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HISTCNRS (2000) Wyart : Différence entre versions

De Wicri France
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L'origine du CNRS remonte au Front Populaire. Le président du Conseil, Léon Blum, avait demandé à Jean Perrin ce qu'il voulait faire. Perrin était un type merveilleux, mais il était un peu pagaye. Il donnait un rendez-vous et il ne venait pas. Il était d'une gentillesse extrême, mais ce n'était pas un administrateur, au contraire. Très rapidement, il a conseillé au gouvernement de créer un sous-secrétariat d'Etat à la Recherche scientifique qui a été confié à madame Joliot. Mais ça embêtait celle-ci et elle ne savait pas trop quoi faire. Au gouvernement non plus, on ne savait pas. Puis, il y a eu l'histoire des médailles. Le gouvernement avait dit à Jean Perrin et aux savants qui l'entouraient et avaient la réputation d'une sensibilité de gauche : on va vous donner un budget et vous vous débrouillerez. Vous êtes mieux au courant que nous de ce qu'on doit faire pour aider la recherche. Au début, on a donc créé quelques postes de techniciens pour les mettre à la disposition des chercheurs. J'ai eu l'un des premiers en 1937. On a donc embauché une dizaine de 'travailleurs scientifiques', des ingénieurs chômeurs intellectuels. J'ai donc eu l'un des tout premiers, Salaignac, un type admirable qui travaillait auparavant dans un laboratoire médical où il faisait des clichés aux rayons X. Je l'ai recruté par l'intermédiaire de Pierre Urbain, le fils de Georges Urbain, le pontife qui faisait un peu la loi avec Jean Perrin dans le monde scientifique de l'époque. Il y avait donc déjà vaguement l'idée de créer ce qui est devenu ensuite le CNRS. C'est à dire un organisme qui recruterait des gens qui pourraient faire carrière dans la recherche (comme aujourd'hui) en leur donnant des moyens de fonctionnement en dehors de la lourdeur de l'Education Nationale.
 
L'origine du CNRS remonte au Front Populaire. Le président du Conseil, Léon Blum, avait demandé à Jean Perrin ce qu'il voulait faire. Perrin était un type merveilleux, mais il était un peu pagaye. Il donnait un rendez-vous et il ne venait pas. Il était d'une gentillesse extrême, mais ce n'était pas un administrateur, au contraire. Très rapidement, il a conseillé au gouvernement de créer un sous-secrétariat d'Etat à la Recherche scientifique qui a été confié à madame Joliot. Mais ça embêtait celle-ci et elle ne savait pas trop quoi faire. Au gouvernement non plus, on ne savait pas. Puis, il y a eu l'histoire des médailles. Le gouvernement avait dit à Jean Perrin et aux savants qui l'entouraient et avaient la réputation d'une sensibilité de gauche : on va vous donner un budget et vous vous débrouillerez. Vous êtes mieux au courant que nous de ce qu'on doit faire pour aider la recherche. Au début, on a donc créé quelques postes de techniciens pour les mettre à la disposition des chercheurs. J'ai eu l'un des premiers en 1937. On a donc embauché une dizaine de 'travailleurs scientifiques', des ingénieurs chômeurs intellectuels. J'ai donc eu l'un des tout premiers, Salaignac, un type admirable qui travaillait auparavant dans un laboratoire médical où il faisait des clichés aux rayons X. Je l'ai recruté par l'intermédiaire de Pierre Urbain, le fils de Georges Urbain, le pontife qui faisait un peu la loi avec Jean Perrin dans le monde scientifique de l'époque. Il y avait donc déjà vaguement l'idée de créer ce qui est devenu ensuite le CNRS. C'est à dire un organisme qui recruterait des gens qui pourraient faire carrière dans la recherche (comme aujourd'hui) en leur donnant des moyens de fonctionnement en dehors de la lourdeur de l'Education Nationale.
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===L'affaire des médailles===
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Donc Perrin et son groupe ne savaient en fait pas trop quoi faire. Subitement, quelqu'un a eu une idée lumineuse : des médailles pour le prestige de la science. On va créer un grand prix, dans le style du Nobel, un Nobel et des petits sous-Nobel, des tas de médailles, le vrai gag ! Mais des appétits se sont éveillés. A Paris, le milieu scientifique était plutôt pour les médailles. Mais assez rapidement, l'affaire a fait scandale. On savait qui allait avoir la première, il s'agissait de Georges Urbain. Puis on a vu arriver une masse de types qui faisaient de la lèche à Urbain pour avoir les suivantes. Là-dessus mon camarade normalien André Weil est intervenu pour contrer cette affaire de médailles. C'était le frère de la philosophe Simone Weil, un professeur de mathématiques à l'université de Strasbourg, le pape des Bourbaki, le groupe de mathématiciens qu'il avait créé. C'est un type qui avait la foi de sa soeur (elle est morte tragiquement en Angleterre pendant la guerre) et qui, étant pacifiste, a refusé d'être mobilisé à la déclaration de guerre. Comme officier, il a été dégradé, puis il est parti en Amérique où il est devenu l'un des grands mathématiciens mondiaux avant d'être élu à l'Académie des Sciences. Avec Weil, dans le camp des anti-médailles, il y avait Yves Rocard et toute une bande de normaliens provinciaux dont mon grand ami Jean Delsarte professeur à Nancy.
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Version du 18 août 2014 à 09:32

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Cette page contient un texte publié sur le site HISTCNRS[1] en 2000. Il reprend le contenu d'un entretien réalisé en 1986 par Jean-François Picard et E. Pradoura les les 5, 12 et 20 mars 1986.

