Collection ALS/1840/Sganzin Madagascar
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Notes sur les mammifères et sur l’ornithologie de l’ile de Madagascar (1831 et 1832)
Cette page introduit une monographie de Victor Sganzin sur la faune de Madagascar.
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Sommaire
Notes sur les mammifères et sur l’ornithologie de l’ile de Madagascar
NOTES
NUR LES MAMMIFÈRES ET SUR L'ORNITHOLOGIE
DE L'ILE DE MADAGASCAR
(1831 ET 1832),
PAR
M. VICTOR SGANZIN,
CAPITAINE D’ARTILLERIE DE MARINE, CHEVALIER DE LA LÉGION D'HONNEUR,
EX-COMMANDANT DES ÉTABLISSEMENS FRANÇAIS A MADAGASCAR
ET MEMBRE DE PLUSIEURS SOCIÉTÉS D'HISTOIRE NATURELLE.
Avant-propos
L'espoir de me rendre utile à mon pays et à la science est le seul motif qui m'ait engagé à rédiger des notes sur l’histoire naturelle de Madagascar.
Avant de partir pour ce pays, je m'étais un peu livré à l'étude de l'entomologie et de la conchyliologie ; ma collection de lépidoptères se composait d’une partie des espèces que l’on rencontre en Europe classées d’après la méthode de Latreille, et mes coquilles renfermaient déjà presque tous les genres faisant partie de la classification de Lamarck.
Lorsque je reçus l'ordre de partir pour les colonies, je profitais des moments de loisir que me laissait mon service pour décrire les coquilles terrestres, fluviales et marines de la Bretagne, dont je déterminais le gisement et les localités
J'avais même dessiné et réuni dans quelques planches toutes les espèces que
javais pu me procurer. Obligé d'abandonner ce travail, je me promis d’en commencer un autre, plus intéressant aux yeux des naturalistes; et dès mon arrivée à
Bourbon je jetai les bases des diverses faunes que j’entreprends aujourd’hui, et dont
l'une a déjà paru et a été rédigée par M. le docteur Boisduval et par moi.
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Lorsque je quittai Bourbon pour aller prendre le commandement de l'ile Sainte-Marie de Madagascar, je relâchai à Tamatave, point de la grande terre appartenant au gouvernement Hova, auquel nous faisions la guerre.
Je fus vivement frappé de la beauté du pays, son aspect riant el pittoresque était loin de me faire supposer que la mort résidait sur ses rivages. Il fallait, pour m'en convaincre, l'apparition subite des malheureux Européens échappés au dernier hivernage et qui trainaient avec peine leurs membres languissants.
De tous côtés des forêts vierges s’offraient à mes regards, et je me sentais naître une ardeur difficile à décrire à la vue des superbes lépidoptères, parmi lesquels je reconnaissais les papilio à ailes élégantes, les acrées et les superbes urania, dont les reflets dorés fatiguaient l'œil de leurs richesses métalliques. Des sucriers verts et dés sikets à longue queue planaient au-dessus des fleurs et saisissaient avec légèreté la mouche dorée ou l'insecte brillant qui leur servait de pâture. Des colombards au riche plumage voltigeaient à peu de distance et formaient un contraste singulier avec les cris lugubres des coas, des coucals, des taitsou et des vouroudrious qui étourdissaient mes oreilles.
Des makis gracieux et parés d’une belle robe se balançaient au soleil et semblaient, en s’élançant de branche en branche, défier mon agilité, lorsque je cherchais à les coucher en joue, pour m’emparer de leurs dépouilles.
Les fleurs étaient couvertes de riches cétoines et l’on rencontrait sur chaque arbre des buprestes de grande taille, des charançons bariolés, et des insectes de forme tout-à-fait nouvelle.
La mer, couverte de récifs et de coraux, jetait sur ses bords des débris de pernes, de pintadines, d’arches et de tridacnes; souvent même on en rencontrait des tas qui annonçaient que ces coquilles avaient servi de nourriture aux naturels.
