La grippe ou influenza (1908) André/Formes thoraciques

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Formes thoraciques


 
 

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Chapitre
Formes thoraciques
Auteur
Gustave André
Extrait de
La grippe ou influenza (1908)
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Les formes cliniques de la grippe
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Formes gastro-intestinales

Cette page introduit un chapitre de l'ouvrage La grippe ou influenza, rédigé en 1908 par Gustave André.

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Formes thoraciques


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Le Professeur Litten, de Berlin (Die influenza épidémie, Soc. méd. Int. Berlin), relève la fréquence extraordinaire de l'épistaxis. Elle fut si intense en 1890, chez certains malades, que les observateurs la désignaient comme incalmable. La laryngo-trachéite s'accompagnait de douleurs brûlantes et d'une sensation de cailloux le long du sternum. Litten relève encore dans ces documents des crises d'asthme avec orthopnée, des bronchites


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fibrineuses ou croupales avec coagulations en forme de grappes, enfin des bronchites putrides.

Le poumon est, en effet, le véritable champ d'action du microbe de la grippe et de ses complices, le pneumocoque, le streptocoque, le pneumo-bacille de Friedlander, le tétragène, le micrococcus catarrhalis, etc. C'est là qu'éclatent, d'ordinaire, les déterminations les plus redoutables. Nous avons déjà parlé longuement de la congestion pulmonaire, des bronchites à pneumocoque, de la bronchite capillaire, du catarrhe grimpant, accidents dont nous aurons à reparler dans le chapitre des complications. La bronchoplégie, entrevue par Graves et si bien étudiée par Huchard, appartient aux formes nerveuses.

Le Dr M. Labbé (Journal des Praticiens, mars 1902) a bien étudié les formes thoraciques de la grippe. Nous ferons un résumé succinct de cet excellent travail.

La grippe respiratoire varie comme intensité et comme note dominante suivant les épidémies. Tandis qu'en 1803, par exemple, les troubles nerveux se produisirent presque exclusivement, en 1837, l'appareil respiratoire fut surtout envahi. Au début de l'épidémie de 1889-1890, la forme nerveuse fut très accentuée, tandis qu'à la fin on n'avait guère à compter qu'avec les symptômes broncho-pulmonaires, notamment chez les enfants et chez les vieillards. D'ordinaire, avec quelques


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frissons, de la fièvre et des algies diverses, on voit surgir un catarrhe nasal intense, accompagné d'injection conjonctivale, une toux parfois quinteuse donnant bientôt lieu à une expectoration muco-purulente. Plus tard, les associations microbiennes peuvent provoquer des complications variées, ayant toutes pour point de départ la bronchite grippale. C'est ainsi que le catarrhe suffocant apparaît dans sa forme ordinaire ou peut revêtir l'aspect pseudo-membraneux.

Les diverses congestions, maladie de Woillez, congestion pulmonaire à forme pleurétique de Potain, fluxion de poitrine de Dieulafoy, Dupré et Grasset, sont le plus souvent des manifestations grippales. On peut constater alors des points de côté, des crachats ocreux, de la submatité, du souffle, un peu de crépitation, etc. Nous avons déjà noté la mobilité remarquable de ces foyers congestifs. La spléno-pneumonie n'est qu'un degré avancé de ce processus. Nous connaissons déjà les signes de cette maladie si bien décrite par Grancher, maladie à évolution traînante, d'une durée parfois désespérante et pouvant évoluer en deux temps. Quelquefois, comme Huchard et Lemoine l'ont signalé, il y a des troubles cardiaques avec expectoration sanglante. Plus tard, l'affection peut aboutir à la sclérose pulmonaire et à la dilatation bronchique, affectant la forme pseudo-phymique de Teissier, Lemoine, Egger,


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Mizon et Makereel. Nous avons déjà parlé du type bronchoplégique de Graves et Huchard. Il s'agit, comme le dit très bien M. Labbé, d'une bronchite capillaire généralisée avec paralysie des petits muscles de Reissessen, comme après la section des deux pneumogastriques.

Les pneumonies vaso-paralytiques de Huchard, apyrétiques et dues à une insuffisance nerveuse, peuvent envahir en un jour un poumon tout entier. Nous avons déjà signalé le mode congestif si spécial décrit par Ferrand.

La broncho-pneumonie, suivant Lombard, survient dans le cours même de la grippe, tandis que la pneumonie vraie est l'apanage de la convalescence. À noter encore les formes pseudo-lobaires avec leurs grandes oscillations thermiques, leur expectoration aérée et striée de sang et leur tendance à l'asphyxie.

La broncho-pneumonie à cocco-bacille de Meunier et la pneumonie fibrineuse si bien étudiée par Ménétrier sont décrites dans certaines pages de notre travail. Ce dernier auteur, concurremment avec Cornil et Babès, a signalé un type intéressant, la péripneumonie avec inflammation surtout interalvéolaire. Les recherches de Finkler et Leichtenstein sur l'infiltration embryonnaire du tissu interalvéolaire, ainsi que la péripleurite sèche de Morel-Lavallée, bien résumées par M. Labbé, le sont aussi par nous dans notre travail.


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Le polymorphisme de la grippe thoracique en rend le diagnostic très épineux. La grippe, d'ailleurs, est trop souvent mise en cause ; c'est ainsi qu'on peut méconnaître des manifestations tuberculeuses, des pneumonies typhoïdes, des catarrhes morbilleux, etc. Le pronostic de la forme thoracique est toujours sérieux.