L'article original

Né le 16 octobre 1902 à Avion, décédé le 13 mars 1992 à Paris. Professeur à l'université de Paris VI, UER des sciences de la terre, laboratoire de minéralogie. En 1923, il fut reçu à Normale et à Polytechnique. Il choisit la première. Après l'agrégation, il occupa un poste d'assistant de la chaire de minéralogie. En 1933 il devient le plus jeune maitre de conférences de l'université. Co-éditeur d Acta Crystallographica dès 1947, il fut dix ans plus tard Président de 'Union Internationale de Cristallographie. Il réalise pour le Palais de la Découverte la salle de cristallographie. il a installé en 1941 le Centre de Documentation du CNRS, dont il resta directeur jusqu'à sa retraite. Membre de l'Académie des sciences, 1959 - 1992.


Vous avez été témoin de la naissance du CNRS...

...et aujourd'hui, le CNRS est mort. Enfin, je veux dire qu'il n'a plus cette liberté du début, qu'il est devenu très administratif. Maintenant, quand on veut une mission, il faut prévenir deux ans à l'avance, c'est grotesque. Le CNRS après de beaux débuts a eu des fonctionnaires qui jouaient les importants et qui ont empêché les scientifiques de travailler. Il avait été créé par des professeurs d'université qui voulaient une certaine liberté. La recherche a besoin de liberté. Avec le CNRS, on a voulu se libérer du poids de l'administration. J'ai connu cette première période, c'était magnifique. Il y avait des types responsables, Laugier et Longchambon, ensuite Jacob et Dupont, après ce fut Joliot. La belle période, ça a été ça. C'est une question d'hommes.


N'y a t'il pas également à l'origine du CNRS, le rôle de certaines disciplines scientifiques ?

A l'origine, l'affaire était purement dirigée vers les sciences exactes et un peu vers la biologie, mais en retrait. La biologie n'avait pas encore subi sa transformation moléculaire. La biologie moléculaire est d'ailleurs une conséquence des progrès apportés par les méthodes physiques - et en particulier les rayons X - dans la détermination des structures atomiques. La biologie a pris son essor bien après la guerre, lorsque l'on a commencé à faire l'analyse de structures de molécules compliquées à partir des cristaux, de la diffraction cristalline des rayons X. Au début donc, c'étaient les sciences exactes, les mathématiques et l'astronomie tenaient la vedette, puis venaient la physique et la chimie.


Comment le CNRS a t-il été créé ?

L'origine du CNRS remonte au Front Populaire. Le président du Conseil, Léon Blum, avait demandé à Jean Perrin ce qu'il voulait faire. Perrin était un type merveilleux, mais il était un peu pagaye. Il donnait un rendez-vous et il ne venait pas. Il était d'une gentillesse extrême, mais ce n'était pas un administrateur, au contraire. Très rapidement, il a conseillé au gouvernement de créer un sous-secrétariat d'Etat à la Recherche scientifique qui a été confié à madame Joliot. Mais ça embêtait celle-ci et elle ne savait pas trop quoi faire. Au gouvernement non plus, on ne savait pas. Puis, il y a eu l'histoire des médailles. Le gouvernement avait dit à Jean Perrin et aux savants qui l'entouraient et avaient la réputation d'une sensibilité de gauche : on va vous donner un budget et vous vous débrouillerez. Vous êtes mieux au courant que nous de ce qu'on doit faire pour aider la recherche. Au début, on a donc créé quelques postes de techniciens pour les mettre à la disposition des chercheurs. J'ai eu l'un des premiers en 1937. On a donc embauché une dizaine de 'travailleurs scientifiques', des ingénieurs chômeurs intellectuels. J'ai donc eu l'un des tout premiers, Salaignac, un type admirable qui travaillait auparavant dans un laboratoire médical où il faisait des clichés aux rayons X. Je l'ai recruté par l'intermédiaire de Pierre Urbain, le fils de Georges Urbain, le pontife qui faisait un peu la loi avec Jean Perrin dans le monde scientifique de l'époque. Il y avait donc déjà vaguement l'idée de créer ce qui est devenu ensuite le CNRS. C'est à dire un organisme qui recruterait des gens qui pourraient faire carrière dans la recherche (comme aujourd'hui) en leur donnant des moyens de fonctionnement en dehors de la lourdeur de l'Education Nationale.


L'affaire des médailles

Donc Perrin et son groupe ne savaient en fait pas trop quoi faire. Subitement, quelqu'un a eu une idée lumineuse : des médailles pour le prestige de la science. On va créer un grand prix, dans le style du Nobel, un Nobel et des petits sous-Nobel, des tas de médailles, le vrai gag ! Mais des appétits se sont éveillés. A Paris, le milieu scientifique était plutôt pour les médailles. Mais assez rapidement, l'affaire a fait scandale. On savait qui allait avoir la première, il s'agissait de Georges Urbain. Puis on a vu arriver une masse de types qui faisaient de la lèche à Urbain pour avoir les suivantes. Là-dessus mon camarade normalien André Weil est intervenu pour contrer cette affaire de médailles. C'était le frère de la philosophe Simone Weil, un professeur de mathématiques à l'université de Strasbourg, le pape des Bourbaki, le groupe de mathématiciens qu'il avait créé. C'est un type qui avait la foi de sa soeur (elle est morte tragiquement en Angleterre pendant la guerre) et qui, étant pacifiste, a refusé d'être mobilisé à la déclaration de guerre. Comme officier, il a été dégradé, puis il est parti en Amérique où il est devenu l'un des grands mathématiciens mondiaux avant d'être élu à l'Académie des Sciences. Avec Weil, dans le camp des anti-médailles, il y avait Yves Rocard et toute une bande de normaliens provinciaux dont mon grand ami Jean Delsarte professeur à Nancy.








Voir aussi

Notes