Développement de la veille à l'INRS

De Wicri Nancy
Développement de la veille à l’INRS :
approches et retours d’expériences



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Cet article est paru en juin 2006 dans la numéro 0 de la revue Ametist.
Françoise Grandjean,i
francoise.grandjean@inrs.fr
Guillaume Moureaux,i
guillaume.moureaux@inrs.fr
Michel Servais.i
michel.servais@inrs.fr
  • i - INRS, avenue de Bourgogne, 54500 Vandoeuvre 03 83 50 21 56.


Mots-clés
institut recherche, sécurité travail, veille, retour expérience, analyse information, système information, logiciel, prototype, description système, INRS, France, Dilib
Keywords
research institute, work safety, wakefulness, experience feedback, information system, software, system description
Résumé
Depuis 1995, le centre de documentation du site de l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité) situé à Vandoeuvre, a expérimenté différentes approches de l’infométrie et de la veille dans le but de soutenir les activités de recherches de son site. Cet article présente le cheminement, les réflexions et les difficultés qui ont marqué ce parcours.
Ce parcours a permis d’acquérir de l’expérience et de susciter un intérêt pour la veille. Des projets pilotes ont été menés sur des sujets d’études tels que le stress, la génomique du mésothéliome, les risques biologiques émergeants ou les particules ultrafines. Ils ont été réalisés en collaboration avec le LORIA (Laboratoire Lorrain de Recherche en Informatique et ses Applications) et l’INIST (INstitut de l’Information Scientifique et Technique) et se sont essentiellement appuyés sur la plate-forme DILIB (Digital Library) développée par ces organismes. Parallèlement, une sensibilisation à la veille a été conduite grâce à un séminaire de réflexion interne, des stages de formation et la création d’une rubrique de communication interne dédiée à ces sujets sur l’intranet de l’INRS.
Aujourd’hui, la nécessité d’organiser et de structurer une activité de veille au sein de l’INRS s’impose en raison de la quantité accrue d’information disponible, du développement des NTIC (Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication) mais aussi des choix stratégiques dans l'orientation des études et des actions menées en matière de prévention des risques professionnels.
Notre démarche a permis de mettre en évidence la nécessité d’homogénéiser l’accès à l’information et de structurer les informations réunies selon un modèle commun pour une exploitation collective efficace. Mais les aspects humains et relationnels se révèlent problématiques car il s’agit de convaincre et de dépasser les réticences que soulève la mise en place de nouveaux processus.

Introduction

Cet article vise à montrer comment les méthodologies de veille ont fait leur chemin progressivement au sein de l’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité). Il s’agit pour nous de partager notre approche, nos expériences, nos difficultés et nos observations. L’objectif de cet article est aussi de montrer comment nous avons acquis précocement une connaissance profonde de la discipline et avons préparé la culture d’entreprise afin de permettre l’introduction de la veille à l’INRS non pas comme une révolution mais plutôt en douceur et comme une évidente nécessité.

Ce retour d’expériences mettra en évidence une démarche d’abord de type expérimental avec le développement d’outils d’exploration et d’analyse de l’information faisant appel aux techniques de l’infométrie. Il montrera comment nous avons parallèlement travaillé à une nécessaire sensibilisation des personnels à tous les niveaux de responsabilité de l’institut, du chercheur au directeur en passant par les chefs de projet.

Il montrera également comment nous avons réalisé des prototypes d’outils de collecte, d’analyse et de diffusion et d’analyse de l’information aussi bien dans le cadre d’un système informatif opérationnel que d’un système informatif de management et de décision. Et nous évoquerons les travaux qui sont aujourd’hui en perspectives ainsi que les difficultés et obstacles que nous avons aujourd’hui à franchir.

Importance de l’information dans les missions de l’INRS

Que ce soit à l’échelle des individus ou des sociétés, aujourd’hui, chacun doit être compétitif. De l’invention à la production de masse tout doit aller plus vite dans la course à l’innovation. Cependant, il s’agit de ne pas oublier de préserver les hommes et les femmes acteurs de cette compétition.

C’est le rôle du système français de prévention des risques professionnels. Ce rôle consiste à protéger les individus face aux risques qui apparaissent notamment sous l’effet de cette pression économique. Mieux encore, les acteurs de ce système se doivent, autant que possible, de précéder cette course en proposant des solutions de prévention.

