Rev. Hist. Sci. (1957) Itard, méthode des fluxions, Newton, Buffon : Différence entre versions

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Le certificat de l'Académie des Sciences est signé par Fontenelle le 21 mai 1740. Buffon traduit de l'anglais de John Colson, The Method of Fluxions and Infinite Series, Londres, 1736. Le travail de Colson est lui-même une traduction du latin de Newton. On voit ainsi combien on est loin de la pensée de l'auteur et avec quelles précautions il faudrait utiliser ce texte si l'on voulait s'en servir pour étudier l'évolution de sa pensée mathématique.
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Le certificat de l'Académie des Sciences est signé par [[A pour personnalité citée::Bernard Le Bouyer de Fontenelle|Fontenelle]], le 21 mai 1740. Buffon traduit de l'anglais de [[A pour traducteur commenté::John Colson]], ''The Method of Fluxions and Infinite Series'', Londres, 1736. Le travail de Colson est lui-même une traduction du latin de [[A pour auteur cité::Isaac Newton|Newton]]. On voit ainsi combien on est loin de la pensée de l'auteur et avec quelles précautions il faudrait utiliser ce texte si l'on voulait s'en servir pour étudier l'évolution de sa pensée mathématique.
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Il n'y a cependant nulle part trahison et la lecture de ce court traité sera fort utile à tout mathématicien qui voudra se familiariser avec les techniques mathématiques du xviie siècle. Cet ouvrage, bien que paru tardivement, reflète avec fidélité l'état de l'Analyse, en Angleterre, vers les années 1670, c'est-à-dire l'essentiel des résultats trouvés par Newton ou assimilés par lui.
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Si Buffon paraît, à première lecture, un traducteur assez fidèle, sa préface appelle les plus extrêmes réserves. Elle révèle, pour la période pré-newtonienne, de graves ignorances : « Archimède, Apollonius, Viviani, Grégoire de Saint-Vincent, ont connu l'Infini ; leurs méthodes d'approximation et d'exhaustion en sont tirées, et ils s'en sont servi pour quarrer et rectifier quelques courbes... Cavalieri et vingt ans après Fermat et Wallis ont été les premiers qui aient appliqué quelques idées de Calcul à cette Géométrie de l'Infini. » Tout y est : confusion de dates, amalgame d'Anciens et de Modernes, erreurs même, car Archimède a peut- être rectifié le cercle, mais ni Apollonius, ni Grégoire de Saint-Vincent, ni Viviani dans sa jeunesse n'ont rectifié de courbes. Le premier à citer en ce domaine est Roberval pour sa comparaison de l'arc de spirale et de l'arc de parabole en 1642-1643.
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N'insistons pas. Pour la période ultérieure Buffon démarque tout simplement le ''Commercium Epistolicum'' en adoptant les thèses anglaises les plus outrées. En somme, cette préface est un bel exemple de la façon dont il ne faut pas écrire l'histoire des sciences.
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Buffon a tout de même rendu un service signalé aux mathématiques, par cette traduction tardive de Newton. Certes ses contemporains avaient peu à apprendre dans cet écrit, du moins les mathématiciens d'avant-garde.
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Dès 1708, l‘''Analyse démontrée'' du P. Reyneau avait été un bon manuel, faisant une synthèse des travaux des deux écoles, celle de Leibniz et des frères Bernoulli d'une part, celle de Newton et de ses élèves ou amis de l'autre. Certes, l'écrit du P. Reyneau n'a pas l'élégance de l‘''Analyse des infiniment petits'' du marquis de l'Hôpital. Certes, il contient même des erreurs. Mais ces erreurs, le jeune d'Alembert les a relevées, en étudiant l'ouvrage qui avait donc quelque valeur éducative.
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Trente ans plus tard la science avait progressé. Mais que l'on examine Le ''calcul différentiel et le calcul intégral'' de l'abbé Deidier (Paris, 1740) : l'ouvrage est contemporain de la traduction de Buffon, il est bien fait, bien écrit, dans une langue plus moderne certes, que celle de Newton. Mais quelle différence entre cet excellent manuel d'un bon professeur, et l'esquisse du cours magistral du
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grand mathématicien ! Ainsi, bien que tardive, cette édition de Newton apportait encore une bouffée d'air pur.
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Le nouveau tirage de la librairie Blanchard sera lui aussi fort utile aux historiens.
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La méthode des fluxions et des suites infinies

Traduit par M. de Buffon.


 
 

Titre
La méthode des fluxions et des suites infinies. Traduit par M. de Buffon (compte-rendu).
Auteur
Jean Itard,
In
Revue de l'histoire des scoences, n°253, 1873. pp. 329-334.
Source
Persée,
https://www.persee.fr/doc/rhs_0048-7996_1967_num_20_1_2521_t1_0095_0000_1
LamethodedesfluxionsNewtonBuffon AB book.jpg

L'ouvrage

Isaac Newton, La méthode des fluxions et des suites infinies. Traduit par M. de Buffon. Nouveau tirage, Albert Blanchard. Paris, 1966, 21 x 27 cm, xxxii + 150 p. Prix : 28 F.


