Histoire poétique de Charlemagne (1905) Paris/Livre premier/Chapitre I : Différence entre versions

De Wicri Chanson de Roland
(Poésies attribuées à Charlemagne)
Ligne 63 : Ligne 63 :
 
qu'il  nous  donne  sur  la  cour  du  grand  empereur.  C'est  le  poème,  
 
qu'il  nous  donne  sur  la  cour  du  grand  empereur.  C'est  le  poème,  
 
ou  plutôt  le  fragment  appelé  par  le  dernier  éditeur  ''Charlemagne et le  pape Léon'',  publié  pour  la  première  fois  par  Canisius,  mais  
 
ou  plutôt  le  fragment  appelé  par  le  dernier  éditeur  ''Charlemagne et le  pape Léon'',  publié  pour  la  première  fois  par  Canisius,  mais  
avec  beaucoup  plus  de  soin  par  M.  Pertz<ref>Monumenta,  SS.  II,  p.  393  et  suiv.</ref>  et  Conrad  Orell<ref>''Zürich'',  1832,  in-8°</ref> attribué par  Canisius  à  Alcuin,  par  Orell  à  un  certain  Heîpericus,  
+
avec  beaucoup  plus  de  soin  par  M.  Pertz <ref>Monumenta,  SS.  II,  p.  393  et  suiv.</ref>  et  Conrad  Orell<ref>''Zürich'',  1832,  in-8°</ref> attribué par  Canisius  à  Alcuin,  par  Orell  à  un  certain  Heîpericus,  
et  par  M. Pertz,  à  l'opinion  duquel  nous  nous  rangeons,  à  Angilbert,  surnommé  Homère<ref></ref>.  Ce  poëme  raconte,  avec  des  circonstances déjà  fabuleuses,  un  événement  considérable  du  règne  de  
+
et  par  M. Pertz,  à  l'opinion  duquel  nous  nous  rangeons,  à  Angilbert,  surnommé  Homère<ref>Le  manuscrit  porte  un  nom  tracé par  une  main  un  peu  postérieure  à  sa date  (neuvième  ou  dixième  siècle),  mais les  caractères  sont  assez  effacés  pour avoir  donné  lieu  aux  deux  leçons  rappor-</ref>.  Ce  poëme  raconte,  avec  des  circonstances déjà  fabuleuses,  un  événement  considérable  du  règne  de  
 
Charlemagne  <ref></ref>,  et  trace  en  outre  le  tableau  poétique  et  vivant  
 
Charlemagne  <ref></ref>,  et  trace  en  outre  le  tableau  poétique  et  vivant  
 
d'une  de  ces  grandes  chasses  que  l'empereur  aimait  tant,  et  auxquelles prenait  part  toute  sa  famille.
 
d'une  de  ces  grandes  chasses  que  l'empereur  aimait  tant,  et  auxquelles prenait  part  toute  sa  famille.
Ligne 85 : Ligne 85 :
 
»  Zurich,  1832,  in-8<>.  nu,  ce  poëme  évidemment  écrit  par  un  
 
»  Zurich,  1832,  in-8<>.  nu,  ce  poëme  évidemment  écrit  par  un  
  
* Le  manuscrit  porte  un  nom  tracé  commensal  habituel  de  l'empereur,  et  
+
*   commensal  habituel  de  l'empereur,  et  
par  une  main  un  peu  postérieure  à  sa  qui  expliquerait  en  outre  le  nom  d'Ho-  
+
  qui  expliquerait  en  outre  le  nom  d'Ho-  
date  (neuvième  ou  dixième  siècle),  mais  mère  donné  à  Angiibert  dans  l'Ecole  
+
  mère  donné  à  Angiibert  dans  l'Ecole  
les  caractères  sont  assez  effacés  pour  palatine.  
+
  palatine.  
  
avoir  donné  lieu  aux  deux  leçons  rappor-  *  Voy.  notre  livre  H,  ch.  xii.  
+
  *  Voy.  notre  livre  H,  ch.  xii.  
  
tées  ci-dessùs.  Les  raisons  de  M.  Pertz *  Publié  par  A.  Mai,  Auci.  classici,  
+
  *  Publié  par  A.  Mai,  Auci.  classici,  
  
 
nous  paraissent  très-fortes,  et  nous  som-  tome  V,  p.  40i  et  suiv.  
 
nous  paraissent  très-fortes,  et  nous  som-  tome  V,  p.  40i  et  suiv.  

Version du 3 janvier 2023 à 17:21

logo lien interne Cette page est en phase de création pour des raisons de cohérence des liens dans ce wiki (ou au sein du réseau Wicri).
Pour en savoir plus, consulter l'onglet pages liées de la boîte à outils de navigation ou la rubrique « Voir aussi ».