Les symptômes pulmonaires, les localisations de l'affection sur l'appareil respiratoire, semblaient, jusqu'en 1890, faire partie intégrante de la maladie, obligatoirement en quelque sorte. Dans presque toutes les épidémies connues, ces troubles avaient été mentionnés et la réalité de leur existence était classique. Chose curieuse, dans la pandémie de 1889-1890, ils manquèrent presque complètement dans les premières semaines, et n'apparurent, avec une intensité d'ailleurs croissante, que lorsque la grippe se fut pour ainsi dire acclimatée dans nos pays. Les premiers cas faisaient plutôt songer à la dengue qui, par bien des points, en effet, se rapproche de l'influenza. Le vrai danger réside dans la pneumonie lobaire et dont la broncho-pneumonie. Ces deux phlegmasies du poumon peuvent se présenter, dans quelques cas, à l'état d'ébauche ; il s'agit, d'après Peter, de fluxions aiguës, mais plutôt corticales que centrales ; la maladie générale, infectieuse, agirait sur les expansions terminales du pneumogastrique et du grand sympathique


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mélangées dons les plexus pulmonaires. On perçoit alors des râles crépitants en foyer et du souffle dans les diverses régions du thorax. À un degré plus avancé, d'après l'éminent clinicien, on constate, outre le souffle et la matité d'un côté, de la broncho-œgophonie, témoignage d'un léger épanchement pleural ; ce sont là des pleurésies grippales plus congestives qu'exsudatices. Il faut noter aussi une expectoration sanglante et fluide qui n'a rien de l'expectoration de la pneumonie franche. C'est, dit encore Peter, la « fluxion de poitrine » avec toux incessante, violente, congestive. Ces fluxions grippales sont souvent funestes chez les très jeunes enfants et chez les vieillards. Il faut redouter cette congestion pulmonaire grippale ; elle peut être mortelle, soit par la production d'une hémorragie persistante, soit par sa généralisation.

La pneumonie grippale

On a beaucoup disserté sur les différences, sur les nuances qui séparent la pneumonie grippale de la pneumonie ordinaire, et beaucoup de cliniciens restent sceptiques. Il n'existe pas de symptôme pathognomonique, mais quelques légères différences dans le tableau morbide.

Ce problème mérite pourtant d'être serré de près, et tout d'abord, il importe de s'entendre sur le sens donné à ce terme de pneumonie grippale.


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Nous pensons qu'il faut appeler ainsi la pneumonie qui surgit, non point précisément après les premiers troubles grippaux, mais surtout comme une manifestation primitive et, en quelque sorte, isolée de la maladie. Dans le premier cas, la pneumonie est venue se greffer sur une grippe persistante, comme elle aurait pu le faire chez un typhique, un varioleux, un diabétique, un brightique, un alcoolique, etc. Il serait certes excessif de ne pas la qualifier de grippale, mais cette étiquette lui convient mieux, à notre avis, lorsque, dans une épidémie, elle éclate, sans être précédée par la fièvre catarrhale et quand elle s'accompagne des stigmates ordinaires de l’influenza, asthénie, algies, brisement, etc. Sous le bénéfice de ces restrictions, nous croyons qu'il existe une pneumonie lobaire propre à la grippe. Certains cliniciens distingués ne sont pas d'accord sur ce point, et nous croyons utile de résumer quelques-uns de leurs arguments.

Les premières observations ayant trait à cette question sont consignées, au nombre de trente-neuf, dans la remarquable thèse déjà citée par nous, du Dr Ménétrier. Avant lui, Jaccoud avait déclaré que la grippe était un terrain favorable à l'évolution du pneumocoque. Les cas de Ménétrier avaient été relevés dans une petite épidémie de grippe à Paris, en 1885-1880. On peut objecter qu'il s'agissait peut-être d'une fièvre catarrhale



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saisonnière, d'une grippe nostras, ne présentant que de lointaines analogies avec la pandémie qui devait éclater trois ou quatre ans après. Les complications suppuratives provoquées par le pneumocoque furent fréquentes et très graves ; il s'agissait de fausses membranes fibrino-purulentes molles, d'hépatisation grise avec abcès miliaires dans le poumon et dans le rein, d'exsudats fibrino-purulents à la surface des hémisphères cérébraux, d'arthrites suppurées, etc. ; on était en face, en somme, d'infections pneumococciques intensives. Il est difficile de tirer de ces faits des conclusions nettes dans le sens d'une origine grippale.

Finkler, qui a observé quarante-cinq cas de pneumonie grippale, n'a reconnu que deux fois le type de la pneumonie franche ; les autres concernaient des phlegmasies bâtardes à streptocoques.

D'après le Professeur Duponchel (Bullet, méd., 1890), adoptant en cela l'opinion du Professeur Gaucher, il ne faut point se hâter de donner un nom aux déterminations pulmonaires de la grippe, au début de leur évolution. Un jour, ce sera la pleurésie qui sera au premier plan ; quelques heures ou quelques jours après, le parenchyme pulmonaire sera en cause, et inversement. La phlegmasie du poumon peut ressembler à la congestion pure ou bien à la broncho-pneumonie ; le plus souvent, on sera en présence d'une pneu-



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monie franche. Dans trois cas observés au Val-de-Grâce, en 1890, le regretté clinicien fut tout surpris de ne point trouver les crachats rouillés, visqueux et adhérents classiques ; il s'agissait d'un liquide muqueux, filant, aéré, médiocrement adhérent aux parois du vase ; en somme, c'était l'expectoration du catarrhe bronchique. Le point de côté fut violent, mais aucun des trois malades ne perçut nettement le frisson initial si caractéristique. Les courbes thermométriques, n'étaient pas celles de la pneumonie franche ; elles traduisaient nettement des poussées successives d'inflammation pulmonaire. La durée de l'affection dépassa trois semaines et le déclin s'accompagna de sueurs nocturnes abondantes, de troubles nerveux variés, céphalée, rachialgie, insomnie, lassitude extrême, c'est-à-dire des stigmates ordinaires de la grippe. Enfin, particularité remarquable, l'examen bactériologique des crachats ne révéla à aucun moment les diplocoques capsulés de la pneumonie.

Le Dr Laveran, dans un certain nombre de pneumonies survenues à la même époque, constata les mêmes anomalies, notamment au point de vue de l'expectoration ; en effet, l'examen des crachats révéla le plus souvent la présence de streptocoques, plus rarement celle des pneumocoques. Plusieurs cas de pneumonie grippale se produisirent chez des hommes en traitement pour



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d'autres maladies, ce qui pouvait plaider en faveur de la contagion. La conclusion à tirer de ces deux communications intéressantes, c'est qu'il est difficile, selon nous, de ne pas relever des différences assez tranchées entre ces singulières pneumonies et la pneumonie classique. La contagion ne constitue-t-elle pas, dans tous ces cas, une nuance appréciable ?

