Le Buffon choisi de Benjamin Rabier/Sauvages/Carnassiers/Hérisson

De Wicri Animaux

Le hérisson

Le Buffon choisi de Benjamin Rabier, page 41

Le renard sait beaucoup de choses, le hérisson n'en sait qu'une grande, disaient proverbialement les anciens.

Il sait se défendre sans combattre, et blesser sans attaquer : n'ayant que peu de force et nulle agilité pour fuir, il a reçu de la nature une armure épineuse, avec la facilité de se resserrer en boule et de présenter de tous côtés des armes défensives, poignantes, et qui rebutent ses ennemis ; plus ils le tourmentent, plus il se hérisse et se resserre. Aussi la plupart des chiens se contentent de l'aboyer et ne se soucient pas de le saisir : cependant il y en a quelques-uns qui trouvent moyen, comme le renard, d'en venir à bout en se piquant les pieds et en se mettant la gueule en sang ; mais il ne craint ni la fouine, ni la marte, ni le putois, ni le furet, ni la belette, ni les oiseaux de proie.

Hérisson

La femelle et le mâle sont également couverts d'épines depuis la tête jusqu'à la queue, et il n'y a que le dessous du corps qui soit garni de poils; ils produisent au commencement de l'été. On m'a souvent apporté la mère et les petits au mois de juin ; il y en a ordinairement trois ou quatre, et quelquefois cinq ; ils sont blancs dans ce premier temps, et 1 on voit seulement sur leur peau la naissance des épines.

Ils vivent de fruits tombés ; ils fouillent la terre avec le nez à une petite profondeur ; ils mangent les hannetons, les scarabées, les grillons, les vers et quelques racines ; ils sont aussi très avides de viande, et la mangent cuite ou crue. A la campagne, on les trouve fréquemment dans les bois, sous les troncs des vieux arbres et aussi dans les fentes de rochers, et surtout dans les monceaux de pierres qu'on amasse dans les champs et dans les vignes. Quoiqu'il y en ait un grand nombre dans nos forêts, nous n'en avons jamais vu sur les arbres ; ils se tiennent toujours au pied dans un creux ou sur la mousse. Ils ne bougent pas tant qu'il est jour, mais ils courent, ou plutôt ils marchent pendant toute la nuit : ils approchent rarement des habitations, ils préfèrent les lieux élevés et secs, quoiqu'ils se trouvent aussi quelquefois dans les prés. On les prend à la main : ils ne fuient pas, ils ne se défendent ni des pieds ni des dents ; mais ils se mettent en boule dès qu'on les touche, et pour les faire étendre il faut les plonger dans r eau. Ils dorment pendant l'hiver. Ils ne mangent pas beaucoup, et peuvent se passer assez longtemps de nourriture. Ils ont le sang froid à peu près comme les autres animaux qui dorment en hiver. Leur chair n'est pas bonne à manger, et leur peau, dont on ne fait maintenant aucun usage, servait autrefois de vergette et de frottoir pour sérancer le chanvre.