Au sein de ce dispositif l'INRS est dépositaire des connaissances scientifiques et techniques dont le système de prévention a besoin pour mettre en œuvre cette prévention. Le rôle de cet institut se décline en trois missions majeures :

  • Anticiper : Du risque toxique au bien-être physique et psychologi¬que, l'INRS conduit des programmes d'études et recherches pour améliorer la santé et la sécurité de l'homme au travail. Le bilan de ces actions lui permet également de déterminer les besoins futurs en prévention. Tous les cinq ans, un programme définit son cadre général d'action.
  • Sensibiliser : L'institut conçoit de nombreux produits d'information : 4 revues, 300 brochures, 150 affiches, 70 vidéos, des cédéroms, un site internet. Ils sont diffusés auprès d'un large public, composé de chargés de sécurité, médecins du travail, ingénieurs, opérateurs, formateurs... Certaines actions ponctuelles font l'objet de campagnes de prévention auprès du grand public.
  • Accompagner : L'INRS propose une aide technique aux entreprises : 40 000 demandeurs y font appel chaque année pour résoudre un problème de prévention. L’institut transmet son savoir-faire et ses compétences par 70 offres de formation ou d'aides pédagogiques adaptées aux besoins des animateurs de la prévention en entreprise. Ses experts participent à de nombreux groupes de travail, nationaux, européens ou internationaux, pour la rédaction de textes à caractère réglementaire ou normatif.

L’INRS est réparti sur trois sites, à Paris, à Vandoeuvre et à Neuves-Maisons, chacun disposant d’un centre de documentation adapté à ses activités. Sur le site de l’INRS situé à Vandoeuvre, la documentation traditionnelle est depuis toujours étroitement liée aux travaux d’études et de recherches qui constituent l’essentiel de l’activité scientifique. Elle apporte sa contribution dès l’origine de ces projets et les accompagne tout au long de leur réalisation.

Les trois services de documentation de l’INRS mettent à disposition sur le réseau interne l’ensemble des sources documentaires dont ils disposent. En effet, les 3 centres de documentation de l’INRS bien que de nature et de missions différentes, se sont regroupés pour offrir un accès commun à l’information scientifique et technique sur le site intranet de l’institut (Interligne) (voir illustration 1).

Illustration 1 : Interligne : Le site intranet de l’INRS.

Interligne permet d'accéder à des services de bases de données internes mais aussi externes telles que BiblioSciences de l’INIST, (Pascal, Francis, Inspec, Current Contents…), Kompass, Perinorm. Interligne ouvre également l’accès vers un serveur de cédérom offrant entre autres, l’accès aux bases diffusées par le centre canadien d’hygiène et de sécurité (CCHST).

L’utilisateur d’Interligne a aussi accès aux revues auxquelles les centres INRS de Paris, Vandoeuvre et Neuves Maisons sont abonnés. Elles sont présentées accompagnées de l’état de leur collection, du nom de la personne à contacter pour y accéder en version papier et d’un lien direct sur le site de l’éditeur pour l’accès aux sommaires voire au texte intégral lorsque la revue existe également au format électronique.

En effet depuis 2 ans, l’accès au texte intégral des articles de périodiques s’est beaucoup développé. Après une période expérimentale, où l’accès à la version électronique d’une revue était compris dans l’abonnement à la version papier, une politique d’accès payant s’est mise en place progressivement. Il a donc fallu trouver une solution pour faire face à cette tendance. C’est dans ce but, que fin 2002, l’INRS a adhéré au consortium COUPERIN qui regroupe la plupart des universités et des organismes de recherche publics français. Ainsi un accord a pu être signé avec l’éditeur Elsevier pour accéder aux 1700 revues électroniques en texte intégral du service ScienceDirect.

Des approches pour se familiariser avec l’infométrie et la veille

Parallèlement à cette documentation en évolution, depuis 1995, des expériences ont été menées sur le développement d’applications de traitement et d’analyse de l’information grâce à des collaborations informelles établies avec le LORIA et l’INIST. En effet, Jacques Ducloy et ses collaborateurs au LORIA puis à l’INIST, ont développé la plate-forme d’investigation documentaire, DILIB, qui est une bibliothèque de puissantes fonctions de traitement de l’information structurée au format XML. Elle a été implantée sur le serveur du Centre de Services Informatiques de l’INRS et a été utilisée pour la réalisation de nos différents outils de traitement de l’information.