Bonnemaison, de Toulouse, a, il est vrai, signalé un certain nombre de pneumonies particulièrement infectantes et contagieuses qu'il avait déjà d'ailleurs attribuées à la grippe ; mais, en temps ordinaire, cette contagion est des moins évidentes.

D'après Kundrat, la pneumonie franche, lobaire, a été assez rare en 1890. Il signale, en revanche, comme Comby, des bronchites d'une forme spéciale, localisées dans les conduits moyens, avec sécrétion très abondante de muco-pus où le microscope décela le véritable pneumocoque en grande quantité.

Jaccoud affirme que c'est seulement à une période avancée de l'épidémie que surviennent les pneumonies franches et les broncho-pneumonies, après le troisième jour au plus tôt, au bout de deux semaines au plus tard. La pneumonie fibrineuse grippale présente d'ordinaire quelques caractères insolites ; le début est insidieux et lent ; l'ascension thermique est graduelle, irrégulière



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et rappelle le tracé de la grippe. Le point de côté est rare, les frissons sont légers et répétés ; l'expectoration est franchement sanglante et médiocrement visqueuse. La lésion est spéciale aussi ; les foyers sont peu étendus, mais multiples ; cette pneumonie est essentiellement mobile ; elle envahit progressivement les différents points du poumon, souvent des deux côtés. L'auscultation révèle une hépatisation moins compacte ; le souffle a moins de rudesse et les râles crépitants vrais sont rares et ont moins de sécheresse. La défervescence est le plus souvent graduelle ; la résolution des blocs hépatisés est très lente, et l'exsudat fibrineux est tellement abondant que la mort peut survenir par asphyxie. Le cinquième jour est particulièrement dangereux, entraînant rapidement un changement radical et tout à fait imprévu dans l'état du malade.

D'après Huchard, certaines pneumonies en bloc peuvent rapidement, dans l'espace de vingt-quatre heures, arriver à la période d'hépatisation et envahir un poumon tout entier. Ce sont, pour lui, des pneumonies vago-paralytiques.

Duponchel, dans une seconde communication à la Société médicale des Hôpitaux, pour répondre à certaines objections, cita deux nouveaux cas dans lesquels l'examen de la poitrine donnait tous les signes d'une pneumonie lobaire et point ceux de la broncho-pneumonie. Le mode d'évolution, la


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courbe thermique, l'aspect des crachats présentaient les mêmes analogies que dans les observations citées plus haut. Il faut ajouter que, dans ces pneumonies grippales où se trouvait le streptocoque, Netter, contrairement à l'opinion de Duponchel, persista à voir, non des hépatisations lobaires, mais des broncho-pneumonies.

Pour Duflocq, la pneumonie grippale est la conséquence d'associations microbiennes ; elle est insidieuse, ne présentant ni le point de côté, ni l'expectoration caractéristique. Il existe de la submatité, des râles crépitants, de la bronchophonie, de la pectoriloquie aphone, des frottements pleuraux, quelquefois du souffle tubaire dur ; les crachats renferment d'ailleurs des pneumocoques. La température, relativement peu élevée, est de 39°, 38°,5, puis 37°,3. Il se produit alors un relèvement à 37°,7, 38°,4 ; enfin, le neuvième jour, on trouve 36°,8.

Fiessinger, qui plaide l'identité de la grippe endémique et de l'influenza, admet que la pneumonie lobaire, relevant de cette affection, présente un souffle moins rude et des râles plutôt sous-crépitants, avec une dyspnée violente, du délire et une terminaison souvent funeste.

F. Widal parle de début insidieux, d'absence de frisson initial et d'un tracé thermique irrégulier, avec dés rémissions et des poussées fébriles. Le souffle est moins rude ; les crachats à peine



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teintés sont analogues à ceux de la bronchite simple. C'est, à peu de chose près, l'opinion de Duponchel et Laveran.

Dans deux autopsies de pneumonie grippale faites au Vésinet, en 1890, Gaucher constata l'aspect macroscopique d'une pneumonie lobaire arrivée à l'hépatisation grise. Cependant, l'examen microscopique fit voir que cette lésion devait être, en définitive, rapportée à la bronchopneumonie. Après des inoculations à des souris de pulpes et de sucs pulmonaires et spléniques, cet éminent observateur affirma qu'il existait des broncho-pneumonies grippales, d'aspect pneumonique non tributaires, soit du pneumocoque, soit du streptocoque. « Peut-être, déclare-t-il, nous sommes-nous trouvés (Thoinet et Gaucher) en présence de la pneumonie grippale pure, sans infection secondaire, sans pneumocoque, nistreptocoque ? »

Le Dr Litten, de Berlin (Die influenza-epidemie, 1889-1890, Soc. médec. int., Berlin), a consacré quelques pages remarquables à la pneumonie grippale ; nous les résumerons brièvement.

Au point de vue en question, les données cliniques ne sont pas sans analogie avec celles précédemment énumérées, avec cette considération qu'elles présentent sans conteste des côtés nouveaux et bien personnels.


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La forme fibrineuse s'accompagnait de frissons, de tremblements, de fièvre intense, tandis que la broncho-pneumonie évoluait graduellement avec peu de frissons et une élévation plus lente de la température, avec développement excessif des symptômes bronchitiques existant déjà.

Dans certains cas manifestement lobaires ou fibrineux, on vit le frisson initial faire défaut ; la crise manquait et était remplacée par une défervescence mortelle ; il aurait existé des pneumonies doubles apyrétiques. Les formes adynamiques et typhoïdes prédominèrent. La durée classique de cinq à sept jours fut souvent dépassée et graduellement se préparait un abaissement mortel de la température. Les crachats caractéristiques (marmelade d'abricots) firent souvent défaut. Les complications consistèrent en hémoptysies, hépatisation caséeuse, infarctus pulmonaires, hoquet, certaines formes de péricardite, des pleurésies sèches ou séro-fibrineuses. Les exsudations purulentes de la plèvre se produisirent de préférence pendant lié cours des pneumonies croupales.

