CIDE (2009) Kamga

De CIDE

Les nouveaux enjeux de la mise en valeur du Patrimoine scientifique et technique de la recherche dans l’espace Francophone


 
 

 
titre
Les nouveaux enjeux de la mise en valeur du Patrimoine scientifique et technique de la recherche dans l’espace Francophone
auteurs
Rachel Kamga et Khaldoun Zreik
Affiliations
Université Paris 8, Laboratoire Paragraphe
In
CIDE.12 (Montréal), 2009
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Introduction

La réflexion proposée dans cette communication se veut une incitation à une réflexion globale sur le repérage, l’inventorisation, la documentation, la sauvegarde et la valorisation du patrimoine scientifique et technique francophone de la recherche par le biais des technologies d’information et de la communication. En abordant la question du recensement des éléments de ce patrimoine et celle de leur valorisation, on ne peut manquer de poser la question de l’histoire et particulièrement celle de l’histoire des sciences et des techniques. Faut-il rappeler l’importance de ce riche patrimoine, à la fois témoin de l’histoire de la recherche scientifique, de l’évolution et de l’apport des sciences et des technologies et support incontestable de la culture scientifique et technique dans une société de la connaissance[1] ? En effet, aussi bien la science, la technique et l’industrie que les régions elles-mêmes ont un passé qui se matérialise dans un patrimoine et qui reste sous-jacent à maintes problématiques du présent[2] . A cette fin, on analysera d’abord le concept, du matériel scientifique obsolète, témoin non seulement d’une époque, mais de pratiques scientifiques ou pédagogiques, faisant partie de notre histoire. À ce titre, il doit être évalué et préservé. L’intérêt pour la préservation des archives et instruments scientifiques et techniques s’est de plus en développé et se caractérise par des actions coordonnées comme celuide l’Union Internationale d’Histoire et de Philosophie des Sciences [3] . La mise en valeur de ce patrimoine contribue également au développement de la culture scientifique et technique, permettant aux publics de se familiariser avec les savoirs, les techniques et les innovations.

Comme le souligne les entretiens de Jacques Cartier[4], les francophones bénéficient d’un patrimoine scientifique et culturel dont nous pouvons être fiers et qu’il faut faire partager. Seule une recherche de qualité garantira l’existence d’un espace scientifique francophone. Il s’agit d’accélérer les échanges, de multiplier les rapprochements pour que des projets scientifiques de qualité voient le jour. C’est l’identité francophone qui est en jeu[5] . La rétroaction de la communauté scientifique et technique est très positive à ce sujet, il est opportun de faire le point sur de nombreuses initiatives engagées dans le monde francophone. D’exemples actions (internationales, nationales, régionales ou institutionnelles) menées ou en cours au sein de divers organismes (musées, ministères, universités, collectivités, associations, PME, associations …) francophones, constituent un levier significatif pour la sauvegarde et de valorisation du patrimoine scientifique et technique contemporain, particulièrement pour la recherche. Comme le projet de numérisation des 200 000 « manuscrits de Tombouctou », témoins de la grandeur de la ville entre le XIV° et le XIX° siècle ; Conservatoire National des Arts et Métiers à Paris, pionnière en la matière par la création du conservatoire numérique des arts et métiers suite à une mission nationale de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique contemporain confiée à son directeur. Le CNUAM couvre le domaine de la recherche et de l’enseignement en histoire des sciences et des techniques, en épistémologie et en didactique. Deux autres exemples de projet de grande envergure sont : le Centre d’Histoire des Sciences et des Techniques de l’Université de Liège, et Bibliotheca Alexandrina.

Les notions de collecte, conservation, sauvegarde et valorisation font ressurgir aussi bien les enjeux que les problèmes méthodologiques n’ont résolus. Comment décider qu’un objet plus qu’un autre sera classé patrimoine ? Les procédures d’évaluation des intérêts de ces objets restent floues ou peu comprises du grand public. Car les processus de sélection, conservation, valorisation des objets font appels à des critères aussi bien objectifs que subjectifs ce qui complexifie la démarche méthodologique. Nous pensons que les outils virtuels peuvent être ici d’un grand secours, tel le laboratoire virtuel de Fabio Bevilacqua mettant en œuvre les instruments électriques de Pavie, et les « histoires d’instruments » sur CD élaborés par Catherine Cuenca[6].

