CIDE (2009) Kanellos : Différence entre versions

De CIDE
imported>Lisa Chipot
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=='''Introduction : les hésitations du musée virtuel'''==
 
=='''Introduction : les hésitations du musée virtuel'''==
Comment se fait-il qu’un récit aussi court et aussi fragmentaire que celui sur l’Annonciation <ref>Le texte entier est contenu dans 13 petites lignes dans la version du manuscrit grec et se trouve au seul évangile de Luc (ch.
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Comment se fait-il qu’un récit aussi court et aussi fragmentaire que celui sur l’Annonciation<ref>Le texte entier est contenu dans 13 petites lignes dans la version du manuscrit grec et se trouve au seul évangile de Luc (ch.
 
1, lignes 26 à 38). On trouve aussi, dans la tradition islamique, un récit apparenté, dans la Sourate 19, intitulée « Marie
 
1, lignes 26 à 38). On trouve aussi, dans la tradition islamique, un récit apparenté, dans la Sourate 19, intitulée « Marie
 
(Maryam) » ; là, la description est encore plus courte : elle tient en 6 lignes au plus (16 à 21) !</ref> a reçu tant de considération et a connu une telle postérité dans la production artistique occidentale depuis tant de siècles ? Que signifie-t-il, que transmet-il de si important pour inspirer décidément tant de générations et susciter tant d’intérêt créatif, même chez des  artistes non chrétiens, voire non croyants ?
 
(Maryam) » ; là, la description est encore plus courte : elle tient en 6 lignes au plus (16 à 21) !</ref> a reçu tant de considération et a connu une telle postérité dans la production artistique occidentale depuis tant de siècles ? Que signifie-t-il, que transmet-il de si important pour inspirer décidément tant de générations et susciter tant d’intérêt créatif, même chez des  artistes non chrétiens, voire non croyants ?
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que les préoccupations d’une ingénierie asservie à son temps. De façon minimaliste, le musée virtuel se veut, tout d’abord, un patrimoine numérique sur une collection d’œuvres ; il est souvent vitrine ou reproduction d’expositions réelles, transitoires ou permanentes ; il se transforme, parfois, en site éducatif ; il peut être un univers entièrement virtuel, même avec des œuvres virtuels ; il intègre des jeux pour petits et grands (les fameux « serious games »), etc. Ses multiples transfigurations recoupent nombre d’initiatives qui semblent centrales dans une société comme la nôtre, mieux comprise, désormais, comme une société de la Communication, de l’Information et de la Connaissance. Globalement, il désigne des enjeux complexes mais porteurs, relevant de l’héritage culturel, dans une économie numérique orientée par les services.
 
que les préoccupations d’une ingénierie asservie à son temps. De façon minimaliste, le musée virtuel se veut, tout d’abord, un patrimoine numérique sur une collection d’œuvres ; il est souvent vitrine ou reproduction d’expositions réelles, transitoires ou permanentes ; il se transforme, parfois, en site éducatif ; il peut être un univers entièrement virtuel, même avec des œuvres virtuels ; il intègre des jeux pour petits et grands (les fameux « serious games »), etc. Ses multiples transfigurations recoupent nombre d’initiatives qui semblent centrales dans une société comme la nôtre, mieux comprise, désormais, comme une société de la Communication, de l’Information et de la Connaissance. Globalement, il désigne des enjeux complexes mais porteurs, relevant de l’héritage culturel, dans une économie numérique orientée par les services.
  