L’objectif initial était de développer un outil muni d’une interface hypertexte permettant un accès intuitif à des fonds documentaires. L’outil a été utilisé pour exploiter les fonds documentaires généraux des centres INRS de Paris et de Lorraine, ainsi que des bases documentaires personnelles de chercheurs de l’institut. Il permettait de visualiser les fréquences et les associations de mots du titre, mots du résumé, descripteurs et auteurs mais aussi de naviguer dans les notices bibliographiques. Au-delà de l’objectif initial, ces interfaces de consultations étaient en fait de véritables serveurs infométriques munis également de représentations graphiques de l’information permettant d'explorer des fonds documentaires avec une optique d'analyse.

Au début des années 2000, cette expérience a été complétée lorsque ces outils ont été mis en œuvre à la demande de chercheurs pour explorer non plus des bases internes mais des fonds résultant de l’interrogation de bases de données externes comme MEDLINE, NIOSH, PsycINFFO sur des thématiques intéressant l’institut. Ces travaux en collaboration avec le LORIA, ont notamment abouti à la réalisation des applications WebStress qui avait pour objectif d’explorer le vaste fonds des publications concernant les problèmes de stress au travail et Transcriptome/Bibliome (voir illustration 2) en collaboration avec l’INIST qui exploitait des documents traitant de l’expression génétique du mésothéliome, tumeur liée à l’exposition à l’amiante.

Illustration 2 : Serveur documentaire sur le mesotheliome.

Cependant, après ces premières expériences et avant d’aller plus loin dans le domaine de l’analyse de l’information, l’idée est apparue que l’INRS devait mener une réflexion sur ce qui précède cette analyse : les problèmes de collecte de l’information et donc la veille. De plus, les participants aux premières expériences ayant été enthousiasmés, l’idée était aussi d’organiser une opération visant à sensibiliser l’ensemble du personnel de l’INRS à la veille.

Septembre 2003 a donc vu l’organisation d'un séminaire interne concernant la veille. Une journée de sensibilisation permet alors de faire avancer la réflexion interne du public INRS en situant la veille dans un cadre de prospective stratégique. Tables rondes, retours d'expérience d'organismes externes et expériences internes se déroulent au long de cette journée. Les différentes déclinaisons de la veille sont proposées : veille pour une production de connaissances, veille pour des décisions de société, aspects politico-stratégiques et médiatiques, structures et outils internes.

Parallèlement, la documentation développe alors, sur son site intranet, une nouvelle rubrique consacrée à la veille grâce au concours d'une étudiante (Christelle Martin), du DESS Information Scientifique et Technique et Intelligence Economique (ISTIE) de Nancy. Sa mission était de réaliser une étude comparative des outils existants et de les appliquer à titre d'exemple à la thématique des risques biologiques émergents et plus particulièrement aux risques biologiques dans les métiers du bois. Le site en question répertorie et décrit sources d’informations, méthodes et outils pour la veille, le but étant de mieux appréhender les spécificités de chaque outil et d’aider tout un chacun à les mettre en œuvre pour ses propres besoins. En 2003 et 2004 cette rubrique intranet est accompagnée de stages de formation interne sur le thème de la veille animés par l’INIST.

Plus récemment, nous avons pu étudier et tester un nouveau produit d’analyse de fonds documentaires, présenté par l’équipe Orpailleur du LORIA (Emmanuel Nauer). Cet outil nommé IntoBib est issu de la technologie DILIB mais complété par les technologies PHP et SQL. Le but est de fournir, au chercheur ou au spécialiste de l'information scientifique et technique, un environnement dans lequel il puisse exploiter les données issues de sa veille, de façon dynamique cette fois, contrairement aux serveurs d’investigation classiques dont les explorations sont prévues dès la construction du serveur.

<ref>
  <TITR>Joining the trek with Keith up the Serpentine 
        Road--the lattice from another perspective.</TITR>
  <AUTE>
    <e>Wolosewick, J J</e>
  </AUTE>
  <SOUR>Biol-Cell. 2002 Dec; 94(9): 557-9</SOUR>
  <JOUR>Biology of the cell under the auspices of the 
        European Cell Biology Organization</JOUR>
  <ISSN>0248-4900</ISSN>
  <YEAR>2002</YEAR>
  <LANG>
    <e>English</e>
  </LANG>
  <PAYS>France</PAYS>
  <DEEN>
    <e>Cytoplasm chemistry</e>
    <e>Cytoskeleton chemistry</e>
    <e>Organelles chemistry</e>
    <e>Cytoplasm ultrastructure</e>
    <e>Cytoskeletal Proteins analysis</e>
    <e>Cytoskeletal Proteins ultrastructure</e>
    <e>Cytoskeleton ultrastructure</e>
    <e>Microscopy, Electron methods</e>
    <e>Organelles ultrastructure</e>
  </DEEN>
  <TYPE>
    <e>Editorial</e>
  </TYPE>
</ref>

Illustration 3 : Données au format XML pour l’application amiante.

