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Le Siège et la bataille de Nancy (1860) Lacombe, 12

De Wicri Lorraine
Le Siège et la bataille, Lacombe Ferdinand bpt6k9623684h.jpeg
 
Le
Siège et la Bataille
de Nancy

XII
Conséquences des événements qui précèdent

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  I   : Considérations sur la bataille...
II  : Causes de la guerre ...
III : De l'art militaire ...
IV : Topographie de le ville de Nancy ...
V   : Composition de l'armée de Charles le Téméraire ...
VI  : Opérations du siège ...
VII  : Situation critique de Nancy ...
VIII : Arrivée de René devant Nancy ...
IX  : Description du terrain ...
X  : La Bataille et la Poursuite, ...
XI  : Ce qui suivit la bataille...
XII : Conséquences des événements ...
Annexes
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Texte original


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XII.

Conséquences des événements qui précèdent.

La victoire du duc de Lorraine, qui venait d'anéantir les débris des forces bourguignonnes et de frapper l'unique héritier d'une maison souveraine, devait produire dans l'Occident d'immenses résultats.

Rendue à elle-même, la Lorraine se trouvait délivrée de la menace permanente d'une domination étrangère, et la France, du plus grand adversaire de son unité politique. Restaient sans autre maître que Marie de Bourgogne, impuissante à les conserver, de vastes contrées, que son père, s'il eût vécu davantage, eût érigées en un puissant royaume, qui aurait enserré le sol français de l'orient au septentrion, et lui eût fermé les Alpes et les Vosges. Cet opulent héritage allait échoir à deux couronnes.

C'étaient surtout les Suisses qui avaient contribué à ce revirement de fortune. Leur réputation militaire grandit de la hauteur de ce fait considérable, et il en advint que la plupart des nations européennes, briguant[1]


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leur alliance, empruntèrent des soldats à leurs montagnes, ou disciplinèrent des piquiers à la façon des fantassins helvétiques.

Louis XI prit bientôt un corps de Suisses à sa solde. Charles VIII, son fils, en comptait 8,000 dans son armée quand il pénétrait en Italie ; Mathias Cor- vin enrôlait chez eux ses soldats, et François Ier eut tour à tour les Suisses pour ennemis et pour auxiliaires dans ses combats de géants. A Marignan, ses canons écrasèrent leurs bataillons, au milieu desquels se trouvaient encore des vétérans de Granson et de Nancy, et vengèrent contre l'ordre profond l'artillerie si mal servie de Charles le Téméraire. La coutume de recruter des régiments suisses se perpétua en France, surtout, pendant plusieurs siècles. Cette tradition amena le colonel Stuppa à dire à la cour de Louis XIV, dans un moment d'amertume, et à l'occasion de l'érection de la forteresse d'Huningue, qu'avec le sang des Suisses versé pour la France on ferait couler de Paris à Bâle un canal navigable. Louvois répondit qu'avec l'argent répandu dans leurs mains


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mercenaires on paverait une route plus longue encore. A quoi Racine ajouta : « Point d'argent, point de Suisses. »

Nous avons dit quelle révolution la tactique de l'infanterie suisse apporta dans l'art militaire, nous ajouterons qu'on eut désormais assez de confiance dans sa solidité pour la commettre de préférence à la garde des canons, et que lorsque la cavalerie se sentit soutenue par des bataillons régulièrement organisés elle cessa de mettre pied à terre, et fut rendue à sa véritable destination. Toutefois elle eut le tort, en se munissant d'armes à feu, d'imiter l'ordre profond de cette infanterie, car un tel ordre est un danger constant pour une troupe qui se montre à portée de l'artillerie.

En résumé, les guerres de Charles le Téméraire contre les Suisses, les fautes qu'il commit dans les batailles de Granson, Morat et Nancy, les ressources enfin déployées par ses adversaires furent de mémorables enseignements pour les capitaines qui allaient apparaître sur la scène du monde ; elles agrandirent


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le domaine de l'art militaire, et contribuèrent d'une façon puissante à ses progrès.

Louis XI avait le plus grand intérêt à connaître les événements qui se passaient devant Nancy. La bataille s'était donnée le 5 janvier ; grâce au Roi, le service des postes commençait à fonctionner en France; le 9 et le 10, il en sut tous les détails à son château de Plessis-les-Tours par les lettres de M. de Craon, lieutenant de Champagne, placé sur les marches de la Lorraine ; sa joie fut grande et son parti rapidement pris. Il se constitua le protecteur de mademoiselle de Bourgogne, sa filleule, et réclama le duché comme fief masculin, qui devait, à défaut d'héritier mâle, faire réversion au sceptre de France, ainsi que le roi Jean et le roi Charles Y en avaient réservé la clause dans le titre qui constituait cet apanage à Philippe le Hardi. Pour appuyer ses prétentions, il faisait occuper la Bourgogne par 700 lances.

