Académie royale de musique (Fontenai, 1776)

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Cette page présente une courte description de l'Académie royale de musique devenue Opéra de Paris rédigée en 1776 par l'abbé de Fontenay dans son Dictionnaire des artistes, (ou Notice historique et raisonnée des architectes, peintres, graveurs, sculpteurs, musiciens, acteurs et danseurs ; imprimeurs, horlogers et mécaniciens).

Eléments introductifs

Le Palais du Petit-Bourbon était situé entre le Palais du Louvre et l’Église de Saint-Germain l'Auxerois.

L'article


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Académie Royale de Musique

nommée vulgairement l'Opéra. Ce spectacle, né en Italie dans le seizième siècle, (Voyez Jacopo CorsiCorsi et Claudio MonteverdiMontevere.) fut introduit en France par le cardinal Mazarin, qui fit représenter en 1645, au Petit-Bourbon, devant le roi et la reine, une pièce italienne intitulée : La Festa theatrale de la finta Pazza. Le même cardinal, ayant fait venir des acteurs d'Italie, fit encore représenter, en 1647, une autre pièce italienne, en musique et en trois actes, sous le nom d'Orfeo è Euridice[NDLR 1]. Le succès qu'eurent ces deux premiers opéra, engagea quelques auteurs à travailler dans ce genre. Le célébré P. Corneille fit jouer, en 1650, Andromède, tragédie à machines. Benserade, qui avait de la facilité dans l'esprit, composa les vers de quelques ballets, accompagnés de déclamation & de symphonie, dans lesquels le roi Louis XIV, les princes et les plus grands seigneurs dansaient, représentant des divinités, des héros, des bergers et d'autres personnages.

L'abbé Perrin, introducteur des ambassadeurs auprès de Gaston, duc d'Orléans , oncle du roi, alla plus loin : il voulut donner un opéra français. C'était une pastorale en cinq actes[NDLR 2], qui fut mise en musique par Cambert, et qui fut représentée, en 1659, au village d'Issy. Mais on manquait encore de bons musiciens et de belles voix : on croyait


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même que les paroles françaises n'étaient point susceptibles des mêmes mouvements et des mêmes ornements que les paroles Italiennes ; & il faut convenir que celles qu'avoit employées l'abbé Perrin, n'étaient pas propres à détruire ce préjugé : aussi son opéra réussit-il faiblement. Celui que le cardinal Mazarin fit exécuter en 1660 , aux noces du roi , sous le titre d'Ercole amante, ennuya. Le marquis de Sourdeac , si connu par ses talents pour les machines, releva un peu les pièces lyriques, déjà décriées auprès de certaines personnes qui les regardaient comme absurdes et ridicules. 11 fit représenter d'abord dans son château en Normandie, ( Voyez son article ) et ensuite par la troupe royale du Marais, à Paris, la Toison d'Or, dont les paroles étaient de Corneille. Le roi, suivi de toute sa cour, voulut la voir, et il en fut très satisfait.

Ce prince aimait tous les arts, et il avait un goût particulier pour la musique. Comme il désirait de la faire fleurir dans ses Etats, il accorda, le 28 Juin 1669, à l'abbé Perrin, des lettres-patentes

« portant permission d'établir en la ville de Paris & autres du royaume, des académies de musique pour chanter en public des pièces de théâtre , comme il le pratique en Italie, en Allemagne & en Angleterre , pendant l'espace de douze années.... Et attendu que lesdits opéra & représentations sont des ouvrages de musique tout différents des comédies récitées , & que nous les érigeons, par lesdites Présentes , sur le pied de celles des académies d'Italie , où les gentilshommes chantent sans déroger : Voulons & nous plaît 3 que tous les gentilshommes 3 damoiselles & autres personnes, puis sent chanter audit opéra , sans que pour ce ils dérogent au titre de noblesse , ni à leurs privilèges, charges , droits & immunités. »

Cependant , comme l'abbé Perrin ne pouvoit fournir seul aux soins & à la dépense excessive que demandoit un tel établissement, il s'associa, pour la musique, avec Cambert ; pour les machines, avec le marquis de Sourdeac j & pour sournir aux frais nécessaires,