Des fonctionnalités de fouille (dénombrements, classifications, extractions de règles, etc.) peuvent être déclenchées à la demande pour analyser plus précisément certains sous-ensembles de données. Le principe technique est que les actions de l’analyste sur l’interface hypertexte sont traduites en requêtes SQL et les résultats de traitement traduits en graphiques et en chiffres. Les temps de traitement sont très courts grâce à la conception du serveur qui pré calcule les résultats lors de sa génération à l’aide de fonctions PHP.

A titre d’essai, nous avons expérimenté l’outil avec un corpus de références bibliographiques sur l’amiante issu de MEDLINE. Là encore le savoir-faire acquis au sein de l’INRS a permis la transformation de ces données au format XML (voir illustration 3) pour l’importation directe dans cette application. Les résultats qui se sont dégagés se sont avérés intéressants dans la mesure où ils indiquaient des tendances en présentant des pics d’intérêt et de publications pour le sujet, liés aux dates des décisions politiques ou aux échos médiatiques.

Des prototypes de systèmes informatifs

En 2004 une étude d'instruction de projet sur les risques professionnels liés aux particules ultrafines est initiée par un laboratoire de l’INRS. Le chargé de projet (Olivier Witschger) dont la mission est de faire le point sur ces risques et sur l'intérêt de lancer une étude sur ce sujet, est intéressé par la mise en place d’un processus de veille pour soutenir l’étude. Sensibilisé par le précédent séminaire de veille il avait constaté que la documentation traditionnelle et les outils mis à sa disposition ne suffisaient pas pour répondre à son besoin. Nous décidons alors d'avoir recours aux services d’un veilleur, étudiant du DESS ISTIE (Guillaume Moureaux) dans le cadre de son stage d’étude en collaboration avec les membres de la cellule veille de l’INIST (Catherine Czysz, François Parmentier, Philippe Houdry et Solveig Vidal) qui lui transmettent leur savoir faire et nous donnent accès à certains de leurs moyens d’investigation.

La première tâche consiste alors à réunir un fonds de références bibliographiques sur le sujet des particules ultrafines. Pour cela les bases documentaires mises à disposition par l’INIST au travers du service BiblioSciences sont employées. Ce service présente l’intérêt de permettre l’interrogation de 11 bases de données externes avec une seule interface d’interrogation et de permettre le téléchargement des résultats sous un format unique. Un fonds documentaire sera donc effectivement constitué après plusieurs réunions avec les chercheurs impliqués dans le projet pour définir le besoin et préciser le vocabulaire requis pour l’interrogation des sources.

Illustration 4 : La base de donnée documentaire particules ultrafines par l’interface CinDoc Web

Mais à cette étape on n’a encore qu’un résultat brut puisqu’il reste encore à traiter le fonds collecté afin de le diffuser et de l’exploiter. Une rapide analyse de l’existant permet de faire le point sur les outils logiciels disponibles à l’INRS et utilisables à cet effet. Le choix est fait de créer une base de notices bibliographiques à l’aide du logiciel documentaire CINDOC récemment acquis par l’INRS. Cette base sera accessible grâce à l’interface Web de CINDOC (voir illustration 4) depuis les trois centres de l’INRS constituant ainsi un moyen de diffusion idéal. De plus, le logiciel est muni d’index interrogeables qui permettront une exploitation des données recueillies par les personnes qui devront analyser ce fonds.

Mais avant cela il s’agissait de préparer les données afin de réaliser ce produit. Les données sont dans un format propriétaire incompatible avec une importation immédiate dans une base CINDOC. Il convient donc de transformer les données dans un format approprié. Une phase de formatage et de traitements divers, effectués sous Unix à l'aide des outils de la plate-forme DILIB est donc engagée. La plate-forme DILIB est d’abord mise à jour et les outils de développement installés avec le concours du Centre de Services Informatiques de l’INRS (Michel Servais).

Le développement des programmes de formatage commence alors. Il s’agit de passer par un format XML qui servira de format transitoire. Le format propriétaire de BiblioSciences est donc transformé en format XML qui sera lui même ensuite transformé en format Ajout Piloté. L’Ajout Piloté est en effet le format d’importation des données de CINDOC qui permettra de constituer la base documentaire.