L'analyse

Le certificat de l'Académie des Sciences est signé par Fontenelle, le 21 mai 1740. Buffon traduit de l'anglais de John Colson, The Method of Fluxions and Infinite Series, Londres, 1736. Le travail de Colson est lui-même une traduction du latin de Newton. On voit ainsi combien on est loin de la pensée de l'auteur et avec quelles précautions il faudrait utiliser ce texte si l'on voulait s'en servir pour étudier l'évolution de sa pensée mathématique.

Il n'y a cependant nulle part trahison et la lecture de ce court traité sera fort utile à tout mathématicien qui voudra se familiariser avec les techniques mathématiques du xviie siècle. Cet ouvrage, bien que paru tardivement, reflète avec fidélité l'état de l'Analyse, en Angleterre, vers les années 1670, c'est-à-dire l'essentiel des résultats trouvés par Newton ou assimilés par lui.

On y voit l'importance qu'il attache à la Géométrie de Descartes, mais aussi avec quelle pénétration il étudie le contact des courbes, les angles de contingence, la notion d'inflexion, « les points de droiture », les points de courbure infinie.

Fondateur de la méthode des séries entières, Newton en fait ici un usage constant et l'on reste étonné de sa virtuosité, par exemple lorsqu'il exprime par une série l'arc d'hyperbole ou l'arc d'ellipse, ou même l'arc de quadratrice.

Pour un mathématicien français, formé de très bonne heure à l'utilisation des dérivées, ses fluentes, ses fluxions et leur notation désorientent peut-être moins que les différentielles de Leibniz. On est un peu plus surpris lorsqu'il se propose d'étudier « la qualité de la Courbure ». Par cette qualité, nous dit-il, « j'entends ici sa Forme, eu égard à son plus ou moins d'uniformité, ou à son plus ou moins de variation dans les différentes parties de la Courbe ; ainsi on peut dire que la Qualité de la Courbure d'un Cercle est uniforme ou invariable ; dans une Spirale... la Qualité de la Courbure sera variée uniformément, c'est-à-dire, également inégale ». Ce langage de l'École fleure étrangement le Moyen Age, et dévoile un des aspects peu connus de la pensée de Newton, que l'on voudrait malgré soi toujours moderne.

Si Buffon paraît, à première lecture, un traducteur assez fidèle, sa préface appelle les plus extrêmes réserves. Elle révèle, pour la période pré-newtonienne, de graves ignorances : « Archimède, Apollonius, Viviani, Grégoire de Saint-Vincent, ont connu l'Infini ; leurs méthodes d'approximation et d'exhaustion en sont tirées, et ils s'en sont servi pour quarrer et rectifier quelques courbes... Cavalieri et vingt ans après Fermat et Wallis ont été les premiers qui aient appliqué quelques idées de Calcul à cette Géométrie de l'Infini. » Tout y est : confusion de dates, amalgame d'Anciens et de Modernes, erreurs même, car Archimède a peut- être rectifié le cercle, mais ni Apollonius, ni Grégoire de Saint-Vincent, ni Viviani dans sa jeunesse n'ont rectifié de courbes. Le premier à citer en ce domaine est Roberval pour sa comparaison de l'arc de spirale et de l'arc de parabole en 1642-1643.

N'insistons pas. Pour la période ultérieure Buffon démarque tout simplement le Commercium Epistolicum en adoptant les thèses anglaises les plus outrées. En somme, cette préface est un bel exemple de la façon dont il ne faut pas écrire l'histoire des sciences. Buffon a tout de même rendu un service signalé aux mathématiques, par cette traduction tardive de Newton. Certes ses contemporains avaient peu à apprendre dans cet écrit, du moins les mathématiciens d'avant-garde.

Dès 1708, l‘Analyse démontrée du P. Reyneau avait été un bon manuel, faisant une synthèse des travaux des deux écoles, celle de Leibniz et des frères Bernoulli d'une part, celle de Newton et de ses élèves ou amis de l'autre. Certes, l'écrit du P. Reyneau n'a pas l'élégance de l‘Analyse des infiniment petits du marquis de l'Hôpital. Certes, il contient même des erreurs. Mais ces erreurs, le jeune d'Alembert les a relevées, en étudiant l'ouvrage qui avait donc quelque valeur éducative.

Trente ans plus tard la science avait progressé. Mais que l'on examine Le calcul différentiel et le calcul intégral de l'abbé Deidier (Paris, 1740) : l'ouvrage est contemporain de la traduction de Buffon, il est bien fait, bien écrit, dans une langue plus moderne certes, que celle de Newton. Mais quelle différence entre cet excellent manuel d'un bon professeur, et l'esquisse du cours magistral du grand mathématicien ! Ainsi, bien que tardive, cette édition de Newton apportait encore une bouffée d'air pur.

Le nouveau tirage de la librairie Blanchard sera lui aussi fort utile aux historiens.

Jean Itard.


Voir aussi

Liens externes