Patrimoine scientifique et technique francophone : Un potentiel patrimonial et intellectuel d’exception?

La région francophone peut être fière de ce son riche potentiel patrimonial scientifique et technique comprenant, les établissements d’enseignement supérieur, les organismes de recherche, les réseaux de compétence et de nombreuses initiatives territoriales ou individuelles. Ces organismes et actions offrent un tissu riche pour l’exploration méthodique de ce patrimoine. Avant d’aller plus loin, une remarque préliminaire sur la pertinence de l’association du «patrimoine scientifique » au « patrimoine technique » s’impose. En effet, associer le patrimoine scientifique au patrimoine technique se justifie par le lien de proximité qui existe entre ces deux types patrimoines. D’une part, dans le domaine de la connaissance, le lien entre science et technique est fort, tout à fait évident dans le Monde moderne et contemporain. Et d’autre part, le patrimoine technique est majoritairement constitué d’instruments obsolètes utilisés par les chercheurs qui malheureusement échappent à notre considération. L’instrumentation scientifique est pourtant un élément essentiel du patrimoine car témoin et conséquence d’au moins deux Révolutions technoscientifiques : celle de la microélectronique (qui a entraîné celles de la Microinformatique et de l’automatisation) et celle de la microbiologie (biologie moléculaire puis la génomique)[7] . Les instruments scientifiques et appareils témoins de la recherche et de l’innovation disparaissent progressivement des laboratoires, remplacés par d’autres, tandis qu’un grand nombre de chercheurs et d’ingénieurs qui ont participé vers 1960-1970 à la création de ces laboratoires quittent la vie professionnelle, alors qu’ils constituent « une mémoire irremplaçable de ce demi-siècle d’évolution technique et scientifique ». Une « mémoire vivante » qu’il faut conserver et transmettre dans les meilleures conditions aux générations futures[8].

De nombreuses Institutions se sont spécialisées dans la préservation du patrimoine scientifique et technique, mais pour préserver, encore faut-il connaître et inventorier ? La démarche d’inventorisation de cette mémoire scientifique comporte bien évidemment une dimension intellectuelle mais on ne peut réduire à ce seul plan le souci patrimonial. Faut-il rappeler que la région Francophone regorge d’un riche patrimoine scientifique et technique ?

Le patrimoine universitaire et le patrimoine mobilier scientifique et technique représentent un potentiel intellectuel et culturel unique. Pourtant ses infrastructures ne sont cependant que partiellement accessibles au public car cette catégorie de patrimoine est aujourd’hui sous-représentée sur la liste du patrimoine mondial [9] . Les laboratoires doivent alors se montrer, aller vers les citoyens. Et l’objet scientifique prendra alors une dimension démonstrative nouvelle. Car la population connaît mal ces chercheurs arc-boutés sur leurs microscopes, leurs lasers [10] ou leurs archives. En effet, peu de biens reconnaissent explicitement cette dimension comme prépondérante ou même simplement présente dans l’analyse de leur valeur universelle exceptionnelle.

En quelques décennies, les sciences et les technologies ont connu une rapide évolution, le patrimoine scientifique se qui jadis se matérialisait sous forme de « papiers » : cahiers, articles, thèses, actes, etc., se dématérialise peu à peu et se présente sous une forme entièrement numérique transmissible instantanément dans le monde entier constitue une véritable révolution culturelle. Même si le support papier reste évidemment très utilisé, l’essentiel est désormais dématérialisé sur les disques durs des stations, des portables ou des serveurs[11], cette nouvelle forme vient grossir les rangs du patrimoine immatériel[12]. Ce patrimoine immatériel scientifique soulève d’autres problématiques liées à leur organisation et à leur accès (disque dur, supports multimédias, clé USB,messagerie, fichiers joints, …). Dans cette articulation l’inventorisation dudit patrimoine doit porter aussi bien sur leur aspect matériel qu’immatériel. Et pour valoriser ce patrimoine, certains projets de grande envergure dont nous détaillerons quelques exemples dans la partie suivante ont vu le jour.

