Nuvola apps important.png Attention, suite à une faille de sécurité, la plupart des liens vers les serveurs d'exploration sont désactivés.

-

Rev. hist. Église Fr. (1929) Jubainville, Zeller, Réunion Metz France

De Wicri Lorraine

Gaston Zeller. La réunion de Metz à la France (1552-1648)


 
 

Titre
Gaston Zeller. La réunion de Metz à la France (1552-1648)
Auteur
Paul d'Arbois de Jubainville
Dans
Revue d'histoire de l'Église de France , 1929, vol. 15, n° 66, pp. 69-71.
Version en ligne
sur le site Persée

Cette page introduit une critique bibliographique rédigée en 1929 par Paul d'Arbois de Jubainville à propos d'un ouvrage de Gaston Zeller sur la réunion de Metz à l France (entre 1552 et 1648).

Le texte original

Pages 69, 70, 71.


69

Gaston Zeller. — La réunion de Metz à la France (1552- 1648). Première partie : L'occupation. Deuxième partie : La protection. — Paris, les Belles Lettres, 1926. 2 vol. in-8° de 502 et 402 pages.

Bien que l'auteur nous ait averti dans la préface de son ouvrage qu'il laisserait de côté la question religieuse pour ne traiter de la réunion que les asipects politiques, il ne s'en est pas moins laissé entraîner au cours de son récit à parler des dissenssions intestines qui affaiblirent la cité et à leur sujet de l'introduction et des progrès de la Réforme à Metz. Il est donc possible de se représenter ce que fut sous ce rapport la situation de la ville, dans la première moitié du xvie siècle et sous le régime de protection française, qui suivit l'entrée des troupes royales à Metz.

La Réforme s'y était implantée avec succès dès 1520 environ et le nombre de ses adhérents s'élevait à 500, croit-on, en 1525, année du supplice du predicant Jean Châtelain, ancien moine augustin de Tournai, brûlé à Vie, en exécution d'une sentence du tribunal episcopal. L'annonce de sa mise à mort provoqua à Metz une émeute violente contre le clergé. Puis un apaisement se produisit jusque vers 1540'. Alors les réformés devenus de plus en plus nombreux et influents avaient à leur tête des nobles appartenant aux paraiges, parmi lesquels il faut citer les membres de la famille de Heu. Gaspard de Heu, maître-échevin, fut déposé pour cause d'hérésie et se retira à Strasbourg avec les plus ardents des1 réformés condamnés à l'exil (1542). Guillaume Farel, venu de Neuf- châtel à Metz pour leur donner l'appui de sa parole, quitta la ville ^où sa vie était en danger. Toutefois, il faut constater que la réaction catholique contre les progrès de l'hérésie n'agissait que par sursauts, si bien qu'au printemps de 1543 un ministre protestant acquérait le droit de s'installer à Metz : en même temps bon nombre des bannis de l'année précédente étaient autorisés à y rentrer. Cependant les réformés, dont la hardiesse croissait avec l'importance numérique, exigeant le droit d'ouvrir un temple, le magistrat, qui était alors catholique en majorité, fit appel à l'empereur, suzerain de la cité. Au mois d'octobre 1543 Charles Quint interdit l'exercice public du culte réformé à Metz et prononça la peine du bannissement contre les propagateurs des nouvelles doctrines. Ainsi les catholiques messins l'emportaient et avec eux les Gournay, adversaires des Heu.

Lors de l'annexion de 1552, l'ordonnance impériale était toujours en vigueur et le magistrat l'appliquait souvent, malgré le persistant accroissement en nombre des partisans de la Réforme. Toutefois il semble que la présence d'un prédicant était tolérée en 1551. Metz offrait alors un refuge aux Lorrains et aux Français, inquiétés ou redoutant de l'être à cause de leurs opinions en matière religieuse, par exemple à Rabelais (1546).


70

Quant à l'évêque de Metz, tenu en suspicion par les Messins qui n'admettaient pas sa résidence dans la ville, depuis l'époque lointaine où son autorité y avait été abolie, il faisait séjour dans le château de Vie, capitale de sa principauté, fief de l'Empire, quand il lui arrivait de visiter son temporel. De 1.505 à 1550r ce fut le cardinal Jean de Lorraine, auquel succéda un autre Lorrain, le cardinal Charles de Lorraine-Guise. 11 faut noter qu'en 1533, quand les luthériens d'Allemagne menacèrent l'indépendance des Etats catholiques voisins, on vit s'unir pour la première fois dans l'intérêt de leur défense, la, citéj, l'évêque et le duc de Lorraine.

