Histoire naturelle (Buffon)/Tome 6/Le chevreuil

De Wicri Animaux
< Histoire naturelle (Buffon)‎ | Tome 6
Révision datée du 28 septembre 2024 à 16:02 par Jacques Ducloy (discussion | contributions) (Le chevreuil (par Monsieur de Buffon))
logo travaux Texte en cours d'importation
Georges-Louis Leclerc de Buffon.jpg
Georges-Louis Leclerc de Buffon
Histoire Naturelle (1749)
I - II - III  / Mammifères : IV - V - Tome VI - VII - VIII - IX - X - XI - XII - XIII - XIV - XV
Oiseaux : XVI - XVII - XVIII - XIX - XX - XXI - XXII - XXIII - XXIV / / XXV - XXVI - XXVII - XXVIII - XXIX
XXX - XXXI - XXXII - XXXIII - XXXIV - XXXV - XXXVI / / XXXVII - XXXVIII
/ / P I - P II - P III - P IV - P V / / C / / F 1 - F 2 / / PE
Buffon Hist Nat E.O. Tome 7 f11.jpg

Article précédent : Le daim

Article suivant : Le lièvrel

Collection Quadrupèdes Buffon 1749 tome 2 f111.jpg

Cette page introduit l'article Le chevreuil par Monsieur de Buffon dans le tome VI de son encyclopédie[NDLR 1].

Le chevreuil (par Monsieur de Buffon)

Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f274.jpg[167]

Le chevreuil

Buffon Lanessan Tome 9 page f39.jpg[l 29] Le cerf, comme le plus noble des habitants des bois, occupe dans les forêts les lieux ombragés par les cimes élevées des plus hautes futaies : le chevreuil [L 1] comme étant d'une espèce inférieure, se contente d'habiter sous des lambris plus bas, et se tient ordinairement dans le feuillage épais des plus jeunes taillis ; mais s'il a moins de noblesse, moins de force, et beaucoup moins de hauteur de taille, il a plus de grâce, plus de vivacité, et même plus de courage que le cerf [1] ; il est plus gai, plus leste, plus éveillé ; Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f275.jpg[168] sa forme est plus arrondie, plus élégante, et sa figure plus agréable ; ses yeux surtout sont plus beaux, plus brillants, et paraissent animés d'un sentiment plus vif ; ses membres sont plus souples, ses mouvements plus prestes, et il bondit, sans effort, avec autant de force que de légèreté. Sa robe est toujours propre, son poil net et lustré; il ne se roule jamais dans la fange comme le cerf; il ne se plaît que dans les pays les plus élevés, les plus secs, où l'air est le plus pur ; il est encore plus rusé, plus adroit à se dérober, plus difficile à suivre ; il a plus de finesse, plus de ressources d'instinct. Car, quoiqu'il ait le désa- vantage mortel de laisser après lui des impressions plus fortes, et qui donnent aux chiens plus d'ardeur et plus de véhémence d'appétit que l'odeur du cerf, il ne laisse pas de savoir se soustraire à leur poursuite par la rapidité de sa première course et par ses détours multipliés ; il n'attend pas, pour employer la ruse, que la force lui manque ; dès qu'il sent, au contraire, que les pre- miers efforts d'une fuite rapide ont été sans succès, il revient sur ses pas, retourne, revient encore, et lorsqu'il a confondu par ses mouvements opposés la direction de l'aller avec celle du retour, lorsqu'il a mêlé les émanations présentes avec les émanations passées, il se sépare de la terre par un bond, et, se jetant à côté, il se met ventre à terre, et laisse, Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f276.jpg[169] sans bouger, passer près de lui la troupe entière de ses ennemis ameutés.

Il diffère du cerf et du daim par le naturel, par le tempérament, par les Buffon Lanessan Tome 9 page f40.jpg[l 30] mœurs, et aussi par presque toutes les habitudes de nature : au lieu de se mettre en hardes comme eux et de marcher par grandes troupes, il demeure en famille ; le père, la mère et les petits vont ensemble, et on ne les voit jamais s'associer avec des étrangers ; ils sont aussi constants dans leurs amours que le cerf l'est peu ; comme la chevrette produit ordinairement deux faons, l'un mâle et l'autre femelle, ces jeunes animaux, élevés, nourris ensemble, prennent une si forte affection l'un pour l'autre qu'ils ne se quittent jamais, à moins que l'un des deux n'ait éprouvé l'injustice du sort, qui ne devrait jamais séparer ce qui s'aime ; et c'est attachement encore plutôt qu'amour, car, quoiqu'ils soient toujours ensemble, ils ne ressentent les ardeurs du rut qu'une seule fois par an, et ce temps ne dure que quinze jours ; c'est à la fin d'octobre qu'il commence et il finit avant le 15 de novembre. Ils ne sont point alors chargés, comme le cerf, d'une venaison surabondante; ils n'ont point d'odeur forte, point de fureur, rien en un mot qui les altère et qui change leur état ; seulement ils ne souffrent pas que leurs faons restent avec eux pendant ce temps; le père les chasse, comme pour les obliger à céder leur place à d'autres qui vont venir et à former eux-mêmes une nouvelle famille : Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f277.jpg[170] cependant, après que le rut est fini, les faons reviennent auprès de leur mère et ils y demeurent encore quelque temps, après quoi ils la quittent pour toujours, et vont tous deux s'établir à quelque distance des lieux où ils ont pris naissance.

