BBF (1982) Deschamps

De Histoire de l'IST
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Auteur
Christine Deschamps
Résumé
Cet article est le rapport d'un stage effectué à la National Library of Medicine (NLM), pour essayer d'y étudier le rôle et les services, à l'échelon national, d'une bibliothèque centrale de médecine. Il expose comment la NLM nous apprend qu'outre l'utilisation de la technologie informatique et de l'automatisation, toute une politique d'organisation de la documentation médicale et de coopération entre bibliothèques peut être mise en place à condition de reconnaître la nécessité d'une telle philosophie, passant par la définition de règles de gestion rationnelles

L'article

La National Library of Medicine (NLM) n'a pas toujours porté ce nom. Bibliothèque militaire à l'origine, elle fut créée en 1836 sous le nom de « Library of the Surgeon General's Office ». En 1865, un des plus grands bibliothécaires américains, John Shaw Billings, en prit la direction. Dès 1879, paraissait le premier numéro de l'Index Medicus (suivi en 1880 de l'Index Catalogue), reflet des collections de cette bibliothèque. Après diverses appellations, elle devint en 1956 la National Library of Medicine. Son but est de rassembler, d'organiser et de rendre disponible toute publication scientifique dans le domaine médical. Avec, en 1980, un budget de 46 millions de dollars, 428 personnes y travaillant régulièrement, dont plus de 200 pour les activités de bibliothèque, elle a rassemblé 1 545 000 volumes et, à partir de ses 22 750 abonnements, elle publie par an 243 870 citations dans l'Index Medicus. Grâce à son ordinateur IBM 370/168, et à un mini-ordinateur Data General System 350, elle automatise de plus en plus tout le traitement de ses acquisitions ; en appliquant le logiciel ELHILL, elle propose ses bases de données : Medline, Toxline, Chemline, Catline, Serline, Cancerlit, etc., et pour les bibliothèques américaines seulement la : « Name Authority File » (liste d'autorité de noms propres ou de noms d'associations) et « MesH Vocabulary File » (Medical Subject Headings : thesaurus medical). De plus, elle traite 434 500 demandes de prêts par an, dont elle satisfait plus de 340 000... Son importance et son rayonnement se mesurent amplement à tous ces renseignements.

Dans le texte qui suit, a été étudiée la possibilité d'adapter à la réalité française la façon dont la NLM assume son rôle national et comment la Bibliothèque interuniversitaire de médecine (BIUM) pourrait en tirer des leçons pour mieux suivre son exemple.

En effet, la BIUM, dont l'existence remonte jusqu'à 1395, est une des plus grandes (sinon la plus grande) bibliothèques médicales de France. Un million d'ouvrages, plus de 39 kilomètres de rayonnages avec ses annexes (Bibliothèque des Saints-Pères et Centre français de documentation odonto-stomatologique), 65 personnes travaillant en tout dans les trois sections, un budget total de 2 100 370,00 FF, un peu moins de 3 000 périodiques courants, 2 terminaux d'ordinateurs, 52 280 demandes de prêt satisfaites en 1980, 7 500 thèses et volumes acquis en un an... Ces chiffres permettent de réaliser à l'échelon français l'importance réelle de la BIUM. Créée Centre d'acquisition et de diffusion de l'information scientifique et technique (CADIST) pour la médecine en novembre 1980, son rôle national commence à se dessiner plus clairement. Il lui faut maintenant, pour être un centre national de prêt efficace en médecine, savoir utiliser au mieux l'automatisation qui permettra une meilleure diffusion de l'information médicale ou bibliographique.

Conformément à la suggestion de Miss Mary E. Corning, responsable des relations internationales à la NLM, il ne s'agit pas ici d'étudier seulement le rôle joué par la NLM, pour en prôner l'imitation pure et simple. Il serait utopique de vouloir avoir la même importance ; il n'est pas non plus question de prétendre faire le même travail : l'Index Medicus ne saurait avoir de copie même française. Il paraît donc à la fois plus réaliste et plus souhaitable d'étudier les grands principes sous-jacents qui règlent le développement (exemplaire) de cette bibliothèque, afin d'étudier si, dans chacun des cas observés, il y aurait un moyen d'adapter ces règles fondamentales aux réalités des bibliothèques médicales françaises.

On étudiera en premier lieu l'utilisation de diverses techniques ou technologies, puis comment ces techniques rendent possible une coopération sans excès d'autorité, enfin on essaiera de rendre sensible la philosophie qui permet les applications précédentes.