Dans le même temps, d’autres traitements intermédiaires sont ajoutés à la chaîne de formatage. En effet, à l’étape du format XML il devient possible d’appliquer des traitements supplémentaires comme le dédoublonnage et l’indexation semi-automatique des références bibliographiques.

L’objectif de ces outils complémentaires est d’effectuer un retour vers des problématiques d’analyse en se proposant d’explorer des fonds issus des bases de données externes.

Le dédoublonnage est en effet un pré requis pour pouvoir réaliser ensuite une analyse infométrique du fonds. Quant à l’indexation semi-automatique elle permet de marquer les références bibliographiques avec les termes que l’on veut analyser. Le principe étant de détecter des termes ou expressions spécifiques présents dans les notices bibliographiques et de les représenter par un terme générique qui sera ensuite analysé en termes de fréquence.

Ces travaux permettent de produire des historiques des publications sur tel ou tel sujet sous forme de représentations graphiques. Grâce à cette application on peut montrer par exemple que le nombre de publications concernant un type de risque ne progresse plus alors que l’industrie correspondante est florissante. On peut ainsi se poser la question de l’intérêt de la proposition d’autres études dans ce domaine. Cette application constitue donc un système informatif décisionnel à destination de la direction scientifique de l’institut. Afin de tester ce système d’analyse, de tels travaux ont été réalisés à titre d’exemple sur des thématiques connues de longue date ou bien nouvelles comme les nanoparticules, les éthers de glycol, les troubles musculo-squelettiques, le stress, les fibres céramiques, le traitement au niveau de l’indexation permettant de différencier les aspects prévention, épidémiologiques et toxicologiques.

L’objectif ici est évidemment de susciter l’intérêt et de sensibiliser les directions en montrant l’apport d’une veille stratégique et prospective. Cet outil pourrait en effet contribuer à la prise de décision concernant les orientations scientifiques de l’institut dans le cadre du Plan à moyen terme quinquennal 2008-2012.

Perspectives

Où en sommes-nous aujourd’hui ? Actuellement, nous commençons à développer, en collaboration avec Michel Servais, un système automatisé d’alerte, basé sur les profils proposés par ScienceDirect de Elsevier. Il s’agit de construire des équations de recherche pour chacun des sujets des 7 projets transversaux en cours au sein de l’INRS. Les alertes envoyées par ScienceDirect seront redirigées vers le serveur de messagerie de l’INRS, basculées dans une base de données de type SQL et après validations sélectives des résultats, diffusées dans une rubrique « Veille PTI » d’Interligne (voir illustration 5).

Illustration 5 : Les alertes ScienceDirect accessibles sur le site intranet

Que ressort-il du parcours effectué ? Au niveau de la Documentation, l’intérêt est évident, dans la mesure où c’est le virage qu’elle doit prendre rapidement pour évoluer vers d’autres missions.

Le rôle traditionnel de recherche et de fourniture d’informations bibliographiques a été remis en cause par l’explosion de sources documentaires électroniques à disposition des chercheurs via l’intranet. La Documentation s’est aussi attachée à les aider à les utiliser et les exploiter (formation des utilisateurs sur les sources, aide au démarrage d’une recherche bibliographique, constitution de bases de données, mise en place d’alertes..). Elle se doit de jouer désormais un rôle moteur dans l’analyse et l’exploitation des données bibliographiques dans le cadre de la veille.

Illustration 6 : Modélisation de prototypes de systèmes informatifs avec les outils de l’INRS

Tandis que les technologies de l’information font leur progrès nous tentons autant que possible d’apporter des innovations dans notre manière de pratiquer la gestion de l’information à l’INRS. Nous suivons pour cela une démarche expérimentale qui nous permet de nous former aux méthodes et aux technologies qui apparaissent. Cette acquisition d’expérience nous permet d’aller chaque fois plus loin et de rendre l’INRS progressivement autonome dans sa gestion de l’information sur la base des expériences et savoir-faire acquis dans le cadre de collaborations.

Par exemple, nous avons commencé à acquérir une certaine pratique des technologies XML. Cette maîtrise nous permet aujourd’hui et de plus en plus, d’échanger des données entres différentes applications. (voir illustration 6) Dans ce domaine nous avons notamment développé des passerelles logicielles faisant appel à la technologie XML. Elles permettent dans un cas de regrouper des bibliographies constituées sous EndNote en une base documentaire CINDOC. Cela constitue une sorte d’outil de veille collective rassemblant les recherches bibliographiques des membres d’un groupe de travail donné. Nous avons également constitué des outils destinés à monter un système de veille orienté web.

