La Chanson de Roland/Léon Gautier/Édition populaire/1895/Introduction/Le poète

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Le poète

Comme nous l'avons montré tout à l'heure, l'auteur de la Chanson des Roland est un Normand, et c'est ce qui est presque mathématiquement prouvé par l'importance exceptionnelle donnée à « Saint Michel du Péril ».

Même il se pourrait que ce fui un Avranchinais, à cause du voisinage de ce mont Saint-Michel dont il lui tant d'estime.

Quoi qu'il en soit, d'ailleurs, Il esl très probable que ce Normand a vécu de l'autre côté du détroit, et c'est ce que laissent supposer l'origine topographique de notre manuscrit, le mot agier qui est d'étymologie anglo-saxonne, et certaines allusions à l'Angleterre qui ne sont pas sans être empreintes de quelque dédain.

Voilà ce que nous avions dit, et ce que nous devions redire.

Mais l'auteur de notre poème est-il réellement ce Turoldus dont il est question dans notre dernier vers : Ci fait la geste que Turol- dus declinet? On ne saurait l'affirmer.

La geste! Ce mot est employé quatre fois dans notre Chanson, et le poète en parle toujours comme d'un document historique qu'il a dû consulter et dont il invoque le témoignage au même titre que celui des chartes et des brefs. Ce document, c'était peut- être quelque ancienne Chanson, ou bien encore quelque Chro- nique plus ou moins traditionnelle et écrite d'après quelque poème antérieur. Donc, c'est de cette geste, et non pas de notre poème, que Turoldus serait l'auteur.

Mais, même en admettant que ce mot « geste » s'applique à notre propre chanson, il faudrait encore expliquer le mot décli- ner. Or ce mot signifie à la fois « quitter, abandonner, finir une œuvre », et, par extension, « raconter tout au long une histoire, une geste. » La première de ces deux significations a paru la meilleure à quelques critiques. On peut donc admettre qu'un Touroude a « achevé » la Chanson de Roland. Mais est- ce un scribe qui a achevé de la transcrire? un jongleur qui a achevé de la chanter? un poêle qui a achevé de la composer? A tout le moins, il y a doute.

M. Génin, s'appuyant uniquement sur ce laineux dernier vers, attribue notre chanson à un « Theroulde », bénédictin de l'abbaye de Fécamp, auquel le roi Guillaume donna l'abbaye de Malmes- bury, qui fut transporté en 1069 à l'abbaye de Peterborough , et qui mourut en 1098. « Si ce n'est lui, c'est son père, » dit M. Génin. Et le père de ce Theroulde est, en effet, précepteur de Guillaume le Conquérant. Mais ce ne sont là que des probabilités, et la seule présomption en faveur de cette opinion consiste dans la présence de ces deux exemplaires du Roland dans l'armoire aux livres de la cathédrale de Peterborough. « Apparemment, dit « M. Génin, ce n'étaient pas les moines saxons qui les y avaient « fait venir. N'est-il pas plus probable qu'ils y avaient été placés « par l'abbé Theroulde comme son œuvre, ou plutôt comme celle « de son père, le précepteur de Guillaume le Conquérant? »

Encore un coup, ce n'est là qu'une présomption, et non pas une preuve.

Bref, l'auteur du l!(>l<nt<l est un Normand qui a séjourné en Angleterre.

Mais il n'est pas certain qu'il ait porté le nom de Touroude ;

Et encore moins que ce soit le fameux abbé de Peterborough ou son père[1].


  1. Nous ne croyons pas utile de discuter ici l'opinion relative à ce « ber seint Gille », qu'on a voulu, sans aucune preuve , considérer comme l'auteur du Roland. Voir notre note du vers 2086