Histoire naturelle (Buffon)/Tome P1/Pétromyzon lamproie

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Le pétromyzon lamproie

Buffon Hist Nat E.O. Tome P1 f177.jpg[3]

C'EST une grande et belle considération que celle de toutes les formes sous lesquelles la nature s'est plu, pour ainsi dire, à faire paraître les êtres vivants et sensibles. C'est un immense et admirable tableau que cet ensemble de modifications successives par lesquelles l'animalité se dégrade en descendant de l'homme, et en parcourant toutes les espèces douées de sentiment et de vie jusqu'aux polypes, dont les organes se rapprochent le plus Buffon Hist Nat E.O. Tome P1 f178.jpg[4] de ceux des végétaux, et qui semblent être le terme où elle achève de s'affaiblir, se fond et disparaît pour reparaître ensuite dans la sorte de vitalité départie à toutes les plantes.

L'étude de ces décroissements gradués de formes et de facultés est le but le plus important des recherches du naturaliste, et le sujet le plus digne des méditations du philosophe. Mais c'est principalement sur les endroits où les intervalles ont paru les plus grands, les transitions les moins nuancées, les caractères les plus contrastés, que l'attention doit se porter avec le plus de constance; et, comme c'est au milieu de ces intervalles plus étendus que l'on a placé avec raison les limites des classes des êtres animés, c'est Buffon Hist Nat E.O. Tome P1 f179.jpg[5] nécessairement autour de ces limites que l'on doit considérer les objets avec le plus de soin. C'est là qu'il faut chercher de nouveaux anneaux pour lier les productions naturelles. C'est là que des conformations et des propriétés intermédiaires, non encore reconnues, pourront, en jetant une vive lumière sur les qualités et les formes qui les précéderont ou les suivront dans l'ordre des dégradations des êtres, indiquer leurs relations, déterminer leurs effets et montrer leur étendue.

Le genre des pétromyzons est donc de tous les genres de poissons, et surtout de poissons cartilagineux, l'un de ceux qui méritent le plus que nous les observions avec soin et que nous les décrivions avec exactitude. Placé, en effet, à la tête de la grande classe des poissons, occupant l'extrémité par laquelle elle se rapproche de celle des serpents, il l'attache à ces animaux non seulement par sa forme extérieure et par plusieurs de ses habitudes, mais encore par sa conformation interne, et surtout par l'arrangement et la contexture des diverses parties du siège de la respiration, organe dont la composition constitue l'un des véritables caractères distinctifs des poissons.

On dirait que la puissance créatrice, après avoir, en formant les reptiles, étendu la matière sur une très-grande longueur, après l'avoir contournée en cylindre flexible, l'avoir jetée sur la partie sèche du globe, et l'y avoir condamnée à s'y traîner par des ondulations successives sans le secours de Buffon Hist Nat E.O. Tome P1 f180.jpg[6] mains, de pieds, ni d'aucun organe semblable, a voulu, en produisant le pétromyzon, qu'un être des plus ressemblants au serpent peuplât aussi le sein des mers; qu'allongé de même, qu'arrondi également, qu'aussi souple, qu'aussi privé de toute partie correspondante à des pieds ou à des mains, il ne se mût au milieu des eaux qu'en se pliant en arcs plusieurs fois répétés, et ne pût que ramper au travers des ondes. On croirait que, pour faire naître cet être si analogue, pour donner le jour au pétromyzon, le plonger dans les eaux de l'Océan, et le placer au milieu des rochers recouverts par les flots, elle n'a eu besoin que d'approprier le serpent à un nouveau fluide, que de modifier celui de ses organes qui avait été façonné pour l'atmosphère au milieu de laquelle il devait vivre, que de changer la forme de ses poumons, d'en isoler les cellules, d'en multiplier les surfaces, et de lui donner ainsi la faculté d'obtenir de l'eau des mers ou des rivières les principes de force qu'il n'aurait dus qu'à l'air atmosphérique. Aussi l'organe de la respiration des pétromyzons ne se retrouve-t-il dans aucun autre genre de poissons: et presque autant éloi- gné par sa forme des branchies parfaites que de véritables poumons, il est cependant la princi- pale différence qui sépare ce premier genre des cartilagineux, de la classe des serpents.

Voyons donc de plus près ce genre remarquable; examinons surtout l'espèce la plus grande des Buffon Hist Nat E.O. Tome P1 f181.jpg[7] quatre qui appartiennent à ce groupe d'animaux [DESM 1], et qui sont les seules que l'on ait reconnues jusqu'à présent dans cette famille. Ces quatre espèces se ressemblent par tant de points, que les trois les moins grandes ne paraissent que de légères alté- rations de la principale, à laquelle par conséquent nous consacrerons le plus de temps. Observons donc de près le pétromyzon lamproie, et com- mençons par sa forme extérieure.

Au devant d'un corps très-long et cylindrique, est une tète étroite et allongée. L'ouverture de la bouche, n'étant contenue par aucune partie dure et solide, ne présente pas toujours le même contour; sa conformation se prête aux différents besoins de l'animal : mais le plus souvent sa forme est ovale; et c'est un peu au-dessous de l'extré-

Notes de l'article

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Note associée au titre
  • Lampetra et lampreda, en latin.
  • Lampreda, en Italie.
  • Lamprey, ou lamprey cel, en Angleterre.
  • Lampretee, en Allemagne.
  • Pibale, dans quelques départements méridionaux de France, et dans la première ou la seconde année de sa vie.
  • Lamproie marbrée, Daubenton, Encyclopédie méthodique.
  • Petromyzon marinus, Linné, édition de Gmelin.
  • Petromyzon marinus, Fauna suecica, 292.
  • Petromyzon maculosus, Artedi, Ichthyologia, gen. 64, syn. 90.
  • Pétromyzon Lamproie, Bloch, Histoire naturelle des poissons, troisième partie, page 31, planche 77.
  • Lamproie marbrée, Bonnaterre, planche d'histoire naturelle de l'Encyclopédie méthodique.
  • Petromyzon, Klein, miss. pisc. 3, f. 30, n° 3.
Autres notes

Planche relative à l'article

Buffon Hist Nat E.O. Tome P1 f176.jpg

Notes de la réédition d'Anselme Desmarest

  1. Dans des articles de suppléments, M. de Lacépède a de plus admis cinq autres espèces qu'il décrit sous les noms de Pétromyzon rouge, Sucet, argenté, Sept-œil, et noir. DESM. 1828.

Sources