Valorisation du patrimoine scientifique et technique par les TIC : Exemples de projets de préservation et valorisation ?

La Mission nationale de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique

Sur le plan national, la Mission nationale de sauvegarde du patrimoine scientifique et technique confiée au Musée des arts et métiers du Cnam par le Ministre de la Recherche, a pour objectifs principaux de sensibiliser les organismes d’enseignement supérieur et de recherche, ainsi que les entreprises, à la sauvegarde du patrimoine scientifique et technique, de développer un réseau national de sauvegarde et de valorisation du patrimoine de la recherche et de l’industrie, en assurant un rôle de conseil et d’expertise dans le domaine, en suscitant des initiatives régionales, en accompagnant la mise en œuvre du programme dans les régions.

Projet de numérisation des manuscrits arabo-islamiques[13]

« Les apports arabo-islamiques dans le domaine des sciences médicales » est le premier volume d’une série intitulée « Contribution de la civilisation arabo-islamique aux sciences » récemment publié en coopération par le Bureau de l’UNESCO au Caire, le Centre national égyptien pour la documentation sur le patrimoine culturel et naturel (CULTNAT) et la Bibliothèque nationale d’Egypte.[14] « Ce projet pilote est la première phase d’un effort encyclopédique de longue haleine pour utiliser les TIC à fin d’accès et d’archivage des trésors uniques des civilisations arabo-islamiques » [15] . Le principal résultat de cette première phase du projet a été la numérisation de 2.000 manuscrits destinés à tomber dans le domaine public, au bénéfice des chercheurs, analystes et de toutes les personnes intéressées. Les manuscrits numérisés font partie d’une collection de 1.084 manuscrits d’origine arabe, turque ou persane relatifs aux sciences médicales et détenus par la Bibliothèque nationale égyptienne du Caire. Le catalogue sur support papier fournit, quant à lui, la description détaillée de 31 d’entre eux. La totalité de la collection numérisée sera publiée sur un CD-Rom trilingue (arabe, français et anglais) et sera publiée sur internet en fin d’année 2009.

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Valoriser le patrimoine de "la Cité de l'écrit" : Tombouctou, la Renaissance par le Numérique[16]

Le projet de numérisation des manuscrits de Tombouctou entre dans le cadre de la coopération décentralisée entre la région Rhône-Alpes et la région de Tombouctou, région située au nord du Mali, entre le fleuve Niger et les frontières algériennes et mauritaniennes.

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Ce vaste projet, dont l'ambition première est de redonner à Tombouctou son rôle historique de « Capitale du Savoir et de la Culture », consiste d’une part, à inventorier les manuscrits, à élaborer le catalogue, à informatiser le réseau des bibliothèques, et d’autre part à contribuer au mouvement de sauvegarde physique des manuscrits à travers la numérisation de 50 000 manuscrits (4 millions de pages). Il permettra aussi de créer des conditions de stockage pérenne des données numérisées, d’élaborer une bibliothèque numérique et de créer un pôle de compétence regroupant un centre d’études supérieures de l’écrit et des arts graphiques, un musée, des ateliers de copie.

Ce vaste chantier s’inscrit comme une suite sociale et économique logique du cœur du projet intégré à la stratégie de développement touristique de Tombouctou et sa région. Environ 180 à 200 000 manuscrits anciens, provenant de l’Espagne Arabo- Andalouse, de la vallée du Niger, du Sahara central, de la Mauritanie, du Maroc... sont conservés dans la région de Tombouctou. Certains sont universellement connus et reconnus pour leur intérêt historique et relatent le passé d’une société aux activités commerciales intenses, muée par une pensée africaine et musulmane « humaniste » très originale. Ces manuscrits sont actuellement gardés en divers lieux et entretenus de diverses manières : au CEDRAB-IHERIAB créé par la volonté de l’Etat malien en 1970, dans des bibliothèques privées entretenues par les descendants des fondateurs, ouvertes ou non au public, mais aussi dans des demeures familiales. Face aux problèmes de dégradations physiques, de trafics et de difficultés de conservation de ces manuscrits dans un pays pauvre frappé par une succession d’années sèches et une période de guerre, de nombreuses réflexions sur l’inventaire, la restauration et le stockage de ces manuscrits ont vu le jour ces dernières années.