Livre premier, chapitre I

Histoire poetique Charlemagne 1905 Paris p 033.jpg

LA POÉSIE LATINE DE COUR.

L'histoire poétique d'un grand homme comprend essentiellement ce que le sentiment et l'imagination populaire ont fait de lui, sa vie plus ou moins fabuleuse dans le cœur de l'humanité. La principale qualité qu'elle demande aux monuments qui l'occupent est la spontanéité  ; elle n'accorde qu'une attention distraite aux produits artificiels de la poésie lettrée  ; du moment qu'une œuvre est voulue et arbitrairement composée, l'histoire poétique lui refuse toute valeur comme document.

Les productions artificielles des poètes qui ont essayé, depuis la Renaissance, de mettre à profit les matériaux épiques légués par le moyen âge ne nous occuperont donc qu'en passant; il en doit être de même de l'espèce de poésie épique, en latin, dont Charlemagne fut le centre de son vivant. Créée par l'influence directe du prince, chantant sous ses yeux les exploits qu'il lui indiquait, composée dans un latin classique qui, par rapport à l'époque où elle se produisait, était un archaïsme pénible, elle n'a aucun des caractères qui pourraient la recommander à notre étude.

Histoire poetique Charlemagne 1905 Paris p 034.jpg

Elle est restée d'ailleurs, et il en devait être ainsi, sans aucune influence sur le développement postérieur de la légende, et nous offrira à peine une ou deux fois l'occasion d'un rapprochement intéressant avec elle. Nous devons cependant mentionner cette poésie, que nous ne saurions mieux désigner que sous le nom de panégyrique; il faut d'ailleurs remarquer que, si elle est pour notre sujet d'un intérêt secondaire, elle est loin d'être indigne d'attention à d'autres points de vue, et qu'elle forme au contraire un des phénomènes intéressants de l'histoire littéraire du moyen âge. Ce ne fut guère que vers le milieu de son règne, après les guerres d'Italie et d'Espagne, que Charlemagne put développer d'une façon vraiment sérieuse les germes de culture lettrée qu'il avait rassemblés de diverses parts. Ce n'est pas ici le lieu de rappeler ce qu'il fit dans cette intention [1]  ; les noms de ses principaux collaborateurs, Paul Diacre, Alcuin, plus tard Eginhard et Théodulf, sont assez connus. On sait aussi ce qu'était l'École du palais, sorte d'académie où l'on s'encourageait à acquérir et à propager une science à moitié naïve, à moitié prétentieuse, mais qui n'en mérite pas moins le respect et les éloges de l'historien. N'est-ce pas déjà un trait de l'histoire poétique de Charlemagne, que ce déguisement, renouvelé plus tard dans d'autres académies, où lui et les siens cachaient leur personnalité barbare sous le masque des plus illustres anciens? Le roi qui tuait mille Philistins et qui chantait le Seigneur sur la harpe, tel était l'idéal qu'avouait l'empereur en prenant le nom de David, et l'image qu'il laissa de lui dans le souvenir de la postérité ressemble en plus d'un trait à celle que le peuple hébreu s'était faite du fils d'Isaïe[2].

La poésie qui se développa dans ce milieu fut de deux sortes, religieuse ou de circonstance. Nous n'avons pas à parler de la première; c'est dans la seconde que se placent les quelques productions dont nous devons dire un mot.

Poésies attribuées à Charlemagne

En tête des poètes qui ont chanté des événements du règne de Charlemagne se placerait Charlemagne lui-même, si on pouvait regarder comme authentiques les quelques vers qui nous ont été transmis sous son nom[3]. Parmi ces pièces, il en est au moins une qui est incontestablement apocryphe; c'est la lamentation de Charles sur la mort de son neveu Roland; elle n'a d'autre autorité que celle du Pseudo-Turpin, (Chapitre xxv.) [NPM 1]

Histoire poetique Charlemagne 1905 Paris p 035.jpg

Nous ne mentionnons pas quelques petites poésies, épitaphes, dédicaces ou autres, adressées à Charlemagne ou composées pour lui par les membres de l'École palatine. Nous ne parlerons que d'un morceau épique réellement important, et remarquable d'ailleurs autant par sa valeur littéraire que par les détails curieux qu'il nous donne sur la cour du grand empereur. C'est le poème, ou plutôt le fragment appelé par le dernier éditeur Charlemagne et le pape Léon, publié pour la première fois par Canisius, mais avec beaucoup plus de soin par M. Pertz [4] et Conrad Orell[5] attribué par Canisius à Alcuin, par Orell à un certain Heîpericus, et par M. Pertz, à l'opinion duquel nous nous rangeons, à Angilbert, surnommé Homère[6]. Ce poëme raconte, avec des circonstances déjà fabuleuses, un événement considérable du règne de Charlemagne Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte ; les références sans nom doivent avoir un contenu, et trace en outre le tableau poétique et vivant d'une de ces grandes chasses que l'empereur aimait tant, et auxquelles prenait part toute sa famille.