L'utilisation des technologies

La première chose qui frappe les yeux d'un bibliothécaire français visitant la NLM, c'est l'équipement de cette bibliothèque. En plus des multiples consoles et terminaux, le fichier de la salle de lecture est depuis 1981 entièrement sur microfiches COM, et consultable sur lecteurs-agrandisseurs. En outre, un séjour au Lister Hill Center, spécialisé dans le transfert de l'information biomédicale grâce à l'automatisation, est une expérience qui pourrait laisser croire qu'en changeant de bâtiment (NLM - Lister Hill), on a également changé de siècle, et que l'on est entré de plain pied dans le 21e siècle.

Déjà en visitant le département audiovisuel de la NLM, on est sensible à ce déploiement de matériel, permettant des relations interactives entre la bibliothèque et son public. Que ce soit dans l'acquisition extensive des médias audiovisuels de tout genre en médecine, dans leur sélection pour la signalisation dans la base de données AVLINE, ou encore dans les diverses expériences tentées par NMAC (National Medical Audiovisual Center), on peut trouver là tous les aspects de la recherche pour une meilleure utilisation de ces matériels (très répandus dans les bibliothèques américaines).

Le Lister Hill Center s'est voué au développement de toutes les techniques permettant une amélioration de la diffusion de l'information biomédicale. Ce centre expérimente notamment les nouvelles techniques applicables aux bibliothèques, en cherchant à démontrer l'intérêt pratique de divers systèmes. Si ceux-ci ne sont pas par la suite adoptés par des bibliothèques ou des sociétés privées spécialistes de l'information, il abandonne ces projets. Il a ainsi cessé de démontrer la possibilité de l'utilisation des satellites pour l'information biomédicale (consultations médicales et enseignement à distance avec l'Alaska). Cette démonstration a été faite, aucune société privée ou publique n'en a pris le relais, le projet est donc pour l'instant en sommeil. Les deux programmes sur lesquels le Lister Hill Center travaille en ce moment et qui sont en relation directe avec les bibliothèques, sont ceux du stockage de l'information, et ceux de l'Integrated Library System.

Le stockage de l'information se fait par compression de textes pour en réduire le volume, et par utilisation comme support du vidéodisque. Ce moyen, dont les possibilités de reproduction sont bien meilleures que celles des autres techniques audiovisuelles, reste malheureusement encore très coûteux, même pour des Américains.

Le deuxième programme, directement utilisable par toute bibliothèque disposant d'un mini-ordinateur type IBM Series 1, ou Data General Electric Series, ou Digital Equip. Corp., PDP 11 y compris LS 11/23, est celui intitulé Integrated Library System (ILS). On le trouve dans le commerce, et il peut être directement utilisé pour l'interrogation du catalogue d'une bibliothèque de moyenne importance, pour la circulation des documents, y compris le bulletinage des périodiques (facilité par la cotation au moyen de lecture optique sur code-barres), et pour tout le circuit du prêt interbibliothèque. Une deuxième étape comprendra le circuit des acquisitions, le catalogage (partagé ou non) et la collaboration avec des fichiers d'autorité par complémentarité ou par simple confrontation. Le système restera suffisamment souple pour que chaque bibliothèque puisse y rajouter des notations locales, ou même modifier certaines zones. On peut déjà le voir fonctionner à la Bibliothèque du Pentagone, où il fait ses preuves. Mais il pourrait être utilisé par toute bibliothèque française, pour peu qu'elle ait le budget nécessaire pour l'acheter et les moyens techniques pour l'utiliser.

Mais la NLM se sert bien évidemment des techniques de l'automatisation pour pouvoir créer et proposer au public des bases de données bibliographiques. Ici, certains seront moins dépaysés. Bon nombre de bibliothèques françaises en effet disposent de terminaux d'interrogation et sont familiarisées avec ces incomparables services que rend la NLM : Medline (permettant la publication de l'Index Medicus), Catline (Current Catalog), Toxline, Chemline, Cancerlit, et encore 5 autres bases de données.

Ce que l'on ne sait pourtant pas de l'extérieur, c'est que la NLM ne se contente pas de ces bases de données accessibles au public. Pour une meilleure exploitation de ses possibilités, elle utilise des bases qui lui sont propres et qui lui permettent d'automatiser le traitement des livres et périodiques tout au long des diverses opérations nécessaires.

