Histoire naturelle (Buffon)/Tome 8/Le Cochon d’Inde

De Wicri Animaux
Buffon Hist Nat Tome VIII Gallica img 1.jpg

Le Cochon d’Inde.*


Ce petit animal, originaire des climats chauds du Bresil et de la Guinée, ne laisse pas de vivre et de produire

  • Le Cochon d’Inde ; au Bresil, Cavia Cobaya ; en Allemand,

Indianisch Künele, Indisch Seüle, Meer-Ferckel, Meer-Schwein ; en Anglois, Guiny pig ; en Suédois, Marswin ; en Polonois, Swinka Zamorska. Cavia Cobaya. Pison, Hist. Nat. pag. 102. Cuniculus Indus. Gesner, Icon. animal. quadrup. pag. 106. Mus, seu cuniculus Americanus et Guineensis, porcelli pilis et voce, Cavia Cobaya Brasiliensibus dictus, Margravii. Ray, Synops. animal. quadrup. pag. 223. Mus caudâ abruptâ, palmis tetradactylis, plantis tridactylis. Linnæus. Cavia Cobaya Brasiliensibus ; quibusdam mus Pharaonis, tatu pilosus, porcellus, mus indicus. Klein, de quadrup. pag. 49. Lapin des Indes. Cuniculus ecaudatus, auritus, albus aut rufus, aut ex utroque variegatus.… Cuniculus Indicus. Brisson, Regn. animal. pag. 147.


dans le climat tempéré, et même dans les pays froids, en le soignant et le mettant à l’abri de l’intempérie des saisons. On élève des cochons d’Inde en France, et quoiqu’ils multiplient prodigieusement, ils n’y sont pas en grand nombre, parce que les soins qu’ils demandent ne sont pas compensés par le profit qu’on en tire. Leur peau n’a presqu’aucune valeur, et leur chair, quoique mangeable, n’est pas assez bonne pour être recherchée : elle seroit meilleure, si on les élevoit dans des espèces de garennes où ils auroient de l’air, de l’espace et des herbes à choisir. Ceux qu’on garde dans les maisons ont à peu près le même mauvais goût que les lapins clapiers, et ceux qui ont passé l’été dans un jardin ont toûjours un goût fade, mais moins desagréable. Ces animaux sont d’un tempérament si précoce et si chaud, qu’ils se recherchent et s’accouplent cinq ou six semaines après leur naissance ; ils ne prennent cependant leur accroissement entier qu’en huit ou neuf mois, mais il est vrai que c’est en grosseur apparente et en graisse qu’ils augmentent le plus, et que le développement des parties solides est fait avant l’âge de cinq ou six mois. Les femelles

ne portent que trois semaines, et nous en avons vû mettre bas à deux mois d’âge. Ces premières portées ne sont pas si nombreuses que les suivantes, elles sont de quatre ou cinq ; la seconde portée est de cinq ou six, et les autres de sept ou huit, et même de dix ou onze. La mere n’allaite ses petits que pendant douze ou quinze jours, elle les chasse dès qu’elle reprend le mâle, c’est au plus tard trois semaines après qu’elle a mis bas ; et s’ils s’obstinent à demeurer auprès d’elle, leur père les maltraite et les tue. Ainsi ces animaux produisent au moins tous les deux mois, et ceux qui viennent de naître produisant de même, l’on est étonné de leur prompte et prodigieuse multiplication. Avec une seule couple, on pourroit en avoir un millier dans un an ; mais ils se détruisent aussi vîte qu’ils pullulent, le froid et l’humidité les font mourir, ils se laissent manger par les chats sans se défendre ; les mères mêmes ne s’irritent pas contre eux : n’ayant pas le temps de s’attacher à leurs petits, elles ne font aucun effort pour les sauver. Les mâles se soucient encore moins des petits, et se laissent manger eux-mêmes sans résistance ; ils n’ont de sentiment bien distinct que celui de l’amour, ils sont alors susceptibles de colère, ils se battent cruellement, ils se tuent même quelquefois entre eux lorsqu’il s’agit de se satisfaire et d’avoir la femelle. Ils passent leur vie à dormir, jouir et manger ; leur sommeil est court, mais fréquent ; ils mangent à toute heure du jour et de la nuit, et cherchent à jouir aussi souvent qu’ils mangent ; ils ne