Ces expériences nous ont permis d’apprendre à réaliser différents prototypes à toutes les étapes du processus de veille et de tester sur des groupes d’utilisateurs les solutions les plus appropriées à la culture d’entreprise de l’INRS. De même, nous aurions pu faire le choix d’investir dans des solutions commerciales clés en main. Mais nous avons préféré faire d’abord nos expériences afin de pouvoir le moment venu être capables d’une véritable maîtrise des outils et de l’exploitation de ces outils à leur plein potentiel. Dans le même temps, nous nous sommes employés à faire progresser l’idée qu’une gestion moderne de l’information à l’INRS qui pourrait profiter non seulement à chacun, mais encore plus à l’ensemble et qu’il devient nécessaire d’avoir une politique globale dans ce domaine. De plus, chacun commence à réaliser par lui même qu’il ne peut pas maîtriser à lui seul la masse d’information qui se déverse sur le web, dans l’intranet ou bien envahit sa boite de messagerie et son bureau.

En fait de société de l’information, nous serions plutôt actuellement dans une société de la surinformation ou chacun a la responsabilité ou parfois le besoin vital de ne rien ignorer mais n’a pas le temps matériel de traiter la quantité d’information qui lui incombe. C’est ainsi que certains chercheurs de l’INRS cherchent à monter des groupes de travail non pas pour mettre en commun l’information mais pour en partager l’analyse dans des processus d’intelligence collective. Car le problème n’est plus de trouver l’information, mais de savoir laquelle est l’information adéquate et pertinente.

Si pendant un temps, à l’INRS, la tendance a consisté à donner à l’utilisateur tous les moyens de s’informer par lui-même, aujourd’hui, cette situation tend à s’inverser. Des chercheurs commencent en effet à revenir chercher de l’aide auprès des spécialistes pour trouver l’information ou plutôt pour la trier puis pour l’analyser lorsqu’elle est trop abondante. Cependant l’utilisateur conserve le désir d’être autonome et a parfois du mal à admettre que des médiateurs sont nécessaires, à l’interface, entre lui et l’information.

Pour ce qui concerne l’avenir de l’INRS, 2005 voit se définir des projets à l’échelle de chaque département scientifique mais aussi des projets transversaux rassemblant les moyens de plusieurs départements qui ont des besoins croissants de collecte, de tri, de validation, d’analyse et de diffusion de l’information. Pour 2005-2008, l’INRS a été retenu comme maître d’œuvre du projet européen d’observatoire des risques professionnels dont le principe même consiste à surveiller la littérature scientifique et toutes les autres sources d’information.

Cette offre nouvelle en matière d’outils et de méthodes, va pouvoir aider à faire des choix stratégiques au moment où se met en place la préparation du prochain Plan à Moyen Terme et sans doute permettre à chacun de mieux repérer et exploiter l’information utile pour les missions de l’INRS.

Bibliographie

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  • [6] Ducloy j., Nauer e., Jolibois s., Grandjean f., Chouaniere d., Mouze-Amady m.,DILIB, how to use an XML technology to build Intranet or Internet services oriented towards scientific survey,Consensus Workshop on “stress at work” organise par l’AMI (UK), Copenhague, 21-22 juin 1999,Vandoeuvre, Institut National de Recherche et de Sécurité, INRS, Service Epidémiologie en Entreprise, EE, 1999
  • [7] Jolibois s., Chouaniere d., Ducloy j., Grandjean f., Mouze-Amady m.,La gestion informatisée de corpus bibliographiques. Adaptation des normes et formats documentaires.,Bulletin des bibliothèques de France, vol. 45, no. 1, 2000, pp. 998-108.
  • [8] Jolibois s., Chouaniere d., Mouze-Amady m., Grandjean f., Servais m.,Standardisation of a multibase bibliographic corpus.,Journal of the American Society for Information Service,Vandoeuvre, Institut National de Recherche et de Sécurité, INRS, Service Epidémiologie en Entreprise, EE, 1999
  • [9] Chouaniere d., Jolibois s. ; Mouze-Amady m., Grandjean f., Francois m.,Une base documentaire sur le stress professionnel.,Travail et sécurité, n° 579, décembre 1998, pp. 8-11, ill.

Voir aussi

Dans le réseau Wicri :

La page de référence « Développement de la veille à l'INRS » est sur le wiki Wicri/Ticri.