Les sélections et acquisitions sont traitées en utilisant un fichier nommé In-Proc (In-Process), puis, que ce soit pour la rédaction de la fiche de base, l'établissement et la vérification des vedettes-auteurs et matières grâce à des fichiers d'autorité, le bulletinage des périodiques, la surveillance des abonnements, la reliure, etc., ces opérations successives sont entrées directement par le personnel, sur console, en utilisant un logiciel intitulé INQUIRE, et qui a été étudié pour la NLM par la Société Info Data. Le travail énorme de catalogage accompli à la NLM ne pourrait l'être sans cette automatisation. Cela a également d'autres conséquences utiles qui nous font bien voir que si un établissement est suffisamment développé, une gestion automatisée de ses collections est bénéfique, non seulement à lui-même, mais à d'autres bibliothèques.

En effet, c'est grâce à cette automatisation, permettant une authentification très soigneuse des données bibliographiques par un fichier central d'autorité, que la NLM a pu développer différents services de coopération avec d'autres bibliothèques, ou qu'elle a pu participer, avec la Library of Congress, à la publication, au verso de la page de titre, au moment de l'édition, de sa fiche de base avec ses vedettes-matières et sa classification. Les éditeurs acceptent en effet de reconnaître l'autorité de la NLM pour le catalogage et facilitent ainsi la tâche des petites bibliothèques. Cette opération nommée CIP (Cataloging in Publication), n'est possible que par l'automatisation qui permet la validation immédiate des données bibliographiques.

Ce souci de vérification et de perfection se retrouve également dans la manière dont la NLM conçoit le travail des bibliothécaires, et l'évaluation de la qualité et des résultats.

Car la technologie employée dans les opérations bibliothéconomiques trouve son pendant dans le souci constant, à tous les échelons, de traiter la NLM comme une entreprise commerciale, afin de mieux la gérer. Les techniques de marketing sont appliquées couramment : évaluation du public, des produits à lui offrir, de la promotion nécessaire pour faire valoir ces produits, et surtout de l'évaluation des résultats et des performances du personnel, afin de connaître les besoins réels de la NLM : statistiques, audits, rapports sur le temps passé et la qualité du travail permettent d'assurer au mieux une masse de tâches qui va toujours en se développant. Les deux techniques, informatique et marketing, se rejoignent d'ailleurs parfaitement, pour gérer les statistiques d'évaluation des produits (catalogues, bibliographies, formation de bibliothécaires, etc.).

S'il paraît peu vraisemblable de pouvoir gérer de la sorte les bibliothèques françaises (encore que cela soit pourtant la clef de bien des opérations de grande envergure), on pourrait déjà utiliser quelques-unes de ces techniques. Certaines sont difficiles à appliquer et relèvent d'un souci de rentabilité peu compatible avec l'idée qu'on se fait en France du « service public ». Mais une véritable étude de marché, adaptée à chaque établissement, des facteurs liés à l'environnement et à la situation administrative : (« clients »/« organismes rivaux »), en concordance avec le « macro-environnement » (grandes lignes et tendances politiques ou économiques), permettrait à tous de connaître les buts à atteindre, de les définir par rapport à chaque niveau de « client » (lecteur ou bibliothèque participant à un même réseau). Les études de « marketing différentiel » privé et commercial sont autant d'aides pour définir selon le type de clientèle ce que les Américains nomment les 4 « P » : Product, Place of distribution, Promotion, Price.

Un des points les plus essentiels, et qui marque bien l'étape nécessaire à la construction d'un système de bibliothèques réellement efficace, est l'utilisation de l'idée de l' « integrated marketing » : chaque section de l'institution en question doit refléter l'attitude générale de la bibliothèque et influence en retour l'efficacité du marketing. Il faut savoir passer de la simple idée que : - une bibliothèque doit avoir les moyens de satisfaire les besoins de l'utilisateur sur un sujet précis, à l'idée, beaucoup plus complexe, que : - il faut, de plus, s'assurer que l'utilisateur ne passera pas à côté de ces possibilités, et que toutes les ressources disponibles lui seront offertes, et ce dans les meilleurs délais.

Cette étape, qui permet de faire, non plus du simple travail courant de bibliothèque, mais un véritable travail de recherche sur les ressources et disponibilités dans les autres institutions, est celle qui passe par l'établissement de réseaux et de systèmes de coopération entre bibliothèques.

Une coopération efficace sans excès d'autorité


Voir aussi