Curieusement, alors que le crédit technologique semble augurer des possibilités illimitées, une étude que nous avons menée en amont, portant sur plus de cinquante musées, a montré qu’environ 9 fois sur 10 on a affaire à des musées virtuels qui sont des calques de musées réels, i.e. de musées qui se trouvent physiquement implantés en un lieu et opèrent sur un mode plutôt classique. Étrange constatation alors que la notion de musée virtuel était censée nous délivrer des contraintes d’unité du lieu qui pèsent sur les collections. L’intérêt d’un musée virtuel, son essence même, est précisément cette ouverture qu’il permet en matière d’accessibilité diversifiée à des collections d’objets choisis, prioritairement pour leur caractère culturel <ref>  Rappelons la définition de l’UNESCO d’un musée : « une institution permanente, sans but lucratif, au service de la société
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Curieusement, alors que le crédit technologique semble augurer des possibilités illimitées, une étude que nous avons menée en amont, portant sur plus de cinquante musées, a montré qu’environ 9 fois sur 10 on a affaire à des musées virtuels qui sont des calques de musées réels, i.e. de musées qui se trouvent physiquement implantés en un lieu et opèrent sur un mode plutôt classique. Étrange constatation alors que la notion de musée virtuel était censée nous délivrer des contraintes d’unité du lieu qui pèsent sur les collections. L’intérêt d’un musée virtuel, son essence même, est précisément cette ouverture qu’il permet en matière d’accessibilité diversifiée à des collections d’objets choisis, prioritairement pour leur caractère culturel<ref>  Rappelons la définition de l’UNESCO d’un musée : « une institution permanente, sans but lucratif, au service de la société
 
et de son développement, ouverte au public et qui fait des recherches concernant les témoins matériels de l’homme et de son
 
et de son développement, ouverte au public et qui fait des recherches concernant les témoins matériels de l’homme et de son
 
environnement, acquiert ceux-là, les conserve, les communique et notamment les expose à des fins d’études, d’éducation et
 
environnement, acquiert ceux-là, les conserve, les communique et notamment les expose à des fins d’études, d’éducation et
 
de délectation ». Elle reste aussi valide dans le cas des musées virtuels. Bien entendu, le musée virtuel peut aussi concerner
 
de délectation ». Elle reste aussi valide dans le cas des musées virtuels. Bien entendu, le musée virtuel peut aussi concerner
des objets de n’importe quelle nature, fonction et vocation. </ref> . Or, aujourd’hui encore, le concept de collection reste majoritairement enfermé dans la logique de l’institution, probablement parce que le marché était déjà formaté et occupé par des musées classiques qui, naturellement, ont eu plus des moyens que d’autres pour développer des vitrines en ligne. Ces musées réels et plus ou moins fortunés, ont compris les TIC comme des moyens complémentaires pour promouvoir leurs actions culturelles ; incidemment, aussi, pour soutenir leur business et leur image à un moment où le monde muséal semblait subir des mutations profondes.
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des objets de n’importe quelle nature, fonction et vocation.</ref> . Or, aujourd’hui encore, le concept de collection reste majoritairement enfermé dans la logique de l’institution, probablement parce que le marché était déjà formaté et occupé par des musées classiques qui, naturellement, ont eu plus des moyens que d’autres pour développer des vitrines en ligne. Ces musées réels et plus ou moins fortunés, ont compris les TIC comme des moyens complémentaires pour promouvoir leurs actions culturelles ; incidemment, aussi, pour soutenir leur business et leur image à un moment où le monde muséal semblait subir des mutations profondes.
  