Chose surprenante, on vit, dans certaines circonstances, la pneumonie disparaître tout à coup avec l'explosion d'un érysipèle de la face.

Le même auteur signale encore des pneumonies bilieuses, avec crachats vert d'herbe et apparition d'un ictère.


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La phtisie floride, l’infiltration purulente, la gangrène, le pyo-pneumothorax vinrent terminer dans certains cas la pneumonie fibrineuse.

De toutes les considérations qui précèdent, il parait résulter, croyons-nous, que l'hépatisation pulmonaire grippale se présente anatomiquement et cliniquement avec certains caractères qui sortent quelque peu des données classiques. C'est une question à reviser.

Broncho-pneumonie

Primitive, la pneumonie lobulaire vient compliquer assez fréquemment la grippe. Cette variété est bien connue aujourd'hui pour son caractère spasmodique, angoissant et sa marche serpigineuse qui la rapproche du catarrhe grimpant mentionné plus haut. La broncho-pneumonie grippale, comme les fluxions, de même origine, se localise volontiers vers les sommets et donne lieu à une expectoration purulente déjà notée par Graves. On conçoit aisément combien, dans ces conditions, cette phlegmasie peut en imposer pour la tuberculose ; cette confusion est d'autant plus facile, que l'état aigu peut aboutir à la sclérose interstitielle et à la bronchectasie, avec apparition de phénomènes pseudo-cavitaires, d'ailleurs curables. Il s'agit quelquefois d'une splénisation pulmonaire s'attardant dans un sommet. Ces variétés primitives ou secondaires sont bien connues aujourd'hui et leur



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pronostic est particulièrement sévère ; elles présentent d'ailleurs un haut degré de contagiosité.

Nous avons déjà noté ce qui distinguait, au point de vue anatomo-pathologique, les nuances séparant ces broncho-pneumonies grippales de la forme ordinaire, tant au point de vue histologique qu'au point de vue bactériologique ; le bacille de Pfeiffer serait au premier plan et actionnerait les agents pneumonigènes habituels, pneumocoques et streptocoques.

H. Meunier a étudié, comme nous l'avons déjà vu, dix cas de broncho-pneumonie infantile dus au bacille de Pfeiffer. La clinique, déclare cet observateur distingué, ne peut, en l'absence de recherches bactériologiques, formuler le diagnostic de broncho-pneumonie grippale, surtout chez l'enfant ; la notion d'une épidémie régnante peut être pourtant d'un grand secours. Les nuances symptomatiques invoquées par Meunier sont les suivantes : irrégularité de leur marche, prédisposition aux rechutes, degré très marqué de dépression et d'abattement se prolongeant longtemps après la défervescence. Chez une fillette de quatre ans, atteinte de broncho-pneumonie grippale, Comby constata du souffle doux à la base gauche, sans râles ni matité ; la fièvre était forte, la dyspnée intense, l'abattement très marqué ; néanmoins, l'enfant guérit.

Chez l'adulte, la broncho-pneumonie grippale


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est quelquefois un phénomène ultime ; elle survient parfois après une diarrhée abondante ; elle se caractérise par la fréquence du pouls et un affaiblissement extrême. L'auscultation révèle un grand nombre de râles sous-crépitants fins, avec des périodes d'amélioration et des poussées fébriles. La flore bactérienne est assez riche.

La pneumonie catarrhale peut être le primum movens d'une phtisie caséeuse (Ch. Garnier). Il se produit d'abord plusieurs foyers pneumoniques présentant des pneumocoques, des streptocoques et des staphylocoques ; plus tard, ces zones hépatisées sont envahies par le bacille de Koch. L'aggravation d'une phtisie pulmonaire préexistante par la grippe a été observée fréquemment, et c'est par l'intermédiaire de cette complication qu'on voit parfois la broncho-pneumonie s'accompagner de pleurésie purulente.

Ch. Garnier a étudié (Arch. de Méd. expérim., 1900) le rôle du bacille tuberculeux dans l'étiologie et la pathogénie de la pneumonie caséeuse. Strauss, dont il discute l'opinion, attribue dans ce cas une place prépondérante au bacille de Koch. Hutinel, Mosny, Aviragnet, Marfan, etc., ne font intervenir l'agent spécifique de la tuberculose que d'une façon secondaire. Les altérations pneumoniques ou broncho-pneumoniques seraient primitivement engendrées par les microbes habituels, streptocoque, pneumoco-


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que, etc. ; plus tard, le bacille tuberculeux ferait subir aux zones hépatisées la transformation caséeuse ; il s'agirait, en somme, d'une infection mixte, Strauss, dans son beau livre, la Tuberculose et son bacille, rejette cette théorie en se basant sur des recherches pratiquées avec la collaboration de Gamaleia. Ce mode d'infection paraît rare, en effet ; la clinique, cependant, offre quelques faits indiscutables. Ch. Garnier rappelle, à ce sujet, une observation recueillie dans le service du Professeur Bernheim. Tout plaidait en faveur d'une pneumonie lobaire grippale, localisation au sommet droit, évolution spéciale, marche de la température, prodromes caractéristiques, etc. ; l'autopsie démontra nettement qu'il s'agissait d'une pneumonie grippale avec transformation caséeuse ; d'ailleurs, le pneumocoque et le bacille de Pfeiffer figuraient dans la flore microbienne. On peut supposer avec Ch. Garnier que, chez ce sujet, la grippe avait réveillé un foyer de tuberculose latente, et conclure, à moins d'invoquer une contagion nosocomiale, qu'une pneumonie fibrineuse peut, dans certaines conditions, se transformer en pneumonie caséeuse.