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nécessaires, avec le nommé Champeron. Dès que cet accord fut conclu entre ces associés, ils firent venir de Languedoc les meilleurs musiciens, qu'ils tirèrent des églises cathédrales où il y avoit des musiques fondées ; & Cambert y joignit les plus belles voix qu'il put trouver ailleurs. On dressa un théâtre dans le jeu de paume de la rue Mazarine, & on y représenta, au mois de Mars 1671, l'opéra de Pomone. On y voyait, dit Saint-Evremond , les machines avec surprise, les danses avec plaisir; on entendait le chant avec agrément, les paroles avec dégoût. Cette pièce fut représentée huit mois entiers avec un applaudissement général, & Perrin en retira pour sa part plus de trente mille livres.

Mais la division s'étant mise parmi les associés, Lully, surintendant de la musique de la chambre du roi, obtint, par le crédit de la marquise de Montes. pan, que l'abbé Perrin, moyennant une somme d'argent , lui céderait son privilège. En effet, au mois de Mai 1672, 1e roi accorda à Lully de nouvelles lettres-patentes en forme d'édit, portant permission de tenir académie royale de musique. Ce musicien transporta l'opéra au jeu de paume du Bel-Air, dans la rue Vaugirard, près du Luxembourg, &, après la mort de Molière arrivée en 1673 , à la salle du Palais-royal, où il est encore actuellement. Ce spectacle avoit été médiocrement goûté jusqu'alors. Mais Lully ayant eu le bonheur de trouver un poète, le célèbre Quinault, qui excellait dans la poésie lyrique , & lui-même ayant des talents supérieurs & un génie admirable pour la musique , il porta les opéra français à leur plus haut degré de perfection. Il sut en faire un spectacle intérssant & magnifique,où la poésie, la musique, la danse, la peinture, la déclamation théatrale, l'éclat des habits, le jeu surprenant des machines, le changement des décorations , tous les arts agréables, en un mot, se trouvèrent heureusement réunis pour frapper les sens, pour charmer le cœur, & même pour satisfaire l'esprit, quoi qu'en pussent dire des personnes chagrines , prévenues ou jalouses.


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Après la mort de Lully, ses enfants lui succédèrent dans le privilège de l'opéra : il passa ensuite à différents directeurs jusqu'à l'année 1749, où, par arrêt du conseil, l'administration en fut confiée à la ville de Paris. Cet arrangement, conforme à l'usage des Romains qui chargeaient les Ediles du soin des spectacles & des fêtes publiques, a mérité les éloges du public, par le bon ordre qui, depuis cette époque , a été établi dans la régie de l'opéra. Les chûtes des pièces sur ce théâtre doivent être bien préjudiciables pour les directeurs, puisqu'on prétend que, pour mettre un opéra sur pied, il en coûte environ 45000 livres. Cette somme ne doit pas paraître exorbitante , si l'on fait attention au nombre des acteurs , des danseurs , des musiciens., des artistes, des ouvriers, des manœuvres, qui sont tous payés à proportion de leurs talents & des services qu'ils rendent. L'hôtel de l'académie est dans la rue Saint-Nicaise. Il y a deux écoles ; l'une de musique, qui se tient les lundi, mercredi & vendredi matin. Cette école est une ressource de sujets, non-seulement pour l'opéra, mais aussi pour la chapelle & pour la chambre du roi. L'autre école est celle de danse, qui se tient les mardi, jeudi & samedi matin.


Voir aussi

Notes de la rédaction
  1. Il s'agit de la version composée par Luigi Rossi et dont la première a eu lieu au Petit-Bourbon.
  2. Cette pièce est répertoriée dans data.bnf.fr : Pastorale en 5 actes. - Musique perdue. - Livret de Pierre Perrin conservé.
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Voir « Académie royale de musique (Fontenai, 1776) » sur le wiki Wicri/Arts, avec sa page de référence sur Wicri/France.