Cela ne serait peut-être pas fâcheux, ni même nuisible en matière de développement du concept si, même avec une telle limitation, l’opportunité virtuelle ne s’avérait décidément castrée. Certes, on voit ci et là des innovations technologiques séduisantes investir peu à peu un métier nouveau, celui de muséologue (et de muséographe) numériques : des bases de données multimédia, des jeux éducatifs (Brooklyn Museum<ref>Lien vers [http://www.brooklynmuseum.org  Brooklyn Museum]</ref> ; Tate Museum <ref>Lien vers [http://www.tate.org.ok  Tate Museum]</ref> ; Musée de Pompei<ref>Lien vers [http://www.pompeiisites.org  Musée de Pompei]</ref> ; Métropolitan Museum<ref>Lien vers [http://www.metmuseum.org  Métropolitan Museum]</ref>),  des plateformes de type 2.0 pour la création de nouvelles sociétés muséales (Brooklyn Museum <ref>Lien vers [http://www.brooklynmuseum.org  Brooklyn Museum]</ref>  ; Powerhouse Museum <ref>Lien vers [http://www.powerhousemuseum.com  Powerhouse Museum]</ref>; Tate Museum ; Métropolitan Museum, de la réalité virtuelle (British Museum<ref>Lien vers [http://www.britishmuseum.org  British Museum]</ref> ; Rijksmuseum <ref>Lien vers [http://www.rijksmuseum.nl  Rijksmuseum] </ref> ; Museo del Prado <ref>Lien vers [http://www.museodelprado.es  Museo del Prado]</ref> ; Musée du Louvre<ref>Lien vers [http://www.louvre.fr    Musée du Louvre]</ref>, des interfaces plus attractives, esthétiques (Musée de l’Hermitage<ref>[http://www.hermitagemuseum.org  Musée de l’Hermitage]</ref>) et plus ergonomiques, des techniques de traitement d’image attrayantes, de la synthèse de parole recevable (Rijksmuseum ; Eternal Egypt<ref>Lien vers [http://www.eternalegypt.com  Eternal Egypt]</ref>), des protocoles de recherche évolués, etc. Cependant,  l’ensemble reste globalement contenu dans des interrogations communes qui relèvent de la conception d’un site commercial plus ou moins  standard. Tristement, le thème de la visite, prioritaire pour un musée, qui deviendrait visite virtuelle dans le cas d’un musée virtuel, se voit dégradé, entièrement fondu qu’il apparaît dans une navigation usuelle. Même les standards émergents, plus ouverts à des réseaux sémantiques, ne lui réservent pas une place importante ({{CIDE lien citation|CIDOC, 2006}}). Par ailleurs, la conception de la structure des données ne permet pas une flexibilité suffisante pour opérer des changements significatifs. En fait, dans la quasi-totalité des musées virtuels calques, on rencontre, dirait-on, une pensée unique qui impose divers régimes de restriction :
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Cela ne serait peut-être pas fâcheux, ni même nuisible en matière de développement du concept si, même avec une telle limitation, l’opportunité virtuelle ne s’avérait décidément castrée. Certes, on voit ci et là des innovations technologiques séduisantes investir peu à peu un métier nouveau, celui de muséologue (et de muséographe) numériques : des bases de données multimédia, des jeux éducatifs (Brooklyn Museum<ref>Lien vers [http://www.brooklynmuseum.org  Brooklyn Museum]</ref> ; Tate Museum<ref>Lien vers [http://www.tate.org.ok  Tate Museum]</ref> ; Musée de Pompei<ref>Lien vers [http://www.pompeiisites.org  Musée de Pompei]</ref> ; Métropolitan Museum<ref>Lien vers [http://www.metmuseum.org  Métropolitan Museum]</ref>),  des plateformes de type 2.0 pour la création de nouvelles sociétés muséales (Brooklyn Museum<ref>Lien vers [http://www.brooklynmuseum.org  Brooklyn Museum]</ref>  ; Powerhouse Museum<ref>Lien vers [http://www.powerhousemuseum.com  Powerhouse Museum]</ref>; Tate Museum ; Métropolitan Museum, de la réalité virtuelle (British Museum<ref>Lien vers [http://www.britishmuseum.org  British Museum]</ref> ; Rijksmuseum<ref>Lien vers [http://www.rijksmuseum.nl  Rijksmuseum] </ref> ; Museo del Prado<ref>Lien vers [http://www.museodelprado.es  Museo del Prado]</ref> ; Musée du Louvre<ref>Lien vers [http://www.louvre.fr    Musée du Louvre]</ref>, des interfaces plus attractives, esthétiques (Musée de l’Hermitage<ref>[http://www.hermitagemuseum.org  Musée de l’Hermitage]</ref>) et plus ergonomiques, des techniques de traitement d’image attrayantes, de la synthèse de parole recevable (Rijksmuseum ; Eternal Egypt<ref>Lien vers [http://www.eternalegypt.com  Eternal Egypt]</ref>), des protocoles de recherche évolués, etc. Cependant,  l’ensemble reste globalement contenu dans des interrogations communes qui relèvent de la conception d’un site commercial plus ou moins  standard. Tristement, le thème de la visite, prioritaire pour un musée, qui deviendrait visite virtuelle dans le cas d’un musée virtuel, se voit dégradé, entièrement fondu qu’il apparaît dans une navigation usuelle. Même les standards émergents, plus ouverts à des réseaux sémantiques, ne lui réservent pas une place importante ({{CIDE lien citation|CIDOC, 2006}}). Par ailleurs, la conception de la structure des données ne permet pas une flexibilité suffisante pour opérer des changements significatifs. En fait, dans la quasi-totalité des musées virtuels calques, on rencontre, dirait-on, une pensée unique qui impose divers régimes de restriction :
  