Nous avons déjà fait pressentir la difficulté de distinguer une pneumonie lobaire grippale d'une pneumonie lobulaire ; c'est que cette dernière, en effet, prend souvent la forme pseudo-lobaire. En général, dans cette variété d'hépatisation,


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le début est moins soudain et les signes stéthoscopiques indiquent des lésions moins profondes ; on peut faire la part de ce qui appartient à la bronchite et aux flots d'induration. Les lésions ont moins de fixité et les zones inflammatoires sont changeantes. L'expectoration n'est pas rouillée ; elle est aérée, quelquefois striée de sang ou purulente ; l'asphyxie est plus vive. Voici, aussi résumée que possible, une intéressante observation de Rendu concernant une broncho-pneumonie grippale compliquée d'une gangrène des membres inférieurs (Bull, Soc. méd. Hôp., janv. 1892). Il s'agit d'une femme de trente-sept ans, entrée à l'hôpital avec une dyspnée extrême, un point de côté très violent, symptomatique d'une pleurésie diaphragmatique. Il existait des râles fins de congestion aux deux bases, une respiration légèrement soufflante à la base droite, et le pouls était de 140. Au bout de quelques jours, détente passagère, pourtant agitation et sueurs profuses ; aux râles fins avaient succédé de gros râles muqueux ; l'expectoration était devenue facile, et un herpès labial avait apparu. Puis, aggravation, agitation, anxiété, tendance aux syncopes ; soixante-douze respirations par minute, lèvres cyanosées et livides ; 36°. Les bruits du cœur, sourds et mal frappés, dénotaient un collapsus cardiaque imminent. Une nouvelle recrudescence survint, avec pluie de râles fins, souffle congestif presque tubaire


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vers le lobe moyen du poumon droit, On pouvait songer à une endocardite avec coagulations intracardiaques.

Pourtant, une nouvelle amélioration se produisit ; mais bientôt apparurent, sur les deux mollets, des marbrures bleuâtres, des sugillations ressemblant à des ecchymoses profondes ; tout cela coexistant avec un peu de gonflement des jambes, des douleurs vives au moindre attouchement et une coloration cireuse des pieds. Il s'agissait probablement d'une thrombose ou d'une embolie des artères fémorales, peut-être même des iliaques avec imminence d'une gangrène des membres inférieurs.

Entre temps, la pneumonie, en voie de résolution, était remplacée par de la bronchite purulente.

Après des péripéties diverses, le sphacèle des jambes s'accentua ; chose curieuse, la respiration devint normale et l'appétit se réveilla ; bref, cet état général satisfaisant était peu en harmonie avec la gangrène totale des membres inférieurs.

Après mûr examen, l'idée d'une intervention chirurgicale fut repoussée. Enfin, la phase ultime surgit avec accidents septicémiques, et la mort survint après une hyperthermie croissante, des râles nombreux et une diarrhée fétide.

À l’autopsie, traces non douteuses de broncho-


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pneumonie, atélectasie du lobe inférieur droit, avec quelques points encore hépatisés, bronches enflammées, tomenteuses, la plupart pleines de pus. Cœur : Végétation verruqueuse récente sur l'une des valvules sygmoïdes de l'aorte ; de plus, sur le fond du ventricule gauche, au voisinage de la pointe, caillot fibrineux ancien, ramolli et puriforme à son centre. Artères : Oblitération artérielle au-dessus de la bifurcation des deux iliaques primitives ; à un centimètre au-dessous de cette bifurcation, caillot dur, grisâtre, fibrineux, très solide, rattaché à la paroi artérielle, par des adhérences lâches. Ce caillot se continuait avec les mêmes caractères dans l'iliaque externe des deux côtés. Au contraire, dans les fémorales, il existait des caillots cruoriques de formation récente ; en outre, on trouva des coagulations sanguines dans la veine fémorale gauche et dans l'artère rénale droite ; le rein correspondant était totalement nécrobiosé, ce qui avait passé inaperçu pendant la vie.

Recherche des agents infectieux

Dans les crachats, présence non douteuse du pneumocoque ; le suc retiré de fragments du parenchyme pulmonaire donna lieu à une culture presque exclusivement composée de pneumocoques. Quant aux cultures faites avec des fragments du caillot du cœur et de ses portions ramollies, elles restèrent stériles. La conclusion de Rendu fut que le


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pneumocoque avait pénétré dans le sang et avait été charrié dans les artères.

Nous pensons que l'irruption du pneumocoque dans le milieu sanguin avait pu donner lieu aux phénomènes septicémiques signalés plus haut. Il s'agirait là d'un processus analogue à celui qu'a tout récemment invoqué le Dr A. Jousset pour les septicémies tuberculeuses. Ce jeune savant a préconisé pour ce genre de recherches un nouveau procédé très délicat par l’inoscopie (Sem. Médic, janvier 1903). Ajoutons que c'est post mortem que, dans l'observation Rendu, le pneumocoque fut rencontré dans le sang.

Le Dr Clémente Ferreira, de Rio-Janeiro (Revue des Malad. de l'Enf., 1890), a relevé, à propos de la broncho-pneumonie grippale chez les enfants, certaines particularités intéressantes. L'élévation thermique est faible, 37°,6, au lieu de 40° à 41°, par suite, sans doute, d'une paralysie des centres thermogènes. Les erreurs de pronostic sont fréquentes et on se berce souvent d'espoirs illusoires. Il existe une tendance manifeste à la bronchoplégie et au collapsus pulmonaire ; la toux est rare, par suite de l'émoussement de la sensibilité de la muqueuse bronchique et de la stagnation des produits de sécrétion. C'est une intoxication générale imprimant à cette pneumonie des allures traînantes et une lenteur extraordinaire dans l'évolution du processus bron-



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chitique ou broncho-pneumonique. Les sécrétions sont rares, filantes, denses et adhérentes. Les vomitifs peuvent hâter l'avènement du collapsus pulmonaire.

Finkler, dont il a été question plus haut, a décrit une pneumonie grippale bâtarde à streptocoques. Rarement, la maladie débutait par un grand frisson ; il s'agissait surtout de frissonnements avec sueurs abondantes. Le point de côté et la toux étaient peu intenses, l'expectoration était rarement rouillée et les signes stéthoscopiques étaient ceux des pneumonies lobulaires migratrices.

Un caractère important consistait dans le défaut de concordance des signes de percussion et d'auscultation. Si la matité siégeait sur un point déterminé, on ne percevait ni souffle, ni râles crépitants ; on pensait alors à la pleurésie ; on ponctionnait et l'on ne ramenait rien. Les foyers étaient souvent si minimes qu'ils ne dépassaient pas l'aire du stéthoscope.