Sur les récifs à découvert, on trouvait des harpes doubles, des tritons, des argus, des cartes géographiques, et en général des espèces rares et recherchées dont je parlerai plus longuement dans ma faune conchyliologique.
De distance en distance des rivières peuplées de caimans nourrissaient aussi des pyrènes, des mélanies, des néritines, et dans les bois et les sentiers je me baissais à chaque instant pour ramasser des espèces terrestres que je ne connaissais pas, et parmi lesquelles se trouvaient les hélix polyzonale, sepulchralis, viridis, le cyclostome unicariné, l’agathine mauricienne et le bulime baguette de tambour.
Si l’on ajoute aux objets que je viens d’énumérer le catalogue varié des plantes magnifiques, des arbres à gomme et des immenses fougères qu’on rencontre dans chaque forêt et sur les bords des marécages, on n’aura encore qu'une faible idée des richesses de cette terre inconnue.
C'est en parcourant une très-faible partie de cet immense littoral, tombeau de
presque tous les naturalistes qui ont cherché à l’explorer, et en cherchant à éviter
tous les piéges que nous tendaient les Hovas, avec lesquels nous étions en guerre,
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que je suis parvenu à former la riche collection que j'ai rapportée en France.
Combien mes résultats auraient été plus satisfaisants, si j'avais pu m'avancer dans l'intérieur des terres, pays très-sain, et si je n'avais pas été gêné dans mes excursions par les naturels !
A mon retour en France j'ai offert à notre Muséum national tout ce que MM. les professeurs ont jugé nouveau pour la science. Mes poissons et mes reptiles ont été mis à la disposition de M. Geoffroy Saint-Hilaire, et ils doivent faire aujourd’hui partie des riches collections du Muséum. Il m'est dès-lors impossible de m'occuper de la description de ces deux classes du règne animal, attendu que je n'avais pas de doubles. M. Bernier, médecin de la marine, naturaliste d’un grand mérite, possédait à l’époque de mon départ une collection générale de toute beauté et qui était le fruit de ses infatigables recherches. Sa collection de botanique sur- tout le mettra sans doute à même de faire paraître la Flore de Madagascar. Il pourra aussi ajouter à l’ornithologie beaucoup d'espèces que je pense inédites et que je n'ai pas pu me procurer.
J'avais eu soin, pour faciliter mes recherches, de dresser des noirs aux différents genres de récoltes; j'eus lieu plus tard de m’applaudir d’avoir pris ces précautions, car je fus bientôt hors d’état de pouvoir chasser moi-même: Je pus cependant recueillir les renseignements que je désirais sur les espèces que mes noirs collectaieni, et je parvins à m'en procurer d’exacts, en demandant à plusieurs naturels, questionnés isolément, les noms malgaches des objets qu'on m’apportait. De plus, je consultais mon interprète, ainsi que les Européens fixés depuis long-temps dans le pays. M. Gobert, jeune naturaliste qui séjourne à Madagascar depuis dix ans et qui vit au milieu des naturels dont il a pris les mœurs et le langage, m'a été d’un grand secours dans la révision de mes notes.
J'ose espérer que ces heureux résultats seront accueillis avec indulgence de la part des naturalistes, qui se rappelleront sans doute que je ne n'étais jamais occupé d’ornithologie avant mon départ, et que c’est dans le seul but de leur être agréable que j'ai entrepris ce travail.
Je n'ai jamais pu imiter l'exemple de mes camarades, qui faisaient mettre à la broche, sans aucun remords de conscience, les courlis cristalus, les coucous bleus et tant d’autres beaux oiseaux qui garnissent si souvent les tables des Européens fixés à Madagascar.
Je terminerai ce travail par la publication d'une Faune conchyliologique de Madagascar, et je m’estimerai très-heureux si je puis être dédommagé de toutes mes fatigues par l'espoir de m'être rendu utile à la science et à mon pays.
Mammifères
Oiseaux
Voir aussi
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