 
# Le visiteur du musée virtuel de ce genre n’a pas la possibilité de voir toutes les collections qui existent dans le musée réel mais seulement une sélection, plus ou moins étendue, plus ou moins en correspondance avec son désir de visite, une sélection décidée par avance par le concepteur du site.
 
# Le visiteur du musée virtuel de ce genre n’a pas la possibilité de voir toutes les collections qui existent dans le musée réel mais seulement une sélection, plus ou moins étendue, plus ou moins en correspondance avec son désir de visite, une sélection décidée par avance par le concepteur du site.
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# Enfin, il ne peut pas toujours s’approcher des œuvres, pour examiner certains de leurs détails ; les œuvres, dans leur présentation picturale, sont données, le plus souvent, avec des résolutions qui correspondent à une vue plutôt lointaine, même après quelques agrandissements possibles permis par les outils de visualisation. De l’autre côté, il ne dispose pas non plus de moyens de (re)contextualisation des œuvres.
 
# Enfin, il ne peut pas toujours s’approcher des œuvres, pour examiner certains de leurs détails ; les œuvres, dans leur présentation picturale, sont données, le plus souvent, avec des résolutions qui correspondent à une vue plutôt lointaine, même après quelques agrandissements possibles permis par les outils de visualisation. De l’autre côté, il ne dispose pas non plus de moyens de (re)contextualisation des œuvres.
  
L’intérêt semble, donc, dès la mise en place d’un tel musée virtuel, compromis ; la notion de visiteur reste au niveau de la métaphore pour parler d’un utilisateur d’un système de gestion de bases de données. On en saisit les raisons : de tels musées sont bâtis sur un modèle économique commun qui leur offre, certes, les fondations mais aussi les limitations. À part, donc, quelques cas d’approfondissement emblématiques, que l’on trouve dans certains musées calques disposant des moyens <ref>Comme la rubrique des « Œuvres à la loupe » du musée du Louvre, le sous-menu « Masterpieces » du Rijksmuseum, la section « Explore » du British Museum, etc. </ref> , et qui proposent des études à part qui se surajoutent à la structure globale du site, le reste est souvent réduit à une base de données, plus ou moins étendue et soignée, plus ou moins conviviale et appropriable, plus ou moins renseignée et affinée, avec les fonctionnalités classiques en matière d’interrogation et de navigation. Le musée virtuel, pourrait-on dire, s’est également abandonné aux charmes de la pensée « BD » revenant du coup à une posture que l’on croyait à jamais révolue, somme  toute patrimoniale et conservatoire. Tout le reste doit s’inscrire dans le cadre de cette pensée. Qui fait office de norme.
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L’intérêt semble, donc, dès la mise en place d’un tel musée virtuel, compromis ; la notion de visiteur reste au niveau de la métaphore pour parler d’un utilisateur d’un système de gestion de bases de données. On en saisit les raisons : de tels musées sont bâtis sur un modèle économique commun qui leur offre, certes, les fondations mais aussi les limitations. À part, donc, quelques cas d’approfondissement emblématiques, que l’on trouve dans certains musées calques disposant des moyens<ref>Comme la rubrique des « Œuvres à la loupe » du musée du Louvre, le sous-menu « Masterpieces » du Rijksmuseum, la section « Explore » du British Museum, etc. </ref> , et qui proposent des études à part qui se surajoutent à la structure globale du site, le reste est souvent réduit à une base de données, plus ou moins étendue et soignée, plus ou moins conviviale et appropriable, plus ou moins renseignée et affinée, avec les fonctionnalités classiques en matière d’interrogation et de navigation. Le musée virtuel, pourrait-on dire, s’est également abandonné aux charmes de la pensée « BD » revenant du coup à une posture que l’on croyait à jamais révolue, somme  toute patrimoniale et conservatoire. Tout le reste doit s’inscrire dans le cadre de cette pensée. Qui fait office de norme.
  