Ces pneumonies se développaient parfois avec une rapidité étonnante ; le pouls était fréquent, petit et mou, la température peu élevée et la dyspnée peu en harmonie avec la minime étendue des lésions. L'autopsie démontrait bien anatomiquement les altérations de la broncho-pneumonie ; la surface de section était unie, quelquefois légèrement granitée, avec un exsudât fibrineux



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peu abondant. C'était plutôt de la splénisation, et l'auteur émet l'hypothèse d'un, érysipèle du poumon.

Kahler, de Vienne, assigne aux pneumonies lobulaires de la grippe une marche traînante. Dans les cas qu'il a observés, il survenait d'abord une bronchite fébrile, mais la résolution n'était pas franche. On voyait bientôt surgir un point de côté assez vif, avec des palpitations et de l'agitation nocturne. On percevait une matité à timbre tympanique, des râles crépitants et un léger souffle bronchique. Ces phénomènes cédaient, mais bientôt d'autres points étaient envahis, à la façon des pneumonies migratrices, et, au niveau de ces petites régions, on constatait le développement de pleurésies partielles. L'expectoration était d'ordinaire muco-purulente, parfois striée de sang. La fièvre s'accompagnait de sueurs abondantes et la défervescence avait lieu par lysis.

La spléno-pneumonie grippale a des caractères assez spéciaux ; ses allures diffèrent de la maladie de Grancher par l'absence fréquente du souffle et de l'œgophonie et la venue tardive de l'expectoration. Makereel et Lemoine lui assignent une physionomie bâtarde, et lui attribuent surtout, comme symptôme presque unique, une diminution notable du murmure vésiculaire.

Faisans a observé une forme de spléno-pneu-



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monie grippale remarquable par la mobilité et la variabilité des signes stéthoscopiques. Le souffle, l'œgophonie disparaissent d'une façon imprévue pour reparaître un ou deux jours après. Ces alternatives se reproduisent plusieurs fois dans le cours de la maladie.

Ce clinicien distingué a communiqué, en 1892, à la Société médicale des Hôpitaux de Paris, une très remarquable observation de maladie de Grancher, d'origine grippale, concernant un jeune homme de vingt et un ans. Nous ne pouvons relever dans cette longue et minutieuse communication que les points les plus saillants.

On avait constaté, au début, une diminution notable du murmure vésiculaire dans le quart inférieur du poumon droit, avec matité, suppression des vibrations vocales et absence de souffle ; il y avait en outre de la broncho-œgophonie et un peu de pectoriloquie aphone. Dans certains points de la région malade, on percevait de petites crépitations discrètes, fines et superficielles ; c'était, en somme, un syndrome pseudo-pleurétique. Deux jours plus tard, il existait un souffle doux des plus nets et une œgophonie des plus pures, signes que le médecin ordinaire avait d'ailleurs perçus dès le premier jour. La toux avait été très fatigante et la malade avait eu une expectoration gommeuse assez abondante. Un peu plus tard, troisième changement ; le souffle avait fait place


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de nouveau à un murmure vésiculaire très affaibli. Après quelques jours de détente, violent frisson, 40°, augmentation de la zone congestionnée, avec apparition d'un souffle plus fort et plus rude qu'à la base. S'agissait-il d'une tuberculose ou bien d'une suppuration ? L'hypothèse de la tuberculose fut repoussée, en raison des allures spéciales de la fièvre, en raison aussi d'une moiteur visqueuse, comme on en constate souvent dans l'infection purulente. On vit bientôt se produire une légère voussure circonscrite en arrière et une légère infiltration de la peau du côté droit du thorax. Après une première tentative vaine, une seconde ponction donna lieu à l'écoulement d'un pus épais et crémeux. L'opération de l'empyème fut pratiquée quelques jours après et, malgré de réelles difficultés et certaines déceptions, donna de très bons résultats. Les conclusions de Faisans sont que la maladie de Grancher peut être une manifestation de la grippe, que sa symptomatologie varie d'un jour à l'autre et qu'il peut se produire, comme dans la pneumonie, une pleurésie purulente.

Nous avons traité, pour un cas analogue, mais plus compliqué, un jeune homme de vingt ans, élève dans une école du Gouvernement, qui fut pris, en mai 1904, dans un milieu où régnait la grippe, de phénomènes ayant la plus grande ressemblance avec un épanchement pleural gauche.


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Deux médecins très distingués pratiquèrent vainement quatre ponctions successives.

Lorsque nous eûmes à examiner le jeune malade, le murmure vésiculaire était aboli dans toute l'étendue du côté gauche du thorax ; il existait de la submatité, quelques crépitations discrètes à la partie moyenne, avec une zone peu étendue de souffle doux un peu au-dessus, une expectoration muco-purulente très abondante, le tout avec apyrexie. L'analyse bactériologique des crachats décela des streptocoques, sans bacilles de Koch. Pas d'albumine. En raison de son mauvais état général, le jeune homme fut installé à la campagne où la situation s'améliora et resta satisfaisante pendant deux mois environ. Puis la fièvre s'alluma et l'expectoration devint plus nettement purulente. Le Dr C... et nous, nous crûmes à une pleurésie interlobaire, lorsqu'un beau jour, on put voir apparaître une tuméfaction très circonscrite un peu au-dessus du sein gauche ; il était dès lors manifeste qu'il s'agissait d'un kyste purulent de la plèvre qui, ouvert déjà dans les bronches, tendait à se faire jour à l'extérieur. Vu la persistance du mauvais état général, on se borna à pratiquer une opération largement suffisante pour le moment, en attendant des circonstances plus favorables pour agir plus radicalement. Plusieurs chirurgiens consultés se refusèrent, avec raison, à pratiquer l’opération d'Estlander. La



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pleurésie purulente circonscrite s'était révélée plusieurs mois après l'apparition d'une splénopneumonie ; tout le poumon gauche était atélectasié et induré, et partant incapable de la moindre expansion. Le malade succomba dans l'hecticité avec une infiltration amyloïde des reins existant déjà depuis quelque temps.