Un exilé irlandais

Un Irlandais, réfugié comme plusieurs de ses compatriotes à la cour de Charlemagne, a composé en son honneur cinq poèmes, dont le plus important raconte la trahison et la défaite de Tassilon, duc de Bavière '  ; ces opuscules sont d'une langue et d'une versification assez bonne, mais n'ont pas grand intérêt historique.

Ermoldus Nigellus

A la même classe que ces poètes se rattache, en ce qui concerne notre sujet, Ermoldus Nigellus, bien qu'il ait écrit après la mort de Charlemagne; le début de son poëme De Gestis Ltidovici pii sq rapporte entièrement au père de Louis  ; et ce n'est pas un des moins intéressants échantillons de cette littérature panégyrique ®. Nous mentionnerons encore ici le versificateur connu sous le nom


  • magne, plutôt qu'à un Heîpericus incon-

» Zurich, 1832, in-8<>. nu, ce poëme évidemment écrit par un

  • commensal habituel de l'empereur, et
 qui  expliquerait  en  outre  le  nom  d'Ho- 
 mère  donné  à  Angiibert  dans  l'Ecole 
 palatine. 
 *  Voy.  notre  livre  H,  ch.  xii. 
*  Publié  par  A.  Mai,  Auci.  classici, 

nous paraissent très-fortes, et nous som- tome V, p. 40i et suiv.

mes, en outre, porté à attribuer à Angil- «  Publié souvent, le mieux dans Pertz,

bert, commensal et gendre de Charle- SS. Il, p, 4C7 et suiv.

Histoire poetique Charlemagne 1905 Paris p 036.jpg


du Poëte saxon, qui mit en vers latins, vers la fin du neuvième siècle, la vie de Gharlemagne d'après les Annales et la Vita d'E- ginhard, non sans se permettre, surtout dans les deux derniers livres, quelques additions, généralement peu importantes et d'un caractère tout personnel, au texte qu'il. avait sous les yeux *.

Nous pouvons encore réunir à ces poésies, composées sous les yeux ou sur l'ordre de Gharlemagne et de ses successeurs, une lamentation, écrite par un Italien, sur la mort de Gharlemagne', des vers sur la mort de l'abbé Hugon, fils de Gharlemagne ', et un petit poëme anonyme sur l'origine des Garolingiens .

Enfin l'un des meilleurs représentants de l'école poétique carolin- gienne, Walafrid Strabon, a mis en hexamètres un singulier récit, composé en prose par l'abbé Hetto, mort dix ans après Gharlema- gne. Hetto y racontait la vision d'un de ses moines, appelé Wet- tin, qui, transporté spirituellement en enfer, y avait été témoin des châtiments infligés aux plus puissants de ce monde, et entre autres au grand empereur qui venait de mourir \ Les vers où Walafrid rapporte cet endroit de la vision sont peut-être ce qu'il y a pour nous de plus intéressant dans cette classe de poëmes.

> Pertz, SS. I, p. 227 et suiv. ' D. Bouquet, tome VII, p. 305.

  • Du Méril, Poésies populaires latines * Pertz, SS. Il, p. 312 et suiv.

antérieures au douzième siècle, p. 245. * D. Bouquet, t. V, p. 399.

Notes originales de l'auteur

  1. Voyez là-dessus Histoire littéraire, tome iV, p. 6 et smv.; Ampère Histoire littéraire avant le douzième siècle, et surtout Bàhr, Geschichte der rômischen LitC'ralur im karolingischen Zeiialter.
  2. Tous deux commencent leurs exploits par tuer un orgueilleux géant; David et Mainet sont chassés de leur patrie et servent des rois étrangers; les légendes abondent sur le temple de Jérusalem et sur la cathédrale d'Aix, etc., etc.
  3. Voy. Bàhr, p. 84.
  4. Monumenta, SS. II, p. 393 et suiv.
  5. Zürich, 1832, in-8°
  6. Le manuscrit porte un nom tracé par une main un peu postérieure à sa date (neuvième ou dixième siècle), mais les caractères sont assez effacés pour avoir donné lieu aux deux leçons rappor-

Notes additionnelles de Paul Meyer

Histoire poetique Charlemagne 1905 Paris p 544.jpg
  1. Dans la Romania, II, 147-8, G. Paris revient sur ces vers, insérés dans la Chronique de Turpin et mal à propos attribués à Charlemagne. Il les considère comme détachés d'une épitaphe de Roland fort analogue à celle que Dummler a publiée dans la Zeitschr. f. deutsches Alterthum^ nouv. série, II, 279-80.

Voir aussi