 
La pensée « BD » est simple ; elle repose. Elle n’offre pas seulement une liberté hors normes mais aussi une liberté voulue hors les normes. O tempora ! O mores !
 
La pensée « BD » est simple ; elle repose. Elle n’offre pas seulement une liberté hors normes mais aussi une liberté voulue hors les normes. O tempora ! O mores !
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Ainsi, le concept de musée virtuel renvoie aujourd’hui, majoritairement et typiquement, à l’idée d’imitation. Il assure, assurément, son rôle de lieu d’émergence de réseaux sociaux, par la constitution de diverses commu- nautés d’intérêts notamment ; mais il reste faillible devant l’exigence de formuler une proposition respectueuse des volontés et des pratiques culturelles. Il rejoint les prérogatives d’un service facilitateur de commerce électronique ; mais il trahit les espoirs qui voulaient de lui un outil d’accès à la connaissance.
 
Ainsi, le concept de musée virtuel renvoie aujourd’hui, majoritairement et typiquement, à l’idée d’imitation. Il assure, assurément, son rôle de lieu d’émergence de réseaux sociaux, par la constitution de diverses commu- nautés d’intérêts notamment ; mais il reste faillible devant l’exigence de formuler une proposition respectueuse des volontés et des pratiques culturelles. Il rejoint les prérogatives d’un service facilitateur de commerce électronique ; mais il trahit les espoirs qui voulaient de lui un outil d’accès à la connaissance.
  
Le concept de visite, nous revenons, semble intéresser peu les  concepteurs des musées virtuels, qui restent dans une optique de communication et de démonstration. Le concept de lecture encore moins. En effet, l’organisation des documents se réalise généralement sans tenir compte des pratiques de lecture <ref>Remarquons que le paradigme d’un musée virtuel reçoit toujours de la plupart des muséographes et des muséologues une
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Le concept de visite, nous revenons, semble intéresser peu les  concepteurs des musées virtuels, qui restent dans une optique de communication et de démonstration. Le concept de lecture encore moins. En effet, l’organisation des documents se réalise généralement sans tenir compte des pratiques de lecture<ref>Remarquons que le paradigme d’un musée virtuel reçoit toujours de la plupart des muséographes et des muséologues une
 
méfiance non dissimulée. Il n’est peut-être pas sans rapport avec notre analyse. La logique des bases de données impose un
 
méfiance non dissimulée. Il n’est peut-être pas sans rapport avec notre analyse. La logique des bases de données impose un
 
cadre qui fossilise les pratiques muséales en matière d’organisation d’une exposition, bâties traditionnellement sur la notion
 
cadre qui fossilise les pratiques muséales en matière d’organisation d’une exposition, bâties traditionnellement sur la notion
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== '''La visite comme (stratégie de) lecture'''==
 
== '''La visite comme (stratégie de) lecture'''==
 
Cette brève promenade dans ce que nous trouvons de commun et de récurrent dans les musées virtuels de nos jours visait à poser rapidement les jalons d’une critique pouvant nous orienter vers quelque développement alternatif. Déjà, on relève que si la première mission de la notion d’exposition virtuelle est de s’affranchir de l’emprise de la matérialité d’un musée réel, la notion de collection doit également se chercher des principes de constitution sur une base différente ; disons, par exemple, thématique. Autrement dit, le mouvement de résistance culturelle dans ce régime quelque peu totalitaire des musées virtuels vitrines d’aujourd’hui, produits sur la logique du couple « institution de support et pensée BD », s’appellerait probablement musée virtuel thématique. Ailleurs, on l’appelle imaginaire ({{CIDE lien citation|Bernier, 2001}}). Son rapport au musée virtuel typique serait, en un sens, le rapport de l’intension à l’extension.
 