Le Dr Manquat, de Nice, a communiqué à la Société médicale des Hôpitaux de Paris (juillet 1901) une très importante observation de splénomégalie grippale limitée au lobe supérieur du poumon gauche. Parmi les particularités à relever, nous signalerons d'abord l'existence de lésions étendues et bruyantes du poumon gauche, contrastant avec l'absence de dyspnée, de toux, d'expectoration, avec un état général des plus satisfaisants. La maladie dura près de cinq semaines et parut s'accompagner des signes classiques de la pleurésie.

Dans le diagnostic assez subtil de cette manifestation grippale, il fallut éliminer la broncho-pneumonie et la congestion pulmonaire à forme pneumonique, cette dernière évoluant toujours très rapidement. La congestion simple autour d'un foyer de broncho-pneumonie ne pouvait non plus être mise en cause. En raison de la diffusion des signes physiques, sauf pourtant le souffle, on ne pouvait pas songer davantage à une pleurésie interlobaire ou à un kyste pleural, affections qui


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eussent certainement déterminé quelque déplacement d'organe, ce qui n'avait pas eu lieu.

La grippe, chez le malade en question, avait le caractère ambulatoire. Malgré la limitation presque exclusive des lésions au lobe supérieur du poumon gauche, on n'avait pas porté de pronostic sévère, et l'excellence de l'état général imprimait à cet état morbide un cachet de bénignité tout au moins apparente.

Potain avait déjà remarqué que la pneumonie congestive offrait une allure lente et ambulatoire.

L'absence d'expectoration, chez le malade de Manquat, avait été, pour ainsi dire, complète. Ce clinicien distingué a absolument confirmé l'opinion de Faisans, sur la mobilité singulière de la maladie de Grancher, notamment à propos du souffle et de la sonorité à la percussion.

Le Dr Manquat assignerait volontiers, au cas qu'il a étudié, une place parmi les pneumopathies pseudo-pleurétiques secondaires à l'infection grippale. L'iodure de sodium à faible dose parut avoir une action résolutive manifeste.

Pleurésie

L'inflammation pleurale peut être sèche. Morel-Lavallée a décrit, on le sait, la pleuro-cellulite diffuse subaiguë, au cours de la pleurésie sèche d'origine grippale. Il insiste sur la variabilité extraordinaire et sur le polymorphisme des phénomènes d'auscultation dans la


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pleurésie grippale. Galliard a observé trois cas de pleurésie sèche unilatérale ayant la même origine, dans le service du Professeur Hayem. Ces trois observations figurent dans la thèse de Châtellier.

À propos du processus de pleuro-cellulite diffuse subaiguë que nous venons de signaler, Morel-Lavallée a décrit un certain nombre de symptômes originaux que nous tenons à résumer. C'est ainsi que l'extension de la phlogose s'effectue sur la totalité des deux séreuses, avec maxima demi-circulaires et sinusoïdaux. Les douleurs fixes ou irradiées ont le caractère névralgiforme ; on perçoit des frottements pleuraux à timbre de frou-frou, de cuir neuf, etc., des bruits à rythme nettement crépitant. Particularité intéressante, nombre de ces bruits se passeraient en dehors et au delà de la cavité pleurale, c’est-à-dire dans le tissu cellulaire sous-pleural. Rendu, Delpeuch et Galliard ont émis quelques réserves sur la réalité de ces bruits extra-pleuraux.

La pleurésie sèche unilatérale est signalée dans les thèses du Dr Châtellier et du Dr Brocard. Bloch, sur quatre cent cinquante observations de grippe épidémique, relève quatre fois la pleurésie sèche, survenue vers le huitième jour, après la cessation de la fièvre. Feréol parlait aussi, comme nous l'avons déjà vu en 1890, de la fréquence des points de côté revenant dans la convalescence et



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faisant songer à la pleurodynie, à la pleurésie sèche ou à la tuberculose.

Le Dr Laurent (Thèse Paris, 1898) a étudié la pleurésie sèche bilatérale comme un symptôme essentiel. Dans son intéressant travail basé sur huit observations, il décrit les frottements pleuraux caractéristiques ; il s'agit de bruits très superficiels, irréguliers, rugueux, inégaux, semblant accompagner les mouvements d'ascension et de descente du thorax ; ils sont parfois, selon l'auteur, d'une ténuité extrême. Fait remarquable, le parenchyme pulmonaire est d'une intégrité absolue. Parmi les caractères secondaires, le Dr Laurent note le début insidieux de la maladie, la bilatéralité des frottements, la raucité de la voix pouvant aboutir à l'aphonie, une toux quelquefois sèche et quinteuse. L'évolution de cette pleurite aurait lieu de bas en haut, par poussées successives. La température reste normale et l'état général est toujours satisfaisant. La médication par excellence, d'après Morel-Lavallée, cité par le Dr Laurent, est le salicylate de soude. La gymnastique raisonnée, le massage du thorax, l'escrime, l'usage des haltères, la natation (?) s'opposeront à la formation de brides et de symphyses.

Brocard (Thèse Paris, 1890) assigne à la pleurésie grippale trots modes principaux : 1° elle peut survenir d'emblée, soit bruyante, avec point


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de côté, fièvre, toux, etc., soit insidieuse ; elle peut être sèche, séro-fibrineuse ou purulente ; 2° elle peut coexister avec d'autres manifestations broncho-pulmonaires, telles que la fluxion de poitrine de Dieulafoy ; elle peut occuper le second plan ou, au contraire, la place prépondérante ; 3° elle peut survenir après une pneumonie lobaire ou une broncho-pneumonie.

D'après Bucquoy, les épanchements séro-fibrineux sont d'une grande bénignité ; ils sont le plus souvent modérés, mais quelquefois d'une abondance telle qu'ils menacent la vie du malade.