La chevrette porte cinq mois et demi; elle met bas vers la fin d'avril, ou au commencement de mai. Les biches, comme nous l'avons dit, portent plus de huit mois, et cette différence seule suffirait pour prouver que ces animaux sont d'une espèce assez éloignée pour ne pouvoir jamais se rapprocher, ni se mêler, ni produire ensemble une race intermédiaire : par ce rapport, aussi bien que par la figure et par la taille, ils se rapprochent de l'espèce de la chèvre autant qu'ils s'éloignent de l'espèce du cerf ; car la chèvre porte à peu près le même temps, et le chevreuil peut être regardé comme une chèvre sauvage, qui, ne vivant que de bois, porte du bois au lieu de cornes [2]. La chevrette se sépare du chevreuil lorsqu'elle veut mettre bas; elle se recèle dans le plus fort du bois pour éviter le loup, qui est son plus dan- gereux ennemi. Au bout de dix ou douze jours les jeunes faons ont déjà pris assez de force pour la suivre : lorsqu'elle est menacée de quelque danger, elle les cache dans quelque endroit fourré ; elle fait face, se laisse chasser pour eux ; mais tous ses soins n'empêchent pas que les hommes, les chiens, les loups, ne les lui enlèvent souvent, c'est là leur temps le plus critique et Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f277.jpg[170] celui de la grande destruction de cette espèce, qui n'est déjà pas trop com- mune : j'en ai la preuve par ma propre expérience. J'habite souvent une


Notes de la partie rédigée par Buffon

Notes relatives au titre
* Le Chevreuil ; en Grec,  ; en Latin, Capreolus, Capriolus' ; en Italien, Capriolo ; en Espagnol, Zorlito, Cabronzillo montes ; en Portugais, Cabra montes ; en Allemand, Rehe ; en Anglais, Roe-Deer ; en Suédois, Ra-Diur ; en Danois, Raa-Diur ; en Écossais, Roe-Buck.
Dorcas, Aristotelis. Caprea, Plinii.
Capra, Capreolus sive Dorcas, Gesner. Icon. anim. quadr. pag. 64.
Capriolus, Jonston. Hist. anim. quadr. tab. 33.
Dorcas Scotiæ perfamiliaris, Charleton. de différent. animal. pag. 9. 12.
Caprea, Plinii. Capreolus vulgo,
Cervulus silvestris septentrionalis nostras, Ray, Synop. anim. quadr. pag. 89.
Cervus cornibus ramosis, teretibus, erectis. Linn. Cervus minimus, Capreolus, Cervulus, Caprea, cornibus brevibus ramosis, annuatim deciduis. Klein. Quadr. Hist. Nat. page 24.
« * » [F 1]
Notes au fil de l'article
  1. (page 167 note a)
    Lorsque les faons sont attaqués, le chevreuil qui les reconnait pour être à lui prend leur défense ; et quoique ce soit un animal assez petit, il est assez fort pour battre un jeune cerf et le faire fuir. Nouveau traité de la Vénerie. Paris, 1750, p. 178.
  2. (Lanessan page 30 note *)
    Par la nature des cornes, le Chevreuil est beaucoup plus voisin du Cerf que de la Chèvre. Chez cette dernière, les cornes sont creuses et persistantes, tandis que chez le Chevreuil elles sont pleines et tombent chaque année comme chez le Cerf.

Planches de l'article

Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f313.jpg
Collection Quadrupèdes Buffon 1749 tome 2 f110.jpg
Buffon Hist Nat E.O. Tome 6 f315.jpg
Collection Quadrupèdes Buffon 1749 tome 2 f111.jpg


Description du chevreil (par Monsieur Daubenton)

Dans le Cabinet du Roi

Dans la réédition de Lanessan

Notes de Lanessan

  1. Cervus capreolus L. ou Capreolus vulgaris de certains zoologistes.

Dans la réédition de Flourens

  1. Flourens précise :
    Cervus capreolus (Linn. ). — Ordre des Ruminants; genre Cerf (Cuvier. ).

Notes de la rédaction

  1. Cette transcription s'appuie sur la version originale de Buffon en utilisant la modernisation du texte par Lanessan.

Voir aussi

Source