Macaire, chanson de geste (1866) Guessard/Préface

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Macaire chanson de geste 1866 Guessard IA page 1.jpg[i]

Avant-propos rédactionnel

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L'article

Macaire Guessard en-tête préface.jpg
PRÉFACE.


J’ai trouvé ce poëme sans titre dans l’unique manuscrit qui nous l’ait conservé, en sorte que j’en suis à la fois l’éditeur et le parrain.

Je lui ai donné un nom, je le sais, qui n’est guère recommandable. En dépit de son étymologie et du parfum de sainteté qu’il exhale, ce nom malheureux était déjà bien mal noté au moyen âge[1], et l’est aujourd’hui plus que jamais. Aussi ne l’ai-je pas choisi, mais subi, Macaire chanson de geste 1866 Guessard IA page 2.jpg[ij] pour ainsi parler, et fort à contre-cœur, sachant surtout que ce n’était pas le véritable titre de l’ouvrage, celui qu’il portait autrefois et sous lequel il a été traduit à l’étranger. Ce vrai titre, tiré du nom de l’héroïne, était, sans aucun doute : La Reine Sibile. Mais comment le conserver à la version que je publie, où Sibile s’appelle Blanchefleur ? Substituer ce nouveau nom à l’ancien ce n’était pas remédier au mal ; c’était plutôt l’aggraver en introduisant un élément de confusion dans le catalogue de notre histoire littéraire. En effet, ce nom gracieux de Blanchefleur, si cher aux trouvères, se trouve déjà en tête d’une de leurs compositions, et bien qu’il y soit associé à un autre, je n’étais pas sans craindre cette répétition dans la série des titres de nos anciens poëmes. Voilà comment j’ai été conduit à préférer le nom d’un coquin à celui d’une reine vertueuse.

C’est dire assez que je n’avais guère à choisir qu’entre ces deux noms : celui de l’innocence et celui de son persécuteur. Il y a bien encore dans cette curieuse composition un troisième personnage qui y joue un grand rôle ; un personnage que l’histoire a longtemps emprunté au roman, que les arts, que le théâtre ont rendu populaire et dont l’érudition a discuté l’existence dans une savante dissertation. Ce n’est qu’un chien, il est vrai mais un chien célèbre : le chien de Montargis. Par malheur, je ne pouvais me servir de ce titre tout fait sans me rendre coupable d’un gros anachronisme, puisque le chien de Montargis n’a été ainsi nommé que longtemps après sa naissance, c’est-à-dire longtemps après la fin du Macaire chanson de geste 1866 Guessard IA page n16.jpg[iij] XIIe siècle, date probable du poëme que je publie.

Si ce poëme n’appartenait pas au genre sérieux, au moins par l’intention, le meilleur titre qu’on lui pût adapter serait sans doute celui d’une des comédies de Molière, en substituant simplement le nom de Charlemagne à celui de Sganarelle. Le grand empereur, en effet, y joue un rôle analogue à celui de l’époux trop soupçonneux que notre grand comique a mis en scène, à cela près que Charlemagne, dont l’infortune n’est pas moins imaginaire que celle de Sganarelle, a cependant pour y croire de plus fortes raisons que lui.

C’est après ces réflexions, et non à la légère, comme on le voit, que je me suis décidé à restituer à notre histoire littéraire, sous le titre de Macaire, la chanson de la Reine Sibile, dont on connaissait depuis longtemps l’existence et le sujet, mais dont on croyait l’original à jamais perdu.

Je n’oserais dire absolument que je l’ai retrouvé. Ce serait faire trop d’honneur à l’Italien qui l’a enchâssé dans la vaste compilation d’où je le tire ; ce serait peut-être aussi paraître trop satisfait de mon essai de restitution. Or, je n’ai garde de tomber dans ces deux excès. Il n’est pas besoin d’être grand clerc pour reconnaître combien est altéré le manuscrit que je publie, et j’ai peur qu’il soit aussi trop aisé aux juges compétents d’apercevoir les imperfections de mon travail. J’estime toutefois que, l’un portant l’autre, le texte de Venise et le mien donneront au lecteur une idée suffisante de la singulière Macaire chanson de geste 1866 Guessard IA page n17.jpg[iv] composition qu’ils reproduisent tellement quellement, et qui, défigurée d’un côté, s’efforce de reprendre de l’autre sa physionomie et ses traits primitifs.

Le fond de ce roman

Voici le fond de ce roman, dont une partie, et la moins vraisemblable, a été si longtemps prise au sérieux et considérée comme historique.

Charlemagne, oubliant trop aisément les souvenirs de Roncevaux, a admis à sa cour et dans son intimité un chevalier de cette race de Mayence qu’il eût dû haïr à jamais, un parent du traître Ganelon, Macaire de Losane. Il a bientôt sujet de s’en repentir. Macaire ose regarder d’un œil de convoitise l’épouse même de son seigneur, la belle et vertueuse Blanchefleur, fille de l’empereur de Constantinople. Il tente d’abord par de doux propos de conquérir ses bonnes grâces ; la reine le repousse et l’éconduit avec indignation. Irrité, mais non découragé, Macaire a recours, pour continuer sa poursuite, à l’entremise d’un nain fort aimé du roi, de la reine surtout, et très-familier avec elle. Le nain, séduit par de belles promesses, consent à servir les desseins de Macaire. Il en est bien puni. Blanchefleur le châtie, et si rudement qu’il en garde le lit pendant huit jours. Dès lors Macaire ne songe plus qu’à se venger, et c’est encore au nain qu’il demande assistance, au nain outragé comme lui, plus que lui, et animé du même esprit de vengeance. Il lui persuade de se cacher le soir derrière la porte de la chambre du roi, et quand Charlemagne se lèvera, selon sa coutume, avant l’aube du jour, pour assister

Notes de l'article

  1. Voyez, par exemple, Huon de Bordeaux, p. 116 :

    Là est Macaires, .i. traïtres prouvés.

    Fierabras, p. 133 :

    L’emperere manda Guenelon et Hardré,
    Grifonnet d’Autefuelle o le grenon mellé,
    Alori et Macaire et des autres assés.

    Aiol et Mirabel, ms. de la Bibl. imp., La Val., 80, fol. 120 v°, col. 2 :

    Makaire de Losane fu malparliers.

    Notre Macaire s’appelle précisément comme celui qui figure dans Aiol et Mirabel :

    Machario de Losane se fait apeler.


Voir aussi

Source
https://fr.wikisource.org/wiki/Macaire,_chanson_de_geste_(Anonyme)/Pr%C3%A9face