Nous avons déjà mentionné l'existence des épanchements pleuraux éphémères consécutifs à la fluxion aiguë du poumon. Ne s'agirait-il pas, dans ces cas d'apparence plus ou moins bénigne, d'un premier assaut du bacille tuberculeux actionné par la grippe ? Il faut dire que H. Meunier a reconnu la présence du cocco-bacille de Pfeiffer dans un cas de pleurésie séro-fibrineuse compliquant une broncho-pneumonie. Le même observateur, à propos d'autopsies d'enfants atteints de broncho-pneumonie, signale l'existence, dans un exsudat pleurétique abondant, du cocco-bacille hémophile accompagné du streptocoque et du staphylocoque. Dans un cas où les recherches bactériologiques paraissent avoir fait défaut, Meunier signale une pleurésie séro-fibrineuse


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double avec exsudat pseudo-membraneux très abondant, sans liquide.

Les pleurésies purulentes d'emblée ou bien d'ordre métapneumonique sont provoquées d'ordinaire par le pneumocoque ou le streptocoque, parfois par leur association. Le cocco-bacille n'est guère signalé comme fauteur de ces sortes d'épanchements. D'autres micro-organismes, que nous citerons bientôt, peuvent engendrer aussi des épanchements purulents. Déjà, en 1880, Châtellier (Thèse Paris) avait étudié ces pleurésies grippales. On peut se demander jusqu'à quel point sa description très correcte et très clinique, d'ailleurs, peut s'adapter aux allures de la grande épidémie de 1890. Lorsque, en temps ordinaire, on se trouve en présence d'une suppuration pleurale, on peut toujours, avec un peu de bonne volonté, invoquer une constitution catarrhale ou, ce qui revient au même, la grippe nostras n'ayant que des ressemblances lointaines avec l'influenza. Nous choisirons donc nos exemples dans les travaux postérieurs à l'épidémie de 1890.

Jarre (Thèse Paris) mentionne cinq observations de pleurésie purulente avec quatre empyèmes pratiqués par Rendu, Robin, Hanot et Letulle. L'intervention chirurgicale, en effet, dans ces épanchements abondants et insidieux, donne les meilleurs résultats.

Laveran a cité six cas de pleurésie purulente


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dont trois coïncidaient avec une pneumonie. Plusieurs de ces cas s'étaient produits chez des hommes en traitement pour d'autres maladies, ce qui plaidait en faveur de la contagion, alors que sévissait à Paris la grippe infectieuse.

En six jours, l'opération de l'empyème fut pratiquée sur quatre malades de son service. C'était là, comme le dit notre éminent confrère de l'armée, un fait heureusement bien rare, et il lui parut que la grippe était responsable de ces empyèmes dont le développement s'était effectué avec une rapidité inusitée. Deux malades succombèrent ; chez l'un, la pleurésie coïncidait avec un pneumothorax, chez l'autre avec une péritonite purulente généralisée. Chez un sujet opéré avec succès, le liquide purulent renfermait des streptocoques en grande quantité. Dans un autre cas de grippe du même service, avec pleurésie à liquide hématique, endocardite, péricardite et péritonite, Vaillard et Vincent rencontrèrent dans le sang de la veine céphalique, recueilli deux heures après la mort, le même streptocoque. Ce microbe fourmillait seul dans le liquide pleural.

Netter, à la même époque (1890), se refusait déjà à considérer le pneumocoque comme hors de cause dans les complications grippales de la grippe. Le streptocoque et le pneumocoque, existant normalement dans la bouche des sujets sains, doivent sans doute acquérir une virulence



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toute spéciale au cours de l'influenza et engendrent ainsi des infections secondaires. Il faut faire remarquer que le pneumocoque a été rencontré beaucoup plus rarement dans le pus de ces pleurésies. Dans ces dernières, le pus est crémeux, épais, peu abondant ; la vomique est fréquente et la tendance à la guérison manifeste. Tout autres sont les allures de la streptococcie pleurale ; la fièvre est intense, le point de côté violent ; le pus, d'un gris sale, se reproduit presque immédiatement après la ponction, même après l'opération de l'empyème. Le bacille encapsulé de Friedlander peut aussi, mais très rarement, provoquer la suppuration pleurale. C'est ce que déclare formellement Netter, dans une très remarquable communication faite à la Société médicale des Hôpitaux (mai 1890). Dans une observation fort intéressante de Letulle, publiée au cours de la grande épidémie de grippe, l'épanchement purulent de la plèvre était uniquement causé par des cultures pures de bacille de Friedlander. C'était un cas de pleurésie partielle développé au niveau de la plèvre interlobaire. Le malade fut pris d'expectoration purulente abondante ; au bout de quinze jours, les crachats purulents disparurent et la guérison s'établit définitivement.

Le Dr Crespin, d'Alger, a publié en 1897 une importante observation intitulée : Grippe, bron-


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chite, pneumothorax gangréneux, pleurotomie ; guérison. Après des phénomènes grippaux très intenses, le malade eut de grands frissons, une transpiration abondante et l'expectoration devenait d'un gris sale, exhalant une odeur infecte. L'examen dénota des signes de bronchite à droite et des symptômes de pneumothorax à gauche. La bronchite grippale avait été suivie de gangrène pulmonaire avec perforation pleurale. La pleurotomie, suivie de lavages de la plèvre à l'eau bouillie d'abord et boriquée ensuite, eut un plein succès. L'examen des crachats n'avait révélé que les parasites ordinaires de la bouche. Le liquide pleural renfermait des staphylocoques, des streptocoques et du leptothrix buccalis. Ce dernier micro-organisme peut très bien, quoique rarement, jouer un rôle actif dans la production d'une gangrène pulmonaire.

Les Drs Dopter et Tanton, dans une note présentée à la Société médicale des Hôpitaux de Paris (juillet 1901), ont fait part des résultats obtenus par l'examen cytologique des épanchements séro-fibrineux de la plèvre. Sur soixante cas de pleurésie ainsi étudiés, cinq ont trait à des pleurésies grippales. Dans deux observations d'épanchement séro-fibrineux au cours de la grippe et non accompagnées de manifestations pulmonaires, l'ensemencement resta stérile, et la formule cytologique fut identique à celle de



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la pleurésie à frigore, à savoir la prédominance très nette des lymphocites avec une petite quantité de polynucléaires éosinophiles. Dans les trois autres cas survenus après la guérison de la grippe, la formule fut encore la même.




Voir aussi