Projet à l’échelle francophone[17]

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Le RFBNN a pour mission de réunir au sein d’une instance coopérative ouverte les grandes institutions documentaires de la Francophonie déjà engagées dans des programmes de numérisation patrimoniale, ou développant des projets dans ce domaine. Il entend offrir à ces institutions un forum d’échanges permettant de mener de façon concertée les initiatives lancées dans le champ de la numérisation patrimoniale, afin d’éviter tout dédoublement d’effort et d’assurer le partage des meilleures pratiques.

Le RFBNN contribuera ainsi à la préservation à long terme et à la diffusion auprès d’un large public d’un patrimoine précieux et souvent menacé de disparition, faute de conditions adéquates de conservation. Le RFBNN assurera également un transfert de savoir-faire auprès d’un nombre croissant d’institutions documentaires de la Francophonie par l’organisation de stages de formation, l’élaboration d’outils didactiques et l’échange permanent d’information entre ses membres. Pour l’instant seuls 14 pays francophones participent à ce projet de grande ampleur, il s’agit : Belgique, Canada, Cambodge, Égypte, France, Haïti, Luxembourg, Madagascar, Mali, Maroc, Québec, Sénégal, Suisse, Tunisie, Vietnam.

La Bibliothèque numérique mondiale (BNM) [18]

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L’UNESCO en collaboration avec 32 institutions partenaires lance la Bibliothèque numérique mondiale, une plate-forme promouvant pour la libre circulation de l’information, la solidarité internationale, la célébration de la diversité culturelle et l’édification de sociétés du savoir. Cet hypermédia propose un éventail unique de matériels culturels provenant de bibliothèques et d’archives d’un peu partout dans le monde. Le site offre manuscrits, cartes, livres rares, films, enregistrements sonores, illustrations et photographies. L’accès à ces ressources est libre et gratuit. L’objectif visé est de réduire la fracture numérique, à promouvoir la compréhension et à renforcer la diversité linguistique et culturelle. Outre la promotion de la compréhension internationale, le projet vise à augmenter la quantité et la diversité des contenus culturels sur internet, à fournir des matériels aux éducateurs, aux élèves et au grand public, mais aussi à réduire la fracture numérique au sein et entre les pays, en renforçant les capacités dans les pays partenaires. La BNM offrira des fonctions de recherche et de navigation en sept langues (anglais, arabe, chinois, espagnol, français, portugais et russe) et proposera des contenus dans plus de quarante langues. Parmi les autres trésors figurant dans la BNM, on trouve des manuscrits scientifiques arabes provenant de la Bibliothèque nationale et des Archives d’Egypte  ; d’anciennes photographies d’Amérique latine fournies par la Bibliothèque nationale brésilienne ; le Hyakumanto darani, un parchemin datant de l’an 764 détenu par la Bibliothèque du Parlement japonais ; la fameuse Bible du diable, du XIIIème siècle qui se trouve à la Bibliothèque royale de Stockholm ; des calligraphies arabes, persanes et turques provenant de la Bibliothèque du Congrès.

Méthodologie de valorisation du patrimoine scientifique et technique proposée dans le cadre du projet EFRARD

Nous constatons fort agréablement l’émergence de projets patrimoniaux ayant recours aux TIC dans une approche de numérisation, d’archivage et de conservation, mais également à des fins d’attractivité et de valorisation touristique de ces territoires. Le projet EFRARD19 [19] s’organise en réseaux scientifiques et d’expertises par spécialisation et thématique sous la forme d’une structure matricielle au sein de laquelle coopèrent étroitement les principaux acteurs de la R&DI (chercheurs, experts, administrateurs, politiques et institutions francophones) pour partager leurs expériences et savoir-faire. La méthodologie développée dans le cadre du projet EFRARD[20] vise à la fédération des différents acteurs francophones de la sauvegarde, de la conservation, de la valorisation et de la recherche dans le domaine du patrimoine scientifique et technique. Les collectivités territoriales ont un rôle primordial dans cette valorisation, puisqu’elles possèdent chacune des outils de culture scientifiques intéressants mais qui gagneraient à renforcer leur coopération avec la communauté scientifique. Par exemple, par la mise en commun du matériel archivistique par des programmes de numérisation. Le premier point central de la problématique des politiques, programmes et actions tient à la question de la collaboration et à la coordination des objectifs communs. Il paraît essentiel de s’interroger sur la notion de patrimoine dans le contexte actuel de révolution technologique. Comment associer inventorisation et la valorisation du patrimoine scientifique et technique aux mutations technologiques actuelles ? Une transformation majeure s’est opérée avec la révolution numérique et la mondialisation, nous obligeant à considérer les mutations technologiques comme une opportunité pour constituer des espaces dans lequel cohabitent immatériel et le matériel. Seules les technologies de l’information et de la communication permettent d’accélérer les échanges, de multiplier les interactions et collaborations pour que des projets scientifiques de qualité voient le jour.