Cette brève promenade dans ce que nous trouvons de commun et de récurrent dans les musées virtuels de nos jours visait à poser rapidement les jalons d’une critique pouvant nous orienter vers quelque développement alternatif. Déjà, on relève que si la première mission de la notion d’exposition virtuelle est de s’affranchir de l’emprise de la matérialité d’un musée réel, la notion de collection doit également se chercher des principes de constitution sur une base différente ; disons, par exemple, thématique. Autrement dit, le mouvement de résistance culturelle dans ce régime quelque peu totalitaire des musées virtuels vitrines d’aujourd’hui, produits sur la logique du couple « institution de support et pensée BD », s’appellerait probablement musée virtuel thématique. Ailleurs, on l’appelle imaginaire ({{CIDE lien citation|Bernier, 2001}}). Son rapport au musée virtuel typique serait, en un sens, le rapport de l’intension à l’extension.
Le musée virtuel sur le thème de l’Annonciation que nous présentons ici en sera notre support en tant que cas d’étude et d’application <ref> Il a été développé en commun par la Fondation Ormylia et TELECOM Bretagne. Le développement a été assuré par la
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Le musée virtuel sur le thème de l’Annonciation que nous présentons ici en sera notre support en tant que cas d’étude et d’application<ref> Il a été développé en commun par la Fondation Ormylia et TELECOM Bretagne. Le développement a été assuré par la
 
société Trinity Systems (www.trinitysystems.gr). Il est le résultat de nombreux travaux menés depuis plusieurs années dans
 
société Trinity Systems (www.trinitysystems.gr). Il est le résultat de nombreux travaux menés depuis plusieurs années dans
 
le Art Diagnosis Centre de cette Fondation et à TELECOM Bretagne.</ref>. Il s’agit d’un musée qui présente une collection d’œuvres représentant le thème de l’Annonciation dans la tradition iconographique byzantine.
 
le Art Diagnosis Centre de cette Fondation et à TELECOM Bretagne.</ref>. Il s’agit d’un musée qui présente une collection d’œuvres représentant le thème de l’Annonciation dans la tradition iconographique byzantine.
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La représentation numérique assure, on le sait, la transmutation de l’objet à  exposer  en  une  constellation  de  fragments  d’information.    L’objet matériel présenté, qui était hier encore contraint, et de façon non négociable, dans l’unité du lieu, du temps et de la visite, s’efface, dans un musée virtuel, devant ce qui le remplace et le « dit » dans un discours nouveau, généralement multimédia et, heureusement, partiellement à la portée de la machine. On a certes perdu l’objet mais son spectre, sa structure informationnelle, permet de définir plusieurs régimes de transition et d’intégration supplétifs. La dissociation entre substance et information, on le sait aussi, libère la structure des connaissances qui décrit un objet et ouvre, plus avant, à des possibilités d’évolution inédites, dans des espaces qualitatifs, indépendants et combinables à désir.
 
La représentation numérique assure, on le sait, la transmutation de l’objet à  exposer  en  une  constellation  de  fragments  d’information.    L’objet matériel présenté, qui était hier encore contraint, et de façon non négociable, dans l’unité du lieu, du temps et de la visite, s’efface, dans un musée virtuel, devant ce qui le remplace et le « dit » dans un discours nouveau, généralement multimédia et, heureusement, partiellement à la portée de la machine. On a certes perdu l’objet mais son spectre, sa structure informationnelle, permet de définir plusieurs régimes de transition et d’intégration supplétifs. La dissociation entre substance et information, on le sait aussi, libère la structure des connaissances qui décrit un objet et ouvre, plus avant, à des possibilités d’évolution inédites, dans des espaces qualitatifs, indépendants et combinables à désir.
  
