi, il est assez simple pour lui de basculer de la paidea au ludus (Caillois, 1967) mais également d'une posture ludique à une posture didactique face à une simulation. Pour Brougère (Brougère, 2005), adopter ce choix de posture dépend en partie du contexte dans lequel se place l'utilisateur (maison, institution...), s'il est seul ou en groupe, cela nous renvoie à la question des « cadres » (Goffman, 1991). Si la simulation peut remplir une fonction didactique, elle peut également remplir les mêmes fonctions que nous avons identifiées autour des différentes catégories de Serious Games. Ces correspondances que nous soulevons entre les Serious Games et les simulations méritent donc une exploration plus approfondie pour affiner notre classification. Ce sera l’objet de nos prochains travaux.

Conclusion

La réflexion menée durant cet article nous a conduit à proposer une classification des Serious Games composées de quatre catégories : Educatifs, Advergaming, Edumarket games et Jeux engagés. Celles-ci ne trouvent pas ici leur fondement dans une propriété intrinsèque formelle, mais s’inscrivent dans un choix de posture que l’on tente de faire adopter à l’utilisateur en lui présentant un « monde » régi par un ensemble de règles et un habillage graphique et sonore dédié. Il ne faut pas occulter cependant, comme nous le révèle la catégories des jeux de simulation, qu’une expérience de réception dépend aussi d’autres paramètres, tel l’habillage de l’application, son mode d’interaction, la présence ou non d’un médiateur, le cadre, l’état d’esprit de l’utilisateur…

Références

[Brougère, 2005] Brougère G., « Jouer/Apprendre », Economica/Anthropos, 2005

[Buckingham, 2003] Buckingham D. et Scarlon M. Ed., « Education, Entertainment and learning in the home », Open University Press 2003

[Caillois, 1967] Caillois R., « Les jeux et les homes », Gallimard, 1967

[Galician, 2004] Galician M.L., « Handbook of product placement in the mass media », The Haworth Press, 2004.

[Genvo, 2006] Genvo S., « Le game design de jeux vidéo : approche communicationnelle et interculturelle », 2006.

[Goffman, 1991] Goffman E., « Les cadres de l’expérience », Editions de Minuit, 1991.

[Gonzalo, 1999] Gonzalo F., « Videogames of the oppressed: Videogames as a means for critical thinking and debate », 1999.

[Kellner, 2005] Kellner C., « Le prétendu jeu des logiciels “ludo-éducatifs” », Ludovia 2006, 2006.

[Michael, 2005] Michael D. et Chen S., « Serious Games:Games that Educate, Train, and Inform », Course Technology PTR, 2005

[Zyda, 2005] Zyda M., « From Visual Simulation to Virtual Reality to Games », IEEE Computer Society, Septembre 2005

Notes

  1. Un défi cérébral, joué avec un ordinateur selon des règles spécifiques, qui utilise le divertissement en tant que valeur ajoutée pour la formation et l’entraînement dans les milieux institutionnels ou privés, dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’ordre public, ainsi qu’à des fins de stratégie de communication (traduction des auteurs) http://gamepipe.usc.edu/~zyda/pubs/Zyda-IEEE-Computer-Sept2005.pdf
  2. http://www.educationarcade.org