Les objectifs de cette méthode proposée sont de sensibiliser les acteurs de la recherche à la protection de leur patrimoine scientifique (articles, archives, base de données, thèse, instruments,…), la première étape doit consister à faire un état des lieux du patrimoine scientifique et technique reconnus ou non dans les pays Francophones. Il s’agit là d’un vaste chantier qui requiert l’implication de tous les acteurs concernés comme nous l’avons souligné plus haut. Notons que le patrimoine scientifique est souvent volumineux, complexe, délicat et nécessite des investissements importants depuis l’inventorisation jusqu’à la valorisation. Les entités productrices n’ont pas toujours une suffisante sensibilité au sauvetage. Le public lui-même demande à être sensibilisé par des mises en scène scénographiques innovantes et pédagogiques. Une fois le patrimoine inventorier s’en suit un processus de restauration et de préservation, processus qui sera poursuivi par une dissémination de ce patrimoine dans l’espace francophone par le biais de TIC, musées virtuels, portails dédiés et des actions de formation ad hoc. La mise en place d’un dispositif de formation et de collaboration sur la valorisation du patrimoine y compris le personnel privé et public des institutions impliquées dans la préservation, la restauration et la valorisation s’avère indispensable. On comprend donc que la sauvegarde du patrimoine scientifique et technique relève d’une démarche globale, sans cesse renouvelée, à caractère sociétal.

L’universalisme scientifique et la diversité culturelle qui caractérise les pays francophones peuvent être considérés comme un vecteur de richesse et de développement pour la mise en valeur de ce patrimoine matériel à qui s’attache un patrimoine immatériel : les connaissances de chacun de ces instruments. L’un est indissociable de l’autre et une réflexion doit être menée pour que cette dualité puisse être conservée au mieux et immatériel[21] . La coopération entre les chercheurs, les institutions en charge de la gestion du patrimoine, les acteurs politiques et économiques s’en trouve nécessairement renforcée surtout en ce concerne leur recensement mais aussi des possibilités de stratégies de développement durable. Les TIC sont d’un grand secours dans ce type de collaboration car ils permettent non seulement le travail en commun malgré la distance géographique (équipes chargées de recenser, sauvegarde, documenter) mais également la mise en visibilité de ce patrimoine d’un pays francophone à un autre en mettant en valeur des sites, des musées, des documents, des hommes. Dans cette conception, un inventaire du patrimoine scientifique et technique francophone doit être réalisé, suivi de sa préservation, restauration, conservation et valorisation. Cette mise en valeur par les TIC, peut se faire à travers un espace virtuel communautaire. Utiliser le terme musée virtuel serait réducteur, car cet espace en plus des fonctionnalités d’un musée virtuel doit également intégrer les moyens de coopération pour un double enjeu : servir la communauté et son développement une fois constituée et, par ailleurs, aider à construire la communauté au préalable. Une itération parait indispensable.