Précisément, dans le cas du musée sur l’Annonciation, l’importance que nous accordons aux interprétations normées tend à n’en retenir que des espaces qui restent en accord avec des pratiques attestées en Histoire de l’Art. Plus techniquement, les parcours de lecture sont bâtis sur cinq points de vue qui constituent autant d’espaces d’analyse d’une œuvre d’art <ref>Certes, d’autres auraient pu aussi bien convenir. La question n’est pas le nombre, ni même la qualité, mais la
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Précisément, dans le cas du musée sur l’Annonciation, l’importance que nous accordons aux interprétations normées tend à n’en retenir que des espaces qui restent en accord avec des pratiques attestées en Histoire de l’Art. Plus techniquement, les parcours de lecture sont bâtis sur cinq points de vue qui constituent autant d’espaces d’analyse d’une œuvre d’art<ref>Certes, d’autres auraient pu aussi bien convenir. La question n’est pas le nombre, ni même la qualité, mais la
 
reconnaissance de régimes d’analyse cohérents, attestés par des discours d’analyse dans le domaine de l’Histoire de l’Art. Et,
 
reconnaissance de régimes d’analyse cohérents, attestés par des discours d’analyse dans le domaine de l’Histoire de l’Art. Et,
 
évidemment, leur potentiel de représentation dans une machine !</ref> . Le terme « point de vue » doit ici être entendu de manière technique : il désigne une localité homogène dans la représentation des connaissances. Pour une icône représentant le thème de l’Annonciation, par exemple, nous avons fini par en distinguer cinq : (i) Description, (ii) Esthétique, (iii) Contexte de production et d’exposition, (iv) Exploration technique (i.e. physico-chimique) et, ce qui synthétise les précédents, (v) Interprétation.
 
évidemment, leur potentiel de représentation dans une machine !</ref> . Le terme « point de vue » doit ici être entendu de manière technique : il désigne une localité homogène dans la représentation des connaissances. Pour une icône représentant le thème de l’Annonciation, par exemple, nous avons fini par en distinguer cinq : (i) Description, (ii) Esthétique, (iii) Contexte de production et d’exposition, (iv) Exploration technique (i.e. physico-chimique) et, ce qui synthétise les précédents, (v) Interprétation.

Version du 9 décembre 2016 à 15:49

Le concept de musée virtuel thématique : la collection comme visite, la visite comme lecture, la lecture comme stratégie.


 
 

 
Titre
Le concept de musée virtuel thématique : la collection comme visite, la visite comme lecture, la lecture comme stratégie.
Auteurs
Ioannis Kanellos (1), Sister Daniilia (2).
Affiliations
(1):Telecom Bretagne, Département Informatique, CS 83818 29238 Brest cedex 3, France
(2) :Ormylia Foundation, Art Diagnosis Centre, 63071 Ormylia, Greece
In
CIDE.12 (Montréal), 2009
En PDF 
CIDE (2009) Kanellos.pdf
Mots-clés 
Musée virtuel thématique, ontologies locales, points de vue, représentation des connaissances à profondeur variable, stratégies de lecture, scénarios de visite, détail et interpicturalité.
Keywords
Thematic virtual museum, local ontologies, points of view, variable depth knowledge representation, reading strategies, visiting scenarios, detail and interpicturality.
Résumé
L’article discute les idées directives d’un musée virtuel thématique, en matière de représentation des connaissances (RC) et d’implémentation. Le cas d’étude est le musée sur l’Annonciation [1]. Nous abordons le problème de la RC suivant plusieurs points de vue et à profondeur variable ainsi que le besoin d’une modélisation des ressources faisant la part tant au détail qu’à l’interpicturalité. Nous expliquons l’importance de reprendre la notion de visite d’un musée virtuel dans celle de lecture. Nous exposons enfin une structure des données susceptible de servir les stratégies qui sous-tendent trois genres de visite (découverte, étude et approfondissement). Nous concluons par une discussion sur quelques enjeux concernant le développement de musées virtuels aujourd’hui.