Or, en 1552, les Messins restaient en grand nombre attachés à la foi catholique, et ils supposaient que la royauté française les affermirait dans leur tenace résistance à l'hérésie. Ils avaient, dans cette pensée, accueilli avec faveur le cardinal de Lenoncourt, promu à l'évêché de Metz, parce qu'il n'appartenait pas à la maison de Lorraine, et qu'il était un protégé du roi de France. Et cependant on devait voir cette chose étrange: le cardinal de Lenoncourt songer à rétablir, avec l'aide du roi, le pouvoir temporel de l'évêque dans la cité et prendre appui sur la famille de Heu, presque tout entière gagnée à la Réforme, contre les Gournay et les Ban- doche, fidèles défenseurs de la foi catholique et dévoués à l'Empire.

M. Zeller fait la remarque que les dissensions religieuses contribuèrent pour une bonne part à la décadence de Metz déjà très accusée dès le milieu du xv* siècle. La situation économique fort troublée des pays d'alentour ne fit par la suite qu'aggraver cette décadence. On s'explique ainsi comment une ville, dont l'assiette était très forte, défendue par de solides remparts, où l'esprit d'indépendance avait naguère créé un patriotisme local très ombrageux, n'offrit aucune résistance à Pavant-garde des troupes du connétable de Montmorency qui occupa Metz sans coup férir en avril 1552.

L'exposé des relations politiques et administratives de la -ville, de Metz avec la monarchie française forme le contenu du second volume de l'ouvrage de M. Zeller. Il y faut noter, comme intéressant l'histoire de l'Eglise de France, l'échec de la restauration du pouvoir episcopal dans la cité. Cette restauration, tentée par le cardinal de Lenoncourt, aurait détruit au profit de l'évêque le régime oligarchique des paraiges si, faute de l'agrément du roi, « le protecteur», cet essai n'avait pas complètement échoué en 1555. 'C'est dès lors le gouverneur commandant la garnison royale qui désigne le magistrat, et en 1556 le cardinal Charles de Lorraine qui avait repris possession de l'évêché, à la suite du désistement de Lenoncourt, renonça formellement à prétendre au pouvoir temporel dans Metz. Par la même convention le roi prenait aussi « en garde et protection » l'Etat episcopal, c'est-à- dire l'ensemble des domaines temporels de l'évêque qui enveloppaient ceux de la cité et s'étendaient fort au loin. Mais M. Zeller établit qu'en fait cette protection ne fut pas exercée et que


71

l'évêque continua à se comporter en souverain dans sa principauté, levant l'impôt, battant monnaie, anoblissant ses sujets et se comportant en fidèle vassal de l'Empire. Il en fut ainsi jusqu'à l'occupation de l'Etat episcopal par les troupes royales en 1632», qui rompit en fait les derniers liens de celui-ci avec l'Empire. Notons encore que depuis 1612 l'évêque de Metz était Henri de. Bourbon-Verneuil, tfils naturel d'Henri IV.

La substitution à Metz de l'autorité royale à celle des paraiges eut-elle pour effet d'y restreindre la propagande des réformés ? On ne le constate pas, bien que

La substitution à Metz de l'autorité royale à celle des paraiges eut-elle pour effet d'y restreindre la propagande des réformés ? On ne le .constate pas, bien que l'exercice du culte public, selon l'ordonnance de Charles-Quint rendue en 1543, demeura toujours interdit, au grand dépit des réformés dont le nombre ne cessait d'augmenter et qui accédaient à toutes les charges municipales. En 1558, fis réclamèrent vainement le bénéfice des. concessions accordées par l'empereur à leurs coreligionnaires pendant la diète d'Augsbourg (1556). Des prédicants furent expulsés et avec eux (peignes notables réformés.

Lors des guerres de religion, des coups de main préparés par les huguenots français avec la connivence. des réformés messins pour les rendre maîtres de la ville échouèrent, ainsi que les tentatives des ligueurs en sens opposé, grâce à l'énergie des gouverneurs militaires et surtout au loyalisme des habitants. « Cette fidélité, dit l'auteur, s'explique par le fait que la population de Metz comptait à côté d'une majorité de catholiques, une forte minorité protestante. » Cette 'dernière considération rend compte de l'émotion soulevée à Metz, lorsque Henri III décida d'y appliquer l'édit de Nemours supprimant le protestantisme en France (1585). L'édit fut rapporté pour Metz, avant de lêtre dans le reste du royaume, en vertu de lettres d'Henri IV de mai 1592, de telle sorte que l'édit de Nantes se trouvait déjà appliqué en fait à Metz, avant d'y être publié.


A intégrer