Conclusion

La valorisation du patrimoine scientifique et technique est un processus critique dans toute démarche de gestion du patrimoine. En effet, de nombreux travaux et études [22] ont abordé la question du patrimoine scientifique et technique en termes de protection et de valorisation. Si on part du postulat que patrimoine scientifique et technique est un enjeu majeur de visibilité, à des fins de vulgarisation scientifique, d’attractivité touristique et de développement des territoires en question, la valorisation dudit patrimoine peut-être envisagée comme vecteur du développement urbain durable. Le concept du Collaboratoire » représente un potentiel important en ce qui concerne le recensement et la préservation du patrimoine scientifique et technique de recherche, comme moyen efficace qui favorise davantage le travail en commun. La sauvegarde et la mise en valeur du patrimoine scientifique et technique ne sont pas encore une cause gagnée. Notre prochaine réflexion s’attachera à illustrer que le patrimoine et les nouvelles technologies peuvent s’enrichir mutuellement. L’intérêt pour la communauté francophone est énorme puisque l’idée est basée sur un projet de reconstruction 3/4D du patrimoine scientifique et technique francophone. Pour ce faire, un appel à manifestation d’intérêt sur ce projet permettra aux différents acteurs[23] d’exprimer leur intérêt vis-à-vis du projet mais éventuellement des projets réalisés, en cours, en gestation proche de ce projet. Cet appel à manifestation d’intérêt devra servir de base à la constitution non seulement d’une équipe de volontaires mais aussi de pays ou régions francophones volontaires à un travail collaboratif et collectif sur ce projet de reconstruction 3/4D du patrimoine scientifique et technique francophone.