En outre, pour contraindre Marie à épouserle dauphin, son fils, il s'emparait de l'Artois. Ce mariage aurait merveilleusement servi sa politique, puisqu'il


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eût réuni le domaine héréditaire de Bourgogne au royaume de France. Mais la jeune princesse se donna un défenseur et un époux en acceptant une alliance avec le duc Maximilieri d'Autriche, fils de l'Empereur.

Une guerre devait s'ensuivre entre les deux Etats. Elle se termina par le traité d'Arras, qui assurait à Louis XI la possession des deux Bourgognes et de l'Artois. Quant à l'Autriche, elle héritait des duchés de Brabant, de Limbourg et de Luxembourg , de la Franche-Comté, des comtés de Flandre et Palatin, du Hainaut, de Namur, de la Hollande, de la Zélande, du marquisat d'Anvers et de la seigneurie de Malines. Ces provinces composaient le cercle de Bourgogne, qui fut incorporé à l'Empire en 1548.

L'ordre célèbre de la Toison d'or, dont le duc Charles était le chef, ne périt pas dans le naufrage de sa maison. Cet ordre militaire avait jeté trop d'éclat sur la cour ducale, et contribué à gagner l'affection de trop de vaillants gentilshommes pour mériter ce sort. Maximilien le conserva. Philippe, fils du


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grand bâtard Antoine, et Josse de Lalain, qui avaient vigoureusemènt combattu à Nancy, furent au nombre des premiers chevaliers qu'il créa pour remplacer ceux que la guerre avait moissonnés.

Le duc de Lorraine, auquel il restait, malgré le départ des Suisses, une petite armée régulièrement organisée et aiguillonnée par l'enivrement de son triomphe, voulut continuer le cours de ses succès, et s'emparer de la Bourgogne et du Luxembourg. Mais Louis XI, qui convoitait également ces provinces, s'opposa à ce que le vainqueur profitât des dépouilles du vaincu. Il était loin d'ailleurs des intérêts de sa politique qu'un autre état rival s'élevât sur les ruines de celui dont la chute lui avait coûté tant d'efforts persévérants et de finesse diplomatique.

René dut donc borner ses exploits à la conquête de ses états, dans lesquels il prit à tâche de faire fleurir l'ordre et la prospérité, interrompus par une longue série de guerres. Il n'oublia pas les chefs et les soldats qui l'avaient si vaillamment secondé. Thierry fut fait prévôt de Mirecourt ; Gérard d'Avit-


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lers, seigneur de Châtenoi ; Gratien de Guerre ou d'Aguerre, selon quelques-uns, seigneur de Damvil- lers j et Oswald de Thierstein, seigneur de Chaligny. Geoffroy de Bassompierre eut le gouvernement de Nancy, et Vautrin de Nettancourt celui de Marville.

Les villages de Laneuveville, Villers, Laxou et la contrée du Vermois furent exempts de taille pour douze ans. Quant à la ville de Nancy, ses priviléges lui furent confirmés par René, et il leur en accorda de nouveaux en l'exemptant à perpétuité de tailles et d'impôts, et en délivrant des lettres d'affranchissement à ses bourgeois.

Si la guerre la plus sanglante avait divisé les ducs René de Lorraine et Charles de Bourgogne, une destinée bien différente était réservée à leur postérité. Nous disions que Marie, fille de Charles le Téméraire, était unie au duc Maximilien d'Autriche, qui devint Empereur. Leur glorieuse lignée régna sans interruption sur l'Allemagne jusqu'au milieu du XVIIIe siècle ; mais en 4740 Marie-Thérèse restait seule héritière de la maison de Habsbourg. Après avoir épousé le


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dernier des ducs de Lorraine, François III, elle le fit élever au trône impérial. Et aujourd'hui les enfants de cette héroïne, issus par elle-même du sang de Charles le Téméraire, et par François de celui de René II, tiennent le sceptre puissant de l'Autriche, et conservent avec un respect religieux les tombeaux de leurs ancêtres dans l'église des Cordeliers, à Nancy, où les visitait naguère encore l'archiduc Maximilien, frère de l'empereur actuel.


Voir aussi

Notes de la rédaction
  1. Pour une meilleure lisibilité, les mots coupés sur un saut de page sont restitués sur la page antérieure.