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Notes

  1. Colloque Patrimoine scientifique et technique, culture et société ? Du 13 Au 14 mars 2008 - Musée des arts et métiers, Paris, < http://www.ocim.fr/Colloque-Patrimoine-scientifique>
  2. Robert Halleux, Directeur de recherche du FNRS, « L’histoire et le patrimoine dans la culture scientifique, technique et industrielle », < http://www.embarcaderedusavoir.ulg.ac.be/journeeshubertcurien/actes/JHCurien-RHalleux.pdf>
  3. R.W. HOME, P. HARPER, O. WELFELÉ (eds), Arhives of Contemporary Science. Proceedings of the Symposium organised by the Commission on Bibliography and Documentation, Liège,20-26 July 1997, Liège, DHS Secretariat, 1998
  4. Créés en 1987, les Entretiens Jacques Cartier s'articulent autour de quatre axes : des colloques pointus initiés et pris en charge par les différents pôles d'excellence de la région Rhône-Alpes, des colloques sur des grands problèmes de société d'aujourd'hui et de demain, des espaces de dialogue consacrés à l'économie, des échanges et des rencontres culturels.
  5. LES ENTRETIENS JACQUES CARTIER, http://cjc.univ-lyon2.fr/article.php3?id_article=45
  6. Robert Halleux, Directeur de recherche du FNRS, « L’histoire et le patrimoine dans la culture scientifique, technique et industrielle », http://www.embarcaderedusavoir.ulg.ac.be/journeeshubertcurien/actes/JHCurien-RHalleux.pdf
  7. Yves THOMAS, directeur de la valorisation de la recherche à l’Université de Nantes, et Professeur à l’Université de Nantes, « Un exemple de sauvegarde du patrimoine scientifique et technologique contemporain »
  8. Serge Chambaud, Directeur du Musée des arts et métiers, « La protection du patrimoine scientifique et technique », Le 15ème Cahier des Soirées scientifiques est paru (décembre 2008).
  9. Michel Cotte, Conseiller de l’ICOMOS pour le Patrimoine mondial « Le patrimoine scientifique : quelques remarques introductives »
  10. Alain Beltran, « Introduction », La Revue pour l’histoire du CNRS, N°14 - Mai 2006, [En ligne], mis en ligne le 3 mai 2008. URL : http://histoire-cnrs.revues.org/document1748.html. Consulté le 29 juillet 2009.
  11. Jean-Michel Trio, Adjoint du Délégué Régional Alsace du CNRS « La protection du patrimoine scientifique : une démarche globale »
  12. Le patrimoine immatériel est une catégorie adoptée officiellement par l’Unesco pour désigner des pratiques, des représentations, des expressions, des connaissances et des savoir-faire ainsi que les objets, les espaces et les groupes qui leur sont associés. Une convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel a été adoptée par l’Unesco en octobre 2003 et entre actuellement en vigueur. Elle a été signée par la France en juillet 2006. Les critères permettant de définir un patrimoine comme immatériel, l’étendue du domaine qu’il recouvre, les formes prises par sa protection, sont autant de questions qui se posent aujourd’hui à la Direction du Patrimoine et auxquelles la mission à l’ethnologie et le Lahic peuvent contribuer à répondre. La notion de patrimoine immatériel rejoint en effet en grande partie celle de patrimoine ethnologique qui était justement caractérisée par son immatérialité.
  13. http://portal.unesco.org/ci/fr/ev.php-URL_ID=5322&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html<nowiki>>
  14. © UNESCO 1995 - 2009
  15. explique Tarek Shawki, du Bureau de l’UNESCO au Caire
  16. < http://www.manuscritsdetombouctou.org/fr/introduction.php>
  17. < http://www.rfbnn.org/html/Pages/mission.htm>
  18. La BNM a été développée par une équipe de la Bibliothèque du Congrès. Une aide technique a été fournie par la Bibliotheca Alexandrina (Alexandrie, Egypte). Parmi les institutions ayant contribué à la BNM, on compte des bibliothèques nationales et des institutions culturelles ou éducatives d’Afrique du Sud, d’Arabie saoudite, du Brésil, de Chine, d’Egypte, des Etats-Unis, de France, d’Iraq, d’Israël, du Japon, du Mali, du Maroc, du Mexique, d’Ouganda, des Pays-Bas, du Qatar, du Royaume-Uni, de la Fédération de Russie, de Serbie, de Slovaquie et de Suède. Site web officiel : http://www.wdl.org/fr<nowiki>>
  19. Espace Francophone pour la Recherche, le Développement et l'Innovation http://www.efrardwiki.org/plate- forme/index.php?title=Accueil<nowiki>>
  20. L’espace francophone pour la Recherche, le Développement et l’Innovation (EFRARD) est un Consortium Francophone de Recherche et Développement durable initialement créé par un groupe de chercheurs de l’équipe de recherche C.I.T.U à l’université de Paris 8. L'objectif d’EFRARD est d'aider à la mise en place d'une communauté internationale majoritairement francophone de chercheurs, experts et institutions travaillant sur les enjeux et modalités du renforcement des coopérations entre les acteurs de la Recherche, du Développement et de l’Innovation (R&DI) pour le développement durable et le changement social
  21. Culture Scientifique et Technique, « Préservation du patrimoine », http://cst.univ-pau.fr/live/Patrimoine?isPdf=1<nowiki>>
  22. A) Jean-Pierre Dalbera est conseiller du directeur pour la recherche et la technologie au musée des civilisations de l'Europe et de la Méditerranée, avec lequel il a créé un nouveau portail consacré aux recherches ethnologiques. Il est chercheur associé au laboratoire LEDEN de l'université Paris VIII et collabore avec le Centre Georges Pompidou, l'Ecole du Louvre, le Museum national d'histoire naturelle, le CNRS pour susciter de nouvelles formes de communication et d'échange avec le public dans le monde scientifique et culturel. Il a piloté le premier plan national de numérisation du patrimoine et produit d'importantes publications multimédias sur les grands sites archéologiques et les Célébrations nationales, primées dans des festivals internationaux. B) Etude réalisée en juillet-novembre 2000 par Catherine Roth, sur une commande de la Mission à l'ethnologie de la direction du patrimoine et de l'architecture du ministère de la Culture (responsable de la mission à la date de janvier 2001 ; les enjeux de la mémoire scientifique », 2000 C) Dominique Lecourt professeur l’université de Denis Diderot - Paris VII, L’enseignement de la philosophie des sciences, Rapport au ministre de l‘éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie. D) L’enquête sur le patrimoine des sociétés savantes lors du colloque de 1997 du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques (CTHS), F) Les travaux de Jean-Marc Levy-Lebond, notamment « Patrimoine scientifique et recherche », Le patrimoine écrit scientifique et techniques : définition, usages et accessibilité, ou encore « Défisciences
  23. Collectivités territoriales, chercheurs, architectes, institutions gouvernementales, établissement d’enseignement supérieur, institutions de recherche, acteurs locaux, aux pouvoirs publics ….

Voir aussi

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